Après plusieurs jours de pluie, il a fait si bon aujourd'hui que je suis allée me baigner avec Vera, à la rivière. Quel bonheur... Je pensais que cela ne m'arriverait plus d'ici l'année prochaine. On dit qu'après la saint Elie, le 2 août, on ne peut plus se baigner. Eh bien, j'ai réussi à voler encore un bain de jouvence parmi les canards. Il y avait, dans le ciel bleu, d'énormes cumulus blancs, renfrognés et terribles. Plus de fleurs, à part quelques tanaisies, et déjà quelques feuilles jaunes. Au retour, je me suis gorgée de ce soleil retrouvé, de la lumière...
Je devais voir une jeune femme Russe qui voulait me rencontrer, elle est arrivée avec ses deux fils, une douce jeune femme très croyante, en robe longue, qui se prépare à quitter la France avec son mari géorgien. "J'ai tellement aimé la France, me dit-elle, ma mère enseignait le français, nous étions imprégnées de culture française, et tout est là bas encore si beau, mais il s'y passe vraiment des choses qui nous inquiètent. Nous subissons une grande pression sociale. Pendant le Covid, c'était absolument insupportable, et puis si vous voyiez ce qu'on propose comme littérature, maintenant, aux enfants... Mes amis français ne comprennent pas que je parle russe aux garçons, que je les inscrive dans un camp de sports patriotiques, ils me disent qu'ils sont français."
Son aîné, un bel enfant aux yeux pensifs, visiblement requinqué par cette dose d'héroïsme viril, était très content de son stage de sports patriotiques, genre ce qu'organisent les cosaques de Pereslavl, et arborait un tee-shirt avec un blason et un glaive. Cela le motive certainement davantage que les séances de lecture avec des drags queens.
Elle m'a parlé d'une amie commune très catholique, pourvue de nombreux enfants et petits-enfants, qui, dans la tourmente, se cramponne vaillamment à son chapelet. En ce qui me concerne, étant tombée dans la marmite orthodoxe pratiquement adolescente, j'ai l'impression de l'avoir toujours été, et n'ai pu opérer la jonction spirituelle avec notre Moyen âge qu'à travers l'Orthodoxie.
Cette jeune femme considère l'incendie de Notre-Dame comme un signe terrible, et c'est bien ainsi que je l'ai ressenti moi-même. L'ouverture des Jeux Olympiques vient compléter le message.
Elle m'a parlé de la jolie vieille datcha de ses parents; c'est une maison mitoyenne, et le voisin va saccager l'ensemble sans que personne n'y puisse rien. A côté de celle d'une parente, un pignouf a construit une maison énorme qui surplombe tout son jardin, elle n'a plus aucune vie personnelle. Et partout le bruit, les engins, les motos... "Le diable est partout, "lui dit son père spirituel.
Sur ces entrefaites, j'ai lu un post intéressant d'une journaliste russe qui s'est retrouvée en France, à la suite de diverses péripéties, et qui y est plus ou moins coincée par sa vie personnelle:
Après la conférence de Pavel Chtcheline sur la crise de l'humanité contemporaine, quelques choses importantes me sont apparues sous un jour nouveau. Par exemple, je me suis toujours demandé pourquoi et dans quel but a eu lieu le marchandage d'Abraham avec Dieu pour le destin de Sodome.
Si vous vous souvenez, Abraham demanda d'épargner cette ville, pourvu qu'on trouvât parmi ses habitants 50 justes. Le Seigneur promit en ce cas d'épargner Sodome. Abraham baissa peu à peu le chiffre des justes et le Seigneur s'arrêta à dix.
Dans l'histoire de la Terre, il y a beaucoup de civilisations disparues, et chez de nombreux peuples, des évocations de grand déluge, de grande inondation, de gens impurs-repésentants de peuples entiers noyés.
Il n'est pas possible qu'il n'y eût là pas du tout de justes, mais le fait est qu'il y en avait si peu, que la masse critique de leur vertu ne suffisait pas pour réformer ces peuples, condamnés à le disparition.
Aujourd'hui, l'effacement de la conscience religieuse, et par la même occasion historique, s'effectue à une telle cadence que bientôt, cette conscience correcte, c'est-à-dire juste, ne suffira plus à sauver mes habitants de Sodome.
Je dis cela à propos de l'Occident, de l'Europe de l'ouest et des USA. Il y a beaucoup ici de gens bien, mais ils n'ont plus déjà aucune influence sur la tendance générale, ils sont trop peu par rapport aux libéraux et ils manquent par trop d'audace (je parle de l'audace dans le bon sens biblique du terme).
Mon amie Liouba me disait un jour que Dieu aimait les audacieux. En réalité, ce post exprime bien des choses. Il y a effectivement encore beaucoup de braves gens en Occident, et ils sont dépassés par ce qui se produit, et qui n'entre pas dans leurs catégories mentales. De plus, on les a dévitalisés spirituellement et culturellement. L'audace est le fruit de l'élan que donne la foi, le sentiment d'être porteur d'une lumière qui doit brûler.