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dimanche 4 août 2024

L'autre monde

 


Comme je parlais à Gilles des taux de placement mirifiques qu’on offre en ce moment à la Sberbank, il m’a répondu que c’était juste la Banque centrale qui coulait l’économie russe, et la cinquième colonne à l’oeuvre. « Et alors que fait le gouvernement ?

- Il a d’autres chats à fouetter ».

Ensuite Vitalina m’a demandé, d’un air significatif, ce que je pensais de la cérémonie d’ouverture des jeux. «Que voulez-vous que j’en pense ? Ce que pense toute personne normale dotée d’un soupçon de bon sens et de sens moral ».

Il pleut sans arrêt, et j’ai même dû chauffer un peu pour sécher la maison, le linge. Pas moyen de rester sur la terrasse. Je sens que cette période débouchera sur le mois de septembre, fini l’été, les baignades et la lumière. Je ne profite même pas de mes fleurs. Mais bon, j’ai des fleurs, j’ai un toit sur la tête, et un moyen de réchauffer l’atmosphère à l’intérieur. De plus, en allant me promener avec Vera qui vient d'arriver de Suisse, j'ai entendu une radio déchaînée, puis une surprise-partie avec chachlik, le problème est universel. Au retour, j'avais devant chez moi toute la bande des petits tarés sur leurs motos. S'ils savaient l'aversion qu'ils m'inspirent, cela leur donnerait le vertige. Quoiqu'en réalité, ils s'en fichent complètement, peut-être même qu'être odieux à tout le monde leur procure une sorte de fierté, une illusion de puissance. Dans le quartier, je suis peut-être la seule à ne pas les avoir encore engueulés, mais pour que cela eût de l'effet, il faudrait qu'un grand méchant loup leur fichât une trouille bleue. Comme je comparais ces petits emmerdeurs aux garçons russes magnifiques qui meurent au front, la mère Alexandra m’a répondu : «Ce sont les mêmes, c’est juste avant-après. Les uns sont forgés par les épreuves, les autres, non. » 



Elle a raison, il se passe là bas des choses révoltantes, mais il y a aussi des conversions massives, des miracles, et je préfère me focaliser sur ce dernier point, même s’il ne faut pas s’aveugler non plus sur ce qui ne va pas du tout. J’ai vu une émission sur des détenus qui se sont enrôlés, ils sont volontaires, encadrés par des prêtres, et visiblement transfigurés par ce qu’ils vivent, ils sont venus chercher leur rédemption, et apparemment, ils la trouvent. Tous parlaient de la peur terrible qu’ils éprouvaient, mais aussi de leur dignité retrouvée. La plupart des jeunes sont des enfants-loups culturels et spirituels qui n'ont rien reçu de ce qui fait un être humain normal. Au moins avec les motards russes, nous ne sommes pas menacés d'être battus à mort pour les avoir contrariés, comme dans les banlieues françaises...

Vera est arrivée hier, contrairement à ce que je pensais, elle ne parle pas du tout russe, à peine quelques mots, ses grands-parents n’ont pas transmis la langue à leurs enfants. Je l’ai emmenée ce matin à la cathédrale, où les paroissiens m’ont accueillie à bras ouverts. Vera avait la larme à l’oeil. Elle m’a dit ensuite que n’ayant connu que Moscou, elle n’imaginait pas trouver ici un tel délabrement et une telle désolation, ces rues défoncées, ces terrains vagues, ces maisons hétéroclites et affreuses, qu’avait-on fait du pays de ses ancêtres ? Et dire que les locaux sont si fiers d’avoir remplacé leurs maisons pittoresques et poétiques par des baraques en plastique ou des châteaux Disneyland... On ne peut pas dire que la station balnéaire de Moscou suscite l’enthousiasme des étrangers sur le plan esthétique, ça, c'est sûr.

D’un autre côté, elle se sent ici libre comme l’air, et en sécurité, comme Anne-Laure, et moi-même. Et les gens lui paraissent plus simples, spontanés et touchants. Elle m'a parlé de tout ce qui l'exaspérait et l'inquiétait dans la Suisse d'aujourd'hui, cela ressemble à ce qu'on me raconte de la France ou ce que j'y ai vu moi-même. Une sorte de folie oppressante, sournoise, de perversité et de fourberie... A un entretien d'embauche, on lui a demandé ce qu'elle pensait de "l'inclusion", de l'écriture inclusive et toutes ces sortes de délires. Elle a répondu qu'elle avait appris à parler et à écrire le français. "En somme, lui répond son interlocutrice, vous voulez que la société s'adapte à vous?" Comme si la société dans son ensemble, c'était elle, la bande de tarés qui la commandite, et la bande de tarés qu'ils élèvent en batterie, mais le problème est qu'effectivement, ils peuvent devenir majoritaires... Ce matin, notre diacre qui chante faux faisait dérailler toute l'église. Je me rendais compte que moi aussi, je me mettais à chanter faux, parce que je ne m'entendais plus moi-même, et que plus personne n'avait idée de la juste mélodie, et c'est ce qui arrive à l'humanité entière, sur tous les plans, elle sombre dans une cacophonie où plus personne ne peut discerner la juste mélodie de la vie.

Nous avons marché jusqu’au lac, parmi les dernières jolies maisons pittoresques, et tous les monstres. Au lac, le coucher de soleil était magique, et nous nous sommes assises sur des pierres pour le contempler, car le kiosque était bourré d’ordures laissées par les pique-niqueurs. Les nuages de Pereslavl constituent tout un autre monde qui flotte au-dessus du nôtre, un monde d’une immense beauté, d’un captivant mystère. Certains nous diront que nous projetons nos fantasmes sur des bouffées de vapeur, mais peu importe d’où viennent cette beauté, et ce mystère, du plus profond de nous, ou de la radieuse matière universelle, tout s’interpénètre et se complète, dans une âme vivante, le drame de l’humanité actuelle est de ne plus s’inscrire dans ce Tout adorable.




lundi 29 juillet 2024

Saint Michel Archange

 

J’ai vu Ania ce soir, elle-même est épuisée par les motos de son fils et de ses petits camarades. Elle les engueule sans arrêt, mais Ania n’est pas trop convaincante, dans ce rôle. Ils s’excusent et recommencent, parce qu’ils font ce qu’il leur plaît et nous emmerdent, à pied, à cheval et en moto. Le voisin désagréable ne vit pratiquement plus chez lui, et c’est dommage, car lui, leur aurait parlé de telle manière qu’ils se seraient calmés depuis longtemps. J’ai croisé un quad à quatre roues conduit par des gamins dont le plus âgé devait avoir dix ans. Comment des parents peuvent-ils être assez stupides pour lâcher leur progéniture sur ces engins de merde ?


Je suis allée à la liturgie chez le père Ioann, pour lui remettre l’icône de saint Michel. Il était ravi, enchanté, et toute sa paroisse avec lui : «C’est un si beau visage angélique, m’a-t-il dit, il en émane une véritable grâce... » Il me l’a donnée pour le porter en procession autour de l’église, puis on m’a montré les fresques qui avancent dans le sanctuaire. J'ai déclaré: "J'espère que saint Michel gardera la Russie de ce qui se passe en France, et sauvera la France des démons qui la dirigent".

Ensuite le père Ioann a offert le thé à tout le monde, c’était l’anniversaire de sa femme. Tout ce qu’il y avait à manger m’était interdit, mais depuis que je sais que mon état n’est pas catastrophique et que les mesures sont préventives, je m’autorise des écarts quand je suis invitée. Les gens ont beaucoup parlé de l’ouverture des jeux olympiques (les jeux olymflics, dit Yves Bataille). Ils n’en reviennent pas. Le père Ioann officie devant un ordinateur, parce que des orthodoxes de Chine et d’un autre pays se branchent sur sa liturgie le dimanche et la suivent sur Skype, faute d’église à proximité. Ces paroissiens de Chine étaient également scandalisés. Même chose avec mes amis journalistes Volodia et Mariana, que j’ai vus ensuite chez moi, le soir. «Ce n’est même pas une question de religion, me dit Volodia. A la limite, même un homme des cavernes ferait un rejet instinctif de toute cette vulgarité et de cette perversion. Cela rebute tout humain normal ». Moi, je n’ai pas pu voir le truc, parce que devant l’ampleur des protestations, Youtube a supprimé la retransmission. J’ai vu « les moments forts » sur une vidéo du Hufftington Post, et ce n’étaient justement pas les plus forts des moments. Puis j’ai surpris l’extrait avec la malheureuse reine Marie-Antoinette décapitée, dont la tête rugit d’une voix de poissarde le « Ah ça ira, ça ira, ça ira » de sinistre mémoire, prélude à un rock endiablé, endiablé est le mot juste. A la limite, je n’ai pas besoin de voir le reste, le poussah bleu enguirlandé, la Cène parodique des transgenres obèses sous les yeux ébahis d’une petite fille, tout est clair. C’est le triomphe des assassins de la France, et des dégénérés qui les suivent et les dirigent, comme l’organisateur de ce bordel, un certain Thomas Jolly, à la physionomie dépravée et impudente, digne de figurer dans le Satyricon de Fellini, et encore, le film de Fellini reste tellement plus esthétique et plus noble que cette bacchanale des bas-fonds. Chez lui, les bas-fonds sont sublimés par le talent... Ma tante Mano me parlait au téléphone de la bassesse intellectuelle dont elle avait vu, comme moi d’ailleurs, l’avènement dès mai 68. C’est bien de cela qu’il s’agit, d’une extraodinaire bassesse intellectuelle, d’une médiocrité et d’une laideur triomphantes et décomplexées. La fin de la France est si triste, si indigne de ses débuts et de son apogée...

 Mais dans les commentaires, on voit se réjouir des gnomes du NOM, tout contents d’avoir « giflé l’extrême droite ». On se demande ce que c’est que l’extrême droite, d’ailleurs, tellement on l’a mise à toutes les sauces, mais je dirais que l’extrême droite c’est toute manifestation encore saine du corps social qui n’est pas eux et qui les rejette. A ces commentaires, on ne sait que répondre, ils viennent de si bas, qu’on ne peut les viser pour leur expédier un crachat, on a juste envie de sortir un flacon de Flytox et d'envoyer la purée. Dany m’a dit : « Quand on le peut, il faut partir de là bas en courant ». La France, fille aînée de l’Eglise, a sans doute été choisie pour être la première putain dans la maison close de Babylone, l'incendie de Notre-Dame en était le signe évident.

Ces créatures des ténèbres, parallèlement à la licence essentiellement sexuelle proposée par ce spectacle qui les met positivement en transes, circulent à Paris derrière des grilles, avec leurs petits QR codes, fliqués à mort et fliquant eux-mêmes les autres avec ivresse et conviction. A côté de ces gnomes actifs, il y a tous les neuneus qui soupirent : «Ben quoi ? Où est le problème ? Un peu d’humour ! Pensez à tout le travail de ces artistes et de ces sportifs, pourquoi tout voir en noir ? »

Je me demande si ce ne sont pas là ceux que je préfère, tous ces abrutis qui descendent joyeusement la pente et y précipitent leurs gosses, pour lesquels je prie tous les jours saint Nicolas tant ils sont mal barrés: "Saint Nicolas, intercède pour les enfants qui tombent aux mains des monstres, pour ceux dont on fait des monstres, en ne leur donnant pas ce dont leur âme a besoin, et pour les enfants de ma famille, pour qu'ils restent à l'écart de ce maelstrom de vice et de stupidité".

Et puis là dessus, je n’ai pas été étonnée de voir une vidéo de Jacques Attali, le mauvais génie de la République sioniste maçonne, déclarer que tout cela était voulu, planifié, et qu’on verrait, dans dix ans, si c’était là le prélude au « merveilleux Nouveau Monde » souhaité par lui et sa bande de tarés, ou si la planète refluerait dans la réaction et l’obscurantisme. Oyez bonnes gens, et ouvrez les yeux. Demandez-vous un peu d'où ça vient et ou cela nous conduit.

https://crowdbunker.com/v/fEz5oQ3ZmN

Avec la photo ci dessus, le père Ioann m'a envoyé une citation de saint Nicolas de Serbie: "Qui a l'espérance, celui-là vaincra. L'espérance, comme une étincelle dans les ténèbres des tourments, réconforte dans les épreuves. Espère dans le meilleur, et le meilleur adviendra. L'espérance est ce qui relie ton âme aux Cieux. C'est sur ses marches que viendront vers toi la victoire et le salut."

J'ai toujours gardé l'espérance, et je la garde encore.

Кто имеет надежду, тот и побеждает. Надежда как огонек во мраке мучений, ободряет в страдании.

Надейся на лучшее, и лучшее придёт. Надежда --- это лестница, связывающая душу твою с небесами. По ее ступенькам придёт к тебе победа и спасение.

Comptine

En m’en allant couper du bois

J’ai cru rencontrer notre roi

 

J’ai cru rencontrer notre roi

Qui s’en allait tôt d’un bon pas

 

Notre bon roi qui s’en allait

Tôt le matin vers la forêt

 

Pour y chercher les enfants bleus

Qui pour jamais s’y sont perdus

 

Petits enfants des cieux venus

Que nous avions tant attendus

 

Qu’on nous a jadis enlevés

Qu’on nous a jadis égorgés

 

Qui sous les sapins reposaient

Qui dormaient puis se sont levés

 

Qui l’ont suivi dans le brouillard

L’armée dorée des enfants morts

 

Malheur à ceux qui les ont tués,

Car notre roi les trouvera

 

Les trouvera et les pendra

A la nuit les fera mourir

 

En enfer ils iront rôtir

Sans jamais pouvoir en sortir !


mercredi 24 juillet 2024

Frénésie

 

La russification passe par la salaison des cornichons


Aujourd’hui, j’ai senti que nous basculions déjà vers l’automne. Nous passons sur le versant automnal de l’été, et c’est venu d’un seul coup. Il fait plus frais, avec du vent, les feuilles de la viorne aubier commencent à rougir, celles des cassissiers à durcir, la végétation n’a plus cette exubérance verte et coriace, elle se fatigue. Mes astilbes sont fanées, à part celles qui fleurissent plus tard que les autres. Et je vois pointer les boules d’or et toutes les fleurs d’automne. Les soirées raccourcissent.

J’ai récupéré Rita, au café. Elle ne m’a pas vue arriver, elle dormait près de Lika, et elle a levé la tête quand elle a entendu ma voix. Elle était très contente mais sans frénésie, et tant mieux pour son coeur. 

En fait, j’étais complètement malheureuse sans Rita et je redoute beaucoup sa fin qui va arriver dans les prochaines années. Je l’ai emmenée promener, j’ai pensé que ce serait bien pour nous deux, je suis énorme et elle a pas mal grossi depuis son opération. Mais elle déteste marcher, et le fait qu’elle ne veuille pas de la laisse n’est pas du tout pratique, je m’arrête sans arrêt pour voir où elle est. J’ai fini par la prendre dans mon sac-à-dos et elle a eu beaucoup de succès sur la plage municipale. Je suis allée sur l’espèce de jetée, on y a ménagé deux sièges de bois, et j’ai dessiné le lac, au pastel gras. Rita était couchée près de moi.

En chemin, j’ai vu les progrès de la laideur et du chaos dans le quartier. La plage n’a pas été mal arrangée, pour une fois, mais les maisons... Il en reste de très jolies, mais elles sont bien isolées, au milieu des architectures wokes venues de nulle part. Il y en a une qui est moderne mais que j’aime bien, elle est harmonieuse, elle a un style russe sans excès, seulement elle est flanquée d’une horreur mauve à qui il ne manque qu’une faveur rose géante pour ressembler à une boîte de savons bon marché comme on en donne quand on ne sait pas quoi offrir. Ailleurs, toujours dans la même tonalité, une isba s’est retrouvée flanquée d’un auvent en polycarbonate transparent fuschia qui, avec le soleil, jette des éclairages de discothèque sur la camionnette du propriétaire, c’est tellement moche que je ne trouve plus les mots pour décrire cela. Et puis j’ai croisé deux camions de terre brinquebalants, et encore un camion de transport, et j’ai vu qu’on construisait frénétiquement dans la zone humide qui borde le lac. Or le lac est un organisme, que tous ces imbéciles étouffent progressivement.

Ici, cela reste charmant et naturel, pour combien de temps?


J’ai vu que la Douma avait rejeté un projet de loi consistant à ne pas donner aux migrants fraîchement arrivés de « capital maternel », cette somme rondelette qui permet aux familles nombreuses de se loger plus facilement. C’est-à-dire que pendant que les soldats russes combattent pour la sauvegarde de leur pays et de leur culture, on leur prépare le Brésil à l’arrière. Apparemment, c’est comme chez nous, les « migrants » arrivent à vivre royalement de différents subsides, ce qui les encourage à venir en rangs serrés.

l'auvent en polycarbonate et la palissade en profnastyl...

Je trouvais que Dany exagérait quand elle me parlait des beaufs débraillés moscovites à tatouages et cheveux bleus ou roses, mais cette année, ils grouillent à Pereslavl, on se croirait à la Grande Motte. Dans le temps, je ne ressentais pas devant les Russes l’exaspération (et le chagrin) que m’inspirait la plèbe française estivale, je trouvais les Russes simples et touchants, mais sans doute que les Français l’étaient aussi, avant qu’on ne les pourrît et les abrutît. Je me demande si je ne devrais pas déménager chez le père Parthène, là où il y a peu de monde, beaucoup d’espace, de merveilleux paysages, de grands arbres, des hirondelles et des martinets, mais pas de moustiques et pas de touristes...

Les motos ont tourné toute la journée, et puis des engins vont et viennent dans le lointain, des camions passent avec fracas, on dirait que l’humanité devient folle, même ici, les gens sont pris d’une espèce de frénésie, ils circulent avec leur radio à tue-tête, dont émanent des hurlements de damnés sur des rythmes primitifs, ils ne peuvent plus exister sans cela, sans faire ou entendre du bruit, du vacarme, le silence les terrifie, et puis emmerder les autres est une sorte de revanche sur leur médiocrité. Cela commence à me faire peur, comme une espèce d'épouvantable phénomène métaphysique universel en cours d'évolution, et que personne ne peut arrêter, parce que trop de gens en sont désormais les complices plus ou moins conscients. Ce soir, en plus des Parisiens en cage et de leurs QR codes, des hommes politiques réfractaires mis en joue par des gangsters, on m'envoie, sur Telegram, cette nouvelle hallucinante et sinistre: 

Mais que se passe-t-il aux Etats-Unis ? Des militants radicaux ont infiltré le Watergate Hotel où séjourne Netanyahu et ont déclenché des alarmes incendie pour perturber sa nuit de repos avant son discours au Congrès. Ils ont même libéré des asticots et des grillons dans les zones réservées à la délégation israélienne, ajoutant une touche de chaos à leur protestation.

FBI, CIA, NSA etc, des agences payées des milliards de dollars, mais on peut s'approcher à 200 mètres avec un drone, un fusil, une échelle de Trump et pénétrer dans un hôtel avec asticots et grillons, où réside Netanyahu. C'est quoi le truc ?

https://t.me/trottasilvano/36001

Et pour finir, on s'attaque au mont Athos, et à ses derniers résistants, au nom de la chasse à la "mafia russe". On tombe sur les Grecs qui ont refusé les réformes douteuses de Constantinople, et sur les Russes, mais aussi sur les Serbes et les Bulgares. C'est l'assaut mondial des forces des ténèbres contre l'Orthodoxie.

https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=pfbid0mQnn4wzpP5oUXGHpKVpKQEa1ZGLvxFJ4fBT8yRgpdpqvMXJZtm1Q1MgoEy9KZab3l&id=100009140182723&__cft__[0]=AZVd4kZO_fq-wFQGvFi_TAnwKbNu0uvGkwnk5B9tienink04CxuuXYUoScaEdUslwWc0U_xoSFSEb5274cQYgljJvaZrHWd8XZBD3RnGaZkWWUVkFKZN_e-fk-S5Lw7xYzTnItXfBNL2sXSxuwykjhurTQfQ8ATPOmgIvyLZgQvxyRlWtuzEYU8PARGipExls-E&__tn__=%2CO%2CP-y-R

https://vk.com/wall-118791961_148146 

Ca fait peur.

 


 

dimanche 21 juillet 2024

L'arbre de vie et les alouettes

 


Expédition au monastère Anastassov, près de l’ancienne petite ville d’Odoiev, dans la région de Toula. Je devais laisser ma voiture au garage près de Moscou, pour une remise en forme, puis dans la foulée, partir avec Oleg le journaliste, pour aller rejoindre l’higoumène de ce monastère, le père Parthène, qui m’avait invitée. 

Le paysage de la région de Toula me rappelait vaguement la France, par la douceur de ses collines, et ses essences d’arbres moins sévères et moins nordiques. Le monastère apparaît à flanc de coteau, sans horribles constructions tout autour. C’est la Russie éternelle, comme on l’imagine, d’autant plus que les bâtiments sont dans le style du XVI° siècle, bien que récents, pour la plupart, le monastère ayant été presque complètement détruit, mais l’higoumène Parthène était architecte, et il a bien travaillé, sans incohérences ni fautes de goût.

Je me suis retrouvée dans cet endroit absolument silencieux, sans aucun moustique, devant un paysage intact, avec des arbres magnifiques, des ormes, des pins, et le cri des martinets dans l’air du soir. Au dessus de la petite rivière, des collines, des brumes qui les recouvraient partiellement se levait une énorme lune dorée. Je ne sais pas pourquoi, la  lune me paraît toujours beaucoup plus grosse en Russie qu’en France. « On dirait un tableau de Vroubel ou un dessin de Bilibine », dis-je à l’higoumène.




Le père Parthène nous a reçus à dîner, il voulait absolument me gaver de sucreries, qui me sont défendues. « Cela fait dix ans que j’ai du diabète, je mange sucré quand même, et je suis bien vivant ! » Il a ensuite joué de l’accordéon, et il en a prêté un à Oleg, sur lequel était écrit « Ukraine ». « C’est un trophée de guerre, nous dit-il. J’ai reçu il y a quelques temps des Wagner qui l’avaient récupéré au front, et me l’ont donné ».

Le père Parthène est chaleureux, intelligent, plein d’humour et très malin. « Vous êtes un petit rusé, père, observai-je, en riant.

- C’est pour cela que je suis higoumène ! Vous connaissez l’anecdote ? Deux higoumènes échangent des nouvelles de leurs monastères respectifs. « Ca va, toi ?

- Oh nous avons eu cete année trois grands malheurs : la mort d’une vache, l’incendie d’un bâtiment, et la visite de l’évêque ! »




L’higoumène Parthène était si content de ma visite qu’il m’a fait cadeau d’une magnifique petite icône sculptée ancienne de saint Nil le Stylite, à ne pas confondre avec saint Nil de la Sora. Il m’a dit que son film sur moi était meilleur que celui de Victor le Blogueur, car j’y étais beaucoup mieux filmée, par les soins d’Oleg, ce qui n’est pas faux. Il me passait au téléphone des gens qui l’appelaient pour m’exprimer leur enthousiasme à l’issue de cette émission.


Le lendemain, je suis allée aux matines, dans l’église principale, dont l’intérieur est digne de l’extérieur, simple et beau. Du haut de la galerie extérieure, je contemplais une brumeuse gloire matinale traversée par les hirondelles et les martinets, pareils à de petits anges lestes et affairés. Après les matines, ne voyant pas arriver la liturgie, mais l’heure du départ prévu pour le festival du jouet de Filimonovo, je regagnai ma chambre et appelai Gleb. On m’attendait pour le petit-déjeûner « français », qui n’avait rien de français, concombres, tomates du jardin, fromage blanc et lait du monastère. Outre la visite du festival et des musées du jouet en terre et de la broderie, nous devions écouter le concert des « Petites alouettes d’Odoiev », un ensemble folklorique de fillettes, patronné par notre higoumène Parthène.

Il faisait dans le centre-ville une chaleur terrible, et il y régnait une ambiance de kermesse, avec le vacarme correspondant. Le père Parthène voulait tout me montrer, me présenter tout le monde et m’offrir tout ce qui me tombait sous les yeux. Gleb n’arrêtait pas de parler, et il avait ses idées, lui aussi. Je cherchais une amie, Lisa, qui collectionne les jouets en terre depuis son enfance. Les stands étaient loin de proposer tous des jouets authentiques, il y avait malheureusement pléthore de kitscheries dégoûtantes, mais je suis tombée sur deux vieux, le frère et la soeur, qui avaient poursuivi sans pouvoir la transmettre la tradition familiale, et j’ai acheté un magnifique « arbre de vie » très poétique et très symbolique qui me rappelait mon « vers spirituel »  préféré :

 


Au milieu du paradis

L’arbre croit et resplendit.

Les feuilles en sont de satin

Les pommes de l’or le plus fin

Et les oiseaux séraphins

Chantent pour les chérubins.

 

Le programme musical continuait à nous bétonner les oreilles d’un boum-boum constant avec des variations pseudo-folkloriques à la surface, ou du sirop patriotoïde. J’attendais les « petites alouettes » avec impatience pour quitter cet endroit surchauffé, et j’ai pu constater qu’elles étaient largement les meilleures. Habillées de costumes simples et authentiques, et non déguisées en poupées russes et en matriochkas, elles chantaient et dansaient du vrai folklore avec un naturel délicieux et si rafraichissant, sur le fond de toutes ces grimaces et de tout ce toc ! Je les ai chaleureusement félicitées, et elles étaient ravies, car elles avaient vu l’émission du père Parthène, l’une d’elles m’a quand même demandé si j’étais une Française réelle.


De retour au monastère, déjeuner, et puis le père Parthène voulait à nouveau me filmer et m’interroger, notemment sur « Parthène le Fou », dont le titre l’avait frappé, forcément, et dont je venais de lui offrir un exemplaire. J’étais absolument épuisée par mon périple et la chaleur, et me suis aperçue que ce n'était pas seulement le pseudonyme que partageait l'higoumène avec Ivan le Terrible, mais l'art russe d'amener les gens à faire ce qu'ils n'avaient pas du tout l'intention de faire au départ!

Enfin Lisa est passée me prendre, avec trois copines, dont l’une avait exigé un détour de cent kiomètres pour aller à Toula dans un magasin qui, seul en Russie sans doute, vendait un alcool particulier. Sur le chemin du retour, elle me racontait sa vie dans la région de Tver, où elle s’est installée avec son compagnon, et sa chienne des Pyrénées. C’est une femme d’une rare énergie, rien ne lui fait peur, elle a toutes sortes d’activités de couture et de modelage, plus l’élevage des poules, mais depuis qu’elle est en ménage, elle ne travaille plus pour gagner sa croûte. « La voilà, la vraie libération de la femme !  m’exclamai-je.

- Le travail, me répond-elle, c’est l’horreur. »

Elle m’a laissée chez Macha, la fille de mon père spirituel, à Peredelkino, après plus de trois heures de voiture. Il me restait à récupérer ma Logan le lendemain et à rentrer chez moi. Son fils Marc, qui a onze ans, lui a déclaré pendant qu’elle me montrait ma chambre : «J’espère que dans son blog, elle écrira que je suis le meilleur ! »

De retour à Pereslavl, j'ai trouvé presque autant de vacarme et d'agitation que dans la rue principale d'Odoïev. Le bricoleur sciait, les jeunes débiles pétaradaient, le café français était pris d'assaut, et Lika n'avait pas pensé à amener Rita!






jeudi 18 juillet 2024

Pas avec eux.

 

 
 Victor le Blogueur m’a dit que j’avais dépassé les cent mille vues sur Youtube, dommage que je n’ai pas dépassé les cent mille ventes sur Ozon ! Les gens exigent que je donne un concert, mais ils ne se précipitent pas pour me lire. Sur Amazon, où je suis allée parce que j’ai acheté une liseuse électronique, on m’a laissé il y a fort longtemps une appréciation de Yarilo magnifique, circonstanciée et profonde, et j’ai vu qu’il s’agissait d’Henri, que je n’avais pas remercié, car je ne l’avais pas vue, je n’allais plus jamais sur Amazon. Le peu d’appréciations que j’ai sont bonnes, mais ce n’est pas pour cela que les gens achètent...

Je vais me baigner tous les matins et, en quelques jours, je me suis rendu compte que je montais l’échelle du ponton comme une jeune fille, sans y penser, alors que j’avais de la peine à me soulever il y a encore une semaines, et même chose pour sortir de mon hamac... Ce n’est donc pas tant la vieillesse qui est en cause que le ramollissement. Ces séances de natation sous les nuages, parmi les canards et les nénuphars jaunes sont un vrai bain de jouvence et une puissante consolation pour l’âme. Je nage, et les feuillages des saules écument au dessus de ma tête, les nuages passent, se déploient, s’effilochent, les hirondelles filent, happant les saloperies qui se ruent sur moi quand je sors de l’eau.

Le bruit est de plus en plus incessant. Outre les divers outils dont le son vrille les nerfs, il y a les camions que les GPS envoient de notre côté, les horribles pétrolettes de tous les petits choléras, les pelleteuses, cela n’arrête pas. Ils lotissent tout, construisent partout. Et il y aura bien évidemment de plus en plus de circulation, de radios, de vacarme. J’ai vu qu’on vendait un grand morceau de nature dans le marécage, au dessous du monastère saint Nicétas, si j’étais plus riche, je l’achèterais, pour empêcher qu’on y construise quoi que ce soit. C’est un véritable massacre, ils ne pensent qu’au fric, aux Moscovites qui viendront bâtir leurs boîtes d’allumettes plastifiées aux berges sacrées de ce lac épique. 

Les gens se plaignent beaucoup de l’immigration asiatique musulmane excessive, des exactions commises par des barbares barbus, à côté de ce qui se passe en France, je dirais que ce n’est pas encore si tragique mais quand même, et visiblement, la population réagit avec plus de vigueur, il se crée des communautés, pour défendre les autochtones, et pas seulement contre les brutalités des allochtones, mais aussi contre les débordements des bandits ou fonctionnaires locaux. Ces communautés viennent aussi en aide à leurs membres dans la détresse, elles ont une cagnotte alimentée par les dons des adhérents. Il y a aussi échange de services, propositions de travail. Et aide humanitaire aux populations impactées par la guerre, aux soldats. Sur ce fond, j’apprends dans RT, que l’on fait massivement venir en Russie des Africains pour leur offrir du travail. On veut limiter, soi-disant l’immigration asiatique mais on commence à déverser ici toute l’Afrique, comme chez nous, selon le principe de l’extermination sournoise des chrétiens blancs cher au mondialisme. Qui est ce «on » qui nous médite cela, alors même qu’on envoie mourir au front la fleur de la jeunesse pour défendre la Russie et le monde russe ? Moi, j’aime les Russes et la Russie tels qu’ils sont, je n'ai pas envie de les voir noircir dans une espèce de Brésil ou de Seine-saint-Denis, ni de voir des blacks impudentes déclarer à la télé qu’elles sont ici chez elles, et que les autochtones mécontents n’ont qu’à partir, ou se réjouir bruyemment que leur municipalité ait triché aux élections pour "faire barrage". Que viennent ici des étudiants et des séminaristes, à la rigueur, mais le remplacement de population, personnellement, j’ai vu ce que cela donne, merci. Car si la Russie tombe dans ce scénario, nous n’aurons plus nulle part où aller. Je vois tous les jours des photos de jeunes soldats russes morts au front, des garçons avec de beaux visages purs, la fleur du pays, pas du tout ceux qui se traînent débraillés et tatoués, cramponnés à leurs tablettes ou juchés sur leurs pétrolettes et leurs squads. Cela me rend malade, je pense à leurs parents, à leurs fiancées, au Fédia de Katia. On a passé sur tous les sites Telegram une vidéo atroce de sévices fantasmagoriques infligés par les Ukrainiens aux Russes prisonniers, et j’ai préféré ne pas regarder, mais je crois que c’est insoutenable. Et pendant ce temps-là, on déverse toute l’Afrique et toute l’Asie à l’arrière ? Ca ne va pas la tête ? On ne pourrait pas commencer par les Russes coincés dans les ex-républiques baltes ou musulmanes, ou par les Européens qui vont se retrouver bientôt commes les Boers ? Délivrés de notre présence, ils n'ont pas envie de travailler chez eux, ces Africains? Il leur faut toujours un tonton blanc, si pas français, alors russe?

Du coup, je suis entrée dans la communauté « le nord russe ». Et merde.

Parallèlement, dixit Igor Drouz, un intellectuel d’origine juive soi-disant orthodoxe et patriote, ce doit être une espèce de Zemmour, a fait un article dans Tsargard prônant la solution finale palestinienne pour les Ukraniens, le massacre systématique de tout ce qui bouge, et cela est cité abondemment par les occidentaux ravis, bien que Tsargard ait supprimé cette prose nauséabonde. Ce n’est pourtant ni russe ni orthodoxe, comme démarche, la tête du journaliste non plus, d’ailleurs, d’où sort-il, celui-là ? Qui est derrière ? Il y a tant de fourberie et de vilenie à l’oeuvre partout qu’on a bien du mal, parfois, à garder le moral. Et pourtant, il se passe aussi au front des choses lumineuses, des conversions éclatantes, des exploits spirituels, des miracles, et c’est ce qui démontre que le combat passe au dessus des protagonistes politiques et des trahisons, le combat est métaphysique ; et ce qui est sûr à mes yeux, c’est que Dieu ne PEUT PAS ETRE AVEC EUX, avec ceux d’en face, même si nous ne sommes pas toujours dignes qu’Il soit avec nous.

J'ai infiniment honte d'avoir loupé toute une série de fêtes, le transfert à Moscou des reliques du métropolite Philippe, le martyr de la famille impériale... Comme il est significatif que l'horrible époque où nous vivons toujours, et même de plus en plus, ait commencé par le sacrifice humain de ces gens dignes, nobles et beaux, l'incarnation même de l'idéal chrétien, par d'infects gnomes!



samedi 13 juillet 2024

Insolation

 


Hier soir, des gens sont arrivés de Suisse, Myriam, son mari et son amie Eliane. Des lecteurs de Slobodan Despot et de son Antipresse, des amis de Jean-Marc Bovy qui m’envoyait une bouteille de vin et que je remercie. Ils m’avaient apporté aussi du chocolat Lindt, auquel je n’ai plus le droit de toucher, et du fromage. Ils voulaient voir de leurs yeux ce qui se passe ici, et dans le même esprit, Myriam est allée déjà cinq fois en Syrie où elle a trouvé une toute autre réalité que celle qui est présentée par les médias aux ordres. Ils voulaient aller avec moi au restaurant, je les ai emmenés aux « Boyards », où j’ai trouvé Katia, dont c’est le quartier général. Nous avons dîné avec elle, dans la bonne humeur et le plaisir de parler librement de la situation qui nous préoccupe tous. Les Suisse étaient impressionnés par l’accueil qu’ils rencontrent partout et par l’importance que conserve ici la culture française.

Katia m’a paru triste et fatiguée. Elle se ronge les sangs pour son Fiodor. D’après ce que nous entendons dire, il est temps que Bielooussov fasse le ménage.

Le matin, j’étais allée à la liturgie de la fête des saints Pierre et Paul, et j’ai vu une femme d’une quarantaine d’années sangloter tellement à la confession qu’elle ne pouvait pas parler. Elle était accompagnée de deux vieux, probablement ses parents, eux-mêmes en larmes, et j’ai pensé que c’était encore un jeune homme qui avait dû périr au front. Que dire des fonctionnaires qui trahissent et étalent leur luxe et leur débauche, de tous les serviteurs de la caste, en Occident, et de ceux qui, ici, se vendent à eux et vendent les leurs ?

Après l’office, je suis allée au café avec Jean-Pierre, Tatiana, Thaissia et leurs enfants, j’avais la vue sur la coupole de bois de l’église du métropolite Pierre, et sur son toit en forme de tente, d’une blancheur irréelle, depuis qu’on la restaure, quel cachet elle donne déjà à tout l’ensemble...

Aujourd’hui, j’ai revu mes Suisses au café, ils sont très sympas, je voulais prendre congé, et puis ils ont rencontré Veniamine, mais c'était un exploit de ma part: je suis tellement surmenée en ce moment, je devais aussi aller chanter au petit marché de la « place Rouge », je n’ai pas pu refuser, pour ne pas snober les gens du cru. Quand je suis arrivée, une jeune femme chantait de la variété française, en robe rouge sous un soleil de plomb. C’était le cosaque Alexeï qui dirigeait la manoeuvre. Quand mon tour est arrivé, j’ai tout de suite senti que ce serait très dur. Au bout de deux chansons, j’étais au bord de l’apoplexie. Un brave homme est venu m’ombrager d’un parapluie, il m’a sans doute évité une insolation. Curieusement, je n’ai pas mal chanté, et tout le monde était très content. J’ai entonné le « corbeau noir de Donetsk », en précisant que, dans les circonstances actuelles, un hommage à ceux qui se battaient là-bas n’était pas déplacé. Un jeune homme est venu jeter cent roubles dans l’étui de ma vielle-à-roue et une bonne dame m’a offert un bouquet de lavande ! Après encore deux ou trois chansons, j’ai dit que si l'on ne voulait pas me voir repartir en ambulance, il fallait mettre fin au concert. Un jeune soldat s’est précipité pour m’aider à remporter mes instruments. Il me regardait avec un sourire ravi qui s’est encore élargi, quand il a appris que j’étais ici depuis presque huit ans.

Au retour, je me suis jetée sous la douche, des pieds à la tête sous l’eau froide, je me demande s’il ne me sortait pas de la vapeur par le nez et les oreilles. Puis je suis allée m’étendre sur le hamac, dans le fil d’une brise miséricordieuse, avec la vue sur les astilbes, leurs épis de lumière rose, et les calices oranges des hémérocalles.



jeudi 11 juillet 2024

Ange en blouse blanche

 



Au réveil, j’ai lu le post d’un intellectuel orthodoxe qui m'a déprimée: on a écrasé à Moscou un petit pavillon de style baroque russe pour construire une horreur de plus. Le problème est que ces gens-là, les hauts fonctionnaires, ou disons les fonctionnaires, les bas ne sont pas tellement mieux, sont tous des apparatchiks fils d’apparatchiks élevés dans la haine de tout ce qui a précédé 1917 et, au fond, la haine de la culture, de la mémoire et de la spiritualité, même s’ils vont faire, par superstition, bénir leur voiture chez le prêtre du coin. Il ne faut donc pas s’étonner s’ils se vendent à n’importe qui et agissent avec un rare cynisme. Un correspondant m’écrit que je parle des Russes comme lui parle des Français. Mais c’est que les mêmes processus sont à l’oeuvre partout, le communisme n’étant que l’autre face du capitalisme, c’est-à-dire une idéologie du matérialisme et du mépris absolu de tout ce qui nous a faits ce que nous sommes. Ou plutôt ce que nous étions. Car plusieurs générations de créatures programmées et mutilées ont engendré trop de dégénérés qui n’ont plus aucune référence culturelle, aucun respect de rien. Ici, les choses ne sont pas allées aussi loin que chez nous, parce qu’il y avait au moins un discours officiel d’héroisme et d’abnégation, encore un certain respect de la littérature et de la musique classique, et aussi une simplicité de vie favorable à la vérité des sentiments. Les Français qui font des vidéos invariablement enthousiastes sur la Russie n’en connaissent pas la culture, l’un d’eux s’est même empressé de saccager son isba traditionnelle, exactement comme ses voisins, et un Anglais ricane de mes réflexions sur les barrières métalliques façon zone industrielle qui défigurent la Russie entière. Ce sont des occidentaux qui ont exactement la même mentalité que les post-soviétiques, simplement ici, ils sont plus libres, de travailler, d'exister et d'élever leurs enfants, et ils y voient moins de migrants exotiques. Cela leur suffit. Ils n'ont pas idée de ce que fut Moscou avant la cata, ni les autres villes, d'ailleurs. Pour le folklore, ils en restent à kalinka et aux poupées en jupettes coiffées de kakochniks qui s'agitent, avec un sourire invariable, sur de la kitscherie musicale. Comme beaucoup de Russes, malheureusement. 

Ceux qui connaissent et aiment la culture russe, ou la culture française, ne peuvent être que pleins de douleur, qu’ils soient russes ou français, car on nous efface l’une et l’autre, et sans notre culture, nous ne serons plus nous-mêmes. Quand Poutine disait, la larme à l'oeil, qu'il ne voudrait plus vivre dans un monde dont la Russie aurait disparu, j'ai envie de lui répondre qu'il faudrait commencer par empêcher qu'on ne la fit disparaître de l'intérieur, qu'on ne la rende, comme la ville de Pereslavl, complètement méconnaissable. Car sans monde russe à sauver que signifie la guerre contre un occident lui-même dénaturé? Ici, du moins, pour l’instant, l’Eglise tient le coup, alors qu’en occident, elle s’est depuis longtemps couchée, et l’esprit de « l’orthodoxie occidentale intelligente et ouverte » ne me dit rien qui vaille. Je suis de plus en plus convaincue que je ne suis pas venue ici me mettre à l’abri mais obéir à une sorte de vocation, car il n’y a plus vraiment d’abri nulle part. Disons qu’en Russie, les occidentaux encore dignes de leurs ancêtres peuvent trouver un repli et un répit, et peut-être appuyer les Russes encore authentiques dans leur résistance.

Je prie pour Andreï Belooussov, afin qu’il ne connaisse pas le destin de Stolypine et puisse mener à bien son nettoyage. Que Poutine l’ait nommé pour ce faire me rassure. Et puis mon père Valentin soutient Poutine, c'est vraiment la lueur qui me guide dans les ténèbres. Mon père Valentin n’a jamais été communiste, il est monarchiste, d’une culture encyclopédique et d’une intelligence exceptionnelle.

Un autre élément qui me donne de l’espoir, en Dieu, en l’archange saint Michel, en la providence, c’est la qualité des soldats russes et de ceux qui les aident, les conversions massives et les miracles, tout ce qui se passe « là bas », parallèlement aux histoires de brigands et aux bacchanales estivales de la plèbe dont l’Administration de Pereslavl admet, paraît-il, ouvertement favoriser l’élevage en batterie. Et aussi la mémoire génétique, le surgissement, malgré tout, de Russes inattendus et convaincus dans des familles où l'on avait perdu le souvenir de ce que c'était, avec l'estime pour ses ancêtres moujiks.

Juste avant le covid, j’avais ici une excellente généraliste, le docteur Ivanova, et puis elle avait disparu de la circulation. Ensuite, Gilles m’avait dit qu’elle était à Kostroma, où il était allé la consulter, et elle lui avait parlé de moi. Récemment, Lika, la femme de Gilles, m’a dit que le docteur Ivanova était de retour à Pereslavl. J’ai pris rendez-vous. Elle m’a dit que son retour était dû à son veuvage, et en effet, elle avait l’air plutôt triste, mais si je suis pour elle pleine de compassion, j’avoue que son retour me soulage énormément. Elle est compétente et consciencieuse, avec de grands yeux bleus sévères et honnêtes. Elle m’envoie faire toutes sortes d’examens de routine, mais au moins je sais où aller, et m’interdit complètement le sucre, car mon pancréas est surmené, et d’après elle, la plupart des ennuis que j’ai, y compris les problèmes d’articulations, viennent d’un état inflammatoire engendré par l’ablation, autrefois, de la vésicule biliaire et l’abus de sucre.

Ce n’est évidemment pas marrant, car cela me prive de la consolation des gâteaux du café français, et autres pauses sucrées, cela complique aussi beaucoup l’alimentation quotidienne. Mais en même temps, j’éprouve le sentiment que le retour du docteur est pour moi quelque chose de providentiel, que je serai moins seule vis à vis de mes problèmes de santé et de vieillissement ; que cela me sauve peut-être la vie, ou me la prolongera, et j’ai besoin de vivre au moins jusqu’à la mort de mes chats ou notre éventuel anéantissement collectif par les effets de la malfaisance de la caste. Aussi suis-je pleine de reconnaissance envers le Seigneur qui m'envoie cet ange en blouse blanche.