Ma présentation à Moscou a eu lieu, mais c’est un coup d’épée dans l’eau. Même mes amis ne sont pas venus en masse, ca se bousculait moins que pour mes anniversaires. Volodia avait oublié, et il est venu avec beaucoup de retard, je n’ai pas vu les autres cosaques. Aucun représentant de la famille Asmus ni du clergé de Krasnoselskaïa, trop fatigué par les services dominicaux. A part un journaliste, tous ceux qui m'avaient interviewée, ou pour qui j'avais même un peu travaillé, ne se sont pas dérangés. L’éditeur Slava m’a dit qu’il fallait appeler les gens un par un, qu’ils étaient très difficiles à bouger. Il me propose de tout m’éditer et de traduire lui-même Epitaphe, mais je ne sais pas comment je pourrai financer... enfin je pourrais, mais il faudrait que ce fût un minimum rentable pour ne pas finir dans une cabane à déplacer des casseroles sous les fuites d'eau. Et faire la promotion me prend une énergie et un temps que je ne consacre pas à la création...
Liouba a fait tout un discours sur mon livre, sur le chemin spirituel de Fédia qui, déjà débauché, aspire à la pureté et à la beauté, et finit dans un épuisement lumineux, comme une espèce de jeune starets. Elle a parlé de mon amour pour le folklore et la culture russes ; de mes liens avec l’orthodoxie, le métropolite Philippe. De ma psychologie étonnante. Comment avais-je pu me mettre dans la peau de personnages aussi différents de moi ? J’ai répondu que je pensais ce que dit le tsarévitch Feodor à Fédia : que l'on sait tout de façon génétique, qu'à un certain niveau de l'âme, on entre en osmose avec toute l'humanité. D'ailleurs, pour ce qui est de Fédia, il m'est très proche, si j'avais eu son histoire, j'aurais peut-être réagi comme lui.
Iouri a dit que j’avais
en français une langue extraordinaire, et qu’il se demandait d’où ça pouvait me
venir. « Comment ça ? me suis-je étonnée.
- Eh bien oui,
une bonne femme, comme ça, qui vit dans sa maison avec des tas de chats, et on
s’aperçoit qu’elle a un style incroyable... C'est inattendu. »
Je ne sais pas
comment il faut vivre ou être quand on a un style incroyable ; visiblement,
la mère Gallimard se posait aussi ce genre de questions. Je n’avais pas la
gueule de l’emploi.
Je me suis sentie entourée d'une grande affection. On m'a dit que grâce à moi, beaucoup de Russes commençaient à s'intéresser à leur propre culture. Mais ce qui m’a
le plus touchée, c’est ma voisine Ania : «Votre livre est tellement plein
d’amour, un amour qui laisse un goût de miel amer. Il faut avoir connu beaucoup
d’amour pour l’avoir écrit, ou peut-être en avoir beaucoup manqué. Parfois, en
le lisant, j’ai envie de pleurer. »
J’aurai du mal à
faire la promotion de ces livres qui plaisent beaucoup à ceux qui les lisent,
mais qui ne bénéficient d’aucune publicité.
Iouri lit un extrait |
Rita est de plus en plus tyrannique. Les mondanités l'énervent, et puis je suis occupée par des tas de gens et ne lui accorde pas assez d'attention. Elle grogne sur tout le monde, même ceux qu'elle aime bien. A la fin d'une chanson de Skountsev, elle s'est mise à hurler, juste sur les dernières notes, on aurait cru que nous avions répété.
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