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vendredi 12 juillet 2019

Immigration, suite et fin possible...

Voilà, dossier complété et remis. Il va partir à Iaroslavl et il faut prier pour que là bas, il passe la rampe. Sinon, je risque fort de devoir refaire pour la troisième fois les examens médicaux! Je suis arrivée à 9 heures du matin chez la juriste avec un paquet énorme de relevés bancaires imprimés en vitesse (2018, 2019). On y voit apparaître chaque mois le montant de ma retraite et les retraits que je fais à Pereslavl. Mais on peut chipoter que ce n'est pas un document légalisé, et qu'il n'est pas traduit, même si les chiffres sont limpides. Mon avis d'imposition, je viens de m'en apercevoir, portait sur 17 et pas 18. J'aurais pu rectifier le tir, et aussi essayer de le faire apostiller à l'ambassade, mais on m'avait dit que ce papier, on n'en voulait pas. Si jamais ça ne passe pas, j'irai en vitesse à Moscou le faire traduire et tenter d'obtenir une apostille. Un principe: faire légaliser, apostiller, couvrir de tampons tout document destiné à la bureaucratie russe...
La juriste m'a rédigé une nouvelle déclaration. Je suis allée porter tout ça à l'immigration. Là, ça a duré des heures avec des coups de fil, parce qu'à Iaroslavl, ils changeaient sans cesse d'avis sur ce qu'il fallait produire, et chaque fois, il fallait refaire une déclaration en fonction des pièces à produire, et donc repartir chez la juriste (j'y suis allée trois fois). Je suis sortie de là à 1 heure de l'après-midi, et j'avais rendez-vous avec l'émissaire de l'électricité venu pour le nouveau compteur...
Depuis, je suis devenue une espèce de méduse échouée devant l'ordinateur, et je n'aimerais pas croiser la route du bon docteur Sanchez, dans l'état où je suis: à 67 ans, mon compte serait bon. L'idée de recommencer à courir me glace le sang, j'espère un miracle. J'ai la phobie administrative et je lis mal les papiers, je n'y comprends rien.
La bureaucratie me semble un des symptômes morbides de notre civilisation malade.
Il fait toujours mauvais, et j'ai l'impression d'être au mois de septembre, d'ailleurs il y a des feuilles qui jaunissent. Cela me rappelle les Solovki, l'année dernière, où les fleurs qui ici fleurissent en juin s'épanouissaient fin juillet, tandis que les arbres prenaient déjà des couleurs automnales.
Katia et moi avons fait le choix de notre équipement folklorique: sarafane, chemise, foulard et ceinture. Mais je n'arrive pas à chanter ni à jouer autant qu'il le faudrait.
j'ai choisi le sarafane du premier plan, sur fond bleu, avec une
blouse grise et un foulard bleu...

J'ai fait la grève facebook pendant deux jours. quand je suis revenue dessus, le pauvre Vincent Lambert était mort, après neuf jours d'agonie, privé d'eau et de nourriture, pour un type qui ne survivait que parce qu'il était "branché", il a mis du temps à être "enfin délivré". Et des gens s'en réjouissent bruyamment en insultant les parents, forcément, des cathos tradis, autant dire la lie du pays.
Il est certain qu'autrefois, le malheureux serait mort assez vite des suites de son accident, et que cela n'aurait sans doute pas été plus mal, mais voilà, on l'a arraché à la mort, maintenu dans un état pauci-relationnel des années, sans lui accorder la chance d'un établissement spécialisé pour améliorer son existence et son état, et puis on a décidé que ça suffisait comme ça, et qu'on ne le nourrirait plus, parce que sa vie n'en était pas une.
Il avait un regard conscient et intense. J'ai déjà vu un garçon réduit à "l'état de légume", comme on dit charitablement à longueur de commentaires, il avait un regard vide qui ne se fixait sur rien, ce n'était pas le cas de Vincent Lambert, c'est sans doute pour cela que les journaux bien pensants floutaient sa photo... Reste que sans doute d'autant plus, sa vie n'en était pas une, mais ce principe peut-être étendu à des tas de gens, les tétraplégiques, les filles affreusement défigurées à l'acide, les sourds et aveugles, et même les SDF. Des tas de gens ont une vie qui n'en est pas une, selon les critères contemporains de la santé, de la beauté et du succès. Il sera désormais miséricordieux et convenable de les envoyer ad patres.
Pour les bébés à naître, le raisonnement du légume, de l'amas de cellules, du tas de viande et de la vie qui n'en est pas une ou qui n'en sera pas une parce que toutes les fées modernes n'entoureront pas le berceau, est depuis longtemps installé, au point que beaucoup de femmes poussent des cris d'orfraie si on remet cela en question ou que des médecins rechignent à la triste besogne. On a fait mourir l'infirme de faim et de soif, avec une sédation qui ne marchait pas tellement, d'après ses proches. On découpe les gosses dans le ventre de leur mère, on les arrache en pièces détachées, mais ça ne crie pas, à ce stade. C'est juste un acte médical miséricordieux, que deviendrait ce malheureux, avec sa vie qui n'en sera pas une?
Bien évidemment, le raisonnement s'étend maintenant jusqu'à des foetus tout à fait formés ou prêts à naître: mieux vaut les tuer que de leur laisser vivre une telle vie, qui ne débute pas sous les auspices radieux obligatoires.
Et par conséquent, le raisonnement Vincent Lambert s'étendra lui aussi à toutes sortes de gens lourdement handicapés, ou socialement défavorisés, ou trop vieux.
Personnellement, je ne tiens pas à ce que l'on s'acharne à me faire vivre si déjà je ne suis plus viable. Mais m'abrutir de drogue pour me faire crever de faim et de soif, seule dans mon coin, épargnez-moi cela, de grâce. 

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