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samedi 18 novembre 2023

Un peu de soleil

 


Toujours pas de neige, mais du soleil, un soleil pâle et transparent, au travers de brillantes guirlandes de nuages pour décorer des arbres de Noël célestes, et au réveil, du givre, sur ce qu'il restait encore de fleurs fanées et de verdure obstinée. Je n'ai pas pu m'empêcher de dégager mon seringat, qui dormira jusqu'au mois de mai, pour voir la dégaine qu'il avait, car il a beaucoup poussé, cet été, et l'année prochaine, il commencera à devenir joli. J'ai regardé la tombe de Chocha et son thuya. S'il subsiste quelque chose d'elle, c'est chez moi et en mon coeur, son petit corps se dissout dans le jardin, comme toutes choses qui y poussent et qui y meurent. Et tous mes chats qui, heureux de revoir la lumière, escaladaient le poirier où se poursuivaient sur la terrasse, finiront de la même manière, rangés dans ce microcosme, avant que je ne disparaisse moi-même, du moins je l'espère.

 Les mésanges s'intéressent beaucoup à moi, elles viennent me regarder par la fenêtre.

Ma présentation de livres s'est bien passée, mais j'ai mis cinq heures à faire le trajet. La voiture de Katia n'a pas voulu démarrer, c'est donc moi qui ai fait le chauffeur dans la mienne. Deux heures de bouchon sur le koltso avant de pouvoir entrer au monastère Donskoï, affamées, et aucun temps pour se remettre, pour laisser aussi ma vielle s'adapter, je l'ai accordée comme j'ai pu, mais elle n'était pas tellement au top, elle est climatodépendante, elle aussi. 

Tous les livres que j'avais apportés sont partis, mais c'est surtout parce qu'une amie businesswoman a raflé tout ce qu'elle pouvait pour ses cadeaux d'entreprise. Cependant, les gens présents se sont sincèrement interessés, avec bienveillance et émotion. Je n'ai vu aucun ami, à part mon futur élève Dima, la mère de Katia Lioudmila, c'étaient tous des inconnus. Pour les amis, il reste la présentation chez Iouri. 

J'étais et je suis encore si fatiguée, parce que la mort de Chocha m'a terriblement secouée, j'ai mal dormi toute la semaine. Je commence juste à revenir à moi, à retrouver mon calme.

J'ai dit au père Valentin que je faisais une dépression saisonnière. "Oui, moi aussi, me répond-il, je commence à me sentir mieux quand je vois arriver Noël, parce qu'après nous basculons de l'autre côté, celui des jours qui grandissent."

C'est exactement ce que je ressens. Quand vient d'abord la neige qui éclaire tout, puis les illuminations festives, les guirlandes, les bougies, les lanternes, les boules, les sapins décorés, tout ce qui est profané et saccagé en France au nom de toutes sortes de conneries viles, stupides et méchantes qui nous font de plus en plus ressembler à l'Ukraine, défigurée par les USA et ses séides.

Il m'a dit que "de l'autre côté", tout nous apparaîtrait dans une perspective bien différente. J'ai eu une pensée pour une amie catho qui s'était écriée devant moi en joignant les mains: "Il nous reste à connaître la mort, c'est passionnant, la mort!"

Il m'a montré trois livres de Céline récemment traduits en russe. Il trouve qu'il ressemble à Varlam Chalamov, de visage et de tempérament.

Le fils d'une amie russe a voulu partir au front bien qu'il ne fût pas mobilisable, pour raisons de santé. Ce jeune homme est une grande plante sensible, un poète, un mystique, avec une chevelure bouclée, sa mère était dans les transes, mais c'était pour lui une question de respect de soi. Il vient d'être démobilisé, la boule à zéro, après deux pneumonies très graves. Il a un air paisible, assuré, il est devenu viril. On ne l'envoyait pas directement se battre, il s'occupait de l'intendance et de l'aide aux blessés. Les autres soldats l'appelaient le samouraï. 

En rentrant, j'ai trouvé chez une amie russe la nouvelle que le petit-fils de De Gaulle voulait obtenir la nationalité russe, ce qui m'a fait un drôle d'effet. Mais tous les échos qui me viennent de France semblent démontrer que les indigènes franchouillards, catholiques ou apostats, n'y sont plus chez eux. 

2 commentaires:

  1. Je n'ai pas d'animaux domestiques mais mon frère, père de famille du genre très solide et dans l'action, a été secoué par la mort de sa chienne récemment, et je peux comprendre votre peine pour Chocha.

    "tous les échos qui me viennent de France semblent démontrer que les indigènes franchouillards, catholiques ou apostats, n'y sont plus chez eux."

    A une heure d'Annonay, un raid sanglant et fatal vient d'être commis par des sauvages qui ont attaqué la foule d'une fête de village dans la Drôme, à Crépol.
    « C’était un bain de sang. Des jeunes de cité ont encerclé la salle des fêtes et plantaient les gens à l’aveugle. Le videur s’est fait trancher les doigts. On faisait un massage cardiaque à un jeune par terre. C’était le chaos », souffle Maxence, 18 ans, les yeux rougis.
    Hugo, 18 ans, a assisté, impuissant, au drame : « J’étais vers l’entrée et j’ai vu Thomas se faire planter un couteau dans le cœur et dans la gorge. Un hélico l’a emmené à Lyon, mais il y est passé malheureusement. Je suis choqué parce que c’était un collègue à moi, on a fait du rugby ensemble, on était au collège ensemble, et je l’ai vu mourir. Il y a eu une bataille entre les agresseurs et ceux qui ont eu le courage de leur faire face. »
    Que feraient des Cosaques après une chose pareille ?

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