lundi 2 décembre 2019

La rivière bétonnée.

Ceux qui me lisent se souviennent certainement de toutes les photos que j'ai publiées des berges de la rivière Troubej, près du café français et de l'éléphant autrefois rose, le sentier, les arbres, les feuilles d'automne dans l'herbe, les coupoles des églises au delà du val et les canards, c'était le dernier endroit naturel et pittoresque de cette ville défigurée. Eh bien, c'est fini; on a bétonné d'affreuses allées rectilignes partout, on va y coller des révèrbères stupides, et sans doute d'immondes petits massifs de bégonias ou d'oeillets des Indes. L'éléphant peint en gris a l'air encore plus incongru, là au milieu. Et pour faire cette horreur, on a trouvé de l'argent, alors qu'il n'y en a pas pour les monuments historiques. Il faut dire que les berges de la rivière sont en face de l'administration de la ville alors si d'aventure un haut fonctionnaire vient  de Moscou, il faut que tout autour il ne voit que ce qui convient à une âme et à un cerveau en forme de tableau excell, la vie c'est sale et la nature, ça fait désordre.
J'avais un ami passionné par la structure mathématique des plantes qui me disait que la nature avait horreur des lignes droites. C'est parfaitement vrai, et tous les mutilés spirituels de la modernité ont horreur de la nature, et donc, ils adorent les lignes droites. Pour eux, une ligne ne saurait être que rectiligne. Et tout ce qui croit librement doit être tondu, taillé, enfermé derrière des grillages.
Je suis absolument consternée, car c'est un endroit où j'aimais à me promener avec la chienne, et cela n'aura plus aucun intérêt. Ce sera moche, banal et raide, comme tout le reste. Un espace naturel doit toujours être découpé en tranches comme un gâteau et envahi de structures déplacées et de fleurs rangées comme des soldats à la parade.
Le chaton Stacha s'adapte très bien, et son calme royal facilite bien les choses. Découragé par mes chats, il joue avec Rita, je crois qu'ils vont très bien s'entendre. Il commence à vouloir un peu sortir mais reste sur le perron à prendre l'air. Et je crois qu'il comprendra bientôt le coup de la chatière.


2 commentaires:

  1. Bonjour Laurence,
    mon Dieu, quelle horreur, qu'ont'ils fait à ce si joli coin de nature ? C'est "massacre à la bétonneuse" (même si je crois que le mot est bétonnière)C'est fou d'avoir ce besoin irrépressible de tout saccager ainsi!
    Il y a des moments où l'on se demande dans quel coin va-t-il falloir se réfugier pour échapper à toutes les horreurs que l'on nous impose, mais l'âge venant on ne trouve plus le courage de partir toujours plus loin de tout et de tous, car le temps nous fragilise toujours davantage ... Je crois que ce qui me réconforte c'est de savoir que tout cela ne durera pas...
    Courage, puisqu'il nous faut tenir encore un peu...C'est peut-être une nouvelle façon de porter sa croix.

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    1. Le peintre Alexandre Pesterev, qui vit dans le village encore préservé de Ferapontovo, dans le nord, pense que tout sera saccagé inéluctablement tôt ou tard, et c'est le tour que cela prend. Je n'ai en effet plus tellement le courage de partir encore ailleurs. J'ai eu le sursaut de m'arracher à la France, et ce sera probablement mon dernier exploit.

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