mercredi 21 février 2018

Coincée

L'icône était chez lui, je l'avais faite
pour protéger quelqu'un d'autre
J'ai appris que l'invitation, sans laquelle j'ai dû partir, ne serait pas prête avant lundi, ce qui ne serait que demi mal, mais au lieu de me la faire électronique, on me l'a, Dieu sait pourquoi, faite sur papier. Cela veut dire qu'il faut encore l'envoyer par DHL, la dernière fois cela avait pris une semaine. Une fois qu'elle sera à l'agence, à Paris, il faudra minimum cinq jours au prix fort pour établir le visa, puis il me sera envoyé par Chronopost, avec les imprévus que cela suppose. Je dois retarder mon départ, je ne sais de combien de jours, cela me coûtera encore 50 euros d'amende.
Evidemment, j'avais dit à Ilya, dès l'enregistrement du visa précédent, qu'il faudrait tout de suite demander l'invitation suivante. Je l'avais relancé pour Noël, à mon avis, il a laissé passer une semaine ou plus, mais je ne peux rien dire, il m'a beaucoup aidée, il est très occupé, faire des invitations est très fastidieux, enfin je dépends du bon vouloir des uns et de l'humeur des fonctionnaires.
Je ne cesse de penser à Pat qui vient de mourir, je revois sa vie et notre jeunesse, tout me paraît si triste, très cher, très proche mais très triste, cette France qui ne se ressemble plus, ces centres villes lugubres, je ne me sens vraiment bien qu'à Solan, avec cette église d'une beauté irréelle, d'autant plus irréelle que le monde devient toujours plus moche; le ciel noir et brillant, somptueux, ce ciel étoilé que je ne vois plus à Pereslavl, à cause des nuages, et aussi de l'éclairage municipal. A Cavillargues, je le voyais même de ma terrasse, je m'endormais parfois sur mon hamac, en contemplant les constellations et en écoutant le murmure du ruisseau.
Je traverse ces paysages familiers et me souviens de mes promenades avec mon petit chien, quand je pouvais encore marcher, et puis j'avais mon vélo, je vivais beaucoup dehors, j'étais balayée par le vent et la lumière, comme dans mon enfance, j'ai bien fait d'en profiter, car c'est terminé, c'est plié dans les valises de ma vie, celles de l'ultime déménagement...
Ma hantise est de rester coincée ici, car ma maison et mes animaux sont là bas. Cette hantise, je l'ai chaque fois que je viens. La situation internationale est de plus en plus menaçante, je veux l'affronter là où j'ai choisi d'être, où je suis logée, où m'attendent ces pauvres êtres qui dépendent de moi, mes deux chattes russes et mon chat français, et le pépère Blackos si content d'avoir vu la froide maison où il s'était réfugié devenir chaude et hospitalière, et la follingue Rosie, venue me trouver en couinant, quand on l'avait abandonnée avec ses frères et soeurs dans le baraquement vide.
Oui, j'ai fait tout ce changement radical de vie à l'ombre de Mars, dans l'urgence et l'angoisse... C'est drôle comme cela reste théorique, on se dit que non, cela n'est pas possible, tout ne va pas basculer dans le chaos, quelque chose, quelqu'un va empêcher cela... Mais notre destin européen ressemble de plus en plus à la "course à l'abîme".

4 commentaires:

  1. Pourquoi faire vos visas à Paris ? il y a un bureau à Marseille, ce n'est pas plus proche ?
    Sinon, je lis votre vie comme un feuilleton...Merci.

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    1. Pour le faire soi-même, il ne faut pas être pressée. A Marseille, je dois prendre rendez-vous pour apporter le visa, et cela une fois l'assurance obtenue, ce qui prend aussi plusieurs jours, puis attendre le visa et revenir le chercher. L'agence me fait tout, y compris l'assurance.

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  2. Peut être que notre petite foi ancrée dans nos prières peut changer tout ça, j'en suis même sûre, que seul nos prières le peuvent, c'est notre rôle de chrétien, prier sans relâche pour que ceux qui "décident" ouvrent les yeux, voient le Christ et témoignent

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    1. Oui, sans doute, pour qu'au moins leurs menées n'aboutissent pas.

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