mercredi 23 août 2017

Des voisins et une visite

Le glaïeul de la voisine Alla près de l'icône d'Alexandre
Nevsky peinte et offerte par une Française, Michèle.
La bouteille provient du tas qui grouille dans mon sous-sol.
En allant faire mes courses, j'ai rencontré mes voisins, qui m'ont invitée à prendre le thé. Avec Rosie, que la grand-mère est allée attacher dehors, car elle la trouvait trop mal élevée par une maîtresse trop permissive... Ces gens sont de Mourmansk, c'est-à-dire que Pereslavl, pour eux, c'est déjà l'Afrique. Ils repartent pour leurs ténèbres polaires dans deux jours, après avoir fait connaissance et m'avoir fait goûter des baies jaunes qu'on ne rencontre qu'en Carélie. Des gens sympathiques, ouverts, accueillants et sains.
La grand-mère reste un peu plus longtemps, elle m'a emmenée visiter son lopin, et m'a donné des tomates, une courgette, de l'aneth et du persil, et aussi une tige de glaïeul. Elle avait toutes sortes de fleurs bien rangées, un petit âne factice, que Rosie avait pris pour un vrai, et un élevage de nains de jardin. C'était sûrement une beauté, elle reste encore pas mal. Elle s'entend très bien avec ma voisine Violetta, cela ne m'étonne pas qu'elles aient des affinités.
Le soir, surprise, quelqu'un m'appelle en français, un correspondant Facebook qui passait par Pereslavl et voulait me rencontrer. Un homme charmant, avec sa charmante maman. C'est un comédien, qui vit en Russie depuis 2002 avec une femme russe et a travaillé au consulat, comme moi je travaillais au lycée français, nos avis concordent sur l'épicentre de ces deux établissements. Ils concordent sur beaucoup d'autres sujets, l'Ukraine, la Russie, et la France. La France sur le devenir de laquelle nous ne sommes guère optimistes, sa maman non plus. "Les Russes, me dit-il, sont profonds et attachants, et plus on les découvre, plus on s'y attache et plus on trouve encore de choses à découvrir." Nous en sommes venus à l'idée que les Français ont dû être comme eux, mais il y a longtemps. La maman de Patrick évoque la paysannerie française, pratiquement disparue, sa sagesse, son sens de la communauté. Nous constatons qu'en un temps record, on fait disparaître  tout ce que nous aimions sur cette terre, et que la bataille est partout, dans tous les pays, de façon plus ou moins prononcée, entre ceux qui se rendent ou se donnent au Meilleur des Mondes, et les résistants, plus ou moins nombreux selon les endroits. Je lui parle de mon souci de voir en Russie, parallèlement aux libéraux dont la nuisance n'est plus à démontrer, émerger des néocommunistes agressifs qui crachent sur les tombes de tant de martyrs et de petites gens pour justifier leur idéologie, en dépeignant des "paysans riches qui ne voulaient pas donner leurs denrées aux populations des villes". "Cependant, lui dis-je, actuellement, si je dois choisir entre les libéraux ou les communistes, je préfère encore les communistes, car Dieu merci, ils ne restaureront pas le truc sous sa forme précédente et Staline est heureusement mort.
- Oui, me dit Patrick. Et d'autre part, si le communisme a laissé subsister et renaître quelque chose, après ce que nous concoctent les libéraux, il ne restera absolument rien."
Oui, c'est exactement comme cela que se présentent les choses, et nous ne sommes pas assez nombreux à le voir. Patrick et sa maman sont comme moi-même les Cassandre de service. Position fort inconfortable, mais que faire? Comme disait Céline, "la plupart des gens meurent au dernier moment, certains s'y prennent vingt ans à l'avance, ce sont les malheureux de la terre."
Pourtant, mourir passe encore, mais si possible, ne pas mourir idiots...

Les légumes d'Alla, présentés par Chocha


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