vendredi 9 juillet 2021

Paris, c'est bien mais Kourmych existe aussi.

 


Comme je l'avais promis, je suis partie pour Kourmych, rejoindre Alexandrina, Sacha Viguilianskaia, qui, depuis quelques années, consacre sa vie à la résurrection de l'église où officiaient ses ancêtres, à Kourmych, région de Nijni Novgorod. Kourmych, à la limite de la Russie et de la Tchouvachie, forteresse fondée au XIV siècle pour défendre la Moscovie contre les incursions des Tatars. .

La route est longue et pénible, beaucoup de camions, c'est une expédition. À un moment, on tourne, et la route devient déserte, le paysage aussi. De vastes horizons se découvrent à perte de vue, sans aucune construction parasite, un paysage d'une douceur captivante et immense, et cela pendant 50 kilomètres. Peu de conifères, beaucoup de feuillus, essentiellement des bouleaux et l'espèce invasive de l'érable d'Amérique qui sévit la où ne prospère pas la berce du Caucase.

Kourmych est une bourgade somnolente et délabrée, mais elle est restée authentique, avec beaucoup de très jolies maisons anciennes, en bois et en brique. Sacha à acheté pour une bouchée de pain l'ancien traktir, ou taverne, du coin, qui garde beaucoup de caractère. L'endroit est paisible, bien que central, aucun bruit, pas de motos, ni de voitures, ni d'outils vrombissants, ni de radio. C'est tout près de son église, qui nécessite des travaux titanesques, et où s'affaire une équipe locale, sous la direction de Genia, un "Afghan", un veteran de l'Afghanistan au cœur aussi pur que blessé, qui lui est complètement dévoué. Les enfants locaux l'adorent egalement et l'aident avec enthousiasme.



Averti de ma venue, le père Basile Pasquiet, archimandrite du monastère de la Trinité à Tcheboksary, est accouru le lendemain de mon arrivée. Tcheboksary n'est qu'à 150 km de Kourmych. J'étais allée le voir il y a quelques années avec la regrettée Marie Gestkoff.



Il avait apporté des tas de cadeaux, pour nous et pour l'église, un vrai père Noël. Il m'avait cueilli un bouquet de lavande de Tcheboksary, moins parfumée que chez nous, malgré tout. Il a passé la journée avec nous, je lui ai chante une chanson de Pâques de sa province natale, la Vendée, et une complainte bretonne. Il a reçu et béni les enfants, discuté avec Genia, un artiste local, Sacha, lui a offert une icone sculptée par ses soins. Il a voulu voir l'église, qui avait été transformée en cinema et en discothèque et dont les fenêtres sont toujours murees. Le père Basile à dit la paraclisis à la Mère de Dieu, dans cet endroit ruiné qui nécessite encore tant d'efforts.


En faisant les travaux, Sacha à trouvé toutes sortes d'objets qu'elle exposera dans le musée qu' elle prévoit. Et regroupe dans une tombe commune les ossements bouleversés de l'ancien cimetière, détruit comme partout ailleurs par le pouvoir soviétique, soucieux d'effacer le souvenir des ancêtres et de couper les racines.


Ensuite, le père Basile a voulu se rendre à Bortsoumani, sur les reliques d'un autre ancêtre de Sacha, saint Alexis de Bortsoumani. Le village est ravissant, perche autour de l'église sur une colline, et les maisons sont entretenues mais pas saccagées. On a mis à l'intérieur de l'église une très jolie iconostase naïve venue d'une autre église détruite mais malheureusement, le prêtre a l'intention de la remplacer, sûrement par un truc doré, beaucoup moins intéressant.


Bortsourmani

Le dernier prêtre de Bortsoumani a été fusillé dans un champ voisin, on n'imagine pas de tragédie pareille dans ce paysage d'une sérénité vaste et méditative, et pourtant, comme partout ailleurs a sévi la folie collective meurtrière qui fit tant de victimes. Une plaque rappelle son souvenir. Il a été mis au rang des nouveaux martyrs de Russie. 

Nous avons pris, après ce pèlerinage, congé du père Basile. J'étais épuisée par le voyage de la veille, la chaleur, le manque de sommeil, les longues conversations. Le titre de cette chronique fait référence à une phrase qu'on trouve sur les mugs souvenirs de la ville et que Sacha cite abondamment.

La maison de Sacha



Le mur des ancêtres de Sacha. Son arrière-grand-père avait épouse une Française, fille d'un ingénieur fusillé dans les années 30 comme "espion français". 



10 commentaires:

  1. Ces icônes sculptées sont magnifiques!!

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  2. "Fusillé comme espion français" : quel accueil !

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    1. Il était installé en Russie depuis des années, il y était marié et n'avait pas voulu s'en aller à la révolution. Ses filles n'ont jamais parlé français à leurs enfants.....

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  3. Merveilleux! Et avec le père Basile !
    De tout cœur avec vous et longue vie paisible à Kourmych et ses habitants... Loin, très loin de Paris...

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    1. Je ne sais pas ce qui s'est passé mais plein de doublons de mon commentaire ont été publiés... Un bug dans la matrice, sans doute. Ça nous laisse quelques espoirs...

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    2. Oui, ce sont de vraies vacances, et en plus, je suis peu sur internet.

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    3. Ça c'est bien ! Depuis que je ne vais plus sur les réseaux sociaux ma consommation d'internet a diminué de 9/10ème. Et quelle libération ! Je me demande si au 15 août je ne vais pas prolonger ma retraite jusqu'au 14 septembre...

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