Retour de froid polaire, il gèle la nuit et le jour, il souffle un vent glacial. J'avais le projet d'aller à Moscou, mais je me suis arrêtée à Serguiev Possad, où j'avais rendez-vous à la clinique des yeux pour commander un cristallin. J'ai passé la nuit chez la matouchka Alexandra, c'est-à-dire maintenant, chez sa fille Hélène. Cela m'a fait un drôle d'effet de ne pas la voir dans cette maison où elle tenait tant de place. Je devais continuer ma route le lendemain, mais j'ai compris que je n'étais pas assez habillée et que je risquais d'attraper la mort, j'ai tout remis au week-end prochain et j'ai fait demi-tour. Le lendemain, je suis allée à l’église du père Ioann. La liturgie commence très tard, il faut sortir de la ville, prendre la grand route encombrée. Le père Ioann ne demande qu’à parler. Je lui ai dit que tout me blessait, des nouvelles affreuses me sautent aux yeux et me poursuivent ensuite toute la journée. il m’a recommandé de bénir tout ce que je pouvais, la journée qui commence, ce que je vois de bien, les gens que je croise, y compris ceux qui m’énervent. Pendant le reste des confessions, je suis sortie regarder l'espace, avec dans mon dos le fracas de la route, et devant, un énorme nuage qui déversait de la lumière dans le vide, où était le silence.
Au retour, j'ai été prise dans une tourmente de grésil qui effaçait tout sur son passage. Je suis allée au café, avec ma petite Rita qui tousse, car pour elle, c'est la fête, plus encore que pour moi. J’ai vu Gilles, Lika et Maxime, c’est le petit club français. Puis j’ai jardiné, mais j’ai de plus en plus de mal à faire face, j’ai mal partout et beaucoup moins de forces. Ceux qui posent d’affreuses barrières métalliques d’usine autour de leur maison font généralement des portails qui ferment mal et claquent sinistrement quand le vent souffle, ce qui est très éprouvant pour les nerfs. Du mutant moderne ne proviennent que de la laideur et du bruit. Pourtant, des passants se sont extasiés sur mes fenêtres en losange, qui améliorent beaucoup ma façade et donnent plus de lumière à la mansarde. Je les aurais souhaitées un peu plus petites, mais on n'a pas trouvé.
Katia est passée me voir, nous sommes allées au « Hérisson repu ». Son Fédia n’a pas le moral et elle non plus. « Nous tenons par nos seules prières, c’est nos prières qui le gardent en vie », me dit-elle. Mais au fond, elle avoue être optimiste, en ce qui concerne Fédia et en ce qui concerne la guerre, car « si nous la perdons, ce sera si affreux que je ne peux même pas l’imaginer ». Et en effet, moi non plus. « Notre guerre est sainte, me dit-elle, car ce qu’ils visent et détestent, c’est notre Eglise, c’est notre foi, c’est ce que nous sommes. Mais au communisme a succédé le consumérisme : tout ce que vous voulez, si vous me payez. L’argent justifie tout. C’est comme s’il y avait ici deux populations différentes. Un petit troupeau russe, et tout le reste.
- Oui, la
différence c’est la foi. Sans la foi, beaucoup s'avilissent et se dégradent, sans la foi, je serais devenue folle.
- C’est aussi
ce que disait saint Païssios. »
Nous avons bien consciencequ'il s'agit d'un combat métaphysique entre le bien et le mal, et
nous croyons à la victoire de la Russie, qui ne sera pas celle de ses généraux,
ni de ses fonctionnaires, mais celle de ses soldats harassés, et de tous ceux
qui les soutiennent et qui prient, et celle de Dieu qui ne peut pas laisser de
sinistres mafias détruire complètement l’humanité. Et je revoyais, en discutant
avec elle, le regard épuisé et douloureux de Dmitri le cosaque, levant son
poing serré : « Nous vaincrons, parce que Dieu est avec nous ».
En sortant du restau, nous sommes tombées dans les bras l’une de l'autre. Elle ne voit pas de fin à cette guerre avec l’Ukraine, qui, si elle ne capitule pas complètement, ne nous laissera jamais en paix. Mais j’ai depuis un moment l’intuition que Trump et ceux qui le soutiennent voudraient se débarrasser du problème pour se concentrer sur le moyen-orient. J’ai vu une vidéo qui va tout-à-fait dans ce sens. Je suis convaincue que si Macron et Zelenski font les caques avec tant d’arrogance, c’est qu’ils ont de gros parrains qui les y poussent, en espérant se débarrasser de Trump, et Slobodan a raison de considérer l’Europe comme la position de repli de l’état profond. Il y a certainement des divergences dans la mafia, ceux qui se cramponnent à l’Ukraine et ne veulent pas renoncer à démembrer la Russie, et ceux qui, plus pragmatiques, se rabattent sur le grand Israël et les ressources du moyen-orient, le gaz et le pétrole.
Il y a quelques jours, Kostia m'a emmenée voir les terrains sur lesquels il voudrait construire un lotissement pour les étrangers, enfin pas seulement pour eux, d'ailleurs. La route est très bonne, et il y aura le gaz, car une huile locale a son domaine dans le coin. Le paysage est magnifique, cela me serre même le coeur de penser qu'on y bâtira des maisons, et lesquelles? Kostia a cependant la bonne idée de garder un parc au milieu de son lotissement, où les gens pourront se promener et qui aboutira à la rivière et à une plage. C'est quand même à 26 km de Pereslavl; mais, dit-il, il y a une gare à 7 km. Il paraît qu'on pourrait y pratiquer l'agriculture.
Près de cet endroit, se dresse une église que j'ai visitée il y a longtemps, et j'en connais le prêtre, le père Andreï, en revanche, je ne connaissais pas sa femme qui m'a paru une véritable fontaine d'amour et de modestie. C'était un vrai bonheur que de se trouver dans le périmètre de sa radieuse personne. Kostia nous a fait une photo.
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