Un saut à Moscou pour me confesser et acheter des pinceaux. J'ai eu la chance de voir longuement le père Valentin, de passer un bon moment en famille.
A la liturgie du dimanche, sermon du père Fiodor, sur l'évangile du jugement dernier: le Seigneur ne nous demandera pas si nous avons jeûné ou prié, il nous demandera si nous avons aimé et secouru notre prochain, visité les malades, les prisonniers, nourri les affamés. Le père Fiodor sait de quoi il parle, car il s'occupe des sans domicile fixe des Trois Gares voisines de l'église. C'est un petit homme perpétuellement ébouriffé qui a une bonne dizaine d'enfants et quelque chose d'éternellement juvénile, on le sent toujours en train de retenir un clin d’œil humoristique.
Je confesse au père Valentin, entre autres, que le spectacle du monde où nous vivons me met dans de telles transes que je souhaite les mille morts aux politiciens responsables et à ceux qui les suivent. Il éclate de rire: "Oui, oui... Prions pour rester malgré tout de bons chrétiens!"
Il me parle chez Xioucha d'un Allemand orthodoxe qui lui avait écrit du fin fond de la région de Smolensk, où il a échoué dans un village en perdition et fait cinq enfants à une Russe. Il l'a invité à Moscou, et l'a incité à se rapprocher d'une communauté de paysans orthodoxes qui font dans l'agriculture écologique, comme lui, à réunir les bonnes volontés. Je trouve l'idée excellente, et certains Français pourraient s'y atteler également. Cet Allemand a de la sympathie pour les Amish. "Moi aussi, dis-je, mais nous n'avons pas besoin d'eux, nous avons déjà nos Amish, ce sont les vieux-croyants. Skountsev est allé dans un village de Sibérie où ils vivent comme au XVII° siècle, ils ne boivent même pas de thé, mais d'après lui, leurs infusions sont incomparables, et c'est ce que devaient boire tous les Russes, avant Pierre le Grand. Skountsev transmet tout cela, les chants qui existaient alors et existent encore, et cela fait au moins quelques enfants qui grandissent imprégnés de l'âme immémoriale de la sainte Russie!
- Qu'il soit béni pour ce qu'il fait. c'est notre rôle aussi, à vous et moi, de transmettre l'étincelle de notre culture dans un monde où tout s'éteint, dans la faible mesure où nous le pouvons, nous devons absolument le faire."
Mais comme je parlais de ce genre de choses à une amie de Xioucha, elle me dit que la perte de tout ce que je décrivais la rendait profondément triste. "Il faut simplement réagir, lui dis-je, aller vers cette source, et lui permettre de nous irriguer à nouveau, tant qu'il n'est pas trop tard".
Liéna, la fille aînée du père Valentin, me demande d'enseigner le français à ses filles, le français, qui me paraît parfois en danger de devenir assez vite une langue morte. Mais accrochons-nous dans les ténèbres montantes, et gardons notre lampe allumée: le Jugement Dernier approche, et je vais à sa rencontre avec quelques prêtres orthodoxes, des vieux-croyants et une langue qui n'a presque plus cours, tout cela se conservera dans la Mémoire Eternelle.
A la liturgie du dimanche, sermon du père Fiodor, sur l'évangile du jugement dernier: le Seigneur ne nous demandera pas si nous avons jeûné ou prié, il nous demandera si nous avons aimé et secouru notre prochain, visité les malades, les prisonniers, nourri les affamés. Le père Fiodor sait de quoi il parle, car il s'occupe des sans domicile fixe des Trois Gares voisines de l'église. C'est un petit homme perpétuellement ébouriffé qui a une bonne dizaine d'enfants et quelque chose d'éternellement juvénile, on le sent toujours en train de retenir un clin d’œil humoristique.
Je confesse au père Valentin, entre autres, que le spectacle du monde où nous vivons me met dans de telles transes que je souhaite les mille morts aux politiciens responsables et à ceux qui les suivent. Il éclate de rire: "Oui, oui... Prions pour rester malgré tout de bons chrétiens!"
Il me parle chez Xioucha d'un Allemand orthodoxe qui lui avait écrit du fin fond de la région de Smolensk, où il a échoué dans un village en perdition et fait cinq enfants à une Russe. Il l'a invité à Moscou, et l'a incité à se rapprocher d'une communauté de paysans orthodoxes qui font dans l'agriculture écologique, comme lui, à réunir les bonnes volontés. Je trouve l'idée excellente, et certains Français pourraient s'y atteler également. Cet Allemand a de la sympathie pour les Amish. "Moi aussi, dis-je, mais nous n'avons pas besoin d'eux, nous avons déjà nos Amish, ce sont les vieux-croyants. Skountsev est allé dans un village de Sibérie où ils vivent comme au XVII° siècle, ils ne boivent même pas de thé, mais d'après lui, leurs infusions sont incomparables, et c'est ce que devaient boire tous les Russes, avant Pierre le Grand. Skountsev transmet tout cela, les chants qui existaient alors et existent encore, et cela fait au moins quelques enfants qui grandissent imprégnés de l'âme immémoriale de la sainte Russie!
- Qu'il soit béni pour ce qu'il fait. c'est notre rôle aussi, à vous et moi, de transmettre l'étincelle de notre culture dans un monde où tout s'éteint, dans la faible mesure où nous le pouvons, nous devons absolument le faire."
Mais comme je parlais de ce genre de choses à une amie de Xioucha, elle me dit que la perte de tout ce que je décrivais la rendait profondément triste. "Il faut simplement réagir, lui dis-je, aller vers cette source, et lui permettre de nous irriguer à nouveau, tant qu'il n'est pas trop tard".
Liéna, la fille aînée du père Valentin, me demande d'enseigner le français à ses filles, le français, qui me paraît parfois en danger de devenir assez vite une langue morte. Mais accrochons-nous dans les ténèbres montantes, et gardons notre lampe allumée: le Jugement Dernier approche, et je vais à sa rencontre avec quelques prêtres orthodoxes, des vieux-croyants et une langue qui n'a presque plus cours, tout cela se conservera dans la Mémoire Eternelle.
Coucher de soleil derrière ma maison |