La fête de la Croix coïncidait avec celle des quarante martyrs de Sébaste, cette année, qui est aussi le jour où les enfants appellent les oiseaux migrateurs avec des petites chansons et où l'on cuit des biscuits en forme d'oiseaux. Je suis donc allée pour les vigiles à l'église de ces mêmes martyrs, à l'embouchure de la rivière Troubej. Je suis allée m'élargir l'esprit devant le lac, avant l'office. Le temps s'était bien rafraîchi, il soufflait un vent glacial.
J'aime bien cette église, je la trouve très jolie, et on y a déplacé le père Ioann, que j'aime bien aussi. Je voulais me confesser à lui, mais c'était un office épiscopal, pas le temps. L'office a été très long, trois heures, mais magnifique; non par les chants, qui étaient très bien, mais enfin ce n'était ni Valaam ni la Laure de la Trintié-Saint-Serge, mais par la ferveur, et une espèce d'atmosphère d'allégresse et d'amour qui est, je crois, suscitée par notre évêque Théoctyste: il émane de lui tant de bonté, d'intelligence, et cet humour malicieux qu'ont souvent les grands spirituels. Je voyais fondre des rangées de vieilles, dont je faisais partie, mais aussi des jeunes gens, des cosaques, et le clergé lui-même, tout le monde aime Théoctyste. Il y avait aussi peut-être dans cette joie, et cet amour ambiant, le bonheur d'être ensemble autour de la croix, face aux ténèbres montantes, quelque chose de ce que l'on ressent quand on voit les Ukrainiens autour de leur métropolite Onuphre ou de l'archevêque de Vinnitsa Barsanuphe. En de tels moments, de tels hiérarques, par ailleurs si simples et proches des gens, sont vraiment des princes de l'Eglise, nos derniers princes, et nous comprenons combien il est doux de vénérer, d'offrir son front à la main bénissante, son sourire au regard chaleureux et encourageant qui prend en considération chacun de nous. Nous étions tous heureux d'être en sainte Russie, au pied de la croix, avec notre prince évêque Théoctyste.
Sauve Seigneur ton peuple, et bénis ton héritage...
Beaucoup de gens ricanent à ce sujet dans les fils de commentaires, ils ne comprennent pas que courber le front devant quelqu'un qu'on respecte nous grandit. Ces gens-là me glacent le sang. Pour moi, il n'y a plus parmi eux ni Russes, ni Français, mais le peuple indifférencié de l'antéchrist uni seulement par la bêtise, la méchanceté, la médiocrité revendiquée et un incommensurable orgueil.
Au retour, j'ai vu que le ciel était pur et plein d'étoiles, presque comme à Solan le soir de Noël.
Je voulais retourner le lendemain aux quarante martyrs, mais je suis si lente à réagir que l'heure était passée, je suis allée à la cathédrale. J'ai communié avec joie, la joie de la veille, et je ne sais combien de temps cela nous restera possible, à Moscou, on prend déjà des mesures qui dénaturent la liturgie et l'eucharistie, quand à l'occident, il profite du virus pour tout interdire et arrêter les ecclésiastiques contrevenants. Mais je m'en remets à Dieu. Malgré toutes les questions que je peux me poser, je crois en l'eucharistie, et je crois dans tous les signes eschatologiques qui nous sont donnés.
Je conseille au passage la lecture du remarquable article du père Elie de Terrasson:
https://www.monastere-transfiguration.fr/au-feu.html?fbclid=IwAR3YPAbX1psr3fl5j8O0BvQtjB9xbovgk0xYSnaqJENGzxDTRuwEiMXJZ98
J'ai vu un cosaque que je connais un peu, c'est une famille qui me plaît beaucoup, ils ont plein de gosses, le petit dernier, Gricha, est très rigolo, je l'ai aidé hier à raccrocher son pantalon, j'ai fait cela pendant vingt ans à la maternelle. Il prend toujours des airs de gros dur, et porte souvent une chapka cosaque. Son père m'a demandé si je me faisais du souci pour la France:"Et comment ne pas m'en faire? La France est aux mains de malfaiteurs internationaux et de leurs satrapes, qui vont en faire un énorme Kosovo, et l'histoire du virus me fait peur autant par les aspects sanitaires que par la criminelle gestion de ces gens-là et les conséquences que cela nous prépare!"
Le cosaque Alexandre ne croit pas au virus, il pense que c'est une énorme manipulation, ce qui est sans doute excessif, encore que si le virus me semble bien réel, on peut se poser toutes sortes de questions sur son apparition opportune et l'exploitation qu'on en fait. Il avait à coeur de m'expliquer que la France devait trouver son salut dans la restauration d'une monarchie orthodoxe et que pour ce faire, il fallait commander une icône où figureraient les saints français et les saints russes, et que financeraient des Français et des Russes.
A la suite du séjour des poètes, j'ai décidé de fermer la communication entre ma cuisine et la partie des hôtes, en gardant un accès par l'entrée de derrière. J'en ai fait une niche, avec des étagères, cela me plaît bien, j'espère que les chats n'iront pas tout casser. Monsieur Schtroumpf est tout à fait euphorique, il me témoigne une affection débordante, et il est extrêmement comique et expressif.
J'ai deux jeunes amis russes qui se sont exilés au Monténégro et y recueillent des chats, il paraît qu'ils sont là bas très malheureux, et ils se sont pris de passion pour ces animaux, dont ils décrivent avec humour et tendresse le caractère et les aventures. Fédia est à présent handicapé. Et Katia a eu la malencontreuse idée d'aller à Moscou, la voilà coincée là bas, loin de son mari, et des chats, pour une période indéterminée. Pourtant, il n'y a pas de cas au Monténégro, pour l'instant, et à Moscou, on est loin de la situation européenne mais on lui a refusé l'accès. Cette histoire me bouleverse, car cela ne va pas être simple pour Fédia et ses protégés, et l'on ne sait ni combien de temps cela va durer, ni comment cela va se terminer. J'en avais ce matin la larme à l'oeil.
J'aime bien cette église, je la trouve très jolie, et on y a déplacé le père Ioann, que j'aime bien aussi. Je voulais me confesser à lui, mais c'était un office épiscopal, pas le temps. L'office a été très long, trois heures, mais magnifique; non par les chants, qui étaient très bien, mais enfin ce n'était ni Valaam ni la Laure de la Trintié-Saint-Serge, mais par la ferveur, et une espèce d'atmosphère d'allégresse et d'amour qui est, je crois, suscitée par notre évêque Théoctyste: il émane de lui tant de bonté, d'intelligence, et cet humour malicieux qu'ont souvent les grands spirituels. Je voyais fondre des rangées de vieilles, dont je faisais partie, mais aussi des jeunes gens, des cosaques, et le clergé lui-même, tout le monde aime Théoctyste. Il y avait aussi peut-être dans cette joie, et cet amour ambiant, le bonheur d'être ensemble autour de la croix, face aux ténèbres montantes, quelque chose de ce que l'on ressent quand on voit les Ukrainiens autour de leur métropolite Onuphre ou de l'archevêque de Vinnitsa Barsanuphe. En de tels moments, de tels hiérarques, par ailleurs si simples et proches des gens, sont vraiment des princes de l'Eglise, nos derniers princes, et nous comprenons combien il est doux de vénérer, d'offrir son front à la main bénissante, son sourire au regard chaleureux et encourageant qui prend en considération chacun de nous. Nous étions tous heureux d'être en sainte Russie, au pied de la croix, avec notre prince évêque Théoctyste.
Sauve Seigneur ton peuple, et bénis ton héritage...
Beaucoup de gens ricanent à ce sujet dans les fils de commentaires, ils ne comprennent pas que courber le front devant quelqu'un qu'on respecte nous grandit. Ces gens-là me glacent le sang. Pour moi, il n'y a plus parmi eux ni Russes, ni Français, mais le peuple indifférencié de l'antéchrist uni seulement par la bêtise, la méchanceté, la médiocrité revendiquée et un incommensurable orgueil.
Au retour, j'ai vu que le ciel était pur et plein d'étoiles, presque comme à Solan le soir de Noël.
Je voulais retourner le lendemain aux quarante martyrs, mais je suis si lente à réagir que l'heure était passée, je suis allée à la cathédrale. J'ai communié avec joie, la joie de la veille, et je ne sais combien de temps cela nous restera possible, à Moscou, on prend déjà des mesures qui dénaturent la liturgie et l'eucharistie, quand à l'occident, il profite du virus pour tout interdire et arrêter les ecclésiastiques contrevenants. Mais je m'en remets à Dieu. Malgré toutes les questions que je peux me poser, je crois en l'eucharistie, et je crois dans tous les signes eschatologiques qui nous sont donnés.
Je conseille au passage la lecture du remarquable article du père Elie de Terrasson:
https://www.monastere-transfiguration.fr/au-feu.html?fbclid=IwAR3YPAbX1psr3fl5j8O0BvQtjB9xbovgk0xYSnaqJENGzxDTRuwEiMXJZ98
J'ai vu un cosaque que je connais un peu, c'est une famille qui me plaît beaucoup, ils ont plein de gosses, le petit dernier, Gricha, est très rigolo, je l'ai aidé hier à raccrocher son pantalon, j'ai fait cela pendant vingt ans à la maternelle. Il prend toujours des airs de gros dur, et porte souvent une chapka cosaque. Son père m'a demandé si je me faisais du souci pour la France:"Et comment ne pas m'en faire? La France est aux mains de malfaiteurs internationaux et de leurs satrapes, qui vont en faire un énorme Kosovo, et l'histoire du virus me fait peur autant par les aspects sanitaires que par la criminelle gestion de ces gens-là et les conséquences que cela nous prépare!"
Le cosaque Alexandre ne croit pas au virus, il pense que c'est une énorme manipulation, ce qui est sans doute excessif, encore que si le virus me semble bien réel, on peut se poser toutes sortes de questions sur son apparition opportune et l'exploitation qu'on en fait. Il avait à coeur de m'expliquer que la France devait trouver son salut dans la restauration d'une monarchie orthodoxe et que pour ce faire, il fallait commander une icône où figureraient les saints français et les saints russes, et que financeraient des Français et des Russes.
A la suite du séjour des poètes, j'ai décidé de fermer la communication entre ma cuisine et la partie des hôtes, en gardant un accès par l'entrée de derrière. J'en ai fait une niche, avec des étagères, cela me plaît bien, j'espère que les chats n'iront pas tout casser. Monsieur Schtroumpf est tout à fait euphorique, il me témoigne une affection débordante, et il est extrêmement comique et expressif.
J'ai deux jeunes amis russes qui se sont exilés au Monténégro et y recueillent des chats, il paraît qu'ils sont là bas très malheureux, et ils se sont pris de passion pour ces animaux, dont ils décrivent avec humour et tendresse le caractère et les aventures. Fédia est à présent handicapé. Et Katia a eu la malencontreuse idée d'aller à Moscou, la voilà coincée là bas, loin de son mari, et des chats, pour une période indéterminée. Pourtant, il n'y a pas de cas au Monténégro, pour l'instant, et à Moscou, on est loin de la situation européenne mais on lui a refusé l'accès. Cette histoire me bouleverse, car cela ne va pas être simple pour Fédia et ses protégés, et l'on ne sait ni combien de temps cela va durer, ni comment cela va se terminer. J'en avais ce matin la larme à l'oeil.