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lundi 6 mai 2024

Humeur pascale


 
esquisse

Il fait un froid terrible, les feuilles des fougères, qui me ravissaient comme chaque année en déployant leur manteau translucide sous leurs petites têtes courbées, ont gelé. Quelle tristesse... la belle saison est si brève, et voilà qu'elle s'annonce pourrie. J'ai pitié  des plantes et des bêtes autant que de moi-même, dont les printemps sont déjà comptés.

Pereslavl, outre "l'architecture" de ses nouvelles maisons qui ne ressemble à rien, se distingue par ses rues défoncées à un point indécent, le délabrement de certains quartiers, des terrains vagues qui suivent des destructions incompréhensibles et qui s'installent pour des années, avec déversements subreptices d'ordures, tas de ciments, poutres abandonnées, ferrailles... Cependant les "administrations" successives et leur architecte-conseil fantôme font mumuse avec l'aménagement jamais terminé de la plage municipale qui ne s'imposait pas; l'achat de faux topiaires en plastique, car le plastique inaltérable, il n'y a rien de mieux, on les a répartis dans toute la ville, au milieu du désastre, c'est bien festif. Et dernièrement, l'asphaltage du sommet des buttes qui constituent l'ancien rempart, dernier lieu de poésie et de charme naturel de cette malheureuse cité. Pour que les sacro-saints touristes puissent marcher là haut avec des talons aiguilles, peut-être? Quel genre de crétin a pu concevoir un tel projet? En revanche, les rues au dessous des remparts, où circulent les voitures et les autobus de ces mêmes touristes sont toujours aussi défoncées. Pour elles, il n'y a pas d'asphalte prévu. On fait un petit morceau de temps en temps, pour calmer la populace et c'est marre.

Mon humeur n'est guère pascale... Mais si, mais si, j'essaie de ne plus remarquer tout cela, ou de passer par dessus, seulement je le mentionne quand même pour ne pas me faire accuser de tout trouver ici idéal.

Dany m'avait parlé d'un ado qui avait voulu "changer de genre", dans l'Oural, et que les autorités du coin ont soustrait à l'autorité de sa mère, qui bien sûr, s'opposait aux mutilations catastrophiques et irréversibles impliquées par une telle opération . "Comment? M'étais-je écriée. Mais le changement de genre par voie chirurgicale a été interdit en Russie!" Et en effet. Piotr Tolstoï répond à un journaliste qui lui reproche d'avoir voté cela en temps de guerre, comme s'il n'y avait pas plus urgent, que précisément, il fallait le faire maintenant, avant que les partisans de ce type de mesures ne prennent de l'importance, et que c'était pour garder une société normale à leurs descendants que les Russes faisaient la guerre à ceux qui cherchaient à imposer leur étrange style de vie au monde entier. Alors que penser? Qu'au niveau local, un chaud partisan de l'Occident et ses valeurs soutient sournoisement ce genre de choses? Si c'est le cas, il faudrait mettre au pli ce saboteur et ses pareils. Car en effet, c'est contre tout cela que se battent et meurent les soldats russes. Il s'avère, d'après ce que j'entends dire, que ces soldats manquent de beaucoup de choses et que c'est la population qui finance directement l'armée, c'est-à-dire les innombrables groupes de soutien, qui récoltent des fonds, offrent des drones, du matériel, des uniformes, de vieilles voitures ou les réparations d'icelles, des médicaments, des bains de vapeur intinérants, ce n'est pas "la guerre de Poutine", c'est la guerre des Russes, et peut-être que je ne me trompais pas en pressentant que la Russie était un énorme Donbass potentiel. On verra bien. Si c'est le cas, ce n'est pas gagné pour nos ennemis, et si nous mourons tous, ce sera, dans le contexte, ce que nous aurons encore de mieux à faire. Car la société de la caste n'est pas faite pour les hommes ni même pour le bétail.

pour les russophones


Je traduis ici le propos d'un soldat, Dmitri Joukov, qui me frappe par sa profonde lucidité et son courage: "Je me bats ici pour des raisons simples et banales. Des raisons personnelles. D'abord, je n'ai rien à faire à Kiev, où je serais pendu la tête en bas sur le Maïdan pour des activités que j'ai menées avant celui-ci. J'ai aidé le Berkut, organisé des processions religieuses pour l'unité avec le monde russe.. Et ensuite... je me bats pour la sainte Russie et la foi orthodoxe. si nous gagnons, il y aura davantage de Christ sur la terre, et si nous perdons, il y en aura moins".  http://rys-strategia.ru/news/2024-05-01-18528   

En voilà un, au moins, qui ne se trompe ni de combat ni d'ennemi.

"Que pouvons-nous faire?" me demandait mon peintre d'hier. Rester solidaires et déterminés. Prier. Crier la vérité. Si l'Ukraine est le laboratoire du monde entier, le Donbass est celui de notre résistance, envers et contre tout, y compris nos propres traîtres et affairistes.

A ce point de mes réflexions, je tombe sur celles de Slobodan Despot, ô combien judicieuses:

"Dans un système aussi bien tenu en main, il ne peut rien se passer et il ne se passe, de fait, rien. L’opposition sincère, en particulier depuis la dystopie covidienne, transmigre vers des formes d’organisation «citoyennes» qui s’illustrent par leur amateurisme et leur naïveté. On pétitionne, on manifeste, on concertationne, on lettrouvertise, on s’éparpille très vite en clans et en factions et l’on n’aboutit, concrètement, qu’à fournir aux agences du pouvoir des listes de suspects. En un mot, on fait comme si l’on était encore en démocratie en s’obstinant à ignorer les preuves criantes de son abolition fournies par le pouvoir lui-même. Le déploiement de techniques de subversion dignes de la guerre secrète — comme l’infiltration cognitive développée par le psychologue Cass Sunstein sous l’ère Obama — contre ces formes de contestation légales et légitimes illustre la transposition de méthodes d’influence psychologique venues du monde militaire dans le champ civique. Face à un tel appareil de contrôle, soutenu par une machinerie de propagande médiatique unanime, la contestation démocratique loyale n’a aucune chance. Sa tragédie est qu’elle ne l’a toujours pas compris. Autant réclamer le référendum d’initiative citoyenne au roi Hérode. Les Européens de l’Ouest ont une sorte de circonstance atténuante: ils sont nés au milieu d’une clairière historique. Rien dans leur éducation ni dans leur univers culturel ne les avait préparés à ça. Ils se sont lancés dans une lutte inégale sur un terrain miné sans même dresser un portrait-robot de leur adversaire, de ses moyens et de ses motivations. Ils ont cru le plus souvent qu’il ne s’agissait que de lever un malentendu alors que la lutte est ontologique: elle se terminera par l’anéantissement d’un camp ou de l’autre. Beaucoup, particulièrement en Suisse, essaient de maintenir coûte que coûte leur foi dans la bienveillance foncière des «autorités». Au stade actuel, leur confiance s’apparente à de l’infantilisme".

https://antipresse.net/aparchive/440244/Antipresse-440.pdf

Je m'en vais faire une icône, quand on n'a plus d'issue, il faut s'évader vers le haut. Il est temps d'en prendre l'habitude.

2 commentaires:

  1. XB ! " quand on n'a plus d'issue, il faut s'évader vers le haut. Il est temps d'en prendre l'habitude" Absolument ! et prier pour les siens et ensemble aussi les uns pour les autres !

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    1. BB! Oui, Maxime, et c'est ce que je fais! Et nous rassembler tous, à proximité ou plus loin, tant qu'internet est disponible.

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