lundi 18 juin 2018

Du passé faisons table rase et place au business

la laure de la Trinité saint Serge

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LE MINISTRE DE LA CULTURE EN TANT QUE DIAGNOSTIC

 « A la fin de 1964, "l'épuration  " de Moscou et de sa région allait bon train, en prévision de la mise au point et de la confirmation du nouveau plan général de reconstruction de la capitale. Cela nous obligea à rencontrer le ministre de la culture de l'URSS d'alors, E.A Fourtseva. Il nous était parvenu les nouvelles inquiétantes du démantèlement des églises de Souzdal, Vladimir, Pskov, Kalouga, Toula, Viazma. Le Mosoblsoviet essayait de déclasser l'ensemble de monuments de la laure de la Trinité Saint Serge. A Zagorsk (maintenant Serguiev Possad) on avait démantelé une église en bois du XVII° siècle sur le mont Iline. On avait fait sauter un marché du XVIII° siècle à Romanov sur la Volga (maintenant Toutaïev).
Dans la salle de réception de la ministre, on nous avertit que nous n'avions pas plus de dix minutes à notre disposition. Piotr Dmitrievitch (Baranovski) essaya d'expliquer quelque chose au collaborateur de la ministre, mais celui-ci, avec un geste des mains habituel, ouvrit la porte et nous nous retrouvâmes dans un vaste bureau. Yekaterina Alexeïevna  nous proposa de nous asseoir et demanda tout de suite ce qui nous amenait. Piotr Dmitrievitch commença à expliquer combien la situation était regrettable avec les monuments d'architecture. Yekaterina Alexeïevna fit la grimace, nous démontrant son complet déplaisir, et, interrompant Baranovski, lui dit qu'à son avis il y avait trop de monuments dans le pays et qu'on ne pouvait s'occuper de tous et qu'il n'y avait pas de raison de le faire. Le gouvernement avait des problèmes plus importants que la conservation des monuments. Ici, elle répéta une expression très courante à l'époque: "Nous approchons du communisme, et les gens ne savent pas où vivre!" A l'effroi de Baranovski et de toutes les personnes présentes, elle se mit à parler des intentions de détruire tout ce qui empêchait de construire des villes communistes. Quelqu'un de la commission demanda à Fourtseva ce que devait être, à son avis, une ville communiste. Elle répondit que les architectes le savaient mieux qu'elle, mais bien sûr, sans églises."

(Des mémoires du prof. A.S. Trofimov// Piotr Baranovski. Travaux, souvenirs de ses contemporains. M. 1996. P.186)

D'où l'on voit qu'il est très excessif de considérer l'URSS comme un conservatoire des traditions qui se perdaient en occident sous l'influence du matérialisme consumériste. Si cela s'est produit, c'est le résultat des effets secondaires de la grande catastrophe culturelle et humaine subie par le pays. C'est la fine fleur de l'architecture russe du passé, ou plutôt ce qu'il en restait après les destructions énormes des décennies précédentes, que ce ministre de la culture projetait sans frémir de sacrifier au triste béton de la ville communiste idéale. On voit par la même occasion, d'où provient le fonctionnaire actuel, si empressé de sacrifier ce qui a été miraculeusement épargné non plus au projet communiste mais aux projets immobiliers juteux des promoteurs, comme par exemple ici, à Pereslavl, sur la rive du lac, près du monastère saint Nicétas. Quand mon père Valentin disait à sa femme, devenue communiste par réaction au libéralisme, que ceux qui la scandalisaient alors étaient les mêmes apparatchiks qui la scandalisaient, au temps du communisme, quand elle était dissidente, il avait parfaitement raison. Entre le libéralisme capitaliste prédateur et le communisme qui faisait table rase de tout ce qui pouvait remémorer aux gens l'âme de leur pays, sa poésie et sa beauté, je ne vois pas de différence, ils s'entendent très bien, ils procèdent l'un de l'autre. Il est pour moi évident que cette Fourtseva n'avait plus rien de russe, à part peut-être son type physique et sa langue, c'était un mutant, comme le Français abruti qui rend "les religions" responsables de tous les malheurs humains, crache sur le "moyen âge", appelle son fils Parker ou Kévin et n'a jamais rien connu d'autre que la musique de merde importée ou la presse people. Ces gens-là, purs produits de la modernité, n'hésitent devant aucune destruction, plus rien n'est sacré à leurs yeux et par conséquent, même le sens de la patrie est chez eux très atrophié et remplacé par une conception purement idéologique ou des intérêts financiers.

МИНИСТР КУЛЬТУРЫ КАК ДИАГНОЗ

«На исходе 1964 г. полным ходом шла «чистка» Москвы и Подмосковья в преддверии разработки и утверждения нового генерального плана реконструкции столицы. Это заставило нас искать встречи с тогдашним министром культуры СССР Е.А. Фурцевой.
Поступали тревожные известия о разборке храмов в Суздале, Владимире, Пскове, Калуге, Туле, Вязьме. Мособлсовет пытался снять с охраны ансамбль памятников Троице-Сергиевой лавры. В Загорске (ныне Сергиев Посад) разобрали деревянную церковь ХVII в. на Ильинской горе. Были взорваны торговые ряды ХVIII в г. Романове на Волге (ныне г. Тутаев).
В приемной министра предупредили, что в нашем распоряжении будет не более 10 минут. Петр Дмитриевич [Барановский] попытался что-то объяснить помощнику министра, но тот привычным взмахом руки открыл дверь, и мы сразу очутились в просторном кабинете. Екатерина Алексеевна предложила сесть и сразу же спросила, что заставило нас прийти к ней. Петр Дмитриевич начал говорить о том, как неблагополучно у нас обстоят дела с памятниками архитектуры.
Екатерина Алексеевна сделала гримасу, обозначавшую полное неудовольствие, и, прервав Барановского, сказала, что, по ее мнению, памятников у нас в стране слишком много и всеми ими заниматься невозможно, да и ни к чему. У государства есть вопросы поважней сохранения памятников. Тут она повторила весьма расхожее в то время выражение: “Мы подходим к коммунизму, а людям жить негде!” К ужасу Барановского да и всех присутствующих, она стала говорить о намерении снести все, что нам мешает строить коммунистические города. Кто-то из комиссии спросил Фурцеву, каким же должны быть, по ее мнению, коммунистические города. Она ответила, что архитекторы должны это лучше знать, но уж конечно без церквей».
(Из воспоминаний проф. А.С. Трофимова // Петр Барановский. Труды, воспоминания современников. М. 1996. С. 186)


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