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lundi 2 octobre 2017

De choses et d'autres

Macha m'a demandé de venir remplacer sa prof de français malade et m'implore de donner des cours dans son club. J'ai eu affaire à deux personnes qui me regardaient avec espoir: allais-je poursuivre? Je me sens un peu obligée de le faire, car j'ai compassion de ces amoureux de la France et du français, je vois que leurs cours sont terriblement théoriques, mais cela ne me rapporte pas grand chose et va me prendre du temps, et de la liberté...
De plus, le français, je l'emploie mais les règles de grammaire sont loin, elles me sont devenues consubstantielles, mais je ne les connais plus. Il faudra que je me procure une grammaire, une vraie, une ancienne, pas un machin néopédagogique à l'usage des rétrécis du bulbe contemporains...
Nous avons discuté du concert, qui va avoir lieu, Dima s'en occupe.
Ilya a vu le service d'immigration, on me recevra le 21 novembre, avec tous les documents requis, certificats médicaux, casier judiciaire, et ensuite, il me faudra attendre de quatre à six mois pour avoir le permis de séjour.
L'anniversaire de mon arrivée ici approche, cela fait presque un an que j'ai débarqué de nuit et sous la pluie, avec mon petit chien et mes chats, dans une maison sans chauffage, sans eau ni électricité. Maintenant, je suis au chaud, je me sens presque installée. Mais il faudra encore largement six mois pour avoir un statut de résident. A l'horizon encore plein de démarches et d'aller et venues. Mais bon, il y a de l'espoir.
Didier a reçu sa chambre de congélation, qui n'est pas celle qu'il avait demandée et qui ne produit pas un froid assez fort. Il s'est pris de bec avec l'installateur qui voulait à toutes forces mettre le moteur derrière la chambre, ce qui faisait perdre de la place dans la pièce. Ce matin, Didier me montre le bloc moteur avec un fin sourire: c'est là qu'on voit s'afficher la température et que se trouve l'interrupteur commandant le moteur: "Tu te souviens du cirque qu'ils m'ont fait pour que je les laisse placer le bloc derrière, entre la chambre et le mur?
- Oui...
- Alors explique-moi comment j'aurais eu accès à l'interrupteur? Et puis attends, tu vois là? Il a fait une soudure, il n'a pas protégé la paroi, regarde dans quelle état elle est... Et tu sais ce qu'il m'a répondu? "Du moment que ça marche..." Tu te rends compte?"
Un peu plus tard, une des employées sort du four les croque-monsieurs de notre déjeuner, et il lui enjoint de retourner la plaque avant de les ré enfourner, pour que la cuisson soit bien répartie. La fille tourne la plaque, puis elle la retourne, et enfourne. "Tu as vu? me demande Didier. Elle a tourné une fois et Dieu sait pourquoi, elle a recommencé, qu'est-il arrivé aux croque-monsieurs?
- Ils sont dans la même position qu'avant!
- Ouais, ouais, exact! Eh bien j'ai ça tout le temps!"
Il m'a fait goûter ses chocolats à la noix de coco, et son nouveau macaron au beurre salé. Pas dégueulasse.
Didier est très antireligieux. Comme pas mal de Français il parle "des religions" sans trop savoir de quoi il s'agit ni en quoi elles diffèrent les unes des autres. "Les religions" sont cause de tous les maux de la terre, y compris la guerre de Cent ans. Je préfère ne pas argumenter trop longtemps, ce qui est sans doute lâche, mais en ce moment, une immense lassitude s'empare de moi. Dire à quelqu'un ce qu'il n'est pas prêt à entendre revient à dépenser ses forces en pure perte, ce que le Christ appelait donner ses perles aux cochons. Les gens ont un certain nombre de clichés dans la tête, et si cela fait beaucoup de mal, il est très difficile d'effacer cette programmation. Que Dieu leur vienne en aide et me donne la force de supporter tout ce que j'entends comme bêtises et comme calomnies...

A l'intention de ma tante Mano, des photos de ma maison dans son état actuel...














vendredi 29 septembre 2017

Le fantôme d'Alexandrov

Après les serpents qui, d'après la vieille Rosa,  se répandent à travers la forêtle jour de l'Exaltation de la Sainte Croix, j'ai eu droit au fantôme d'Alexandrov. Une employée de la pâtisserie m'a dit avoir travaillé dans un restaurant à Alexandrov qui était rempli de poltergeists, on y entendait battre un coeur, des souffles qui passaient , des objets qui se déplaçaient, et elle m'a assurée avoir vu un type lumineux et blanc, habillé à la russe, comme avant la révolution. Comme Alexandrov était la résidence du tsar Ivan, j'ai essayé de savoir de quel siècle était la maison, si elle n'aurait pas possiblement appartenu à quelque joyeux opritchnik de sa suite, mais c'est peu vraisemblable, car elle est en bois, et il ne reste pratiquement pas de maisons de cette époque, elles étaient alors toutes dans le kremlin d'Alexandrov ou autour.
Le pâtissier écumait, aujourd'hui, commandes qui n'arrivent pas, apprentis qui prennent des initiatives malheureuses et n'en prennent pas de judicieuses, ne supportent pas d'être remis en place, argumentent et n'écoutent rien. Maxime, avec son gentil regard d'enfant, passait près de moi en me chuchotant: "Oh qu'il est énervé, qu'il est énervé", d'un air épouvanté, et il m'a avoué s'être attribué une bourde commise par les employés pour ne pas irriter davantage le chef à leur égard! En réalité, aller contre le bordel russe est une entreprise extrêmement difficile. Iouri le cosaque est scandalisé qu'on aille chipoter pour une absence, si elle est compensée un autre jour; pour lui comme pour la plupart des Russes, la santé et la famille avant tout, et on peut toujours s'arranger. Didier lui reproche de "materner" les employés qui doivent être responsables et sur lesquels on doit pouvoir compter. Moi, je serais plutôt comme Iouri le cosaque, raison pour laquelle ici, je suis quand même comme un poisson dans l'eau, et des arrangements, j'en ai eus, du temps du lycée français. Comme me disaient les employés russes: "Vous êtes des nôtres"!
En même temps, Didier n'est pas le mauvais cheval, il déteste l'injustice et reconnaît toujours les mérites. Parmi les employés, il y en a une qui cafte et l'autre qui joue au petit chef, cela l'agace considérablement.
Pour ceux qui se lanceraient dans sa mousse au chocolat, je précise qu'il fait fondre le chocolat dans la crème et que pour obtenir de la bonne crème fouettée, il faut la faire refroidir dans le "cul de poule" ou le saladier où l'on va la battre, avec le fouet qui servira à l'opération, mais il ne faut pas non plus la congeler. Si on ne refroidit pas la crème on obtient "de la merde"...
Il faisait un froid de canard, un vent aigre et 8 petits degrés, je suis entrée dans un magasin local où j'ai trouvé un manteau russe très chic, tout à fait mon style, 70% laine, simple et de bon goût. C'était pratiquement le seul.
Rosie se déplace sur ses pattes et elle a monté l'escalier toute seule.

les glaïeuls de la voisine Violetta et le petit cheval porte bonheur de
la fête folklorique

jeudi 28 septembre 2017

Visite au café


Procession à Romanov Borissoglebsk par Olga
Motovilova Komova
J'ai discuté du concert et de stages éventuels avec Macha, qui dirige le club, tout le monde est pour, en plus elle voit l'évêque dans une semaine. Elle me dit qu'il est très sévère, ce qui est possible, car il est jeune et ascétique, mais il semble très aimé, les soeurs du monastère l'ont en grande estime. Mon père Valentin me disait que les saints étaient difficiles à vivre, et quand j'ai traduit des passages de la vie de saint Luc de Crimée, j'ai vu que cet homme fervent et indomptable n'était pas toujours souple! Il considérait la chirurgie et la foi orthodoxe avec la même intransigeance que Didier l'art de la pâtisserie...
Macha, écoutant tout ce que je lui racontais sur le folklore, l'épanouissement personnel que sa pratique apporte et son caractère formateur pour les enfants, me proposait de l'enseigner dans son club. Mais je ne suis pas assez compétente, et ce serait tout de même un comble que le folklore russe fût enseigné par une Française! "Justement, me dit-elle, cela fera honte aux gens que ce soit une Française qui l'enseigne!"
Didier était sur place et aussi Maxime, l'associé de Gilles. Je me suis fait charrier sur ma gourmandise qu'ils encouragent largement.
J'ai rencontré en arrivant le peintre Ilya Komov et sa femme Olga Motovilova Komova. Ils venaient décrocher les tableaux de cette dernière à la galerie locale, pour aller les exposer beaucoup plus au nord, à Kostroma.
J'ai rencontré aussi le monsieur qui fait des fromages, Alexandre. Lui aussi a repéré les caves d'Ivan le Terrible, mais en attendant, il squatte celles d'un monastère. Nous avons bien discuté, car c'est également un slavophile. Il m'a expliqué que toutes les vieilles villes du coin étaient à plus ou moins soixante kilomètres de distance les unes des autres, car c'était la distance que parcourait un cheval dans la journée, et le cavalier faisait étape et changeait de monture. De Moscou à Serguiev Possad, de Serguiev Possad à Pereslavl, de Pereslavl à Rostov, de Rostov à Yaroslavl, plus ou moins soixante kilomètres. Et Alexandrov se trouvait à soixante kilomètres de Moscou, car ils ne prenaient pas le même chemin, donc un des problèmes que je me posais à ce sujet en écrivant mon roman est résolu: le trajet entre Moscou et Alexandrov se faisait en une journée.
J'éprouve une espèce de béatitude à me trouver dans ma maison tiède, le climat russe incite au cocooning, sans doute la raison pour laquelle le palais Romanov, à Moscou, semble si agréable à vivre, si chaleureux, petites pièces voûtées, tentures, tapis, étage de bois clair. Je suis régulièrement fleurie par ma voisine Violetta qui coupe peu à peu ses merveilleux glaïeuls.
Rosie marche un peu. Elle s'est encore échappée dans le jardin, mais elle se laisse mieux faire quand je la porte à l'intérieur. Je pense que cela va s'améliorer peu à peu.

Vue de Yaroslavl par Olga Motovilova Komova

mercredi 27 septembre 2017

La possibilité d'un concert

Rosie est sortie et se déplace sur le terrain, mais à présent, je n'arrive pas à la faire rentrer. Je ne suis pas sûre qu'elle marche vraiment. Et la soulever, il n'en est pas question, même avec une muselière, elle se débat avec trop de vigueur. Bref, je préférerais avoir affaire à un yorkshire...
J'ai donné aujourd'hui un cours de français, c'est-à-dire qu'une petite fille très motivée et très sérieuse est venue m'expliquer qu'elle ne comprenait rien aux cours de son professeur et qu'elle était pourtant la plus douée de la classe. J'ai observé que cette petite fille était très organisée dans son travail, ce que je n'ai jamais été, chapeau. Cela dit, elle avait une quantité énorme d'exercices à faire et absolument pas le niveau de compréhension pour s'en sortir. La prononciation zéro, beaucoup de pain sur la planche. Des tas de choses à revoir en amont et mon heure de cours n'a servi qu'à survoler.
Je suis allée au café français discuter de la possibilité d'un concert, Dima Paramonov, les "gousliari" Romane et Yegor Strelnikov, et puis moi-même avec ma vielle russe, des vers spirituels, des chants populaires russes et aussi français, en ce qui me concerne. Ce qui serait suivi éventuellement de stages d'apprentissage des gousli deux fois par an, au club qui s'est établi au dessus du café.
Personnellement, j'adore Dima Paramonov, sa façon de jouer et de chanter, très authentique, j'aime aussi énormément Romane, moins Yegor Strelnikov, qui pourtant plaira sans doute davantage, aux Russes comme aux Français, justement parce qu'il est beaucoup moins authentique et en rajoute des tonnes.
Quand à moi, je ferai ce que je pourrai en si brillante compagnie! Je suis heureuse de pouvoir participer à la promotion de la merveilleuse culture populaire russe méconnue des Russes eux-mêmes. C'est là la principale raison de ma présence ici. J'espère faire venir aussi Skountsev et tous ceux que je connais dans le genre.



Dmitri Paramonov

Romane


Yegor Strelnikov

mardi 26 septembre 2017

L'increvable Rosie

Pour les fans de Rosie, une bonne nouvelle. Après notre visite à la clinique vétérinaire qui nous a démontré qu'elle n'avait rien de grave, elle s'est levée, et elle est allée dans la cour, où elle se trouve en ce moment. Elle a délivré le colis qu'elle gardait depuis trois jours. De temps en temps elle couine, mais elle s'est redressée et déplacée.
Il me faudra lui prévoir une niche et une chaîne pour les moments où je serai absente et en attendant une clôture.
J'ai remis le chauffage, je suis fière d'y être arrivée toute seule. Il fait un temps frais avec de gros nuages et des rayons de soleil dans les feuillages d'automne, tout ce que j'aime. J'ai déplacé des fleurs et des buissons, mis en place le futur jardin au moins dans les grandes lignes. L'année prochaine, ce devrait être déjà une toute autre histoire. Mais j'aurais besoin d'aide, il y a des choses qui sont au dessus de mes forces.
La voisine a un jardin du genre bien entretenu où tout est compartimenté, le contraire de ce que je fais, car j'essaie de mélanger les fleurs de façon à ce qu'elles se mettent en valeur et que les floraisons se succèdent dans un ensemble naturel et capricieux. Cependant, moi qui n'aimais pas trop les glaïeuls, je louche sur les siens, que je vois, le soir illuminés par la lumière oblique. Ils ont un côté art nouveau, un rose émouvant, je pense qu'elle m'en donnera, mais au printemps, car c'est au printemps qu'on en installe les bulbes. Il manquera à mon bonheur des cosmos, qui poussent ici comme du chiendent.
 J'ai réparti des astilbes et des pivoines de façon à ce qu'elles ne soient plus alignées comme des chiffres dans un tableau excell, mais apparaissent en touffes, mélangées avec des phloxs et des lavataires, plus tard des roses trémières, quand j'en trouverai. J'ai planté aussi une haie de framboisiers entre la voisine et moi, avec une viorne obier et un "irga".

première sortie de Rosie



mon mélange. Au milieu, va pousser un seringat.

la touffe de glaïeuls de la voisine

lundi 25 septembre 2017

Rosie donne des inquiétudes

Rosie ne se lève pas, bien qu'elle semble aller mieux. La vétérinaire du monastère, qui m'avait annoncé qu'elle viendrait aujourd'hui, me fait faux bond ce soir, elle ne viendra que demain matin... Une autre vétérinaire me dit de retourner à la clinique faire une radio de la partie antérieure pour voir s'il n'y a pas de fracture de la région du cou et de la colonne vertébrale. Mais comment la transporter? J'appelle Olga, la dresseuse, et Gilles, car aucun taxi ne veut charger la chienne. Olga vient avec une muselière. Mais impossible de transporter Rosie, nous essayons de la mettre sur un drap et elle hurle. Du reste la clinique est fermée et n'ouvre que demain matin dix heures. Gilles et Olga viendront nous chercher, mais il faut que la clinique nous donne une civière et même que quelqu'un nous accompagne et lui fasse un calmant. Quand je pense que la bonne femme me la traitait d'hystérique et m'a même envoyée promener quand je l'ai rappelée...
A voir ce qui se passe avec Rosie, je me dis que si j'avais réagi plus tôt avec Doggie, cela n'aurait peut-être pas changé grand chose... en tous cas pas dans la clinique à laquelle j'ai eu affaire. J'espère que les médecins ne sont pas aussi je-m'en-foutistes et dénués d'empathie, sinon, j'ai intérêt à vieillir gaillarde...
En tous cas, si cela tourne vraiment mal, plus de chiens, j'ai le numéro des "bénévoles" et leur adresserai tout chien ou chiot en perdition, mais chez moi, non. Je ne peux plus faire face à ce genre de choses, ni financièrement, ni moralement.
Je suis partie ce matin en vélo à travers un épais brouillard, qui s'est levé ensuite, j'aurais supporté des gants. A la pâtisserie, on était en plein boum, plein de commandes. Mais elles arrivent au dernier moment, et souvent, on ne vient pas les chercher quand elles sont prêtes. Didier râlait façon Audiard, mais il a aussi de l'humour, Dieu merci. Rosa, la vieille tsigane, m'a dit tout à coup qu'après demain, c'était la fête du "mouvement", движение. Ce jour-là, il ne faut pas aller en forêt, car tous les serpents se promènent. Ils ont même un chef, le serpent suprême, que sa mère a vu une fois. Je me suis longuement demandé ce que cela pouvait être que cette fête du mouvement, et j'ai tout à coup compris: c'est celle de l'Exaltation de la Croix, воздвижение, "mouvement vers le haut", en russe... Intéressant univers que me dévoile Rosa la tsigane.

dimanche 24 septembre 2017

saint Silouane

C'était aujourd'hui la fête de l'un des plus grands saints russes, saint Silouane l'Athonite, que je prie pour ne pas détester mes ennemis. Il enseignait de les aimer, cela m'est trop difficile. Je ne parle pas de petits ennemis de tous les jours, que je fuis dans le pire des cas, mais des ennemis du genre humain, des corrupteurs et des assassins de haut vol qui sont au dessus des lois. En ce monde, du moins...


La soeur Larissa m'a accueillie à bras ouverts, et m'a dit que sa fête et la mienne coïncideraient l'année prochaine avec la Pâques: le 28 mars. C'est une veuve qui a pris le voile à la mort de son mari. Je lui ai parlé de la fête avec l'évêque Théodore, pour lequel elle a beaucoup de respect. Il paraît qu'il porte des chaînes sous sa soutane. "Qu'il ne les enlève surtout pas, me dit l'archimandrite Basile, cat rien n'est pire qu'un évêque déchaîné!"
La soeur Larissa me donne l'adresse d'une vétérinaire orthodoxe qui est aussi médecin, c'est pratique... Rosie continue à se plaindre, elle a la patte enflée et ne se lève pas. Je veux bien croire qu'elle est hystérique, mais quand même... La vétérinaire de l'autre jour m'affirme qu'elle n'a pas de fracture et que c'est une emmerdeuse. Cependant, quand tout va bien, si emmerdante qu'elle soit, elle est debout, joviale et ne gémit pas.
Le ciel est bleu en permanence, je ne savais pas qu'ici, c'était possible. Mais il commence à faire vraiment froid la nuit et j'envisage de recommencer à chauffer... A la suite de mes séances de jardinage, j'ai mal au dos, et aux genoux...
Dima Paramonov rêve d'organiser des stages d'apprentissage des gousli à Pereslavl, car il en fait déjà à Yaroslavl. Je vais essayer de l'aider à concrétiser cette bonne idée. Ce serait bien de faire de Pereslavl un pôle attractif pour tout ce qui est folklore authentique, pas seulement pour des concerts, mais aussi des apprentissages... Je me rends compte que le patrimoine oral est le plus facile à transmettre et à conserver. Chaque chanson apprise est une chanson sauvée et cette chanson sauvée, transmise à d'autres, sauve ceux qui la chantent. La musique et les chants sont l'âme même du peuple, son ciment, avec la foi. Il faut conserver ce patrimoine, mais aussi les savoir-faire artisanaux, agricoles, les savoir-faire en premier lieu, avant les bâtiments, costumes et autres traces d'un temps plus fécond, car ils seront détruits, je le vois bien... Une jeune femme qui s'opposait à des promoteurs a été tuée, dans je ne sais plus quelle région de la Russie. L'argent rend les gens féroces et infâmes sous tous les cieux, et la religion ne tempère plus assez la cupidité. avant la révolution, les gens riches, en Russie, devaient se conformer à l'idéal orthodoxe, mais maintenant, plus rien ne vient retenir le requin post-soviétique...
L'important n'est pas de conserver de vieilles maisons ou de vieilles églises mais d'être capables d'en faire de nouvelles et d'aussi belles, car dans le même esprit: organique, spontané, vital. La tradition n'est pas la conservation du passé mais la fécondation permanente du présent par le passé, en lien avec ce qui nous a précédés et qui nous porte.