samedi 14 août 2021

La fête des gens heureux

 


La fête des « gens heureux » est une épreuve terminée. Hier soir, Il y avait un monde fou dans l’appartement à côté, Génia et sa petite amie, un couple de folkloristes et leur gamine turbulente qui menaçait de tout casser, un jeune homme, une jeune femme, Katia, Ira, bien sûr. J’ai un tel besoin d’être un peu tranquille que je me sentais complètement hébétée. Ils ont chanté, moi aussi, mais je n’étais pas à ce que je faisais.

Le matin, je me demandais comment j’allais affronter la journée. La cuisine est sens dessus dessous. Les poires et les concombres menacent de pourrir, le jardin retourne à l’état sauvage, et il est si détrempé que je ne peux pas le tondre. Moustachon m’a dès l’aube réveillée en fanfare en m’apportant un oiseau qu’il a lâché sous le lit. J’ai pu sauver le pauvre animal.

La fête avait lieu derrière le village de Gorodichtché dont on devine qu’il a dû être d’une beauté fantastique, mais de nombreuses villas "mon rêve" de moscovites ou de locaux enrichis ont considérablement cassé l’atmosphère. Il domine le lac de sa belle église blanche à cinq coupoles bleues. Et je le contemplais, ce lac, dans le vacarme d’une sono qui diffusait, comme bien souvent, de la merde.

C’est moi qui devais ouvrir le concert, où sont venus se produire des tas de gens, les uns après les autres. Avec les micros, la sono, les badauds, les étals d’artisanat ou de produits fermiers. Une bonne femme m’a présentée comme quelqu’un de positivement extraordinaire, la Française férue de folklore venue s’installer ici. J’étais poursuivie par la trouille irrationnelle qu’un affreux type qui m’injurie sur les sites de Pereslavl, et injurie également tous ceux qui défendent le lac et les derniers endroits pittoresques du coin, vînt faire du scandale, ce qui, évidemment, ne s’est pas produit. D’ailleurs, une fois  sur cette scène, je n’y ai plus pensé. J’ai chanté mes deux chansons cosaques marrantes, aux gousli, et une complainte bretonne, à la vielle à roue, « la Vierge et saint Jean-Baptise », car c’est le carême de la Dormition qui commence. Je ne dis pas que j’ai été acclamée par des foules en délire, car la foule était partout occupée à choisir des fromages ou à acheter des jouets ou des céramiques, mais j’ai fait ma petite impression, pas mal de gens sont ensuite venus me trouver. Je me suis cependant promis de ne plus m’embarquer dans ce genre de galère. Les soirées - au café français, ou chez moi, ou dans d’autres endroits plus intimes. C’est trop fatigant, tout ça. Et puis quand j’ai écouté Génia et compagnie qui ont pris ma suite, je me suis rendu compte que la sono et le folklore n’allaient pas ensemble, c’était terriblement bruyant. Ceux qui sont passés ensuite donnaient nettement dans la « culture de kolkhose ».


Génia, Katia et leurs amis

Une dame m’a abordée, elle s’appelle Ioulia, et elle est guide à Moscou. Elle a fait un jeu « Alexandre Nevski », pour les enfants, qu'elle m'a offert, et en ferait bien un « Ivan le Terrible », car elle s’occupe également de l’école du dimanche de sa paroisse, et du reste, son jeu, je l’avais vu dans la mienne, de paroisse. Elle attend la sortie de Yarilo avec impatience. Je ne sais pas comment elle en a entendu parler, mais du coup, je me dis qu’il aura peut-être plus de retentissement qu’en France, il pourrait d’ailleurs difficilement en avoir moins...

Elle m’a dit qu’elle ne savait pas comment parler d’Ivan le Terrible pendant ses excursions, et je lui ai avoué que moi-même, je redoutais les réactions. «S’il avait été entièrement mauvais, a-t-elle ajouté, il n’aurait pas laissé le pays plus grand et plus puissant qu’il ne l’a trouvé ».

J‘ai ensuite rencontré dans un stand Anastassia, qui s’occupe du centre culturel « the Place », à Rostov. Elle était avec une charmante céramiste qui, à 50 ans, a décidé qu’elle ne perdrait pas davantage sa vie à la gagner dans la publicité, et elle a quitté Moscou pour la province et l’aventure créatrice. Anastassia serait prête à organiser une présentation de Yarilo quand il sortira. Nous avons vu le père Pantaleimon, higoumène du monastère saint Daniel, et il a acheté une belle icône en bois sculpté de saint Georges, que j’aurais prise, s’il ne s’était pas décidé, et cela n’aurait pas été très raisonnable. Je suis contente qu’elle soit revenue au père Pantaleimon. « Qu’il est beau garçon, cet homme, nous dit ensuite une dame présente, est-ce qu’il est vraiment tout à fait moine ? Même sa barbe n’arrive pas à le défigurer !

- Ah oui, il est même higoumène !

- Il est bien jeune pour être higoumène...

- Notre évêque aussi, est jeune. Ils sont tous les deux très intelligents.

- Ca se voit !»

Anastassia et la céramiste prétendaient qu’ici, c’était la dictature, je leur ai dit : « Regardez, nous sommes là, détendues, sans masque, sans passe sanitaire, nous avons une vie normale, en France, c’est la maison de fous en permanence, les gens vont bientôt perdre leur travail sans indemnités s’ils ne montrent pas leur pass vaccinal, ils ne peuvent aller nulle part, on leur prend des amendes monstrueuses, et certains font même de la prison. Je les vois tous se promener avec leur couche culotte sur la figure, regardez autour de nous, vous en voyez, des muselières ?»

J’étais complètement ahurie. J’aurais grand besoin de solitude, de paix, de quelques jours sans sollicitations ni obligations, ni invitations.

2 commentaires:

  1. Profite-en quand même : https://olivierdemeulenaere.wordpress.com/2021/08/16/la-republique-du-ghana-deviendra-le-premier-pays-a-utiliser-la-biometrie-sans-contact-dans-le-programme-national-de-vaccination-contre-le-covid/

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