J'ai participé hier à un dîner, ou plutôt une beuverie, d'intellectuels orthodoxes locaux. Je me suis plutôt ennuyée, car moi, je n'étais pas bourrée, je me bourre très rarement la gueule, je n'ai pas envie d'être malade. L'alcool rendant leurs propos confus, j'avais du mal à les comprendre, et leurs plaisanteries de même, car le russe n'est quand même pas ma langue maternelle, et d'ailleurs, j'étais très fatiguée, après Pâques et deux nuits trop courtes. Et puis les propos concernaient surtout leur vie personnelle. Je suis repartie plutôt déprimée.
Après huit heures de sommeil, je me suis levée face à une belle journée, du soleil et un vent nettement plus doux. On dit que souvent le temps change après Pâques. Eh bien cela semble vouloir être le cas. J'ai donc jardiné, puis je me suis fait un brunch sur le perron, avec des oeufs durs, de la paskha, la mienne, plus légère, moins sucrée, et un koulitch du pâtissier Didier, qui n'est pas la version traditionnelle russe de la chose, ni non plus un panetone italien, mais une tuerie française à point de départ russe.
Je regardais mon terrain qui a encore l'air d'un paillasson, les emplacements où bientôt resplendiront lupins, roses trémières, iris, oignons décoratifs, pivoines, et puis les saules et les roseaux du marécage, au loin, et par dessus le toit rouillé de l'isba d'en face, de gros nuages véloces, bondissants dans l'azur et la lumière, et je ressentais, avec mes animaux couchés autour de moi, un bonheur d'une plénitude extraordinaire. J'ai conscience de ne plus avoir d'avenir, et cela à pusieurs titres. D'abord, comme nous le rappelle partout la merveilleuse société mondialiste que nous ont bâtie deux siècles de progressisme implacable et de stupidité matérialiste arrogante, je fais partie des has been en sursis qui n'ont plus qu'une ou deux décennies devant eux, dans la mesure où on voudra bien les leur laisser. Ensuite, je suis notoirement dissidente, et notoirement orthodoxe, ce qui me place dans la catégorie des persécutés imminents. Hier, mes intellectuels évoquaient la fin du monde, et en effet, c'est bien de cela qu'il s'agit, car si quelque chose survit, ce sera la Babylone de Moloch et Mammon, où moi-même je n'aurai pas plus de place que Notre Dame de Paris, l'église du métropolite Pierre à Pereslavl Zalesski, toute la littérature classique, la tradition paysanne, et en général toutes les valeurs que je reconnais et que je défends. Si je reste dans ma maison ici, c'est parce qu'on aura oublié la vieille et qu'on la tiendra pour quantité négligeable. On peut parfaitement me réexpédier en France, si la Russie ne résiste pas à la vaccination obligatoire et surtout à la puce électronique qui va l'accompagner, et qu'un chrétien orthodoxe ne peut accepter, car c'est la marque de la Bête, celle qui fera de nous le bétail de son immonde troupeau. A voir les mufles divers que revêt depuis deux cents ans, ou même un peu plus, son corps unique, je n'ai aucune envie de lui appartenir pour l'éternité, et même si dans la somme de textes qui constituent le testament du christianisme, il y a des choses qui vraiment m'échappent, me dépassent, ou me paraissent, comme disait le père Placide, "des indurations dans le tissu souple de l'Eglise", une chose est claire pour moi, à la façon de Dostoïevski, si on me prouvait que le Christ n'était pas la Vérité; je préfèrerais être avec le Christ qu'avec la Vérité. Car avec EUX, je ne serai jamais.
Donc, n'ayant plus tellement d'avenir, je n'ai plus tellement de soucis non plus. Mes genoux, le fric, tout ça, le virus, bof... quelle importance? La seule chose qui me tracasse, c'est ce qu'il adviendra de mes animaux, mes chers amis, casez-les si vous le pouvez, si vous ne le pouvez pas, ne les livrez pas à une existence de misère, faites-moi la charité de les euthanasier chez un bon vétérinaire. Pour ce qui est de mes affaires, tableaux et manuscrits, que se les partagent ceux qui m'aiment. Mais eux-mêmes n'auront certainement pas le loisir d'en faire grand chose, eux-mêmes feront partie des proscrits.
Bon, évidemment, je ne suis pas pressée à la minute, mais disons qu'il faut tout envisager. Et envisageant tout, j'éprouvais tout à coup sur mon perron un bonheur et une sérénité immenses. Je comprenais la valeur de chacun de ces instants de joie d'exister qu'il me restait à vivre, une joie d'exister sensuelle, celle de ces oeufs qui m'ont tant manqué pendant le carême, du koulitch du pâtissier Didier, de la brise printanière, du ciel et de ses nuages, mais tout cela n'était pas en contradiction avec une plénitude plus vaste, c'en étaient juste les prémices acceptés avec reconnaissance, et je sentais sur moi la protection du Seigneur, au delà de tous mes doutes, de toutes mes petites faiblesses, et je m'en remettais à lui. Je me sentais libérée, profondément libérée, et calme.
Car si le virus me prend, dans ce cas de figure, cela m'évitera peut-être des choses qui me feraient regretter de ne pas y avoir succombé; et si j'y survis, cela sera peut-être pour périr avec les orthodoxes, ici, comme la grande duchesse Elizabeth, j'espère alors être à la hauteur, avec l'aide de Dieu, et le nez dessus, il se peut que je sois malade de trouille, mais j'aurai au moins la consolation de ne pas finir ma vie à quatre pattes dans un EPHAD russe ou français, achevée au rivotryl, une couche sale au cul, entre deux maritornes sous-payées. Mourir en martyr a certainement plus de gueule et plus de sens.
Alors profite de la première brise printanière au soleil, avant que ne bourdonnent les drones dans le beau ciel de Pereslavl, avant qu'il ne t'advienne Dieu sait quoi dans la tourmente, me disais-je. Dieu, tu l'as choisi et gardé, il ne te lâchera pas.
"N'ayez pas peur, j'ai vaincu le monde".
Je mets en annexe l'homélie de monseigneur Théoctyste au monastère saint Daniel, car en la lisant, j'ai compris que toute ma vie, en dépit de tout, et c'est tout ce qu'elle a été capable d'être, sur le plan spirituel, avait été un témoignage, que le fait d'écrire était pour moi un témoignage; le fait même de mettre de la beauté autour de moi est un témoignage, car la beauté vient de Dieu, et là où elle n'est plus, les gens ont beaucoup de mal à Le reconnaître encore.
Je voudrais réflechir sur un thème qui a été évoqué dans la lecture apostolique pascale, et qui se poursuit dans la lecture évangélique d'aujourd'hui des vigiles de Pâques. Il s'agit de l'envoi dans le monde et de la mission. C'est malheureusement ce que beaucoup d'entre nous sont enclins soit à oublier, soit à exclure tout à fait du champ de leur attention.
Après la résurrection du Christ, les apôtres se posaient toutes sortes de questions, sur ce qu'il advient du monde, le Seigneur ne va-t-il pas venir maintenant, n'est-ce pas maintenant qu'arrive le temps eschatologique du Royaume messianique, que tous, étant des Israélites, attendaient et espéraient? Le Seigneur leur répond que leur affaire n'est pas de connaître le jour et l'heure, mais qu'ils doivent prendre la force du Saint Esprit pour être des témoins de la Résurrection du Christ sur toute la terre. Aujourd'hui, nous avons entendu quelque chose de semblable, en plus bref. Le Seigneur dit qu'il envoie aussi les apôtres, comme le Père l'a envoyé lui-même dans le monde: "comme le Père m'a envoyé, je vous envoie" (Jean 20, 21).
Il s'ensuit que la mission d'envoyé, la mission de témoignage sur le Christ Ressuscité, c'est ce qu'il est indispensable de se rappeler. Dieu en donne la force à chacun de nous à travers les sacrements de l'Eglise. Mais nous avons la grande tentation de nous dire que cette force nous est donnée pour nous-mêmes, pour notre apaisement, pour que nous nous sentions bien ici et maintenant. Mais ce n'est absolument pas ça.
Après ma chirotonie épiscopale, on me demandait souvent: "Dis-nous, monseigneur, qu'est-ce que tu ressentais pendant ta chirotonie et après?" Cette question m'amuse beaucoup, et je me représente le tableau, après que le Saint-Esprit soit descendu sur les apôtres sur la colline de Sion, sous forme de langues de feu, et qu'ils soient sortis de là, une foule de journalistes leur demande: "Et qu'est-ce que vous avez ressenti?" Je ne sais pas ce qu'auraient répondu les apôtres, parce que cette force, que nous donne le Seigneur Dieu dans les sacrements, se révèle seulement dans les actes. Et seulement dans ceux, dont le Seigneur parle dans ces extraits pascaux, où nous nous révélons les témoins de la Résurrection du Christ.
Si nous ne faisons pas cela, si le sens de la vie est dans quelque chose d'autre, alors cette force ne se révèle jamais. Elle ne nous est pas donnée pour arranger notre vie. Si nous ne témoignons pas de la Résurrection du Christ, alors il s'ensuit que les sacrements "ne marchent pas". Et si nous nous trouvons ici, dans l'eglise, pour autre chose que témoigner de la Résurrection du Christ devant le monde extérieur, alors notre participation à la vie de l'Eglise est également vide. si c'est pour être paisible, pour ne pas être malade, pour que tout aille bien dans la famille, et même pour un but élevé, pour son salut personnel, c'est en vain que nous y demeurons. Le salut personnel n'est possible que lorsque nous remplissons ce que nous a ordonné le Seigneur, et il nous a ordonné d'être ses témoins. Chaque seconde, toujours et devant tous. Si nous comprenons ces textes ainsi, si nous recevons ainsi le christianisme, alors nous n'aurons aucune crainte.
La crainte vient quand nous cherchons quelque chose d'autre. L'absence de crainte n'est pas l'absence de raison, elle n'est pas semblable à la tentation du Seigneur ou à je ne sais quelles actions insensées. Non, ce n'est pas la même chose. L'absence de crainte est quelque chose d'autre, cela veut dire que les pensées et es aspirations sont orientées autrement, par exemple par la recherche en premier lieu de la réponse active à la question: "Comment puis-je être le témoin du Christ à l'endroit où je me trouve, dans l'entourage où je me trouve, dans la situation dans laquelle Dieu m'a mis?" Et c'est la question, à laquelle nous devons constamment répondre, constamment penser, qu'est-ce qui sera le mieux pour la mission du Christ sur cette terre.
Je voudrais vous souhaiter, chers pères, frères et soeurs, d'approcher le christianisme précisément de cette façon, et de le vivre de cette façon. Que les mots que nous entendons, disons et répétons aujourd'hui de nombreuses fois, "Christ est ressuscité!" ne soient pas seulement des mots, ou un tribut à la tradition, mais qu'ils soient une confession de notre coeur, qui se reflèterait sur toute notre apparence, sur tous nos actes, nos paroles, nos pensées. Absolument tous. Et alors, il n'y aura pas de crainte, alors on saura comment agir dans telle ou telle situation. Alors Dieu lui-même sera avec nous, et la force dont il parlait aux apôtres, apparaîtra dans nos actes, et en nous-mêmes. Dieu fasse que cela arrive".
Après huit heures de sommeil, je me suis levée face à une belle journée, du soleil et un vent nettement plus doux. On dit que souvent le temps change après Pâques. Eh bien cela semble vouloir être le cas. J'ai donc jardiné, puis je me suis fait un brunch sur le perron, avec des oeufs durs, de la paskha, la mienne, plus légère, moins sucrée, et un koulitch du pâtissier Didier, qui n'est pas la version traditionnelle russe de la chose, ni non plus un panetone italien, mais une tuerie française à point de départ russe.
Je regardais mon terrain qui a encore l'air d'un paillasson, les emplacements où bientôt resplendiront lupins, roses trémières, iris, oignons décoratifs, pivoines, et puis les saules et les roseaux du marécage, au loin, et par dessus le toit rouillé de l'isba d'en face, de gros nuages véloces, bondissants dans l'azur et la lumière, et je ressentais, avec mes animaux couchés autour de moi, un bonheur d'une plénitude extraordinaire. J'ai conscience de ne plus avoir d'avenir, et cela à pusieurs titres. D'abord, comme nous le rappelle partout la merveilleuse société mondialiste que nous ont bâtie deux siècles de progressisme implacable et de stupidité matérialiste arrogante, je fais partie des has been en sursis qui n'ont plus qu'une ou deux décennies devant eux, dans la mesure où on voudra bien les leur laisser. Ensuite, je suis notoirement dissidente, et notoirement orthodoxe, ce qui me place dans la catégorie des persécutés imminents. Hier, mes intellectuels évoquaient la fin du monde, et en effet, c'est bien de cela qu'il s'agit, car si quelque chose survit, ce sera la Babylone de Moloch et Mammon, où moi-même je n'aurai pas plus de place que Notre Dame de Paris, l'église du métropolite Pierre à Pereslavl Zalesski, toute la littérature classique, la tradition paysanne, et en général toutes les valeurs que je reconnais et que je défends. Si je reste dans ma maison ici, c'est parce qu'on aura oublié la vieille et qu'on la tiendra pour quantité négligeable. On peut parfaitement me réexpédier en France, si la Russie ne résiste pas à la vaccination obligatoire et surtout à la puce électronique qui va l'accompagner, et qu'un chrétien orthodoxe ne peut accepter, car c'est la marque de la Bête, celle qui fera de nous le bétail de son immonde troupeau. A voir les mufles divers que revêt depuis deux cents ans, ou même un peu plus, son corps unique, je n'ai aucune envie de lui appartenir pour l'éternité, et même si dans la somme de textes qui constituent le testament du christianisme, il y a des choses qui vraiment m'échappent, me dépassent, ou me paraissent, comme disait le père Placide, "des indurations dans le tissu souple de l'Eglise", une chose est claire pour moi, à la façon de Dostoïevski, si on me prouvait que le Christ n'était pas la Vérité; je préfèrerais être avec le Christ qu'avec la Vérité. Car avec EUX, je ne serai jamais.
Donc, n'ayant plus tellement d'avenir, je n'ai plus tellement de soucis non plus. Mes genoux, le fric, tout ça, le virus, bof... quelle importance? La seule chose qui me tracasse, c'est ce qu'il adviendra de mes animaux, mes chers amis, casez-les si vous le pouvez, si vous ne le pouvez pas, ne les livrez pas à une existence de misère, faites-moi la charité de les euthanasier chez un bon vétérinaire. Pour ce qui est de mes affaires, tableaux et manuscrits, que se les partagent ceux qui m'aiment. Mais eux-mêmes n'auront certainement pas le loisir d'en faire grand chose, eux-mêmes feront partie des proscrits.
Bon, évidemment, je ne suis pas pressée à la minute, mais disons qu'il faut tout envisager. Et envisageant tout, j'éprouvais tout à coup sur mon perron un bonheur et une sérénité immenses. Je comprenais la valeur de chacun de ces instants de joie d'exister qu'il me restait à vivre, une joie d'exister sensuelle, celle de ces oeufs qui m'ont tant manqué pendant le carême, du koulitch du pâtissier Didier, de la brise printanière, du ciel et de ses nuages, mais tout cela n'était pas en contradiction avec une plénitude plus vaste, c'en étaient juste les prémices acceptés avec reconnaissance, et je sentais sur moi la protection du Seigneur, au delà de tous mes doutes, de toutes mes petites faiblesses, et je m'en remettais à lui. Je me sentais libérée, profondément libérée, et calme.
Car si le virus me prend, dans ce cas de figure, cela m'évitera peut-être des choses qui me feraient regretter de ne pas y avoir succombé; et si j'y survis, cela sera peut-être pour périr avec les orthodoxes, ici, comme la grande duchesse Elizabeth, j'espère alors être à la hauteur, avec l'aide de Dieu, et le nez dessus, il se peut que je sois malade de trouille, mais j'aurai au moins la consolation de ne pas finir ma vie à quatre pattes dans un EPHAD russe ou français, achevée au rivotryl, une couche sale au cul, entre deux maritornes sous-payées. Mourir en martyr a certainement plus de gueule et plus de sens.
Alors profite de la première brise printanière au soleil, avant que ne bourdonnent les drones dans le beau ciel de Pereslavl, avant qu'il ne t'advienne Dieu sait quoi dans la tourmente, me disais-je. Dieu, tu l'as choisi et gardé, il ne te lâchera pas.
"N'ayez pas peur, j'ai vaincu le monde".
Je mets en annexe l'homélie de monseigneur Théoctyste au monastère saint Daniel, car en la lisant, j'ai compris que toute ma vie, en dépit de tout, et c'est tout ce qu'elle a été capable d'être, sur le plan spirituel, avait été un témoignage, que le fait d'écrire était pour moi un témoignage; le fait même de mettre de la beauté autour de moi est un témoignage, car la beauté vient de Dieu, et là où elle n'est plus, les gens ont beaucoup de mal à Le reconnaître encore.
Je voudrais réflechir sur un thème qui a été évoqué dans la lecture apostolique pascale, et qui se poursuit dans la lecture évangélique d'aujourd'hui des vigiles de Pâques. Il s'agit de l'envoi dans le monde et de la mission. C'est malheureusement ce que beaucoup d'entre nous sont enclins soit à oublier, soit à exclure tout à fait du champ de leur attention.
Après la résurrection du Christ, les apôtres se posaient toutes sortes de questions, sur ce qu'il advient du monde, le Seigneur ne va-t-il pas venir maintenant, n'est-ce pas maintenant qu'arrive le temps eschatologique du Royaume messianique, que tous, étant des Israélites, attendaient et espéraient? Le Seigneur leur répond que leur affaire n'est pas de connaître le jour et l'heure, mais qu'ils doivent prendre la force du Saint Esprit pour être des témoins de la Résurrection du Christ sur toute la terre. Aujourd'hui, nous avons entendu quelque chose de semblable, en plus bref. Le Seigneur dit qu'il envoie aussi les apôtres, comme le Père l'a envoyé lui-même dans le monde: "comme le Père m'a envoyé, je vous envoie" (Jean 20, 21).
Il s'ensuit que la mission d'envoyé, la mission de témoignage sur le Christ Ressuscité, c'est ce qu'il est indispensable de se rappeler. Dieu en donne la force à chacun de nous à travers les sacrements de l'Eglise. Mais nous avons la grande tentation de nous dire que cette force nous est donnée pour nous-mêmes, pour notre apaisement, pour que nous nous sentions bien ici et maintenant. Mais ce n'est absolument pas ça.
Après ma chirotonie épiscopale, on me demandait souvent: "Dis-nous, monseigneur, qu'est-ce que tu ressentais pendant ta chirotonie et après?" Cette question m'amuse beaucoup, et je me représente le tableau, après que le Saint-Esprit soit descendu sur les apôtres sur la colline de Sion, sous forme de langues de feu, et qu'ils soient sortis de là, une foule de journalistes leur demande: "Et qu'est-ce que vous avez ressenti?" Je ne sais pas ce qu'auraient répondu les apôtres, parce que cette force, que nous donne le Seigneur Dieu dans les sacrements, se révèle seulement dans les actes. Et seulement dans ceux, dont le Seigneur parle dans ces extraits pascaux, où nous nous révélons les témoins de la Résurrection du Christ.
Si nous ne faisons pas cela, si le sens de la vie est dans quelque chose d'autre, alors cette force ne se révèle jamais. Elle ne nous est pas donnée pour arranger notre vie. Si nous ne témoignons pas de la Résurrection du Christ, alors il s'ensuit que les sacrements "ne marchent pas". Et si nous nous trouvons ici, dans l'eglise, pour autre chose que témoigner de la Résurrection du Christ devant le monde extérieur, alors notre participation à la vie de l'Eglise est également vide. si c'est pour être paisible, pour ne pas être malade, pour que tout aille bien dans la famille, et même pour un but élevé, pour son salut personnel, c'est en vain que nous y demeurons. Le salut personnel n'est possible que lorsque nous remplissons ce que nous a ordonné le Seigneur, et il nous a ordonné d'être ses témoins. Chaque seconde, toujours et devant tous. Si nous comprenons ces textes ainsi, si nous recevons ainsi le christianisme, alors nous n'aurons aucune crainte.
La crainte vient quand nous cherchons quelque chose d'autre. L'absence de crainte n'est pas l'absence de raison, elle n'est pas semblable à la tentation du Seigneur ou à je ne sais quelles actions insensées. Non, ce n'est pas la même chose. L'absence de crainte est quelque chose d'autre, cela veut dire que les pensées et es aspirations sont orientées autrement, par exemple par la recherche en premier lieu de la réponse active à la question: "Comment puis-je être le témoin du Christ à l'endroit où je me trouve, dans l'entourage où je me trouve, dans la situation dans laquelle Dieu m'a mis?" Et c'est la question, à laquelle nous devons constamment répondre, constamment penser, qu'est-ce qui sera le mieux pour la mission du Christ sur cette terre.
Je voudrais vous souhaiter, chers pères, frères et soeurs, d'approcher le christianisme précisément de cette façon, et de le vivre de cette façon. Que les mots que nous entendons, disons et répétons aujourd'hui de nombreuses fois, "Christ est ressuscité!" ne soient pas seulement des mots, ou un tribut à la tradition, mais qu'ils soient une confession de notre coeur, qui se reflèterait sur toute notre apparence, sur tous nos actes, nos paroles, nos pensées. Absolument tous. Et alors, il n'y aura pas de crainte, alors on saura comment agir dans telle ou telle situation. Alors Dieu lui-même sera avec nous, et la force dont il parlait aux apôtres, apparaîtra dans nos actes, et en nous-mêmes. Dieu fasse que cela arrive".