Après le mois de février au mois de décembre, nous avons le mois de mars pour le solstice d'hiver, qu'aurons-nous donc au mois de janvier? J'ai vu que dans une ville russe, les rues étaient tellement verglacées que plus personne ne pouvait bouger, les enfants ne vont plus à l'école ni les adultes au boulot. Et ici, je n'ose plus tellement sortir non plus. Tout cela va évidemment regeler et se transfomer en patinoire.
Mais quand même, le solstice, c'est le moment où l'hiver bascule vers le printemps, où les jours recommencent à grandir, où la paupière se soulève. A partir d'après demain, nous irons vers la lumière, avec nos bougies, nos guirlandes et nos lanternes. Encore un peu plus de deux mois et on pourra guetter l'apparition des crocus et des jonquilles...
D'avoir choisi de venir en Russie ne me fait pas détester ni mépriser la France, au contraire, d'ailleurs, je l'aime mieux de loin que de près, car je finis presque par la voir à la façon des Russes, un pays merveilleux, encore intact, avec de superbes paysages, un art et une joie de vivre, un grand sens esthétique, mais c'est que ce n'est déjà plus ce que j'ai connu, ou alors quand j'étais petite... Si je déteste les griffes dans laquelle la France est tombée, je ne souhaite pas son malheur, ni son humilitation, au contraire, je les redoute, et même, je suis profondément perturbée par la perspective de sa disparition. Mais les Russes qui ont choisi de partir, ces derniers temps, au pays de la démocratie et des droits de l'homme n'offrent pas le même tableau. Je suis tombée sur une vidéo d'une Russe résidant depuis 30 ans en Italie, pour cause de mariage avec un Italien. C'est une femme intelligente et cultivée, guide. Elle fait une réponse au célèbre écrivain de polars Boris Akounine, qui a quitté le Pays Maudit pour le paradis démocratique en 2014, par solidarité de principe avec ceux qui détestent son pays et lui veulent la peau. A noter, comme il le précise lui-même, qu'il est toujours publié sans problèmes dans la tyrannie qu'il a fuie. Il vient de se faire piéger par les non moins célèbres Vovan et Lexus, qui se sont fait passer pour un membre du gouvernement ukrainien, et tout ce qu'il dit fait dresser les cheveux sur la tête. La Russe italienne lui dit toute sa déception, proclame qu'en ce qui la concerne, comme moi, d'ailleurs, elle a deux patries, la Russie qu'elle défend, l'Italie où elle vit et qu'elle aime. Et d'ailleurs, dans cette vidéo, ce qui est intéressant, c'est qu'elle défend l'Italie autant que la Russie, en traçant le tableau de ce qui existe réellement dans le paradis européen choisi et revendiqué par Boris Akounine: la liberté d'expression disparue, la situation de pays occupé, non souverain depuis la dernière guerre, soumis aux diktats américains, envahi par la terre entière; l'appauvrissement des citoyens qui ne peuvent plus joindre les deux bouts, les paysans et les petites entreprises ruinés par les sanctions. Un tableau complet, intelligent, argumenté.
https://youtu.be/S04jofqm--4?si=pP0SlbevA7dpw_zQ
Boris Akounine, comme beaucoup de libéraux, est pour la fragmentation de la Russie en une infinité de républiques, selon le prédécoupage complètement artificiel des bolcheviques, qui ont fabriqué cette bombe à retardement. Lui-même est géorgien, il publie sous un pseudonyme russe, se prétend russe. Il explique d'un air grave et pénétré, que la Russie est une "menace pour le monde". Ah bon? Et sur quoi se base-t-il, à l'heure actuelle, pour affirmer cela? Je me rends compte que même au temps de la guerre froide, si l'URSS cherchait à étendre son influence dans le monde, économique, culturelle ou politique, elle ne serait jamais sortie des limites du glacis établi par Staline autour de son fief, quand un pays est de cette taille, on a déjà assez de problèmes pour le gérer. La menace russe ne servait qu'à justifier la colonisation américaine. Poutine lui-même ne s'est décidé à reprendre la Crimée, puis le Donbass, qui ne demandaient que cela, qu'à force d'être harcelé par l'OTAN. En revanche, une tyrannie mondiale jetée comme un filet indestructible sur l'ensemble des pays, par l'intermédiaire de castes locales entièrement acquises au cerveau central et d'organismes internationaux qui sont autant de moyens de contrôle, cela me paraît beaucoup plus inquiétant. Je ne comprends même pas comment quelqu'un d'intelligent, et d'intellectuellement honnête, peut ne pas voir qui, depuis des décennies, fiche partout la pagaille sanglante, mais c'est sûrement la haine, ou l'orgueil, qui lui troublent le jugement, sinon, il verrait aussi ce qu'évoque Ekaterina Santoni et dont me parlent nombre de correspondants. A moins qu'il ne soit juste candidat à l'entrée dans cette secte mondialiste qui fait notre malheur et voudrait achever la Russie. Mais bon, des gens qui vivent dans une réalité parallèle, depuis ma jeunesse, j'en ai vu un paquet. Surtout chez les intellectuels.
https://youtu.be/Bu3H-IUAWdE?si=hMCh27F9u4IqyfX-
https://youtu.be/WtVPATZCcio?si=3IpAG9eP-lL7e9zB
Pour parvenir à ses fins, il donne explicitement la recette qu'on applique déjà en Russie, comme partout ailleurs, et qui détruit la France: pourrir le pays de l'intérieur. Il n'y a pas de meilleur moyen, dit-il. Jusqu'à une période récente, on appelait les gens comme lui des traîtres. Est-ce parce qu'au fond, il est géorgien, bien qu'il se revendique russe? Mais non, même pas, il y a des Russes comme cela. Et tout ce qui s'est passé ou se passe là bas, il ne veut pas le savoir, il est prêt à livrer au désastre que connaissent l'Ukraine, ou les pays du moyen Orient, la Russie toute entière, sans compter que l'Europe y passerait aussi, elle y passe déjà. Non, c'est Moscou, le danger universel, il faut le voir discuter avec cet air grave de l'intellectuel qui a tout compris, c'est un poème, j'en suis positivement fascinée: pas l'ombre d'un doute, et il dispense ses conseils au pseudo-chef d'état qu'il croit lui faire face...
Dans le même temps, un autre intellectuel, le journaliste orthodoxe ukrainien Dmitri Skvortsov, est emprisonné pour avoir défendu son Eglise persécutée. Il fait signe de sa prison, avec l'icône de saint Nicolas, dont c'était la fête hier. D'après ce que j'ai compris, Ian Illitch Takhtiour, qui m'avait invitée, a eu le temps d'être échangé avec des prisonniers ukrainiens, mais pas lui. Je suppose qu'Akounine ne veut même pas en entendre parler. https://vk.com/wall355949337_29940
Ce qui me déplaît en Russie, c'est davantage les cicatrices de ce qui fut que ce qui se passe aujourd'hui. En France, pour y revenir, c'est le contraire. Mais je vois bien que la France et la Russie sont victimes du même mal, il n'est plus si virulent chez la première, il se déchaîne chez la seconde. Il y a eu tant de dégâts de faits, depuis cent cinquante ou deux cents ans, que je ne sais comment l'une et l'autre se relèveront de tout cela, ni quel monde est en train d'émerger, mais en commentaire de la vidéo de Ekaterina Santoni, la jeune Russe qui l'a postée se montre optimiste. Elle pense que c'est la fin de la caste, de la secte, et que c'est la Russie qui lui écrasera la tête. Elle exprime une pensée qui me soutient depuis bien longtemps: "Il n'y a pas de système éternel". En effet, et j'aurai au moins vécu assez pour commencer à voir tomber tous ces masques, et démonter ces impostures. Je ne suis pas certaine que Boris Akounine ai fait le bon choix, et pas seulement sur un plan éthique.
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