mardi 16 avril 2024

Sauver les meubles

 


Le printemps s’installe, il y a quelques jours, je marchais le soir avec une amie, et tout était encore marronnasse, gris et frisquet, mais un coucher de soleil rougeoyant sur la nuit tombante nous apportait déjà les premiers scintillements sonores des rossignols. Parallèlement, avec les beaux jours, le voisin recommence à bricoler des heures en faisant profiter tout le quartier et moi-même de son atroce radio. Je m’échine a aménager le jardin pour ne plus voir la pustule qui pousse sur l’isba d’oncle Kolia, et que son bouleau aurait masquée au moins l’été, si on l’avait laissé vivre, mais non, les pustules aiment à s’étaler avec arrogance et ne supportent pas la compagnie d’un bel arbre. Or je sens que je ne peux plus travailler autant qu’avant, je me fatigue vite.

Le sermon m’a plutôt cassé les pieds, je le trouvais long. Les sermons doivent être courts et substantiels et ne pas faire dans le prêchi-prêcha. Et peut-être aussi ne pas être systématiques. Pourtant, d’habitude, j’aime bien les sermons de cet excellent prêtre. Mais allons un peu à l’essentiel, et si on ne le peut chaque dimanche, pas la peine de délayer, j’étais là, sur mon genou douloureux, à entendre bouboubou le péché, bouboubou le repentir, et vice-versa, cela me faisait, si j’ose dire, une belle jambe. Je suis lasse de tout cela. Pourtant, quand je prie, je le fais avec ferveur, chez moi ; je ne le fais pas tout le temps, enfin disons que je ne lis pas des kilomètres de textes devant les icônes, mais je prie avec ferveur. Je ne sais pas si je me repens, mais je suis bourrelée de remords et je ne pense pas avoir une opinion excessivement positive de moi-même, ne serait-ce que parce que je me sens solidaire de l'humanité, et donc responsable de ce qu'elle a de pire.

Je n’ai pas de forces, mais c’est compréhensible, je suis âgée, et j’ai en ce moment une nourriture pauvre, elle ne nourrit pas, mais elle fait grossir, vous pouvez être tranquille. Pâques tombant très tard, le réveil de la nature arrive en plein carême, et moi, j’ai du travail physique à faire au jardin, sans aide.

Je suis arrivée à aménager mon salon, et il me plaît beaucoup, mais je n’y suis jamais, je travaille dans mon bureau. Disons que la prochaine fois que j’aurai Valérie ou Anne-Laure, on pourra passer au salon, qui est aussi prévu pour servir de salle-à-manger, car si j’ai des invités russes, ils restent à table des heures. Il m’aura fallu presque huit ans pour aménager cette maison, qui ne me convenait pas vraiment. Le jardin, c’est pareil, fait comme il est et cerné par les emmerdeurs et leurs bâtisses moches, il est très difficile à organiser. J’aurais dix ans de moins, j’aurais déjà déménagé. Mais je n'en ai plus l'énergie, et face à ce qui se prépare dans le monde entier, j'éprouve le même sentiment. Chaque jour qui passe me paraît gagné sur un avenir fort sombre, en ce qui concerne l'humanité, et sur la vieillesse en ce qui concerne ma personne. Pourtant, si mauvaise orthodoxe que je sois, si cancre foncier que je sois, je crois, je crois que Dieu ne laissera pas tomber les hommes ni sa servante indisciplinée Laurence qui, malgré son goût pour la décoration et les jolis jardins, vit moralement sur ses valises.



L’Iran bombardant maintenant Israël, cela devient très rock n’roll. A force de semer le vent, bien sûr, on récolte la tempête, et c’était sans doute le but. A cause sans doute de mon avant-dernière chronique, je ne peux plus diffuser mon blog sur Facebook. J’ai ouvert une chaîne Telegram, pour ceux qui y sont, et j'invite les autres à s'abonner, mais il y en a qui n'y parviennent pas, ou qui ne le sont plus sans savoir comment cela s'est produit...

Je vois toutes sortes d’émissions, de commentaires, d’analyses, sur le comportement des Russes et des occidentaux, le pourquoi du comment de la guerre et son issue, et c’est très intéressant, mais moi, il y a une chose qui me tracasse vraiment, c’est les pleins pouvoirs universels donnés à une bande de grands malfaiteurs psychopathes par le biais de l'OMS. Parce que si tout le monde marche là dedans, y compris les Russes, ce sera très mauvais signe et l’on pourra se demander pourquoi meurent des jeunes gens en Ukraine, de part et d’autre. C’est-à-dire, côté ukrainien, on le sait, c’est pour la famille Biden et le second Israël. Et du côté russe ? Dans la tête des Russes et la mienne, c’est pour la souveraineté de la Russie et la sauvegarde de tout ce qu’elle représente, ce qui dépasse largement le cadre de son intérêt national. Que deviendra tout cela si l’on nous soumet à Bill Gates et Tedros ? Or parmi nos analystes et politologues favoris, personne n’en parle vraiment. Je suis tombée sur deux vidéos russes qui y font allusion, l’une est une mise en garde qui est l’équivalent de celle du professeur Perrone, l’autre est une interview du politologue Andreï Fourssov qui inscrit tout cela dans un changement anthropologique planifié visant à créer deux sortes d’humanité, une caste bien nourrie qui vivra longtemps dans la félicité, et une biomasse hagarde, c’est-à-dire quelque chose qui transformera les inégalités sociales en phénomène biologique. Il dit que si la Russie signe le traité de l’OMS, elle perdra toute souveraineté, le méchant dictateur Poutine passera sous la suzeraineté du bon dictateur Bill Gates et de tous ses pareils. Il dit quelque chose d’encore plus inquiétant : il n’y aura pas de pandémie tant que durera la guerre en Ukraine, celle-ci remplissant la fonction que le COVID n’a pas remplie, et évoque une guerre non seulement entre les états mais entre différentes tendances à l’intérieur de ceux-ci.

Il recommande de sauver les livres, qui sont en voie de disparition, et d'élever les enfants avec des contes, opinion que je partage, mais j'ajoute le folklore, que cet intellectuel ne connaît certainement pas, ou alors sous forme d'imitation kitsch épouvantable.



A l’issue de tout cela, j’ai regardé aussi le sermon d’un prêtre russe sur les infos et les analyses politiques. Il les considère comme très mauvaises et dangereuses pour l’âme de ceux qui les écoutent, car elles nous emplissent d’inquiétude et de haine. C’est un fait, si je coupe tout cela et que j’écoute de la musique liturgique ou Arvo Pärt, mon état intérieur s’améliore sensiblement. Cependant, j’ai l’exemple d’un ami orthodoxe qui a décidé de s’évader dans la contemplation extatique et finit par dire des stupidités injustes pour ne pas entrer en conflit avec la société qui l’entoure, en effaçant tout ce qu’il savait auparavant et qui le mettait en porte-à-faux. Et celui d’une autre amie orthodoxe, qui vivait en ermite, sans internet, dans le dépouillement et la prière mais qui, infirmière comme le premier, au vu des scandales dont elle était le témoin, a fini par entrer dans une lutte difficile et constante avec une institution devenue folle et s’est exclamée devant moi : « Ces gens-là n’ont pas d’âme ». Par inclination, je couperais bien la source de mes inquiétudes et de mes indignations, car même si on ne sombre pas dans une haine des cavernes, on est miné par cette situation particulièrement anxyogène et révoltante. Mais par solidarité humaine, je ne le peux pas. 

J’ai rencontré une jeune Russe francophone qui a passé quelques temps en Amérique, elle y a vu des Français aussi. Elle a été surprise de constater qu’ils étaient incapables de lui dire quel rôle jouait encore l’Eglise catholique, l’Eglise catholique, ils s’en fichaient complètement et ne savaient rien sur la question. Elle ressentait de l’hostilité, une pesanteur, il ne fallait pas parler de ces choses, en gros, comme le dit quelqu’un sur facebook, l’URSS est passée à l’ouest. De sorte que mon amie Dany a du mal à expliquer des allusions bibliques ou évangéliques dans les pièces classiques qu’elle étudie avec les ados du lycée français. Effacer le christianisme, c’est effacer nos deux mille ans d’histoire.

Comme je lui parlais d’un ami homosexuel que j’avais dans mon jeune temps, elle m’a demandé ce que je pensais de cela. Je lui ai répondu que nous étions tous pécheurs et que je réagissais assez calmement à la chose, et avec indulgence, car la vie n’était pas simple. « Je suis contre la propagande délirante et indiscrète qui sévit en occident, contre les transitions sexuelles, contre l’étalage vulgaire des manies d’une certaine communauté, je pense souvent, par rapport à l’orthodoxie, à ce qu’a dit je ne sais plus quel geronda grec sur la question : l’Eglise considère qu’il y a deux façons de vivre, le monachisme et le mariage, le reste, homosexualité, hétérosexualité, c’est forcément de la luxure, point à la ligne, n’allez pas chercher plus loin. » Maintenant moi, je trouve que c’est bien difficile à tenir et qu’on fait ce qu’on peut, ce n’est vraiment pas le genre de choses sur lesquelles je porte facilement un jugement. La cruauté m’indigne beaucoup plus, la bassesse, la perfidie, la bêtise... Je suis contre la propagande et je suis contre la stigmatisation. » Elle semblait partager mon avis, et je lui ai parlé de mon livre Yarilo, qui évoque ces relations, sans en faire la propagande mais sans caricature non plus, tout en présentant le mariage comme la seule union aboutie.

5 commentaires:

  1. Bonjour Laurence,
    Il n’est pas facile de trouver le bon équilibre entre le détachement du monde qui permet de prendre du recul et la consommation d’informations qui permet de se faire une idée la plus juste possible de l’état de notre monde.
    D’un côté un isolement égoïste qui préserve notre santé spirituelle, de l’autre une connexion vénéneuse avec le monde qui nous contamine via les événements maléfiques qui s’y déroulent.
    Est-on complice du mal en renonçant à connaitre son existence ? Je ne suis pas théologien mais la bible apporte une réponse à cette question : “Tous ceux qui croient… sont justifiés gratuitement par sa grâce” (Romains 3. 24).
    En tant qu’être humain, nous ne pouvons nous empêcher de chercher à savoir à tout prix. Même si cela doit nous plonger dans le désespoir. C’est cela le paradis perdu, ce désir irrépressible de savoir. Il faut se résigner à n’être que des pêcheurs, avides d’information. C’est notre condition à tous. Nous sommes tous des cancres !
    En avoir conscience, c’est déjà une première étape vers la sérénité.
    Fred

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  2. Bonjour,
    Comment vous trouvez sur telegram?

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    1. J'ai ouvert une chaîne intitulée chroniques de Pereslavl. Et j'ai une chaîne perso sous le nom de Laurence Guillon. Cela dit, pour les chaînes perso, je crois qu'il faut avoir le numéro de téléphone.

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