mercredi 2 mai 2018

Baphomet!

Là, tout à coup, le grand beau temps, la douceur. Je me suis activée dans la jardin, mais je me fatigue vite, et il faudrait faire un travail assez considérable, même si je me résigne à utiliser le terrain plus ou moins tel qu'il est, ce qui est un défi!
Rosie était contente de me voir dehors et restait couchée ou bien coursait Georgette qui n'en a plus tellement peur. Elle aime Georgette, et Georgette le sent.
J'ai vu un chien blanc tout crotté qui, à mon avis, n'est pas d'ici, il a un collier, un air intelligent, sensible et triste, il doit avoir du labrador. Je lui ai parlé, il a hésité, puis s'est approché, mais Rosie s'est mise entre nous, lui montrant que j'étais sa chose et qu'il ne fallait pas se permettre des choses pareilles. Du coup, il est parti...
Elle continue à me rapporter toutes sortes de merdes. D'après Skountsev, les laïkas sont comme ça, et elles couchent dehors par tous les temps, oui, c'est bien une laïka, même si elle n'est pas pure race. La femme de Skountsev est de l'Oural, elle a grandi avec des laïkas.
J'ai vu un passage du journal que je tiens depuis ma prime jeunesse, et je le publie, tant il correspond à notre situation générale, bien qu'il date de 2001, mais il ya  si longtemps que tout est en place..

"Elle m'a dit que J. était mort d'une cirrhose. La dernière fois qu'elle l’a vu c'était une vraie ruine qui continuait cependant à faire la bringue et à draguer. Je me suis souvenue de toutes ces fêtes dans ces belles maisons du Midi qui me laissaient une impression de vide total et de malaise. Toute cette génération de gens qui ne vivaient que pour le plaisir, qui s'étourdissaient en permanence, quel naufrage que leur vieillesse… J'espérais à l'époque que je serais assez évoluée, à 50 ans, pour pouvoir décrocher et ne pas m'obstiner à vivre comme si j'en avais 25. Ici, ne comptent que les valeurs de la jeunesse, il faut plaire et s'amuser jusqu'à la tombe, on ne donne rien aux autres parce qu'on ne pense qu'à soi, à son bon plaisir, à rester beau, en forme, attirant parce que la marchandise doit être présentable pour trouver encore preneur. Tous les rapports humains s'en trouvent faussés, pas de compassion, pas de compréhension, pas d'abnégation, aucune recherche de ce qui peut être profond et durable. Je me sens extrêmement déphasée, je ne me sens pas chez moi. Dans le métro pour aller à la Gare du Nord, c'était le Brésil, une population essentiellement africaine, je n'ai jamais eu à ce point cette impression d'invasion, de disparition prochaine. Pendant que les Français s'enlisent dans les vanités et les idéologies suicidaires, leur pays change de mains.
Nikolaï, le peintre d'icônes, attend l'Apocalypse, aussi peu lui importe l'endroit où il se trouve, pour lui, le naufrage est général et inéluctable. Je le crains aussi. Mais les Français sombrent avec tant de complaisance et tant d'aveuglement, que je me sens mieux avec les Russes. S. se fait traiter de fasciste par ses amis de gauche, parce que s'il ne saisit pas toutes les imbrications d'essence mystérieuse et spirituelle du phénomène, il comprend l'imposture et l'hypocrisie politiques qui nous mènent à notre perte. Nikolaï pense que la complaisance des Français n'est pas due seulement à la propagande, mais à une complicité profonde avec des idées qui leur permettent de mener cette existence hédoniste et creuse et leur en donnent la justification. Que cela puisse se terminer très mal ne les concerne pas, exactement comme J., pur produit de son époque, ne prévoyait et ne voulait prévoir son naufrage et sa fin prématurée, quand il se jetait dans un tourbillon de débauche. Je sens tellement tout cela que j'en éprouve une impression sinistre, malgré les boutiques pimpantes, les massifs de fleurs, les gens décontractés et à la mode, toute cette apparente prospérité. Une chose me frappe : les visages n'ont aucune intensité. Ils ne sont pas fatigués ni ravagés comme le sont parfois ceux des Russes, mais ils n'ont pas d'intensité, on ne sent pas d'âme derrière, on dirait des masques."


Le dernier objet rapporté par Rosie...








3 commentaires:

  1. je suis très surprise... c'est en 2001 que j'ai décidé de prendre mon fils sous le bras, et de l'instruire en famille. A l'école, les enfants s'éteignaient. Si tout le monde se résignait, et bien pas nous... c'était le moment de reprendre notre destin en main.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je vous félicite. J'ai eu un chemin assez spécifique moi-même. Mais ce que je décris là est une impression générale. Il me semble que les résistances individuelles ne sont vraiment pas les plus nombreuses.

      Supprimer
  2. Bonsoir Laurence. Je commente ici car j'étais absente lorsque tu as du publier cet article sur Facebook. Ton passage de 2001 est criant de vérité. Je pense ressentir un malaise depuis longtemps avec un étape clé après mon séjour britannique de 1994 mais hélas, j'étais partie sur une fausse voie, celle du gauchisme. Cela m'a mis longtemps en colère et me faire croire supérieure aux autres, et ce n'est vraiment pas la solution... Bonne soirée

    RépondreSupprimer