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mardi 26 juillet 2022

la maison de la rivière Troubej

 


Je voulais aller à la liturgie du petit matin, car j’avais été réveillée à cinq heures et demie, par des aboiements furieux de Rita, et j’avais vu dans mon jardin une joyeuse cavalcade de patous des Pyrénées bondissants, soit Alissa, pour une fois libre, et ses deux chiots Nounours et Charlie, qui m’ont fait des fêtes délirantes, tout en cherchant à communiquer avec le petit frère Alba, qui est enfermé sur le terrain des voisins de derrière. Mais je ne sais pas pourquoi, je me suis mis dans l’idée que c’était à 7h 40 au lieu de 6h 40 et je suis arrivée au moment de la communion. Le fils du père ukrainien Vassili est venu me dire que son papa allait me donner la communion quand même, mais je ne m’étais pas préparée. 

Dans ma confusion, je suis passée à la cathédrale pour la liturgie suivante, et là, le père Vassili s’est jeté sur moi, m’a couverte de son épitrachlion et m’a absoute sans que j’ai rien confessé ni rien demandé, comme ça, d’autorité : « Il vaut mieux manquer une liturgie que d’y être toujours fourré en étant plein d’orgueil ».  Cela m’a fait un effet extraordinaire, comme si Dieu s’était Lui-même porté à ma rencontre, et de façon tout à fait imméritée, mais ce genre de choses arrive toujours de façon imméritée, et inattendue.

J’ai toujours été la fantaisiste de service, je me souviens d’une prof d’anglais qui, sur la foi des rumeurs courant à mon sujet, m’avait annoncé dès la rentrée qu’elle n’aimait pas les fantaisistes, ce qui m’avait paru de mauvaise augure. Au sein de l’orthodoxie, c’est pareil, ce que la mère Hypandia appelle ma spiritualité hors des sentiers battus, sans doute ! Et là, tout à coup, au milieu de la cathédrale, j’avais l’impression d’être une sorte de jongleur Notre Dame adoubé, j’en avais la larme à l’oeil. Je voyais ma vie sous une autre perspective, et ma vieillesse, et même la mort, tout prenait la lumière.

Ce matin, je suis allée d'un coup de vélo à la rivière me baigner, car hier il a fait très chaud, et cela partait pour être le cas aujourd'hui. Сomme me l'a dit la baigneuse de l'autre jour, l'eau "commençait déjà à fleurir", c'est-à-dire qu'elle devenait trouble, avec je ne sais quoi en suspension, de la vase peut-être. Mais le lac avait une couleur presque méditerranéenne, et le ciel était complètement immaculé. Sur le chemin, j'ai vu que la maison dont j'avais admiré la restauration en cours était devenue positivement magnifique. On était en train de lui fixer des encadrements de fenêtres anciens de récupération, ou peut-être neufs, mais traditionnels, et son fronton s'ornait de sculptures dans le même esprit, deux oiseaux sirènes face à face. J'ai vu le propriétaire d'une autre maison bien réparée que j'avais déjà photographiée. Je l'ai félicité: si tout le monde faisait comme ces deux-là, au lieu de tout plastifier et de construire des châteaux américains, Pereslavl serait un vrai conte de fées. 

Je me demande ce que les Russes diraient si, par exemple, allant visiter la France, ils voyaient que nous déguisons nos vieilles maisons de pierres en isbas avec du faux bois en plastique.

Chaque fois que je vais à la rivière, je m'émerveille de rencontrer une population calme et paisible, qui échange des saluts: petites vieilles, mamans avec des poussettes, pêcheurs nonchalants qui passent avec des cannes à pêche et des canettes de bière.

Ania et son fils m'accompagneront à Rostov pour la présentation de Yarilo au musée d'art populaire. Je voulais les inviter au restaurant d'en face, auquel je ne suis pas retournée depuis le départ de Nil, et qui est bon et pas cher. Mais Ania m'a répondu: "Je ne saurais pas comment m'y comporter, car je ne suis jamais allée au restaurant de ma vie."

Moi, je ne me souviens même pas de la première fois où j'y suis allée, tellement c'est vieux. Je devais avoir trois ans sur la photo qui me représentait dans la cour de la Belle Ecluse à Bollène avec un chiot spitz dans les bras et quatre ou cinq quand j'allais avec papy et mamie dans un restau à Tournon, sous la falaise avec un bas relief, je le vois encore, la Chaumière, peut-être? Pour fêter la réussite de mon bac, maman m'avait invitée dans un restaurant à Suze-la-Rousse, tenu par deux lesbiennes et très bien décoré, on y mangeait de la salade de tomates à la crème et à l'estragon et du canard aux pêches. Pedro, mon beau-père, m'avait, lui, offert une bouffe chez Pic à Valence, il faut dire que selon l'expression du pâtissier Didier, j'ai toujours été de la gueule, pour un Français, il est difficile d'imaginer qu'on puisse atteindre la cinquantaine sans jamais s'être tapé la cloche dans un bon restau... 

Il vient de m'arriver un truc ubuesque avec la Sberbank. Tout d'un coup, on m'a bloqué le payement de l'artisan qui fait ma terrasse et ce n'était pas une somme astronomique. J'ai eu un robot au bout du fil qui me demandait de confirmer l'opération. Je confirme, le robot me demande de le noter, je raccroche parce que je n'en ai rien à foutre de la notation des robots. Un peu plus tard, une vraie bonne femme m'appelle, mais la différence avec le robot n'était pas notable. Il s'agit de vérifications au hasard, indépendamment de la somme. Et à qui je l'envoyais? J'étais tellement fatiguée, que j'ai un peu bégayé, et ensuite, elle me déclare que le 24, j'ai fait un achat de 6000 roubles, pouvais-je lui dire lequel? Impossible de m'en souvenir. Je cherche encore. Oui, je l'ai fait, ça je m'en souviens, ce que c'était, je ne sais plus, parce qu'en ce moment, j'achète du matériel, et puis il fait chaud et je suis crevée, prise d'assaut par des tas de gens qui me sollicitent, je n'ai pas une minute de paix. Moyennant quoi, elle m'a tout bloqué et cela va m'obliger à aller à la banque tout renouveler. Comme quoi en Russie comme en France, les banques sont des organismes épouvantables qui considèrent que notre argent est le leur.  

Ce doit être une campagne en cours, car l'électricien m'a dit qu'on lui avait fait le même coup.





La maison de rêve des bords de la rivière Troubej. L'horrible palissade ne va sans doute pas rester en place.....


 

15 commentaires:

  1. Texte très complet : de la banque à l'Eglise !

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  2. J'ai lu un peu de votre histoire et bizarrerie des rencontres virtuelles, cela m'a donné envie d'écrire ces quelques lignes. ;)
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    Le restaurant Pic, une institution. Dans ma famille une référence, mais où je ne suis jamais allée. Sans doute la seule de la famille, hormis mes grands-parents. Et pour Tournon, la chaumière, c'est bien cela, en face du quai Farconnet, pas très loin du bloc rocheux où le château prend son assise, avec ce bas-relief qui m'impressionnait beaucoup, enfant. Je me retrouve au lycée Gabriel Faure où j'ai passé mes études. Pas loin du château, et sur le quai Marc Seguin, on allait faire des parties de billard en sirotant une limonade. Ce bar n'existe plus et a laissé sa place à la police municipale. La nostalgie m'envahit. Je remonte encore un peu plus le temps, quand j'étais en cinquième et qu'il a fallu choisir une seconde langue étrangère au collège, établi dans les bâtiments de l'ancien lycée de filles d'avant 1968, je voulais apprendre le russe. Facétie d'enfant. Pas vraiment. Sans doute le lien énorme construit par l'Histoire avec l'histoire de mon père. Fait prisonnier au début de la seconde guerre mondiale, il s'est retrouvé au Stalag II-C, (si je ne fais pas de confusion), aux environs de Sttetin (Pologne), travaillait dans une ferme le jour, il a été libéré par l'Armée Rouge en 1945. Pendant ses 5 années de captivité, mon père apprit l'allemand. Ce que je fis en sixième, car j'avais retrouvé un petit dictionnaire en gothique de cette époque et lui avait posé des tas de questions. Pour moi apprendre le russe en seconde langue me semblait évident. Peut-être que je n'ai pas su exprimer cela à mes parents, quoi qu'il en soit changer de collège pour aller à Valence, la réponse fut NIET !!

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  3. Le restaurant Pic, une institution. Dans ma famille une référence, mais où je ne suis jamais allée. Sans doute la seule de la famille, hormis mes grands-parents. Et pour Tournon, la chaumière, c'est bien cela, en face du quai Farconnet, pas très loin du bloc rocheux où le château prend son assise, avec ce bas-relief qui m'impressionnait beaucoup, enfant. Je me retrouve au lycée Gabriel Faure où j'ai passé mes études. Pas loin du château, et sur le quai Marc Seguin, on allait faire des parties de billard en sirotant une limonade. Ce bar n'existe plus et a laissé sa place à la police municipale. La nostalgie m'envahit. Je remonte encore un peu plus le temps, quand j'étais en cinquième et qu'il a fallu choisir une seconde langue étrangère au collège, établi dans les bâtiments de l'ancien lycée de filles d'avant 1968, je voulais apprendre le russe. Facétie d'enfant. Pas vraiment. Sans doute le lien énorme construit par l'Histoire avec l'histoire de mon père. Fait prisonnier au début de la seconde guerre mondiale, il s'est retrouvé au Stalag II-C, (si je ne fais pas de confusion), aux environs de Sttetin (Pologne), travaillait dans une ferme le jour, il a été libéré par l'Armée Rouge en 1945. Pendant ses 5 années de captivité, mon père apprit l'allemand. Ce que je fis en sixième, car j'avais retrouvé un petit dictionnaire en gothique de cette époque et lui avait posé des tas de questions. Pour moi apprendre le russe en seconde langue me semblait évident. Peut-être que je n'ai pas su exprimer cela à mes parents, quoi qu'il en soit changer de collège pour aller à Valence, la réponse fut NIET !!

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    1. Je suis émue, car je n'étais vraiment pas grande quand j'allais dans cette "Chaumière" avec mes grands-parents, et je m'en souviens encore! Et moi aussi, la nostalgie m'envahit, d'ailleurs toutes ces bourgades du bord du Rhône et Annonay elle-même étaient très mélancoliques. J'ai oublié ce que représentait le bas relief mais je me souviens qu'il y en avait un, il se mélange dans mon esprit avec celui de Mithra, à Bourg-Saint-Andéol!

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    2. En 2008 je suis retournée à Tournon et j'ai fait beaucoup de photographies. Je suis entrée dans le lycée et me suis promenée dans les lieux déserts comme je ne les avais jamais vu auparavant, la salle de classe où Mallarmé avait enseigné l'anglais... Voici celle du bas-relief ;)
      https://www.redbubble.com/shop/ap/1885696

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    3. (petite parenthèse, je suis du genre "bordélique" et il m'a été plus simple de vous envoyer un lien sur un site où je présente mes travaux, que de rechercher la photo en question dans mes archives - n'y voyez pas une démarche "commerciale" de ma part, je suis nulle en la matière). ;)

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    4. Je ne vous trouve pas, je débouche sur un site qui vend des tas de trucs

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    5. Je suis vraiment désolée, le lien donné ne vous conduit donc pas directement à la photo (?) je croyais avoir vérifié. Cela vous à fait perdre du temps inutilement. RB était à l'origine un site pour artiste, et c'était vraiment axé sur les images, avec la possibilité d'y placer un CV, des collections. Tout était visible en première page. Ensuite, seulement ensuite, il y avait la possibilité d'acquérir des posters ou des toiles. Maintenant, je ne m'y retrouve plus, et pour tout dire, je ne m'y étais pas rendue depuis fort longtemps. D'autorité tout avait été modifié. J'essaie d'y faire le ménage.

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    6. ce n'est vraiment pas grave. du coup, j'ai cherché le bas relief et l'ai trouvé!

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    7. J'ai moi-même commencé à apprendre le russe toute seule en 68, avec la méthode Assimil, puis à la fac, après mon bac.

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    8. ;) Merci beaucoup d'avoir fait l'effort de chercher ;) Toujours en pleine nostalgie et en plus de mon côté : en plein "ménage" ;)) - La seule chose que je savais bien photographier à Tournon, c'était les trains et les locomotives à vapeur du Mastrou ;) Mais là aussi, à ma dernière visite (2008), quelle tristesse de constater que l'exploitation des Chemins de fer du Vivarais avait pris fin et que les voitures en bois étaient laissés à l'abandon. Les locos en guère meilleur état, une seule était en état de marche. Le meilleur portrait photographique que j'ai fait de ma vie a été celui du conducteur de la locomotive (1978 environ) qui avait accepté que je monte sur sa loco :) Pour moi cela restera dans ma mémoire...

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    9. J'aimerais bien voir vos photos. Pour ma part, je suis en train d'écrire mes souvenirs d'enfance en m'appuyant sur des photos de famille, j'ai grandi entre Annonay et Pierrelatte, où ma mère tenait un hôtel. Pour ce qui est du chemin de fer, j'ai il y a quelques années visité le village d'Aumessas, au dessus du Vigan, un village mort, où vivent principalement des vacanciers l'été. On y voit de très belles maisons bourgeoises, comme ça, au milieu des montagnes, il y a un superbe pont de chemin de fer précédé d'un tunnel, c'était une ligne qui allait de Nîmes à Millaud, elle permettait aux enfants d'aller au lycée, aux gens d'aller faire leurs courses ou vendre au marché, de vivre, en gros. Elle a été abandonnée dans les funestes années70, au cours desquelles s'est déchaînée la connerie qui nous a menés là où nous en sommes. Ces maisons me rappellainet celles d'Annonay, de la région lyonnaise, de la vallée du Rhône...

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    10. Je serai très heureuse de vous inviter à les découvrir. Il y a des photos sur plusieurs sites, pas toujours les mêmes, certaines que je n'ai pas rendues publiques (comme le portrait de ce cheminot, bien que je le montre mais d'une façon détournée sur RB), le problème est que je ne maintiens plus rien à jour. C'est très chaotique. Plus de site personnel car j'ai oublié de renouveler le .com. Je continue de faire le ménage sur RedBubble, où j'ai codé quelques photos dont "Le Mastrou" et "Tournon-sur-Rhône" (ce que je n'avais pas fait, sérieusement jusque là, car j'avoue ne pas prendre mon pied dans ce genre d'opérations lancinantes d'ajouter des "tags" à toutes images pour que les moteurs de recherche les trouvent). Vous pouvez essayer néanmoins par ce chemin ;)

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    11. Souvenirs d'Enfance = c'est toujours un beau projet ;) Une promenade dans le temps et l'espace.
      Que vos mots soient toujours de cette justesse, que j'ai pu constater au fil des quelques posts que j'ai pu lire sur votre blog (l'âme russe... et plein d'autres petites et grandes choses).
      Un grand et merveilleux travail se déroulera au fil de l'écriture...

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    12. Merci, ce que vous m'écrivez me touche profondément.

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