A Moscou, répétition avec les charmantes petites dames
orthodoxes et Skountsev. Puis j’ai suivi Skountsev à l’Arbat, où nous avons
dîné de pirojkis de carême et travaillé les gousli. C’est difficile. Mais je
suis passionnée, autant que par les gousli, par tout ce qu’il me raconte sur la
tradition populaire, et par ces chants qui me font pénétrer dans une autre
dimension, où je retrouve le monde qui est le mien, et il me semble alors que
je prépare celui où j’irai là bas, après ma mort et mon rajeunissement
définitif dans l’éternité. En chantant le tropaire de Pâques vieux-croyant, ou
les vers spirituels, j’entrais en contemplation des reproductions d’icônes
anciennes qui ornent la bibliothèque de l’église saint Dimitri Donskoï, jamais
elles ne m’avaient paru aussi présentes et je voyais ce qui les différenciait
des icônes modernes pseudo-traditionnelles : leur spontanéité, leur
transparence, leur vie, leur force. Je me sentais profondément reliée à tout
cela, partie intégrante. Avec Skountsev, j’ai chanté une complainte qu’il
accompagnait sur une de ses vielles à roue très primitives, bricolées,
grinçantes et plaintives, auxquelles son talent donne un son inimitable, et ce
vieux chant français s’harmonisait complètement avec cet instrument russifié,
le résultat me ramenait, avec ma France ancestrale, à l’origine de tout cela.
J’avais lu avant de venir des commentaires d’une
rare méchanceté et d’une rare bêtise, très comparables à celles des ukrainiens
néonazis, sous une publication qui pleurait Nicolas II et son abdication
forcée. Le centenaire de toute cette infamie réveille des démons qu’on aurait
pu croire endormis. Mais ce centenaire, avec ce qui se passe en Europe et chez
nous, et qui est le fait de la même méchanceté et de la même bêtise, de la même
sinistre astuce, au moyen des mêmes supercheries éhontées, me paraît revêtir
une signification de plus en plus fatale et mystique, en un mot,
eschatologique.
Un peu plus tard, j'ai vu une émission de télé où de petits singes savants chantaient en minaudant des chansons américaines, pour satisfaire la vanité de leurs parents en transes: dressés de A à Z, transformés en petites poupées dénuées de tout naturel. Comme le dit mon amie Dany: "elles ne chantent pas mal, dommage qu’elles donnent l'impression d'avoir eu déjà plusieurs amants dans leur vie." Et il m'est venu une fois de plus à l'esprit qu'après la catastrophe révolutionnaire qui, partie de France, ou même auparavant d'Angleterre, a contaminé la planète entière, avec tout ce qu'elle a inoculé à chaque pays, on se trouve devant des sociétés cassées qui ont bien du mal à recoller les morceaux: il y a ce qui subsiste du peuple, enraciné dans ses traditions, ce qui résiste, et qui peut être appelé ici russe et français chez nous, et puis le mutant mondialiste consumériste qui ne sait plus comment il s'appelle et qu'on peut croiser comme les vaches pour obtenir une meilleure sélection, dans l'optique des banquiers et des idéologues, associés pour tout détruire et tout corrompre.
Petit singe savant américanisé, encore une qui prendra les chants de
ses ancêtres pour de la musique arabe.
enfants russes qui s'éclatent à chanter avec naturel
Et enfin, au niveau professionnel, enfant russe doué d'un réel talent original et vrai, et d'une voix hors du commun, Maxime Trochine:
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