Je voulais aller
à la liturgie du petit matin, car j’avais été réveillée à cinq heures et demie,
par des aboiements furieux de Rita, et j’avais vu dans mon jardin une joyeuse
cavalcade de patous des Pyrénées bondissants, soit Alissa, pour une fois libre,
et ses deux chiots Nounours et Charlie, qui m’ont fait des fêtes délirantes,
tout en cherchant à communiquer avec le petit frère Alba, qui est enfermé sur
le terrain des voisins de derrière. Mais je ne sais pas pourquoi, je me suis
mis dans l’idée que c’était à 7h 40 au lieu de 6h 40 et je suis arrivée au
moment de la communion. Le fils du père ukrainien Vassili est venu me dire que
son papa allait me donner la communion quand même, mais je ne m’étais pas
préparée.
Dans ma
confusion, je suis passée à la cathédrale pour la liturgie suivante, et là, le
père Vassili s’est jeté sur moi, m’a couverte de son épitrachlion et m’a absoute
sans que j’ai rien confessé ni rien demandé, comme ça, d’autorité :
« Il vaut mieux manquer une liturgie que d’y être toujours fourré en étant
plein d’orgueil ».Cela m’a fait un
effet extraordinaire, comme si Dieu s’était Lui-même porté à ma rencontre, et
de façon tout à fait imméritée, mais ce genre de choses arrive toujours de
façon imméritée, et inattendue.
J’ai toujours été
la fantaisiste de service, je me souviens d’une prof d’anglais qui, sur la foi
des rumeurs courant à mon sujet, m’avait annoncé dès la rentrée qu’elle
n’aimait pas les fantaisistes, ce qui m’avait paru de mauvaise augure. Au sein
de l’orthodoxie, c’est pareil, ce que la mère Hypandia appelle ma spiritualité
hors des sentiers battus, sans doute ! Et là, tout à coup, au milieu de la
cathédrale, j’avais l’impression d’être une sorte de jongleur Notre Dame
adoubé, j’en avais la larme à l’oeil. Je voyais ma vie sous une autre
perspective, et ma vieillesse, et même la mort, tout prenait la lumière.
Ce matin, je suis allée d'un coup de vélo à la rivière me baigner, car hier il a fait très chaud, et cela partait pour être le cas aujourd'hui. Сomme me l'a dit la baigneuse de l'autre jour, l'eau "commençait déjà à fleurir", c'est-à-dire qu'elle devenait trouble, avec je ne sais quoi en suspension, de la vase peut-être. Mais le lac avait une couleur presque méditerranéenne, et le ciel était complètement immaculé. Sur le chemin, j'ai vu que la maison dont j'avais admiré la restauration en cours était devenue positivement magnifique. On était en train de lui fixer des encadrements de fenêtres anciens de récupération, ou peut-être neufs, mais traditionnels, et son fronton s'ornait de sculptures dans le même esprit, deux oiseaux sirènes face à face. J'ai vu le propriétaire d'une autre maison bien réparée que j'avais déjà photographiée. Je l'ai félicité: si tout le monde faisait comme ces deux-là, au lieu de tout plastifier et de construire des châteaux américains, Pereslavl serait un vrai conte de fées.
Je me demande ce que les Russes diraient si, par exemple, allant visiter la France, ils voyaient que nous déguisons nos vieilles maisons de pierres en isbas avec du faux bois en plastique.
Chaque fois que je vais à la rivière, je m'émerveille de rencontrer une population calme et paisible, qui échange des saluts: petites vieilles, mamans avec des poussettes, pêcheurs nonchalants qui passent avec des cannes à pêche et des canettes de bière.
Ania et son fils m'accompagneront à Rostov pour la présentation de Yarilo au musée d'art populaire. Je voulais les inviter au restaurant d'en face, auquel je ne suis pas retournée depuis le départ de Nil, et qui est bon et pas cher. Mais Ania m'a répondu: "Je ne saurais pas comment m'y comporter, car je ne suis jamais allée au restaurant de ma vie."
Moi, je ne me souviens même pas de la première fois où j'y suis allée, tellement c'est vieux. Je devais avoir trois ans sur la photo qui me représentait dans la cour de la Belle Ecluse à Bollène avec un chiot spitz dans les bras et quatre ou cinq quand j'allais avec papy et mamie dans un restau à Tournon, sous la falaise avec un bas relief, je le vois encore, la Chaumière, peut-être? Pour fêter la réussite de mon bac, maman m'avait invitée dans un restaurant à Suze-la-Rousse, tenu par deux lesbiennes et très bien décoré, on y mangeait de la salade de tomates à la crème et à l'estragon et du canard aux pêches. Pedro, mon beau-père, m'avait, lui, offert une bouffe chez Pic à Valence, il faut dire que selon l'expression du pâtissier Didier, j'ai toujours été de la gueule, pour un Français, il est difficile d'imaginer qu'on puisse atteindre la cinquantaine sans jamais s'être tapé la cloche dans un bon restau...
Il vient de m'arriver un truc ubuesque avec la Sberbank. Tout d'un coup, on m'a bloqué le payement de l'artisan qui fait ma terrasse et ce n'était pas une somme astronomique. J'ai eu un robot au bout du fil qui me demandait de confirmer l'opération. Je confirme, le robot me demande de le noter, je raccroche parce que je n'en ai rien à foutre de la notation des robots. Un peu plus tard, une vraie bonne femme m'appelle, mais la différence avec le robot n'était pas notable. Il s'agit de vérifications au hasard, indépendamment de la somme. Et à qui je l'envoyais? J'étais tellement fatiguée, que j'ai un peu bégayé, et ensuite, elle me déclare que le 24, j'ai fait un achat de 6000 roubles, pouvais-je lui dire lequel? Impossible de m'en souvenir. Je cherche encore. Oui, je l'ai fait, ça je m'en souviens, ce que c'était, je ne sais plus, parce qu'en ce moment, j'achète du matériel, et puis il fait chaud et je suis crevée, prise d'assaut par des tas de gens qui me sollicitent, je n'ai pas une minute de paix. Moyennant quoi, elle m'a tout bloqué et cela va m'obliger à aller à la banque tout renouveler. Comme quoi en Russie comme en France, les banques sont des organismes épouvantables qui considèrent que notre argent est le leur.
Ce doit être une campagne en cours, car l'électricien m'a dit qu'on lui avait fait le même coup.
La maison de rêve des bords de la rivière Troubej. L'horrible palissade ne va sans doute pas rester en place.....
Un piège pour l'Occident, ou pourquoi les russes sont craints et incompris.
L'humoriste américain Dan Soder, dans sa miniature de stand-up, répond à la question suivante : "Que faites-vous si, par exemple, à New York, vous vous faites harceler par une foule ?
- Répondez juste dans un anglais approximatif avec un accent russe ! Si je pensais que quelqu'un pourrait me frapper et me voler, je prendrais l'accent russe. Fonctionne à merveille. Je rentre chez moi, deux dangereux Noirs m'abordent : "Hé, petit, tu es dans le mauvais quartier ?" "Quoi, c'est un mauvais quartier ?" - Je demande avec un accent russe...
J'ai entendu à peu près la même histoire de la part d'une de mes connaissances qui s'est promenée dans le "mauvais" quartier de Paris le soir et a simplement dit aux enfants excités qu'il était russe. C'était la fin de l'histoire, avant même qu'elle ne commence.
En général, il y a beaucoup d'histoires similaires, beaucoup sont sur toutes les lèvres et il est inutile de les citer ici. D'autant plus qu'ils ne reflètent qu'un seul aspect de la question : la peur de ceux dont on ne sait pas à quoi s'attendre, qui est en fait la conséquence de quelque chose de plus profond, incompréhensible et profondément irrationnel.
J'ai essayé une fois de comprendre pourquoi, en me concentrant sur la langue russe, qui est paradoxalement diverse et, surtout, très controversée pour les étrangers. Ce n'est pas à moi d'en juger, mais au lecteur ; je répéterai ici la conclusion :
"Dans l'ensemble, il semble qu'il n'y ait pas de fumée sans feu. Il s'avère que la paradoxalité est une propriété inhérente à la mentalité russe, qui est formée par l'imprévisible langue russe.
Jugez-en par vous-même : Nous sommes étonnamment travailleurs et étonnamment paresseux , nous sommes avares et gaspilleurs , nous sommes extrêmement sans prétention au point de pouvoir survivre dans n'importe quelles conditions extrêmes et d'adorer simultanément le confort , nous sommes courageux jusqu'à l'héroïsme et souvent extrêmement indécis. Nous sommes à la fois individualistes et collectivistes, cruels et miséricordieux, faibles et incroyablement puissants, conservateurs et révolutionnaires, inventifs et stéréotypés, géniaux et idiots, européens et asiatiques.
Et il n'est pas nécessaire de dire que les propriétés décrites sont inhérentes à toutes les nations et à tous les groupes ethniques dans une plus ou moins grande mesure, et que les Russes ne sont pas meilleurs ou pires que les autres. En fait, nous ne parlons pas de qui est meilleur et qui est pire. Nous sommes simplement différents. Nous vivons dans un monde parallèle à celui des autres et personne n'a jamais pu nous comprendre, car nous sommes totalement imprévisibles !
Par ailleurs, pour en venir aux événements actuels, permettez-moi de vous rappeler une célèbre phrase attribuée au célèbre "chancelier de fer" Otto von Bismarck, qui connaissait bien la mentalité russe :
"Ne jamais entrer en guerre avec les Russes. À chacune de vos ruses militaires, ils répondront par une stupidité imprévisible. Ne s'inscrit-il pas parfaitement dans le cadre de toutes ces histoires sans fin sur ceux dont on ne sait pas à quoi s'attendre ?
La question est maintenant de savoir pourquoi les sanctions sans précédent imposées à la Russie ont l'effet inverse. On aurait dû, comme on pouvait s'y attendre, provoquer un énorme émoi à l'Ouest qui, en fait, a vu dans cette opération spéciale une excuse en béton pour finalement perdre ses masques sous le prétexte le plus plausible et imbattable a aider ceux qui sont envahis par la Russie agressive.
La réponse, à mon avis, réside dans le fait que non seulement les objectifs, mais aussi les moyens de les réaliser sont au-delà des limites de la perception rationnelle inhérente à la plupart des observateurs et des participants au déroulement de l'échiquier mondial, où l'Ukraine, bien qu'importante, n'est qu'une partie d'une action à plusieurs niveaux qui s'étend bien au-delà de l'horizon des événements.
Jugez-en par vous-même : une opération spéciale purement locale a provoqué instantanément des bouleversements tectoniques, qui ont affecté presque toutes les fondations sur lesquelles le célèbre "ordre mondial", bien connu des milliards de personnes, était solidement assis. La confrontation avec l'Occident s'est intensifiée à un degré auquel personne ne s'attendait et a été comparable (bien que provisoirement) à la crise des missiles de Cuba.
Il est évident que personne ne veut et ne franchira une certaine limite. C'est-à-dire qu'il y a clairement un risque calculé avec précision, sur le point de bluffer, en attirant dans son entonnoir de plus en plus de forces et de ressources, surtout de la part de l'Occident, qui, comme il lui semble, augmente la pression sous laquelle la Russie est sur le point de rompre et de demander grâce.
Et que voit-on de notre côté des barricades ? Et ce que nous voyons, c'est un broyage sans hâte et systématique de tout ce que l'Occident jette hystériquement sur le champ de bataille, épuisant ses réserves et comptant sur une percée qui ne se produit jamais, tout simplement parce qu'elle ne peut pas se produire, puisqu'elle n'était pas prévue initialement dans les plans des initiateurs.
J'insiste : en ce moment, en Ukraine, la dénazification et la démilitarisation totales de toute l'Ukraine, et aussi de la partie la plus agressive de l'Occident, ont lieu consciemment, avec peu d'efforts et de moyens, sans forcer les événements sous forme de percées rapides. Cela facilite énormément le futur travail de remise en ordre de l'État défaillant, nettoyé autant que possible des armes et des néonazis les plus enragés, lorsque toute cette "bonté" se consumera simplement dans les flammes des hostilités dans le sud-est.
C'est pourquoi personne ne touche aux soi-disant "centres de décision", que ce soit à Kiev ou en dehors de Kiev et de l'Ukraine. Plus le régime durera, plus il brûlera d'armes et de partisans, plus le sol ukrainien sera propre.
Alors que le NWO s'éternise, il est de plus en plus probable que l'Occident et sa partie la plus hystérique, par exemple la Pologne, agissent par réflexe. À un moment donné, se rendant compte de la futilité des efforts déployés pour attirer la Russie dans sa conquête, la Pologne pourrait finalement décider de lancer ses unités en Ukraine occidentale, où elles brûleraient rapidement sans laisser de trace. Et aucun article 5 de l'OTAN ne sera impliqué par définition, ce qui montrera définitivement au monde le coût et la bêtise de cette alliance à l'arsenal déjà dévasté.
Il est clair que, dans une certaine mesure, ce scénario va directement et indirectement dans le sens des objectifs des Anglo-Saxons, qui se sont également fixé pour objectif d'affaiblir autant que possible l'Union européenne, jusqu'à rendre souhaitable son effondrement. De l'autre côté de l'océan, ils ont même commencé à comprendre qu'il était temps de se calmer et de commencer à assouplir les sanctions. C'est ainsi, mais je pense qu'ils ne savent pas encore que le train est parti, et que la configuration du monde futur se dessine maintenant, dans laquelle ils n'obtiendront pas grand-chose dans le naufrage de l'Europe, et où ils seront eux-mêmes irréversiblement poussés sur le côté de la civilisation avec toutes leurs presses à imprimer et leur PIB virtuel.
Parallèlement, l'essence parasitaire de l'Occident collectif, qui sert à dépouiller les autochtones et à construire son bien-être en se basant non pas sur ses propres ressources mais sur le siphonage du reste du monde, devient de plus en plus évidente.
Les bulles virtuelles se dégonflent, les entreprises d'importance systémique font faillite, l'inflation s'accélère et dévalorise les revenus, le papier sans valeur abandonne des régions entières qui passent aux règlements mutuels en monnaies nationales, les grèves et les émeutes secouent les villes, les structures de pouvoir occidentales sont incapables de prendre une seule décision anticrise adéquate.
Et tout cela sur fond de répétition calme, monotone, hypnotique et quasi quotidienne, aidant à intérioriser l'inévitable : "Les objectifs de l'opération spéciale seront atteints". C'est juste que personne ne va rendre compte à l'Occident des véritables objectifs.
Ou y avait-il une attente calculée qu'ils ne seraient pas d'accord ? Ou était-ce un calcul calculé, aussi, qu'ils refuseraient catégoriquement d'accepter et tomberaient alors dans un piège qu'ils claqueraient eux-mêmes de peur.
Dans la foulée, je propose également le briefing de Slobodan, de plus en plus inspiré par la situation ubuesque de l'occident. Je trouve ces deux matériaux très complémentaires:
Je ne partage pas entièrement son avis sur le climat, car même si on nous manipule, je susi persuadée que l'activité humaine irresponsable ne réussit pas du tout à la Vie, et que le climat, qui en est un des aspects, en souffre comme tout le reste. Le problème est que les pervers au pouvoir se servent de l'écologie officielle pour continuer à polluer tout en nous empoisonnant la vie.
En revanche, que ces mafieux et ces intrigants, ces idéologues tarés, basculent tous ensemble dans une folie complète devant les yeux ébahis du reste du monde, ça, j'en suis sûre. Et avec eux une partie de la population qu'ils administrent, formatée et égarée depuis des décénnies par les abrutis, les médiocres enragés et les délirants que je voyais pulluler dans les facs des années 70. A force de sélectionner dans le personnel dirigeant non seulement politique, mais culturel, toujours les mêmes sectaires des idéologies les plus aberrantes, ces gens ne rencontrent plus aucune contradiction, aucun frein, et ceux qu'ils inondent de leur propagande, plus aucun point de comparaison.
La Russie est sans doute la dernière arche de notre culture et de notre spiritualité, l'occident, lui, est devenu la nef des fous. Il s'agit de déterminer si on est du côté de la nef des fous ou de la Nave qui va. Encore que dans le film de Fellini, ce soit la même chose.
Nouvelle visite de la chaîne orthodoxe Spas, beaucoup plus brève que la dernière fois. Presque tout s'est déroulé sur ma nouvelle terrasse, au frais. J'ai chanté à l'intérieur. La jeune femme qui m'interviewait, Olessia, très jolie et très touchante, m'a embrassée en me disant que j'étais le trésor de Pereslavl!
J'avais fait fièvreusement le ménage, juste avant, à cause des affreux chats, et nous avons eu la visite de Nounours. Profondément pénétrée de l'idée que le prendre serait de la folie, je suis perturbée par son attitude amicale, il est net que je lui plais beaucoup, que je suis tout à fait son genre de patronne.
Ania est de nature hypersensible et moi aussi, c'est ce qui nous rapproche. Nous avons discuté hier sur la terrasse, en buvant le thé. Puis je suis allée chez Anna Ossipova, qui fait de très jolies choses dans l'esprit de l'art populaire, dont elle est imprégnée, et aussi des icônes. Elle vit dans un bel endroit, mais toutes les maisons que j'ai vues sur le chemin sont affreuses. Son père et sa mère, élevés à la soviétique, ne voient visiblement pas le problème, et elle me l'a confirmé. Ils lui reprochent d'être trop axée là dessus, c'est le progrès, les vieilles maisons sont incommodes! "Pas de chance pour eux, lui dis-je, avec moi, en voilà une autre comme vous dans leur entourage!"
Ils m'ont reçue royalement, dans une maison hyper propre, je n'ai jamais vu ici d'endroit aussi impeccable, je pense que la maman d'Ania, à ma place, aurait depuis longtemps envoyé mes six parasites de chats se faire pendre ailleurs.
La table était si jolie que j'ai fait une photo. Ania avait confectionné une tarte à la canneberge, excellente et superbe, avec des bords très hauts, elle pensait que c'était le genre quiche, je lui ai expliqué que non, la quiche ce n'est pas ça, de même que le vin de pomme de son père, ce n'est pas du cidre. Mais il était heureux d'avoir quelqu'un avec qui le boire et nous l'avons bu gaiment.
Son père travaille encore, il est dans tout ce qui touche au cosmos; et ils ont voyagé et séjourné en occident. Il m'a parlé de son père, garde rouge, qui, pendant la seconde guerre mondiale, avait été fait prisonnier et qu'avaient hébérgé des Russes blancs en Allemagne. Quoique d'opinions radicalement opposées, ils l'avaient reçu avec tout leur coeur, comme un compatriote, l'avaient habillé de pied en cap et lui avaient offert deux valises de cadeaux, tout cela lui a été confisqué à son retour en Russie. "Il n'a été ni fusillé, ni envoyé au goulag, tout ça c'est des histoires"! Mais il a été quand même interrogé et mis à l'écart dans un camp spécial pendant deux ans, et d'avoir été prisonnier l'a poursuivi pendant une bonne partie de sa carrière.
La maman d'Ania, devenue orthodoxe, a été désagréablement surprise par l'hostilité des descendants d'émigrés, dans une paroisse de Belgique ou d'Allemagne, je ne me souviens plus.
C'est une famille intéressante, car les parents sont vraiment soviétiques pur jus, charmants, hospitaliers, ils m'ont couverte de cadeaux, de légumes et de fleurs du jardin, mais mis à part la conversion de la maman, soviétiques pur jus. Alors qu'Anna et son mari Dima, sont russes tendance sainte Russie, nostalgiques de la paysannerie, du folklore et de la tradition, Dima travaillait dans un aéroport, avec les événements des dernières années, il a dû se reconvertir et il est parti vivre à Pereslavl, ce dont il est enchanté. Non seulement il éprouve la nostalgie de la sainte Russie paysanne, mais il le physique de l'emploi.
Une artiste
peintre, Larissa Lickmann, avec laquelle je vais exposer, m’a demandé de mettre
de côté deux chroniques et deux Yarilo, car elle a prêté son exemplaire de ce
dernier à des amies qui le lisent à haute voix et sont tellement enthousiastes,
qu’elles veulent absolument le leur. Si ça se trouve, je vais faire un
best-seller. Anna Ossipova m’a dit : « Je
le commence juste, c’est très poétique, mais ce n’est pas vraiment un roman
historique, c’est un livre qui me paraît hors du temps. » Cette réflexion
m’a frappée, je crois qu’elle est assez juste, bien que je ne l'ai pas fait exprès, mais les livres se font à notre insu. Le livre est très visuel, mais ne
donne pas toutes sortes de ces détails
qui reconstituent une époque, en fait, c’est un peu comme si l’époque allait de
soi. Quand on écrit un roman contemporain, on ne fournit pas forcément une description documentaire d'un environnement,
alors qu’on se croit obligé de le faire dans un roman historique, ce que justement
je n’ai pas fait, sauf quand le propos impliquait une description, mais c’est
parfois le ciel du nord, la forêt, quelque chose d’intemporel. Le mari de Natacha, quand il avait fait des tentatives de rédaction de ma traduction,
ajoutait tous ces détails, la description des vêtements de la future tsarine
tcherkesse et de son frère par exemple, ou ceux des boyards, et leur attitude. Je n’étais absolument pas d’accord, en dehors du fait que je ne reconnaissais ni mon livre ni son style, parce que
je n’ai pas fait une reconstitution historique et que le tsar au moment précis
où apparaît Kotcheneï se fiche éperdument des détails de son costume national
tcherkesse: comme tout homme de sa trempe, il regarde si elle est ou non baisable en pensant qu’elle ne
remplacera pas sa femme, irremplaçable par définition.
Je suis tombée sur l'interview par la chaine 1 d'une famille française émigrée dans la région de Moscou. Cela m'a fait un choc. Une famille nombreuse catholique, traditionnelle, "bon chic bon genre", comme on aurait dit dans ma jeunesse, bien élevée, le genre de clientèle que j'avais dans mes classes du lycée français. Avec tout ce qui se passe, on aurait pu penser que de telles familles étaient en voie de disparition, eh bien non. Celle-là est en Russie, elle soutient le Donbass, où elle envoie de l'aide humanitaire. https://www.1tv.ru/news/2022-07-14/433460-bolshaya_frantsuzskaya_semya_shest_let_nazad_pereehavshaya_v_podmoskovie_pomogaet_detyam_donbassa
Je ne me suis toujours pas décidée à récupérer Nounours, et je sens une sorte de pesanteur intérieure analogue à celle qui m'a fait renoncer au dernier moment à déménager dans un joli village, quelque chose d'insurmontable. Ce petit chien me plaît beaucoup, mais je suis harcelée par mes chats, leurs bêtises, leurs crises de jalousie, je suis finalement très occupée, et de plus en plus fatiguée, physiquement et émotionnellement, un chiot demande de l'attention, de l'éducation, de la fermeté, je me demande si je n'ai pas passé l'âge de me lancer dans cette aventure. Ma voisine Ania le pense, elle me dit qu'elle a pitié de moi, parce que le chien deviendra énorme, qu'il peut me renverser, qu'il faut être disponible. Ils sont toute une famille à s'ocupper du sien, qui est adorable et visiblement très heureux. Moi je suis seule et usée, percluse de rhumatismes. Ce qui s'est passé avec le chat à Moscou m'a provoqué des insomnies et une crise de migraine comme je n'en avais plus eu depuis longtemps. Ania me dit que Sacha et Olga s'occuppent bien de leurs chiens, qu'ils les promènent, qu'ils les lâchent de temps en temps. Je me souviens de ce que maman m'avait dit un jour, qu'il ne fallait pas se charger de fardeaux qu'on ne peut pas porter.
Je pressentais qu'Ania avait pris un chien parce qu'elle craint de perdre son mari, qui est beaucoup plus âgé qu'elle, il a mon âge. C'est le cas, elle craint terriblement de le perdre, elle est même allée en pèlerinage à Diveïevo faire prier pour sa santé. Il n'est pas malade, Dieu merci, mais il vieillit, et il a eu le covid, lui aussi, il doit encore être fatigué. Ils sont très unis, et leurs enfants sont très bien, ils n'ont pas du tout la mentalité de merde du petit ado élevé au consumérisme et à la tablette par des beaufs. Ce sont des gens pour lesquels j'ai autant d'affection que de respect.
Elle m'a proposé de lire un extrait de mon livre à la présentation de Rostov, et m'en a fait la démonstration. Elle ne lit pas avec le talent de Katia, mais elle lit distinctement, et c'est le principal.
L'artisan qu'a mis Kola sur l'affaire, Andreï, me plaît beaucoup, il n'est pas idiot, efficace, il me propose même des solutions plus rapides et plus économiques, au lieu d'essayer de me tirer du fric n'importe comment pour n'importe quoi. Et il va me refaire tous les trucs qui ne vont pas dans la maison. Je rends grâce à Dieu de me l'avoir amené...
J'ai découvert la vue que j'aurai depuis la terrasse, qui est à présent presque terminée, il manque l'escalier, mais nous attendons Kolia, qui doit faire un socle en béton. C'est vraiment merveilleux, j'aurais dû faire cela plus tôt, cela change tout, à la limite, je devrais presque être reconnaissante au voisin de m'avoir poussée à chercher cette solution par sa construction brutale, intrusive et moche! Car j'ai sous les yeux un paysage dégagé, enore pittoresque, depuis un recoin où j'ai bien la paix, tout le jardin à mes pieds, la maison d'Ania, celle d'oncle Kolia est cachée par les arbres, mais ce n'est peut-être pas plus mal, étant donné ce que l'on va certainement finir par en faire...
Ici, un article faux-cul et propagandeux pour salir Makine, que je plains beaucoup car il a aimé et choisi la France et voit maintenant son pays d'origine soumis à des calomnies constantes et des interprétations biaisées. Or il sait bien ce qui est vrai et faux, il vient de Russie. Les gens comme lui, ou comme Soljénitsyne, ont une vision stéréoscopique, ils voient les deux côtés du problème. Je l'estime pour son courage. Qu'il soit amené à prendre cette position inconfortable dans le pays qu'il a aimé et où il occupe une position enviable est en soi significatif et devrait faire réflechir ceux qui en sont encore capables. Aucun des Français émigrés de ma connaissance n'est placé devant ce genre de dilemme, ils sont tous patriotes de la Russie, même quand ils sont nostalgiques de la France. J'en discutais avec mon artisan Andreï, il soutient son gouvernement à mort et écoute la propagande ukrainienne avec une curiosité d'entomologiste. Il a des connaissances en Allemagne qui sont consternées et cherchent à revenir.
Le ciel est ce soir si beau, et je trouve magique de le voir depuis ma fenêtre, j'en avais perdu l'habitude. A ses tons cuivrés répondent le joyeux bouquet d'étoiles des lys de Nadia. Je vais mettre plus de lys, ceux-ci poussent très bien. Je sens que nous arrivons déjà au versant automnal de notre bref été.
J'ai fait la présentation de Yarilo, mais le moment le plus intense de la journée fut la liturgie du matin, où il n'y avait presque personne, où j'étais presque seule avec le métropolite Philippe, et je lui recommandais les miens, les personnages de mon livre, et puis aussi la pauvre propriétaire du chat que je croyais avoir sauvé et qui ne cesse de me hanter; pourtant là, vraiment, je n'y étais pour rien, mais c'était comme si je prenais ce chagrin et cette culpabilité sur moi, j'espère que cela allège mystérieusement les siens. Il y a quelque chose de si affreusement irrémédiable dans la mort, de si irréparable... Le chat était là, soyeux, éperdu, et puis quand sa maîtresse est arrivée, on ne pouvait plus rien pour lui. Et cela faisait écho dans mon coeur à la tragédie qui frappe mon amie et pour laquelle je ne trouve pas de mots...
J'aimerais avoir un signe des gens de ma famille que j'ai perdus. Parfois, je sens des présences très proches, le père Placide, le métropolite Philippe, et même parfois l'higoumène Boris, mais je n'arrive pas à trouver celle de mes parents qui me manquent tellement. Peut-être que les hommes de prière se relient plus facilement à nous par delà la mort et les siècles.
J'avais un peu moins de monde pour Yarilo que pour les chroniques, cela touche les gens de moins près. Mais j'ai eu des réactions très chaleureuses. Katia a magnifiquement lu son extrait, avec un vrai talent d'actrice. J'étais très fatiguée, et j'avais mal à la tête. J'ai même reculé devant le café français, j'avais envie de silence, je suis rentrée chez moi. Cette migraine a duré trois jours, je pense que je la dois au chat.
Ce soir, je suis repassée au café, Gilles m'avait vendu plusieurs livres, j'ai goûté le fraisier de Godfroi, alors que mon intention était de me mettre au régime. Et il a introduit un nouveau gâteau, le rocher, que j'ai remis à une date ultérieure, parce que, comme disait en passant à table le regretté père Gauthier, une de nos figures familiales, "un certain ascétisme convient".
Je voulais mettre une dédicace sur l'exemplaire de Vladimir, qui s'occupe du bar, et alors que je commençais à descendre l'escalier, une jeune femme assise en bas m'a regardée avec de grands yeux en murmurant "Laurence", comme si elle avait vu la sainte Vierge, j'ai eu un choc, je crois qu'il va falloir que je m'habitue!
C'était une relation facebook, qui, passant par Pereslavl, se demandait comment y rencontrer Laurence en chair et en os. Eh bien naturellement, en allant au café la Forêt, bien que je sois plus accro aux gâteaux du rez-de-chaussée qu'aux bières du sous-sol! Elle était tout à fait charmante, et avec Vladimir, nous avons parlé d'Ivan le Terrible. La jeune femme me disait qu'au vu de l'île de Siyavsk, qu'il avait couverte d'églises au moment de la conquête de Kazan, elle pouvait difficilement l'associer à un maniaque et c'est vrai qu'il a laissé partout d'admirables constructions. Il est exact que peu de documents fiables subsistent sur son règne. Moi, je le vois comme un personnage de Dostoievski, déchiré par toutes sortes de passions, mais idéaliste, et nostalgique de la pureté et de la sainteté. Un Russe, en somme.
J'ai quitté cette compagnie, parce que mes artisans devaient arriver à cinq heures, ce qu'ils n'ont naturellement pas fait. Kolia a mis sur le coup un type qui a l'air de connaître le boulot, mais il n'est pas venu, cela fait deux mois que ça traîne, et ils ont bien sûr laissé dans mon jardin des poutres et des tuyaux que je ne peux déplacer seule, qui me font cuire les yeux, et m'empêchent de tondre...
J'ai vu qu'un prêtre orthodoxe israélien, sur facebook, colportait toutes les calomnies ukrainiennes sur les Russes avec l'assurance absolue que ces derniers sont fondamentalement coupables de par leur nature intrinsèquement barbare. Les Russes brûlent le blé ukrainien. En effet, ce n'est pas le gentil président Zelenski qui ferait une chose pareille à ses administrés, c'est par définition impossible. Pourtant, le problème est qu'en Ukraine comme partout ailleurs en Europe, les dirigeants peuvent faire n'importe quelle saloperie à leurs populations, puisqu'ils n'ont plus aucun sentiment d'appartenance à une communauté nationale, ce sont tous les membres d'une caste hors sol, d'une espèce de secte. Ils sacrifieront allègrement tous les Ukrainiens à leur guerre médiatique contre la Russie, où d'ailleurs, des terroristes, venus du trou noir, ont installé des dispositifs dans les champs de blé pour obtenir le même résultat que chez eux. Les Russes, en revanche, n'ont aucun intérêt a s'aliéner des populations qui leur sont, dans la partie orientale où ils sont déployés, largement acquises ni à aggraver une pauvreté qu'il leur incombera d'assumer. De plus, ils n'ont aucune haine contre les populations ukrainiennes, et ne tiennent aucun discours en ce sens, alors qu'en face, depuis le maïdan et même avant, la haine est écumante et relève de la psychiatrie. En réalité, le président ukrainien se fout des gens comme d'une guigne, et sait très bien qu'en bombardant le Donbass ou en faisant brûler les champs de blés, il s'attaque non à des Ukrainiens agressés par des Russes, ce qui pourrait paraître absurde, mais à des Russes maintenus de force dans sa nation artificielle, et cela sur commande d'une mafia supranationale de banksters qui n'hésite pas à faire tirer sur les agriculteurs néerlandais à balles réelles par leur propre police..
Du reste, il n'y a pas qu'en Ukraine que brûlent les champs de blé, ils brûlent aussi en Roumanie, où on ne nous dira pas que ce sont les Russes, mais le réchauffement climatique, qui lui aussi a bon dos. Ou bien, comme l'envisage Boulevard Voltaire, à propos des incendies de forêt en France, le terrorisme islamique, son dos n'est pas mauvais non plus. Je crois qu'il n'y a qu'un seul terrorisme, qui utilise les cinglés là où il les trouve, et peu importe leur étiquette. Mais bon, naturellement, je suis complotiste...
Tout cela est aussi ignoble qu'atroce et je me fais beaucoup de souci pour ceux qui sont là bas, dans le paradis démocratique. En même temps, le tour qu'ont pris les événements m'a donné une espèce de sérénité. Un correspondant m'écrivait que l'on pourrait déboucher sur une catastrophe nucléaire, mais je n'y pense pas tellement, pas plus qu'à la chute d'un astéroïde géant, je vis au jour le jour. Si la Russie est vaincue, mais c'est peu probable, je n'aurai plus aucun endroit où me réfugier sur cette planète, entièrement au pouvoir de tout ce que j'abhorre. Auquel cas, peu m'importe la suite, je n'aurai plus qu'à mourir, et on s'occupera sans doute de me faciliter les choses. Si elle triomphe, le monde prendra une autre direction, sans doute plus acceptable pour les êtres humains, et je mourrai avec l'espoir que les enfants ont encore un avenir. Cependant, j'ai le coeur fendu par le sort de l'Europe, que ses dirigeants mènent à une perte totale et sans gloire.
Le dernier numéro de l'Antipresse est particulièrement riche et percutant. Slobodan Despot analyse avec humour le comportement aberrant du personnel politique occidental, si néfaste, et pose la question: le font-ils exprès? Je crois que oui mais l'on est rarement très intelligent quand on est méchant et vil, on est astucieux, mais on ne voit pas très loin, et surtout, on est incapable d'imaginer des comportements qui ne soient pas dictés par de bas intérêts ou des rancoeurs. Et c'est là qu'on fait des erreurs d'appréciation parfois fatales.
Son article sur Soljénitsyne est également très profond, et me touche particulièrement par la définition qu'il donne de la fonction littéraire:
La littérature est radicalement artistique, mais il existe des questions purement littéraires, qui ne se retrouvent pas dans les autres arts. L’écrivain est tenu de s’incliner devant la force suprême qui le traverse. Son devoir intérieur se traduit dans sa relation sacrée à l’écriture: Soljenitsyne en fait une obligation morale et spirituelle, une responsabilité littéraire devant Dieu, une relation à l’absolu. Dans le monde moderne, cette obligation morale s’est effondrée: on écrit n’importe quoi, on ne répond plus de ce que l’on écrit; les écrits s’envolent, d’autant plus depuis l’essor du numérique. Lorsque l’on écrit avec ses pieds, on ne risque pas de rencontrer les étoiles. De même, Soljenitsyne rappelle que ce qui est précieux rencontre toujours peu d’adeptes, et seulement un tout petit groupe de connaisseurs. À vouloir plaire à des millions de gens, les auteurs baissent le niveau culturel du livre. La culture de masse est une antinomie, un désastre, l’inverse du folklore qui recèle l’esprit d’une culture locale et survit au temps avec de vieilles chansons transmises de génération en génération. Pour Soljenitsyne, notre époque est effroyable par sa propension à tout faire disparaître sans s’en préoccuper, sans aucune garantie ni certitude que ce qui a disparu puisse revenir. Cela peut disparaître pour toujours. Un auteur littéraire peut ne pas avoir réalisé ce qu’il devait réaliser. Un véritable auteur a une mission spirituelle et sait qu’il en est investi. Sa littérature est un souffle qui l’envahit, est le produit de ses états d’âme autant qu’elle les façonne.
Ce passage recoupe ce que j'ai dit moi-même à la présentation de Yarilo, car c'est ainsi que j'ai toujours vu les choses. Un acte mystérieux qui nous relie avec l'océan de toutes les âmes, qui fait de nous l'organiste d'un instrument aux milliards de voix, un médium.
J'ai fait un aller et retour à Moscou pour récupérer mes livres et voir le père Valentin, et aussi Dany. Mon intelligent éditeur n'était pas en forme. Il a été malade. Son local a changé, il est juste en face du monastère Danilov et, comme à l'époque de Yarilo, on entend sans arrêt des carillons, car le monastère forme des sonneurs.
Le livre est très beau. L'éditeur Slava pense qu'il va se vendre.
J'ai passé une soirée chez Dany et Iouri, qui ont eu aussi des problèmes de santé, nous en avons tous, c'est le propre de notre tranche d'âge. D'après le psaume, nous commençons tous à être en sursis. "70 ans pour les plus robustes, le surplus n'est que peine et douleur".
Pendant la nuit, j'ai été réveillée par un grand fracas et des cris affreux. Cétait un chat tombé sur le bord de ma fenêtre depuis les étages superieurs, un chat magnifique, de race sphinx, avec un poil ras et frisé tout soyeux, un corps élégant et souple, très propre. Il m'a paru complètement affolé, j'ai essayé de le calmer, de le nettoyer, car il s'est mis aussitôt à déféquer et vomir, et pour l'isoler de la chienne, et du père Valentin aussi affolé que lui, je l'ai mis dans la salle de bains puis j'ai collé une affiche dans l'ascenseur, afin de signaler que nous l'avions recueilli.
Au matin, je l'ai trouvé mort, ce qui a dû se produire tout de suite après que je l'eus laissé. J'étais consternée. C'était un chat magnifique, certainement très aimé. Et de fait, j'ai vu arriver deux heures plus tard sa patronne qui, apprenant le drame, a éclaté en sanglots, et moi aussi. C'était une petite bonne femme entre deux âges, dont l'aspect ne correspondait pas à ce chat de luxe, et dont il était sans doute la plus grande joie, la consolation d'une vie terne. Elle s'accusait de sa mort, car à cause de la chaleur étouffante dans ces appartements, elle avait laissé la fenêtre entrouverte. Je connais bien tout cela, qui m'est déjà arrivé sous une forme ou une autre, et j'avais terriblement pitié et de la dame et du chat. Je suis restée au bord des larmes toute la journée à ruminer les événements du même ordre que j'ai traversé dans ma vie.
Je pensais qu'il était mort de peur, mais en fait, il a certainement dû se blesser en tombant, ce sont des chats certainement fragiles, une race artificielle, comme les spitz miniatures...
Je suis revenue chez moi heureuse de retrouver mon jardin et même mes chats cagueurs et pisseurs, à qui je n'ai pas souhaité la malemort. Il fait beau, un petit air frais, le lys de Nadia la chevrière fleurit et il est magnifique, un bouquet de trompettes d'or.
Le père Valentin m'a raconté que sa fille Olga avait assisté à l'arrestation d'une ado qui brandissait une pancarte "non à la guerre", et qui tremblait de peur à l'idée des conséquences: elle se voyait soumise aux sévices décrites dans la presse libérale pro occidentale; or après l'avoir sermonnée, les flics lui ont dit de rentrer chez elle. La gamine n'en croyait pas ses oreilles: "Vous ne me gardez pas?
- Et pourquoi faire?"
Quand on s'attend à l'échafaud ou au cul-de-basse-fosse, c'est sans doute même un peu vexant!
Nous avons parlé de l'Eglise Ukrainienne, le père Valentin est très heureux que le patriarche et les hiérarques russes n'aient point réagi ni crié au schisme, personne ne juge le métropolite Onuphre, et de plus, cela fait la démonstration de son indépendance effective, que tous les soutiens empressés de l'intervention pachydermique du patriarche Bartholomée dans le magasin de porcelaine ukrainien contestent.
Et à ce propos, mon téléphone ne recevant plus facebook, j'ai appris par Dany et vérifié ensuite que s'installait tout un échange de répliques auquel je ne pouvais participer, sous ma dernière chronique, où j'évoque le métropolite Philippe, entre une dame orthodoxe libérale et atlantiste; c'est-à-dire qu'à mes yeux, elle soutient les gens les plus infernaux qui soient sur la planète en ce moment, et des amies qui la contredisaient. D'après cette dame, le métropolite Philippe, martyrisé pour avoir résisté à Ivan le Terrible, n'aurait pas approuvé l'intervention russe au Donbass. Bien que je n'ai guère le temps de faire une réponse, je sens qu'elle s'impose, et elle servira pour tous les autres.
Chère corréligionnaire, je ne sais si cette chronique se prêtait tellement à une discussion de cette sorte, mais soit, allons-y. Mon histoire avec le métropolite Philippe est très ancienne, et méritait mieux qu'une telle réaction, je n'ai pas l'impression qu'il me désavoue, en l'occurrence.
Le métropolite Philippe défendait contre Ivan le Terrible les propres sujets de celui-ci et non pas les Polonais, les Lithuaniens ou les Suédois. Je ne pense pas que, dans la situation présente, il approuverait l'abandon de populations russes et orthodoxes aux exactions fantasmagoriques de personnages plus ou moins uniates, néonazis et néopaïens revendiqués, dont les tortures et les viols ne sont pas moins atroces et inventifs que ceux qu'on attribue à Ivan le Terrible et son Opritchnina.
Je n'avais pas connaissance de l'opinion de Poutine sur l'assassinat du métropolite Philippe, vous êtes visiblement plus à l'affût que moi de ses moindres dires. Par quel canal l'avez-vous apprise? Au reste, il a très bien pu le dire, c'est une opinion qui circule, certains pensent que Maliouta Skouratov aurait pris cette initiative, ce qui après tout, est possible, et n'innocente pas le tsar pour autant, comme le démontre tout le roman de Dostoievski les Frères Karamazov. Sans contester le martyre du saint homme, il en est aussi pour estimer que l'on ait pu exagérément noircir le tsar sur lequel en fin de compte, on a peu de documents irréfutables. C'est également possible. a partir du moment où on l'identifie à Staline, on assiste à des excès dans un sens comme dans l'autre, ceux qui en font une caricature, dans leur désir de noircir toute l'histoire russe et de prouver que le peuple russe est incapable de se gouverner normalement, et ceux qui voudraient le canoniser, ce qui est bien sûr, contestable.
Cependant, comparer Ivan le Terrible à Staline me paraît abusif, car l'époque était différente, le tsar un monarque légitime, et Staline un dictateur qui a d'ailleurs fait beaucoup plus de victimes qu'Ivan le Terrible, et dans toutes les couches de la population. Mais comparer Poutine à Ivan le Terrible, ou à Staline, puisqu'il paraît que c'est la même chose, est absolument grotesque.
Pour juger Poutine, vous vous appuyez, ainsi que beaucoup d'intellectuels censés être équipés pour penser, et plus grave encore, d'orthodoxes qui devraient avoir du discernement et de la prudence, uniquement sur la propagande unilatérale, cynique et grossière de gens profondément antirusses et antichrétiens qui ont fait et continuent à faire, le malheur des pays qu'ils parasitent, et poursuivent la Russie, qu'ils n'ont pas pu encore achever, d'une haine infatigable.
Vous me ramenez sainte Politkovskaïa et autres personnages dont cette propagande s'est emparés et qui ne représentaient pas grand chose, qui ne mobilisaient pas grand monde, et ne valaient pas la peine d'un assassinat, qu'on n'a jamais prouvé. C'est la raison pour laquelle, personnellement, je n'y crois pas, d'autant plus que le paysage audiovisuel russe, jusqu'à une date récente, grouillait de journalistes entièrement dévoués à votre cause, à croire qu'ils étaient payés par les mêmes ou mus par les mêmes sentiments haineux et les mêmes intérêts, peut-être tout cela à la fois. Ils diffusaient librement sur les ondes exactement les mêmes mensonges que dans les contrées européennes, et jusqu'à de faux reportages, comme le journaliste Ganapovski, et personne ne les assassinés, ni même arrêtés, dans le pire des cas, ils sont partis. Alors pourquoi Politkovskaïa plutôt qu'eux, et pourquoi Nemtsov, personnage discrédité, dont la mort n'était utile qu'à faire marcher les gens comme vous? Quand aux Skripal, c'était tellement cousu de fil blanc que je ne comprends même pas comment une personne dotée d'un cerveau peut prêter le moindre crédit à cette histoire.
En revanche, vous vous foutez complètement des nombreux journalistes assassinés ou arrêtés en Ukraine, de ceux qui se sont exilés, des journalistes occidentaux persécutés par leurs gouvernements respectifs pour avoir dit la vérité sur le Donbass, ainsi que des opposants molestés et intimidés dans le charmant bastion otanesque dont vous prenez si ardemment la défense. Dès 2015, j'avais traduit un appel d'une député unkrainienne, Elena Bondarenko, qui essayait d'attirer l'attention des pays "démocratiques" sur les dérives totalitaires du sien, appel que personne ne voulait publier, évidemment, et qui est passé inapperçu, de même que toutes les horreurs commises pendant les huit ans qu'il a fallu à la Russie pour réagir, tenter d'y mettre fin, et d'éviter une contamination qui aurait fini par menacer sa propre existence. Je me répète, bien sûr, mais je vous invite une fois de plus à regarder l'intervention de l'avocate ukrainienne Tetyana Montian au conseil de sécurité de l'ONU, dont votre presse n'a bien sûr pas parlé. J'ajouterai que pour ce qui est des menaces, dont vous pensez être l'objet de la part d'amies civilisées, les gens qui se sont penchés sur le trou noir mafieux et ses péripéties en reçoivent de réelles, et les consignent à toutes fins utiles.
Vous me reprochez de mélanger la politique et la religion. Ah bon, et pas vous? Et pourquoi les bonnes âmes de l'orthodoxie libérale, intelligente et occidentale, ont-elles justifié la pagaille créée en Ukraine par le patriarche Bartholomée? De sa part, ce n'était pas de la politique? Comment a-t-on pu soutenir cette entreprise infâme commanditée par la CIA? Cela vous va bien, à tous, de baver sur le patriarche Cyrille, quand vous avez épousé cette mauvaise cause et ignoré les persécutions contre l'Eglise ukrainienne traditionnelle comme vous avez ignoré les bombardements de civils au Donbass. Que doit faire Cyrille, pour vous plaire? Bénir l'entreprise visant à nettoyer le Donbass de sa population pour faire place nette aux mafias d'outre Atlantique? Puis le démembrement de la Russie? L'imposition de toutes les "valeurs européennes" ignobles et délirantes que fuient en Russie une partie des orthodoxes européens et américains?
La réalité c'est que non seulement votre gouvernement censure et déforme tout avec une rare fourberie et le secours d'une presse unilatérale, mais vous vous censurez les uns les autres, et cela fait des décennies que cela dure et que les "intellectuels" s'auto-sélectionnent entre eux. De sorte que la société occidentale entière a complètement perdu tout bon sens et tout sens critique. Vous croyez systématiquement la pire propagande parce qu'on vous a persuadés que les Russes sont par essence, par nature, capables de tout. Hypnotisés sur la révolution d'octobre, dont on met complaisemment les affreuses conséquences sur le dos des seuls Russes, alors que toutes les régions de l'empire y ont participé, et que ses cadres étaient majoritairement non russes et russophobes, vous êtes incapables de voir ce qui se commet aujourd'hui, sous l'impulsion de malfaiteurs supranationaux, autrement dangereux et atroces que Poutine. Comme disait déjà Céline, Staline a le dos large. Les Russes aussi.
Pourquoi croyez-vous que je vis ici, au pays du vilain méchant Poutine, par masochisme? J'écris sous la dictée d'un tchékiste qui me braque un revolver sur la tempe? Ou bien je suis soudoyée peut-être?
J'ai horreur de la politique, et n'en parlerais jamais, si je n'avais les yeux grand ouverts sur des infamies que je ne peux cautionner, et depuis longtemps. C'est d'ailleurs pour cela que je suis monarchiste, la monarchie nous délivrait de la politique. Vous préférez prendre les vessies pour des lanternes, grand bien vous fasse. Je comprends que mon blog vous chagrine, mais que voulez-vous, sans renier du tout la France, mes ancêtres et ma culture, comme tous les étrangers qui s'obstinent ici, je suis patriote de la Russie, et cela d'autant plus, qu'on fait de l'occident un asile de fous où même les orthodoxes deviennent absurdes. Non seulement, Politkovskaïa ou pas, je préfère Poutine à Macron, Biden et autres fantoches des banksters du nouvel ordre mondial, mais je leur préfère aussi Bachar El Assad et même le défunt Saddam Hussein. Je leur préfèrerais aussi bien un crocodile, d'ailleurs.
Après conversation avec ma tante Mano, Félicie s'avère sa grand-tante, mon arrière grand-tante, mon arrière-grand-mère, c'était Suzanne, Félicie était sa soeur.
Dimanche, je suis allée voir le père Vassili, le prêtre ukrainien, comme m'y avait invitée sa matouchka. Ils habitent à dix minutes de chez moi, sur les hauteurs, là où je vais contempler le lac. Ils ont la vue sur les monastères de Pereslavl, mais les maisons autour sont affreuses, et question voisins, cela semble pire qu'ici. Ils en ont un très proche qui leur colle la radio en boucle sans se demander s'ils préfèrent le silence. Apparemment, ceux qui se posent ce genre de questions ne sont vraiment pas la majorité. Moi, j'ai le déverseur de camions de glaise, et le massacreur de bouleaux. Mais toute la compagnie d'heureux propriétaires de patous des Pyrénées est plutôt normale...
Je dis que les maisons sont affreuses, et en effet, elles le sont, mais il y en a une qui a été bien réparée, ou bien construite, bois apparent, toiture en zinc, j'ai voulu faire une photo, mais à cause du cotre-jour, on ne voit rien. J'ai vu ce type de restauration sur les bords de la rivière Troubej, ce doit être la mode chez les moscovites, ils récupèrent le bois brut et posent de belles toitures en zinc. Derrière l'isba d'origine, on a monté une maison qui en reprend la forme et la prolonge harmonieusement, ce qui permet d'avoir plus d'espace sans saccager tout.
L'artiste peintre Ioulia m'a raconté que, dessinant une vieille maison pittoresque, ce qui est sa spécialité, elle a été abordée par le propriétaire de la maison voisine, horriblement rénovée, qui, jaloux de ne pas être l'objet de son attention, lui a crié: "Hé! L'artiste! Moi, si j'enlève le plastique, j'ai aussi des rondins de bois!"
Le père Vassili fait des icônes, il a de très gentils enfants qui aident à l'église et au jardin, pour ce qui est des garçons, et à la maison, pour ce qui est des filles. La matouchka a emmené toute la tribu pour m'accompagner jusqu'à ma rue. En passant par les prés, les enfants m'ont cueilli des fraises des bois.
Une amie très chère, femme tendre et délicieuse, a été frappée par une tragédie qui me poursuit, et qui prend à mes yeux, sur le fond de ce qui se passe dans le monde, un sens particulièrement sinistre, on dirait que l'Europe se mue en maison de fous. A Pereslavl, nous sommes pour l'instant protégés, peut-être parce que nous avons ici de nombreux saints qui intercèdent pour nous. La seule chose que je pourrais crier à tous les échos, c'est "priez"! Mais l'on me prendrait en France pour Philippulus le prophète, et ce n'est pas mon genre... d'autant plus qu'il est vain de hurler à l'oreille d'un sourd.
Lorsque je nageais dans le lac, un nuage a brusquement et brièvement lâché sur moi de la pluie, comme un prêtre une giclée d'eau bénite. Je me suis apperçue, en consultant la calendrier des offices à la cathédrale, que la date choisie pour la première présentation de Yarilo, au café, était celle du transfert des reliques de saint Philippe de Moscou. Je reçois en ce moment toutes sortes de signes. Je prie chaque jour saint Philippe pour la sainte Russie, pour moi qui suis venue y vivre, pour mon livre et ceux que j'y ai fait figurer.
ici, tout le bois a été décapé, et une construction ajoutée derrière; la palissade reste traditionnelle
ici, on a conservé l'isba, très jolie et d'un beau ton gris, et ajouté derrière une maison qui en reprend le style
restauration en cours, le bâtiment ajouté reprend la forme du batiment existant