J'ai été contactée par le peintre Ilya Komov, qui se rendait à Toutaïev, avec un ami et voulait me voir au café français. Après avoir eu une maison à Pereslavl, il a déménagé à Toutaiev, écoeuré par le massacre qu'on faisait de la ville. Toutaïev est restée pittoresque, quoique fort délabrée, quand une ville garde son caractère, c'est qu'elle est plus ou moins en ruines. Et Toutaïev commence aussi à être victime des clôtures en profnastyl, réservées en France aux zones industrielles, et qui défigurent toute la Russie, et du "siding" en plastique façon fausse pierre ou fausse planche qui transforme toute maison vivante en lego criard.
Son copain, Micha, s'est présenté comme économiste. Il connaît Benjamin le Suisse, qui est arrivé dans la foulée. Micha est sur le point de devenir vieux-croyant. Il est passionné par le nord russe, ses merveilleux villages encore intacts, souvent ruinés, son folklore, et avec Ilya, ils projettent un festival d'art à Toutaïev, pour les peintres mais aussi les métiers d'art, les métiers traditionnels, et même la musique. Il m'a dit qu'à Arkhanguelsk, un institut formait les jeunes aux savoir-faire traditionnels, receuillis auprès des dernières personnes capables de les transmettre, ce qui est plus important encore que la conservation de ce qu'il reste du patrimoine, parce que ces jeunes seront en mesure de reconstruire ce qui est détruit, pas forcément dans la répétition servile, d'ailleurs. Quand on voit le mouvement d'Abramtsevo, au début du XX° siècle, qui puisait son inspiration dans l'art populaire pour créer un art décoratif original d'un extrême raffinement et d'une grande poésie, on mesure toute l'ampleur de la catastrophe culturelle qui a suivi et accouché de l'horrible goût post-soviétique dont je vois partout la démonstration.
Le nord est resté beaucoup plus authentique, il conserve encore une paysannerie et donc tout ce qui va avec, si c'était à refaire, j'aurais poussé plus loin.
Le peintre qui me fait mes encadrements, et chez qui j'étais passée, me soutient que les Russes n'ont jamais eu une architecture intéressante. Les Italiens du XV° siècle oui, mais les Russes n'étaient capables que de bricoler des églises n'importe comment. Il est communiste. Je pense qu'il répète la leçon de ses jeunes années. Le mépris bolchevique de la Russie, qui ne s'intéresse qu'aux personnalités du passé ayant une mentalité analogue, par exemple Pierre le Grand.
Heureusement que Micha l'économiste n'est pas de cet avis, cela me remonte un peu le moral.
Après l'église, aujourd'hui, dans ce même café français, j'ai rencontré le père Alexandre, de Rostov, sa femme et deux amies, c'est un homme très chaleureux. Bien que Rostov soit moins saccagé que Pereslavl, il commence à préférer Pereslavl, plus vivant. Nous avons abordé à peu près les mêmes thèmes qu'avec Ilya et Micha, mais dans le registre religieux. A savoir qu'on a trouvé des sponsors pour construire une horrible et pompeuse réplique de sainte Sophie de Constantinople près de l'église campagnarde où est conservée la croix miraculeuse de Godenovo, et où un tel édifice est complètement déplacé; tandis que des merveilles architecturales anciennes tombent désespérément en ruines, faute de sponsors pour les travaux, car elles n'intéressent personne, et l'éparchie n'a pas les moyens de les restaurer. Les amies du père Alexandre me conseillaient de devenir maire de Pereslavl. "Oh non, je suis trop anarchiste! D'ailleurs, j'ai décidé de me taire un maximum. Je ne donnerai mon avis que si on me supplie de le donner. Vous voulez mon avis? Vous le voulez vraiment? Eh bien le voilà!"
Dès qu'il fait beau, ou pas trop mauvais, je suis dans le jardin, à réparer les dégâts causés par les eaux stagnantes. Je déplace ce qui souffre trop, mais j'ai peur que mes deux poiriers, mon pommier et mes pruniers ne s'en remettent pas, je leur trouve mauvaise mine. Ce serait le désastre, car ce sont mes seuls arbres. Le reste est jeune, ou ne donne pas d'ombre, ni ne fait écran.
Le voisin de derrière s'occupe de drainer les terrains, j'attends son verdict et ses propositions. Je pense que j'en aurai pour cher. Habituellement, les gens font ce que le responsable de la situation m'a proposé, ils noient leur propre terrain sous des tonnes de glaise, avec tout ce qui était planté là jusqu'alors, et il ne reste plus qu'à déployer du gazon en rouleau, là où l'on n'a pas dallé pour garer la voiture, avec un nain de jardin au milieu, trois thuyas et des bégonias dans des bacs en béton. Où est le problème?
La bêtise m'a fatiguée toute ma vie, mais elle atteint des proportions qui commencent à dépasser mes capacités d'adaptation. Elle est la norme du nouveau monde où les génies ne sont plus Dostoievski, Nietzsche, Shakespeare mais le docteur Laurent Alexandre et Bernard Henri Lévy.
feuillages clairsemés.... |
Combien vous avez raison, Madame Guillon, ajoutons que la "bêtise" des alexandre, lévy, de l' abruti de l'elyséee et toute sa secte est bien plus que ça, c'est de la criminalité organisée sur fond de débilita mentale.
RépondreSupprimerL'art russe : ses origines, ses éléments constitutifs, son apogée, son avenir
RépondreSupprimerby Viollet-le-Duc, Eugène-Emmanuel, 1814-1879 pour l' encadreur ........https://yandex.ru/images/search?text=viollet%20le%20duc%20l%27art%20russe&stype=image&lr=194&parent-reqid=1622475351476364-9342426816743744905-balancer-knoss-search-yp-sas-9-BAL-9317&source=wiz Iakov
Merci, Violet-le-Duc appréciait, de trop nombreux Russes méprisent....
SupprimerAvez-vous eu connaissance de cet épisode-là ?
RépondreSupprimerhttps://yetiblog.org/archives/31433
De temps en temps (trop rarement il est vrai), il peut même arriver qu'en France la télé soit intelligente...
Oui, j'ai vu ça. J'aime beaucoup cet homme.
SupprimerBonjour Laurence,
RépondreSupprimerFinalement vous déménagez, je n'ai pas tout suivi, pardonnez moi...?
Y.
finalement, je ne déménage pas.
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