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lundi 1 mars 2021

C'est le printemps....



Nous avons eu +5°, le lendemain - 11 et maintenant -1. Evidemment, tout ce qui avait commencé à fondre a gelé à mort.  Aujourd'hui, c'est  officiellement le printemps.Cela fait sept ans que maman est morte et que je ne l’ai pas revue, moi qui lui écrivais quasiment tous les jours, ou lui téléphonais...

Hier, Blackos avait chié dans le plat où je gardais des pommes, sur le coffre. Aujourd’hui, il a pissé sur le divan. Cela me met dans de telles fureurs qu’il a peur de moi, mais il n’a pas pour autant l’idée d’aller dehors, ou même à la rigueur dans la caisse que je mets à cette équipe d’imbéciles infoutus d’aller faire leurs besoins dans la nature. Je n’arrête pas de laver, la machine tourne sans arrêt, je fais sans arrêt le ménage. Ce chat disparaîtrait de la circulation, bien qu’il me regarde avec des yeux de merlan mort d’amour, je crois que je m’en remettrais assez vite.

Je suis ce matin dans un état de fatigue nerveuse confinant à la détresse, et hier, je pleurais comme un veau à l’église, cela m'est venu sans que je sache pourquoi, une espèce de tristesse cosmique insondable. La dégradation globale de l’humanité, et spécialement de sa partie européenne, me remplit de douleur et d’appréhension. Les gens perdent toute raison, toute dignité, toute compassion. Une bande de jeunes cons, en Russie, s’est amusée à poursuivre jusqu’à l’épuisement complet, avec des motoneiges, une femelle d’élan enceinte, pour l’étouffer finalement à mains nues, ce qui provoque une vague d’indignation bien justifiée. Les photos de ces individus montrent des faciès d’imbéciles ricanants, y compris une fille, avec cette expression qu’on voit à tous les rebuts de l’humanité, aux gardes rouges qui torturaient et éxécutaient des prêtres et leurs familles, aux banderistes ukrainiens poursuivant et terrorisant en meute une juive à moitié nue, aux "jeunes" des banlieues violant ou lynchant en bande. Et cela pendant qu’en France, un viandard dégénéré assassine à bout portant un jeune sanglier apprivoisé, échappé d’une propriété voisine, qui venait gentiment chercher des caresses en se frottant contre cette équipe d’abrutis armés qu’on appelle chez nous des chasseurs, ces grands écologistes, ces amoureux de la tradition. Le Mordor recrute des orques à temps plein. Le pire est ma conviction de notre solidarité profonde dans le péché, alors que je ne peux pas prier pour ces gens-là, c’est au dessus de mes forces. J’aimerais bien en parler avec Fiodor Mikhaïlovitch Dostoievski. Je pense que toute sa vie, il a souffert des péchés des autres, en plus des siens propres, c’est ce qui le rendait si nerveux et si irritable, comme moi d’ailleurs, car il ne trouvait, comme moi, de transcendance que dans l’écriture, qui nous met encore plus à la merci des bacchanales démoniaques.

Iakov, le Français d’origine cosaque, est venu de Rostov avec toute une équipe de gens, un Grec qui voudrait travailler au café, sa femme, un paysagiste et la sienne, et leurs enfants. J’ai invité Génia, qui a expliqué qu’il était réaliste, que la promotion du folklore, ce n’était pas son objectif, qu’il cherchait juste à vendre des balalaikas et des vielles à roue à des touristes qui ne s’en serviront que quinze jours pour la plupart d’entre eux. Moi, je suis réaliste aussi, je pense qu’il faut des gens comme lui pour soutenir des projets idéalistes auxquels eux-mêmes ne croient pas, et où ils trouvent leur intérêt.

Le paysagiste, un Arménien, Andreï, m’a dit qu’il fallait absolument obtenir de mon voisin qu’il fasse un mur maçonné à hauteur de sa butée, pour protéger mon terrain des infiltrations d’eau, et du déversement de sa terre aux premières pluies diluviennes. Balancer la même quantité de terre chez moi, comme le prévoyait cet imbécile, n’est pas pensable, car ma maison est située au dessous de la sienne, et de son terrain, et la cave serait complètement inondée. Il faut également qu’il prévoit un drainage, le long du mur, et qu’il mette un tuyau, là où il a bouché le canal qui longeait la route. Je suis persuadée que ce type ne fera pas ce mur, bien contente s’il met le tuyau, et même cela j’en doute. Il considère qu’il me fait la grâce du siècle en me proposant d’ensevelir mon terrain sous des tonnes de terre. Il me faudrait discuter de cela avec lui calmement et cela me rend malade.

Le paysagiste dit que la bande de terre entre nous est très étroite, et qu’y mettre de grands arbres est impossible, il propose des thuyas. Je me rends compte qu’il faudra des années pour régler ce problème et m’épargner la vue de sa terrasse pleine de crétins hurleurs potentiels, et du parking surélevé attenant, avec ses séries de bagnoles. Or je suis déjà vieille, je n’ai pas trente ans devant moi.

Dans tous les cas de figure, remédier à ce qu’il m’a fait va me coûter encore de l’argent et du temps. C’est pourquoi vendre est peut-être la seule issue, en fin de compte, faire des travaux ailleurs ou les faire ici, je n’aurai que le déménagement en plus, et la différence entre la maison vendue et la maison achetée paiera les travaux, au lieu que là, je taperai dans mes dernières réserves pour améliorer la situation.

Seulement je suis persuadée, en dépit du fait que ma maison est grande et bien aménagée, que l'exiguité du terrain et son caractère marécageux, avec ce que le voisin m’a infligé juste à côté, compromet la vente, et qu’a cause de cela, je n’en obtiendrai pas ce que j’aurais pu normalement escompter.

Voilà, j’ai bien fait le tour de la question.

Pour cacher ça, il faut des thuyas ou des buissons de 3 mètres....


J'ai vu une charmante jeune femme russe, Xénia, une amie des Asmus. Elle a plein d'amis qui étaient partis en Europe et reviennent à présent épouvantés. Elle m'a dit: "A la limite, je me fous de savoir si Poutine est ceci ou cela, pourvu que chez nous cela ne devienne pas comme là bas. Entre les masques, la justice juvénale, la théorie du genre, les migrants et la culture woke.

- Vous avez raison. Car en ce moment, la situation ne peut pas devenir meilleure. Mais elle peut devenir considérablement pire".

Cette jeune femme m'a parlé de penseurs et d'écrivains russes convaincus que la foi reste vivante ici alors qu'elle s'éteint complètement en Europe, et que pour cette raison, tout dépend maintenant du salut de la Russie. Et cela m'a rappelé les réflexions d'un Russe dont je découvre la page, Iouri Kabankov. Il cite Vladimir Kroupine: "Le monde a une âme et c'est la Russie. S'il lui arrive quelque chose, le reste du monde, vain et attaché à la pourriture, périra  aussitôt". Il termine son message par:

Il serait tout à fait opportun de rapporter ici les paroles du très Saint Patriarche de Moscou et de toute la Russie Cyrille, prononcées lors d'une rencontre avec les savants et les étudiants-physiciens après la consécration de l'église attachée à l'université de rechercher atomique nationale: "...l'humanité n'a jamais, par le passé, expliqué et justifié le péché aussi rationnellement... Le concept même de péché, c'est-à-dire le mal, est aujourd'hui par principe, iédologiquement et philosophiquement, placé au même niveau que le droit, la vérité, la sainteté. L'humanité, partant du principe mal compris de la liberté individuelledéclare aujourd'hui que c'est l'homme qui est un système indépendant de toute valeur; c'est lui qui fixe les crières du bien et du mal."  Kroupineparlant du fait que «la solidarité de la vulgarité est encore plus forte que son opposition», semble sonner le glas: «C'est maintenant l'heure de la prièreEt c'est la chose la plus importante. " «Acquérez un esprit paisibleet des milliers d'âmes seront sauvées près de vous» (saint Séraphin de Sarov). "Nous sommes,- déplore Vladimir Krupin, occupés par une peste étrangère depuis l'extérieur et  l'intérieur». Il est ici tout aussi opportun et approprié de citer les vers pleins de relief du remarquable poète et traducteur Semione Lipkine 
A propos de la façon dont il fut effacé de la terre
par l'épée et le feu des hordes féroces de l'Est
nous est parvenue un récit bref et expressif:
"Ils sont venus, ils ont pillé, brûlé
Tué, anéanti, ils sont partis".
A propos de ceux qui maintenant
plongent le monde dans le néant
nous pouvons dire aussi brièvement:
"Ils sont venus comme la peste et le mauvais oeil
mais ne sont pas partis, ils se sont dispersés au milieu de nous".

Dans le contexte de ce qui précède, il convient de savoir fermement et de se souvenir que la sainte Russie, depuis la chute de Byzance, a été le réceptacle sacré du christianisme orthodoxe, et le monde visible ne continuera à exister que dans la mesure où l'intégrité de ce réceptacle est préservée, puisqu' y brille et vacille encore (si elle n'est plus enflammée comme au temps des apôtres et des apologistes chrétiens), la sainte Foi Orthodoxe

J'ai rencontré aussi au café une jeune femme française, arrivée depuis peu à Moscou. Elle travaille à l'Ambassade. Elle trouve que j'ai un nom de famille breton, et une tête de Bretonne, ce n'est pas la première fois qu'on me le dit. Je sais peu de choses sur la famille de mon père, peut-être un breton est-il venu s'installer dans la Drôme, dans les temps anciens. Je l'ai emmenée à l'église des Quarante Martyrs, et subjuguée par le lac, elle m'a dit qu'elle allait partir droit devant elle pour le contempler. 
Moscou lui plaît beaucoup, et elle se sent en Russie libre comme l'air, tout l'intéresse. Cependant, des collègues de l'Ambassade lui disent que oui, c'est un pays intéressant, "dommage qu'il y règne la terreur". Ce que c'est que l'autosuggestion, quand même... les occidentaux en général et les Français en particulier sont devenus complètement fous. J'ai même connu des gens qui, vivant depuis des années en Russie et incapables de se passer la grille de lecture de Libération et du Monde, passent leur temps à épier ce qui, dans le pays où ils vivent, pourra justifier les préjugés et les mensonges des journaux officiels du pays d'où ils viennent. Un mur peint à l'effigie d'Alexandre Nevski ou du maréchal Joukov? La bénédiction d'un régiment par un prêtre à l'occasion d'une fête? Preuves évidentes du bellicisme impérialiste des Russes et de leur régime oppressif. A noter que l'Ambassade est devenu un véritable bunker, comme si un terroriste guettait nos petits marquis derrière chaque réverbère...
 
A part ça Alexandre Nevsky a gagné les élections avec 55% des voix, mais Sobianine a décrété que pour ne pas diviser les gens, on arrêtait le vote et on ne mettrait personne au milieu de la place de la Loubianka, qui fut autrefois pittoresque, et qui n'est plus qu'un espace où se croisent des flots de bagnoles.




  

vendredi 26 février 2021

A voté.

 

Dieu n'est pas dans la force mais dans le droit

Pour la première fois de ma vie, j'ai voté avec conviction pour un candidat que j'approuve sans réserves, j'ai voté en ligne pour le saint prince Alexandre Nevsky, contre le bourreau de la Tchéka Félix Dzerjinski. D'après le père Gamaris et ses correspondants, ce vote est truqué, le site est fait de telle façon qu'il est difficile à utiliser, moi je n'ai pas eu de problème, au début, j'ai pensé que ma voix n'avait pas été enregistrée, et je suis allée sur le second site proposé, où l'on m'a répondu que j'avais déjà voté. Pour l'instant, Alexandre Nevski est en tête. Il y a peu de votants sur tout le pays. Il me semble que votent avec décision d'un côté les orthodoxes tendance monarchiste, de l'autre les communistes purs et durs. Les autres s'en foutent, et ils ont tort. Cela dit, je me demande qui a eu l'idée grandiose de rétablir Félix, et ensuite de l'opposer à Alexandre Nevski. L'URSS contre la Russie. Et c'est bien de cela qu'il s'agit. Certains communistes mettent en avant le soutien au saint prince des libéraux "maçons" des médias vendus, mais je n'en ai cure. Sans doute veulent-ils manipuler tout cela, les communistes répondent par une autre manipulation. Je pense du reste que toute l'histoire est une provocation destinée à diviser les gens, mais si l'on nous donne un tel choix, je ne vais pas voter pour le bourreau de la Tchéka, et je ne vais pas m'abstenir non plus, tel Ponce Pilate.

Là encore, je me demande ce que fait Poutine. Il lui suffirait de dire: "Ni l'un ni l'autre, on rétablit la fontaine qui était là autrefois". Et tout le débat serait désamorcé. Je suis avec intérêt les vidéos du politologue Mikheïev, et il pense, comme je le soupçonne, qu'un complot a lieu au plus haut niveau de l'état, que c'est là que se situe l'opposition.

De son côté le journaliste Pozner proclame que la tragédie de la Russie est d'avoir choisi l'orthodoxie, tout irait bien mieux si elle était protestante. Et sur le site de l'oligarque Khodorokovski, tout le monde de l'approuver bruyemment, tous les libéraux qui peut-être votent Alexandre Nevski! J'ai répondu que moi, Française, j'avais choisi l'orthodoxie, entre autres parce qu'elle est restée fidèle aux origines, au lieu de dériver jusqu'à enfanter ce monstre protestant qui nous a fabriqué le monstrueux monde moderne capitaliste et matérialiste, dont le communisme n'est jamais qu'un épiphénomène. C'est même pour moi la preuve que j'ai fait le bon choix. Et à l'inverse de Pozner, je me réjouis que la Russie l'ai fait également, qu'elle ait été épargnée par la Renaissance, bien que la Renaissance l'ait finalement violée, en la personne du tsar Pierre qui, à mon avis, n'a pas converti son pays au protestantisme, parce que sa légitimité était d'être le tsar orthodoxe, et que ses sujets auraient alors cessé de le supporter. M'a répondu un type que je connais en incriminant la mauvaise politique de l'Eglise Orthodoxe. Elle n'a pas su, elle n'a pas pu... Ben voyons. L'orthodoxie progressiste n'est pas du tout mon truc. Si je l'ai choisie, c'est aussi, entre autres, qu'elle me restituait le moyen âge.

Ce qui ne veut pas dire que je sois aussi radicale qu'il le semble, car si j'estime qu'on ne doit rien toucher dans l'organisme vivant de l'Eglise, je considère aussi qu'il faut faire preuve de miséricorde et de compréhension, prendre en compte le monde où nous nous trouvons et ne pas harasser les gens avec des exigences devenues impossibles. En général, les traditions évoluent d'elles-mêmes, naturellement. Chaque fois que l'on opère délibérément des réformes, on ampute quelque chose. Ainsi je ne suis pas du tout hostile à l'emploi du russe à la place du slavon dans les liturgies, au moins partiellement. Il me semble que les acathistes à des saints contemporains pourraient être écrits directement en russe. Mais comme ce fut le cas en occident avec le latin, les tenants du russe en font le cheval de Troie de l'oecuménisme et du progressisme, et d'une  protestantisation de l'Orthodoxie analogue à la protestantisation du catholicisme par Vatican II. Je ne vais certainement pas participer à une chose pareille. 

Il me paraît évident que les partisans de Pozner, comme ceux de Félix, ne sont plus russes, ils ne sont plus ces Russes qui suivaient Alexandre Nevski et qui votent aujourd'hui pour lui, et c'est chez les vieux-croyants, en fin de compte, que je vois subsister les figures russes les plus pures, bien que je les trouve un peu raides. Enfin du moins c'est ce qu'on dit, parce que jusque là, dans les faits, que ce soit la famille de Skountsev ou celle du Suisse Veniamine, je n'ai pas eu cette impression, et même, à la librairie des vieux-croyants à Moscou, la vendeuse était adorable, elle m'a prêté ses lunettes pour me permettre de lire les étiquettes des icônes qu'elle vendait. Dommage que Pozner, qui déteste et méprise tellement la Russie, en conserve la citoyenneté tandis que tant de Russes, restés exilés dans les pays baltes ou l'Asie centrale ne peuvent revenir dans la mère patrie. On se demande là aussi ce que fait Poutine pour corriger ce méfait d'Eltsine; pourquoi, avec le déficit démographique, on n'ouvre pas généreusement les frontières à tous ceux qui veulent revenir au pays de leurs ancêtres. Là encore, certains ont intérêt à affaiblir définitivement le pays et ils ne sont pas tous américains.


mercredi 24 février 2021

Liberté


Aujourd'hui est le dernier jour de véritable hiver, il faisait encore - 23. Mais demain, nous en serons à 0°; nous allons entrer dans la période intermédiare souvent ingrate du mois de mars.
Hier, j'ai décidé d'aller me promener, pour profiter de ces ultimes moments de soleil, de neige propre, de féerie hivernale. J'ai remonté à pied le cours de la rivière gelée, et croisé des skieurs. J'ai voulu faire un dessin, mais mes doigts gelaient, et j'ai dû m'arrêter.
Tout me semblait si calme, et je songeais que c'était vraiment un luxe, cette paix, cette nonchalante vie provinciale, alors qu'en France on a tellement gâché l'existence des gens qu'ils tombent dans la déprime et parfois le suicide. Ce qui n'empêche pas un contingent d'hypnotisés de répandre toutes sortes de bêtises sur la tyrannie où soi-disant nous vivons. Le pire est que certains Russes sont également convaincus que l'Europe est un paradis et réclament une "liberté" dont elle est à présent complètement privée. 
La liberté est un de ces mots dont j'aurais bien de la peine à dire ce qu'il représente pour ceux qui l'agitent sans arrêt. Pouvoir se déplacer comme on veut, respirer comme on veut, dire ce qu'on pense sans se faire vilipender ni traîner au tribunal médiatique ou juidiciaire, pouvoir publier, exposer, sans censure déclarée ou sournoise, pouvoir confesser sa foi, pratiquer ouvertement, sans provoquer des huées et des sanctions, des moqueries et des pressions, je considère qu'à présent, toutes ces libertés, on les a ici, on ne les a plus en France, et depuis un bon moment.
En fait, j'ai compris dès les facs des années 70, que la liberté pour ceux qui l'invoquent avec tant de colère, n'est censée exister qu'à leur seul usage, les autres, ceux qui pensent mal, ou peut-être même seulement qui PENSENT, dans l'absolu, n'y ont pas droit. 
L'extrême et méchante bêtise qui était la norme dans ces facs est proposée maintenant comme un code de conduite universel, c'est-à-dire que le seul fait de ne pas être complètement con et complètement inculte fait de vous un dangereux réactionnaire.



Sur une page orthodoxe, j'ai trouvé cette histoire édifiante, que j'ai traduite, pour les gens qui ont du mal à comprendre comment un "Dieu bon" peut envoyer les gens en enfer. Dans mon livre, à la question sur ce thème que pose Fédia, un jeune moine répond: "C'est de rester pour l'éternité dans l'état où tu te trouves probablement maintenant". 

C'est-à-dire que ce n'est pas Dieu qui nous y envoie, c'est nous qui y allons, ou plutôt, nous ne sommes pas capables de nous fondre dans son embrasement, et nous "passons à côté du paradis" comme disent les vers spirituels russes. Et Dieu ne peut pas nous prendre de force, l'amour n'est pas l'amour s'il n'est librement consenti.

Mais dans la mesure où l'humanité est Une, où nous sommes tous solidaires, il me semble que peu de gens resteront en dehors à grincer des dents et à se déchirer les uns les autres. Sauf qu'à partir d'un certain seuil de méchanceté et d'ignominie, quand tous les sentiments élevés et profonds deviennent haissables à celui qui ne peut les éprouver, en effet, on se demande comment il est possible de s'intégrer à l'Amour absolu, au Beau absolu, à la Vérité.

- Maître, - dit un jour le disciple à son starets, - crois-tu en l'existence du ciel et de l'enfer?

- Bien sûr que oui, répondit l'ancien.

- Pourquoi, alors, on ne les voit pas? - demanda le jeune homme. - Pourquoi sont-ils cachés aux gens? Après tout, si le châtiment des péchés et la récompense d'une bonne vie étaient visibles, cela sauverait de nombreuses personnes d'une multitude d'actes répréhensibles. - Ils ne sont pas cachés, - le maître posa une main ridée sur la tête de son élève, - le paradis et l'enfer sont ici, dans notre tête. «Je ne te comprends pas», dit le jeune homme perplexe, «comment peut-on entrer dans sa propre tête après la mort? Le vieil homme cacha ses mains dans les larges manches de sa veste et répondit: - La mort physique est la destruction des liens entre l'âme et le corps. Nous sommes connectés à ce monde par nos sens - l'ouïe, la vue, le toucher, l'odorat, le goût - c'est ce qui nous fait ressentir le temps. Ils quittent notre âme au moment de la mort. Et qu'arrive-t-il à l'âme lorsqu'elle perd le sens du temps? Elle plonge dans l'éternité. Et exactement dans l'état dans lequel elle se trouvait au cours de la vie. Si une personne était bonne, aimait sincèrement Dieu et faisait du bien de toute son âme, si elle voyait le monde dans une lumière radieuse et percevait tout avec gratitude et joie, alors une éternité lumineuse et joyeuse, ornée de bien et de bonheur, l'attend. Une telle âme se précipite directement vers Dieu, en tant que source de la lumière et du bien. Si son âme était noire, si elle était gouvernée par la peur, l'envie et la haine, si elle faisait le mal et ne croyait sincèrement qu'au mal, alors une éternité pleine de tourments, de chagrin et de douleur attend son âme. Une telle âme n'ira pas à Dieu, car la lumière divine lui sera insupportable. Cette âme vivra dans le voisinage de créatures pleines de haine exactement pareilles, qui ne font que sa causer du mal les unes aux autres. Et c'est là le véritable enfer, car de telles âmes brûlent dans le feu de leur propre mal.




 — Учитель, — однажды обратился к старцу его ученик, — веришь ли ты в существование рая и ада?

— Конечно, верю, — ответил старец.
— Почему, тогда, мы их не видим? — спросил юноша. — Почему они скрыты от людей? Ведь если бы наказание за грехи и награда за добропорядочную жизнь были зримы, это уберегло бы многих людей от множества предосудительных поступков.
— Они и не скрыты, — учитель положил морщинистую ладонь на голову своего ученика, — и рай и ад находятся здесь, в нашей голове.
— Я не понимаю тебя, — сказал озадаченный юноша, — как можно после смерти попасть в свою собственную голову?
Старик спрятал руки в широкие рукава своей куртки и ответил:
— Физическая смерть — это разрушение связей между душой и телом. С этим миром нас связывают наши органы чувств — слух, зрение, осязание, обоняние, вкус — то, благодаря чему мы ощущаем время. Они-то и покидают нашу душу в момент смерти. А что происходит с душой, когда та теряет ощущение времени? Она погружается в вечность. И именно в том состоянии, в котором была при жизни человека. Если человек был добр, искренне любил Бога и от всей души творил добро, если он видел мир в радужном свете и всё воспринимал с благодарностью и радостью, то его ждёт светлая и радостная вечность, раскрашенная добром и счастьем. Такая душа устремляется прямо к Богу, как к источнику света и добра.
Если его душа была черна, если им управляли страх, зависть, и ненависть, если он творил зло и искренне верил только во зло, то его душу ждёт вечность полная терзаний, горя и боли. Такая душа не пойдет к Богу, потому, что божественный свет, будет невыносим для нее. Эта душа будет жить по соседству с точно такими же полными ненависти существами, которые только и делают, что причиняют друг другу страдания. И это истинный ад, ведь такие души горят в огне собственного зла.

dimanche 21 février 2021

Prise de conscience

 Je répercute ici un article publié par Slobodan Despot dans son Antipresse, l'article d'un libéral russe qui a tout à coup pris conscience qu'il se trompait peut-être légèrement de combat. 

 L’ENLÈVEMENT D’EUROPE 2.0 (traduit du russe par Slobodan Despot dans le dernier Antipresse)

ANTIPRESSE 273 | 21.2.2021

Exergue

Depuis le 6 décembre 2015, l’Antipresse a publié 273 lettres hebdomadaires, 2759 articles originaux, 165 tribunes («passagers clandestins»).


[Cliquer sur la couverture pour télécharger]

Antipresse 273 - le menu!

L’Antipresse (PDF) du jour est à télécharger ici.

(Vous pouvez également le retrouver sur la page des archives)


Spécial abonnés LECTEUR


L’éditorial en vidéo: https://youtu.be/i56G9rjFMOU

Chers Lecteurs,

Nous nous occupions de notre actualité nationale, suisse et française, lorsqu’un texte peu ordinaire nous est tombé sous les yeux. J’ai donc décidé, au dernier moment, de le traduire pour vous. Il s’agit du «manifeste Bogomolov» qui suscite ces jours-ci une polémique monstre dans le milieu intellectuel russe.

Hirsute, branché, marié à une personnalité politique d’opposition, le metteur en scène Kostantin Bogomolov est un représentant type de l’intelligentsia «libérale» et pro-occidentale en Russie. Son texte sur l’«enlèvement d’Europe 2.0» constitue pourtant une charge violente contre le «modèle» que l’Occident actuel offre au monde. Une charge d’autant plus terrible que les valeurs de cet Occident y sont «déconstruites» par quelqu’un qui les connaît bien et qui aurait voulu, en d’autres temps, les importer dans son pays.

Cette déclaration de divorce culturelle intervient au même moment où le ministre des Affaires étrangères, le si retenu M. Lavrov, se déclare prêt à rompre les liens avec l’Union européenne.

Qu’est-ce que cela veut dire? Même s’il est emporté, hâtif, partial, et bien entendu assez injuste, le pamphlet de Bogomolov tend un miroir à l’Occident. «Voici pourquoi nous ne vous aimons plus», lui dit-il. Dans sa critique, exprimée avec de grandes références culturelles et littéraires, nous pouvons voir la métamorphose de notre société de liberté en un pandémonium de haine et de suspicion se dessiner avec des couleurs crues. Les vérités inconfortables sont toujours bonnes à prendre!


Le manifeste Bogomolov Orange mécanique
L’homme est une belle créature, mais aussi une créature dangereuse. Comme l’énergie atomique, il a des pouvoirs à la fois créatifs et destructeurs.
Gérer cette énergie, limiter sa puissance destructrice et encourager sa puissance créatrice est une tâche ardue. La tâche de construire une civilisation complexe basée sur la complexité de l’humain. C’est ainsi que le monde occidental s’est développé jusqu’à une époque récente. Maîtriser par la religion, la philosophie, l’art et l’éducation la face obscure de l’homme, mais aussi laisser cette obscurité s’échapper par les mêmes soupapes, comme la vapeur d’une chaudière surchauffée.
Au XXe siècle, cette pile nucléaire qu’est l’humain avait échappé à tout contrôle. Le nazisme fut son Tchernobyl. Le choc et la terreur de l’Europe face à cette éruption du primaire humain étaient insupportables.
Libéré du nazisme, l’Occident a décidé de se prémunir contre un «accident nucléaire» en éliminant cet homme complexe.
C’est ce même type humain que l’Europe a façonné pendant des siècles de christianisme, l’homme décrit par Dostoïevski: à la fois élevé et bas, ange et diable, aimant et haïssant, croyant et pris de doute, pensant et fanatique. L’Europe a eu peur de la bête dans l’homme, ne réalisant pas que la part animale dans l’humain est aussi naturelle et organique que sa part angélique. N’ayant pas la force de surmonter intellectuellement et spirituellement les conséquences du nazisme, l’Europe a décidé de castrer l’homme complexe. Châtrer sa sombre nature, emmurer à jamais ses démons.
En son temps, Kubrick a tourné Orange mécanique, un film sur des jeunes ensauvagés qui terrorisent la cité sous l’influence de la drogue, tabassant et violant les paisibles citoyens. Une fois le chef du gang capturé, on lui propose une thérapie expérimentale en échange d’une libération anticipée: fixant ses paupières pour les empêcher de se refermer, on lui montre des heures durant des scènes de violence tout en lui passant la musique de son Beethoven adoré. Au bout du compte, le jeune homme n’est pas seulement débarrassé de son agressivité: la musique le rend malade, il ne peut plus voir une femme nue, le sexe le dégoûte. En réponse aux coups de fouet, il lèche les bottes de son fouetteur.
L’Occident moderne est un semblable criminel qu’on a chimiquement castré et lobotomisé. D’où, sur le visage de l’homme occidental, ce faux sourire de bienveillance et d’assentiment. Ce n’est pas le sourire de la culture, c’est le sourire de la dégénérescence.
Le Nouveau Reich éthique
L’Occident se considère comme une société «vouée» à la réalisation des libertés individuelles. En réalité, l’Occident lutte aujourd’hui contre l’individu en tant qu’énergie complexe et dangereuse à manier. Dans cette lutte, les fonctions de poursuite, de jugement et d’isolement ne sont pas supprimées, mais déléguées par l’État à la société. L’État, représenté par la police et les forces de l’ordre, s’est «humanisé», mais la société prétendument progressiste a assumé le rôle d’une nouvelle phalange, avec l’aide de laquelle le même État combat la dissidence avec une efficacité redoublée.
Le monde occidental moderne est en train de devenir un nouveau Reich éthique avec sa propre idéologie: la «nouvelle éthique». Le national-socialisme, c’est du passé. Le socialisme éthique est devant nous. Le socialisme queer. Siemens, Boss et Volkswagen ont fait place à Google, Apple et Facebook, et les nazis ont été remplacés par un mélange non moins agressif d’activistes queer, de féministes et d’éco-psychopathes qui sont tout aussi désireux de reformater totalement le monde.
Les régimes totalitaires traditionnels avaient supprimé la liberté de pensée. Le nouveau totalitarisme non conventionnel est allé plus loin et veut contrôler les émotions. Limiter la liberté d’émotion d’un individu: c’est le concept révolutionnaire du Nouveau Reich éthique.
Les sentiments et les pensées ont toujours été la zone privée de l’homme. Ses mains pouvaient être ligotées, mais son cœur et son cerveau étaient libres. C’était là le contrat social tacite de la civilisation européenne, qui voyait l’homme comme un réceptacle d’émotions et d’idées, où la haine est l’envers de l’amour: une composante certes complexe et dangereuse, mais nécessaire et importante de la personnalité humaine.
Dans la société nazie, l’homme avait été dressé comme un chien à haïr l’autre. Dans le Nouveau Reich éthique, l’homme est dressé à aimer et privé du droit de haïr librement.
Vous ne pouvez plus dire «Je n’aime pas ceci…», « Cela ne me plaît pas…», «J’ai peur…». Vous devez coordonner vos émotions à l’opinion publique et aux valeurs communes.
Or les valeurs communes sont devenues un nouveau Mur des Lamentations, où tout individu malheureux, offensé ou simplement malhonnête peut non seulement apporter sa note, mais aussi exiger qu’un nouveau Dieu - la Société progressiste - inscrive son insulte, son drame, sa peur ou sa maladie sur les listes d’une nouvelle Unesco éthique, lui confère un statut socialement éminent, lui alloue un budget et lui affecte un quota spécial dans toutes les sphères de la vie publique. Et quiconque affirme qu’un grief est futile, qu’une maladie est soignable ou qu’un drame personnel est votre affaire intime sera la cible d’une puissante machine répressive: cette même opinion publique.
Tous contre un
Les réseaux sociaux sont devenus l’outil idéal de cette nouvelle machine répressive. Tous les citoyens «bienveillants» et «actifs sur les réseaux» en sont les collaborateurs virtuels. Ils ne portent pas d’uniforme, ils n’ont ni matraque ni taser, mais ils ont des gadgets, une soif de pouvoir philistine et une passion tacite pour la violence doublée d’un instinct grégaire. Ils n’ont pas de prérogatives légales, mais ils tiennent la haute main sur le plan moral. Et à la lumière des récents événements aux États-Unis, il est évident qu’il ne s’agit pas simplement d’une foule spontanément rassemblée sur les réseaux: ils sont soutenus par les autorités, le nouveau ministère de la vérité représenté par les propriétaires des géants de l’Internet.
Les réseaux ont conféré à ces nouveaux violeurs l’anonymat, l’absence de contact et - par conséquent - l’impunité. Foules virtuelles, lynchages virtuels, intimidation virtuelle, violence virtuelle — mais isolement mental et social réel de ceux qui sortent du rang. Ces mouchards et ces loups-garous du web jouent habilement de la peur éternelle de l’humain de se retrouver seul contre tous les autres.
Dans l’État nazi, un artiste pouvait perdre son emploi et sa vie à cause de son art «dégénéré». Dans le «bel» État occidental du futur, un artiste peut perdre son emploi parce qu’il soutient un mauvais système de valeurs. Cependant, il ne s’agit plus seulement de l’artiste comme figure d’influence. La situation évolue de manière fulgurante. Aujourd’hui, le plus modeste assistant de recherche dans une institution de province américaine, ou un simple étudiant pacifique et parfaitement à sa place peut être expulsé à cause de sa «mauvaise» opinion de la vie politique ou publique actuelle. Et puisque c’est la société et non l’État qui prend ces mesures répressives, ces excommunications sont appelées actes de solidarité sociale, sanctifiées par la juste colère des personnes «libres» et «progressistes», qui exigent que les hérétiques se mettent à genoux, auquel cas elles seraient prêtes à leur accorder leur absolution et avec elle le droit de travailler et de créer. C’est ainsi que l’on est amené à l’autocastration comme seul moyen de survivre dans ce nouvel État orwellien.
La contre-révolution sexuelle
Le Nouveau Reich a déclaré la guerre à la mort. Une guerre à la nature humaine, au sein de laquelle le vieillissement et la mort font partie d’un incompréhensible plan divin. La poursuite de la jeunesse éternelle est devenue l’idée fixe de la nouvelle société occidentale. La raison en est évidente: la mort est imprévisible et divine. Or les socialistes queer, comme les national-socialistes, comme les communistes, ne reconnaissent nul autre pouvoir que celui de leur Idée. L’Idée et la Raison sont leurs divinités. Ou plutôt, ils sont eux-mêmes des dieux et voient l’homme non pas comme un mystère, mais comme un objet d’expérimentation, comme de la viande. La guerre à la mort est une guerre au mystère de l’être. Une guerre absurde et stupide contre l’éternité.
Mais là où il y a guerre contre la mort en tant que donnée divine, en tant qu’issue mystique, il y a aussi, inévitablement, guerre contre la vie. Car la vie est aussi imprévisible que la mort. Tout aussi incompréhensible. Et donc incontrôlable et dangereuse.
L’Europe est rapidement passée de la révolution sexuelle, qui avait tenu lieu de nouvelle Renaissance européenne post-nazie, à une lutte à mort contre l’énergie du sexe, la partie la plus vitale, la plus émotionnelle et la plus incontrôlable de l’existence humaine.
Car le sexe, c’est la liberté. Le sexe, c’est le danger. Le sexe, c’est l’animal dans l’homme. Mais surtout, le sexe, c’est la naissance de la Vie.
Le christianisme conférait à l’acte sexuel un caractère sacré. Divinité et beauté. L’érotisme était un sujet de l’art. Le désir était une inspiration. Le sexe, une jouissance sacrée de l’Amour. La naissance, un miracle.
Le Nouveau Reich considère le sexe comme de la production et les organes sexuels comme des instruments. Conformément aux préceptes socialistes du passé et dans le cadre du nouveau socialisme queer, il met en commun les outils de production et les redistribue, tout en optimisant la production elle-même et en la plaçant sous le contrôle de l’État social, rendant l’appartenance sexuelle indifférente.
L’incendie de Notre-Dame de Paris n’est pas un signe de la chute de l’Europe chrétienne sous les assauts des musulmans. C’est un signe étrange et mystique de la guerre du Nouveau Reich contre le mystère sacré de la vie et de la mort révélé par la Croix.
Les frontières et la nouvelle théorie raciale
La société transfrontalière et la globalisation sont des composantes du nouvel empire totalitaire. Autrefois, le dissident avait la possibilité de quitter sa société d’origine et d’en trouver une nouvelle. Les frontières garantissaient la liberté individuelle: la diversité des systèmes éthiques et de valeurs permettait à l’être humain de se trouver un environnement de vie et d’accomplissement adéquat — ou à tout le moins, un environnement qui le tolère et qui ne l’empêche pas de vivre.
Le Nouveau Reich éthique vise à l’expansion et l’unification des sociétés. Il instaure ainsi un nouveau village global, où le dissident n’a nulle part où se cacher des gardiens de la pureté éthique.
La pureté éthique a remplacé la pureté raciale. Aujourd’hui, en Occident, ce n’est plus la forme du nez ou la nationalité qui est examinée au microscope, mais le CV éthique de chaque individu qui se démarque: n’y aurait-il pas là-bas, tout au fond de votre passé, du harcèlement, de l’abus ou ne serait-ce qu’une déclaration qui ne correspond pas au nouveau système de valeurs? Si tel est le cas, tombez à genoux et repentez-vous!
L’Europe qu’ils ont perdue
La révolution a isolé la Russie de l’Occident pendant près d’un siècle. Libérée du bolchevisme dans les années 1990, la Russie s’est précipitée vers l’Europe. Elle cherchait à se faire accepter, voulait apprendre, rêvait de retrouver son statut de pays européen. Et puis se réapproprier les valeurs européennes, les valeurs de la belle Europe d’avant-guerre. Une Europe qui n’avait pas peur de l’homme dans toute sa complexité. Qui respectait sa liberté d’aimer et de haïr. Une Europe consciente que la nature avait créé l’homme comme un être complexe, contradictoire et dramatique, et qui ne se considérait pas autorisée à s’immiscer dans les desseins supérieurs. Une Europe pour laquelle la principale valeur de l’homme tenait en son individualité, exprimée non pas dans sa façon particulière de faire l’amour, mais dans sa façon de penser et de créer. Où la créativité elle-même consistait à créer des peintures, de la musique, des textes, et non à remodeler son propre corps ou à inventer de nouvelles options de genre.
C’était l’Europe que la Russie recherchait dans les années 90. C’était ce qu’elle-même rêvait de devenir.
Est-il nécessaire aujourd’hui de se chercher à tout prix des alliés là où il n’y en a pas?
L’Europe est une cerisaie abandonnée et désaffectée. Les Firs y fuient la foule des migrants, les Ranevsky sniffent de la cocaïne pour ce qu’il leur reste de santé, les Petya Trofimov écrivent des lois européennes, les Anya s’y découvrent gay, et les séniles Gaïev, tel le vieux Biden, marmonnent des sentences toutes faites sur la bonté et la justice.(1)
La Russie actuelle est très loin de cette Europe à laquelle elle aspirait. Et, de toute évidence, elle ne veut pas rejoindre le nouveau panopticon européen.
Nos progressistes et nos occidentalistes insistent: la Russie a toujours été et demeure encore un pays de brutes et d’esclaves. C’est en grande partie vrai. Mais il est également vrai que les longues années de vie dans des conditions d’absence de liberté, la peur du camp incrustée dans les gènes, la délation, mais aussi le mutisme et la violence comme moyens de survie et d’autodéfense du peuple contre les autorités et des autorités contre le peuple — toutes ces choses ne nécessitent pas une nouvelle révolution, mais de la patience et de la thérapie.
J’ai horreur de l’esprit de violence et de l’atmosphère de peur. Mais cela ne signifie pas que j’accepterai la transformation d’un pays de brutes et d’esclaves en un pays où l’on ne frappe plus par réflexe de peur, mais par exigence du cœur, où l’on n’empoisonne pas par veulerie, mais par ouverture d’esprit, où des Schwonders(2) BLM de toutes les couleurs (y compris blancs) entrent dans les maisons pour exiger des professeurs qu’ils s’agenouillent, partagent leur espace de vie et donnent leur argent pour aider des Floyds affamés.
La Russie a vécu tout cela en 17. Et les écritures inclusives et autres déformations du langage, et la volonté de s’affranchir de l’identité sexuelle ou culturelle, et les assemblées discutant de moralité, et les revendications de masse des travailleurs, et même des enfants qui trahissent leurs parents — ainsi que cela s’est produit récemment aux États-Unis, où une fille démocrate a dénoncé ses parents trumpistes à la police(3) en découvrant qu’ils avaient participé à la prise d’assaut le Capitole. Tout cela, nous l’avons connu. Et comme il est étonnant de voir le monde occidental, comme s’il rêvait pour la première fois les doux rêves de Vera Pavlovna, et comme il est étrange de voir les yeux brûlants et les discours naïfs des nouveaux raznotchintsy(4) russes, dont la répression morale exercée contre les malpensants n’est pas moins ardente que celle de la police anti-émeute.
Or il y a beaucoup de malpensants, et ce ne sont de loin pas des orthodoxes «dormants». Ce sont des gens modernes, joyeux et libres, instruits et prospères, ouverts à la nouveauté, aimant la vie dans toute sa diversité. Des Russes, des Européens, des Américains, qui rêvent secrètement que ces temps étranges et sombres s’en aillent. Ils ont peur d’élever la voix. Ils ont peur d’être cibles du harcèlement en ligne en Russie, d’être moralement terrorisés, de perdre leur emploi et leurs moyens à l’Ouest.
Ils ont besoin de soutien comme d’air pur. Il faut que leurs sentiments et leurs pensées soient formulés en paroles et que ces paroles soient portées par de la volonté et de l’organisation. Ce qui signifie qu’il temps de formuler de manière claire et intelligible une nouvelle idéologie de droite, une idéologie à l’écart de tout dogmatisme radical, mais qui défende de manière stricte et sans compromis les valeurs d’un monde complexe fondé sur une humanité complexe.
Les raznotchintsy russes nous disent: la Russie est à la traîne du progrès.
Niet!
Par un concours de circonstances, nous sommes la voiture de queue d’un train fou lancé à toute allure vers un enfer boschien où nous attendent des démons multiculturels et «dégenrés» (gender neutral).
Il nous faut simplement détacher notre wagon, faire un signe de croix et commencer à construire notre propre monde. Reconstruire notre bonne vieille Europe. L’Europe dont nous avons tant rêvé. L’Europe qu’ils ont perdue. L’Europe de l’homme sain.

Je ne suis pas d'accord avec tout ce que dit Bogomolov, mais je crois qu'il a saisi l'essentiel, et que ceux qui ont saisi cela, de n'importe quel horizon qu'ils viennent, devraient faire corps.
Ce qu'il n'a pas compris, à mon avis, c'est que le virus de 1917, dont il reconnaît aujourd'hui les symptômes en Europe, venaient de l'Europe, l'Europe était son incubateur, c'est pourquoi sa nostalgie des belles valeurs européennes perdues me fait plutôt rigoler.
Ces valeurs là avaient commencé à disparaître depuis longtemps, et la première crise de cette maladie, après la révolution anglaise, fut la révolution française, qui a infecté la Russie.
Le virus de 1917 a continué à prospérer dans son incubateur de départ, dans les intelligentsias européennes, et en particulier françaises, imprégnées de trotskysme. Dans les facs des années 70 régnait exactement le climat qu'il dénonce ici, ce totalitarisme exécrable, moche et stupide, je l'ai vu venir.
Là où je ne suis pas d'accord non plus, c'est dans sa conception de son propre peuple, des brutes et des esclaves, mais c'est naturellement logique pour un être élevé dans la conviction qu'avant 1917, tout n'était que ténèbres, alors que la brutalité et la mentalité d'esclaves ont été largement le fait de la terreur bolchevique; celle-là même qu'on installe en ce moment chez nous, avec toute sa bêtise destructrice. Dieu sait que je n'ai jamais approuvé le servage, mais je sais que d'une part, il n'était pas implanté partout, que d'autre part, ce n'était pas à proprement parler un esclavage et qu'enfin, le foklore, sous toutes ses manifestations, ainsi que les photos anciennes, ne laissent pas apparaître une mentalité d'esclaves et de brutes avec les faciès correspondants. Mais ni l'intelligentsia tsariste ni à plus forte raison l'intelligentsia communiste ne se sont vraiment penchées sur le folklore, à part quelques notables exceptions.
En effet, la Russie est le wagon de queue du train fou, mais cela ne date pas d'hier. Cela date du moment où Pierre le Grand l'a accrochée à ce train. A l'époque, il semblait puissant et magnifique, mais il était fou quand même, c'est juste que maintenant, il est difficile de ne pas le voir.
Pour nous, Européens, qui avons compris cela et, dans la débâcle, mettons notre dernier espoir en la Russie, il est très important, que les Russes fassent la même prise de conscience que Bogomolov, et sauvent leur pays, en jetant ce que l'Europe a de pire, et en gardant ce qu'elle a de meilleur.
La phrase à retenir, dans cet article, la plus pénétrante et la plus juste, est celle-ci, à laquelle je souscris entièrement:
L’incendie de Notre-Dame de Paris n’est pas un signe de la chute de l’Europe chrétienne sous les assauts des musulmans. C’est un signe étrange et mystique de la guerre du Nouveau Reich contre le mystère sacré de la vie et de la mort révélé par la Croix.

samedi 20 février 2021

Le saint ou le bourreau

 


Je me suis fait engueuler par un intellectuel russe, au demeurant très gentil, parce que j'ai osé répercuter un recueil de citations de Lénine, dument accompagnées de leurs références dans les journaux de l'époque et ses oeuvres complètes, où il appellait au massacre et à la spoliation impitoyables de tous ceux qui l'empêchaient de faire de la Russie ce qu'elle n'avait jamais été et n'a pas vraiment réussi à être, encore un qui nous voulait du bien, comme Klaus Schwabe, comme Gates, comme Soros. Citations "sorties de leur contexte". Oui, mais même sorti du contexte, l'appel au massacre, à la terreur, c'est quand même un appel au massacre. Le contexte serait sans doute leur justification. Personnellement, je n'en vois pas. surtout à cette échelle, et avec cette brutalité. Et contre n'importe qui. Je dirais même qu'il m'est impossible de discuter avec des olibrius qui continuent à adorer cette idole phénicienne et à approuver les sacrifices humains qu'elle ne cessait de réclamer. Avec ceux qui regrettent papa Brejnev mais reconnaissent les "erreurs" précédentes, à la rigueur... mais cracher sur tant de tombes, non, en tant qu'orthodoxe, je ne le ferai jamais, et ce n'est pas cette "Russie", privée du reste de son nom et même de son intégrité géographique, culturelle et spirituelle, comme en voit les conséquences aujourd'hui, que j'ai aimée et que je suis venue retrouver.

En ce moment, on débat de savoir si l'on doit remettre la statue de Dzerjinski, le patron de la Tchéka, devant la Loubianka, ou s'il vaut mieux y établir la statue de saint Alexandre Nevski. Le débat n'est vraiment pas anodin. Je pense que le destin physique et métaphysique de la Russie dépend de ce choix. Un correspondant l'appelle "le choix entre un tchékiste et un saint", entre un bourreau idéologique et un saint prince. D'un point de vue purement politique, je pense qu'Alexandre Nevski étant une figure médiévale nationale unanimement reconnue, il serait beaucoup plus fédérateur de lui donner la préférence, plutôt que de jeter un os à ronger aux révisionnistes, ce qui va hérisser les autres, et j'ai déjà vu une lettre de hiérarques orthodoxes déclarant qu'ils ne reconnaîtraient jamais la restauration de celui qui a martyrisé tant de chrétiens écclésiastiques ou laïques, et cela paraît bien compréhensible. Une éventuelle réconciliation nationale ne saurait être que complètement compromise par le choix provocateur de Dzerjinski, et ce serait un vrai cadeau pour les libéraux et leurs maîtres occidentaux.

D'un point de vue chrétien, d'un point de vue métaphysique, il est évident que le choix de Dzerjinski plutôt que d'Alexandre Nevski serait un reniement définitif de la sainte Russie et de sa mission spirituelle en ce monde, de tous ses martyrs, à commencer par le dernier de ses tsars et sa famille, et aussi toute sa civilisation paysanne que l'on a détruite. Auquel cas, on pourrait être assuré qu'elle ne durerait plus longtemps. La réconciliation nationale deviendrait impossible. Dieu ne pourrait plus épargner un tel état. La Russie subirait le sort qui lui est promis par le Mordor occidental, et dégringolerait vite au niveau de tout le reste sans espoir de retour, avec quelques foyers de résistance, quelques ilôts, qui subsisteraient peut-être dans la nuit totale. 

Prions donc pour que ce sacrilège ne se commette pas et que cette tentation soit déjouée. C'est pour moi la même chose que de préferer Maliouta Skouratov à saint Philippe de Moscou.

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https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=3798679760198181&id=100001685823010&__cft__[0]=AZWQq0j3-AUqrAS63srty13PewWgeHNcnsCHkoVhKEVSaTE5L-UTl8g6B0VGB0emv56PgFKeCeXNHSwcWeOfgEB_IU9cK_jxR-puhdGuE29WdQMWK9OlLgFe2F66IWEQ-ZrfYluLkHeakzm5aTCqdn-M58qJjdU2fupay4DoVzH1NA&__tn__=%2CO%2CP-R

jeudi 18 février 2021

Sur les nuages

 




J'ai voulu me lancer sur les skis mais j'ai un problème de base, les botillons ne semblent pas correspondre, impossible de les bloquer.

Du coup, je suis partie à pied vers le marécage, avec l'impression de marcher sur des nuées scintillantes et sous un ciel d'un bleu profond, tendu de brume. Les roseaux penchaient des têtes poudrées dans l'air froid vibrant de paillettes de glace. Il faisait -15. Mais comme souvent en février, le soleil chauffe déjà les joues du promeneur, c'est là d'ailleurs notre premier signe printanier. 

J'avais Rita dans mon sac à dos, car la princesse déteste la campagne, l'exercice, et le froid aux pattes. Mais rester séparée de moi étant ce qui peut lui arriver de pire... 

Arrivée au lac, j'ai vu s'écarter les roseaux sur une surface sourdement imprégnée d'un insaisissable bleu pastel sous une patine blanche, pareil à une secret reflet interne circulant sous une lumière plus évidente . La berge se perdait dans la vapeur glaciale qu'exhalait ce grand être figé. J'ai fait un dessin, rapide, car mes doigts gelaient.

L'air était absolument immobile et silencieux. Une paix d'un autre monde. J'ai appelé sur la sainte Russie la protection du métropolite Philippe, et lui ai adressé ma prière habituelle: "Emmène-moi jusqu'à Dieu cachée sous ta mante, comme tu le fais de Fédia, dans mon livre!"

Le ciel béait devant moi, et les roseaux tournaient autour de lui en foule, pénétrés de sa lumière, comme des pénitents purifiés dont la tête courbée s'enflamme sans brûler.

Sans doute, ceux qui auront le bonheur d'entrer au Royaume y trouveront-ils ce que l'humanité a fait de mieux, de plus beau et de plus désinterressé. 

Au retour, j'ai trouvé à la porte une espèce de chat squelettique et miteux qui essaie d'entrer chez moi. Que pouvais-je faire? Il s'est jeté sur la bouffe et il a bu aussi d'énormes quantités d'eau. Puis il s'est assis pour me regarder comme une déesse tutélaire de ses yeux malades que j'ai nettoyés avec un colyre.. 

La seule justification que je me trouve, c'est que les gens qui jettent ainsi leurs animaux à la rue auront peut-être une addition moins salée à présenter, si leurs victimes ont trouvé auprès de moi un asile. A ma façon, je répare. Car nous sommes tous solidaires, dans le péché et la sainteté.

Et puis il y a ceux qui meurent, et dont les protégés se retrouvent clochardisés. 

Je n'ai pas fait grand chose pour les autres, sinon écrire, et puis secréter de la beauté, et sauver les animaux qu'ils ont trahis.





 

mardi 16 février 2021

Skis

 


Hier matin, au sortir de l'église, pour la fête de la sainte Rencontre, azur profond du ciel, ombres bleues, neige éblouissante, et un froid très vif, j'avais même des glaçons dans le nez. Ces jours froids de février ou de mars, dans leur pureté, nous soulèvent dans un autre monde; les congères sont pareilles à des nuages, où tanguent des églises et des maisons. Tout cela est si beau que je me suis décidée à acquérir des skis de randonnée, qui s'accompagnent de botillons et de deux bâtons, j'espère que je vais arriver à m'adapter. J'aimerais pouvoir gagner ainsi le lac et m'éloigner des horreurs qui pullulent. Cela me ferait faire de l'exercice, si je ne tombe pas toutes les deux minutes, évidemment....

J'ai acquis les skis après avoir renouvelé mon permis de séjour, ce qui doit être fait tous les ans. Je me sentais légère. Rita est la vedette du service d'immigration, tout le monde vient s'extasier sur elle.

Dans la foulée, je suis allée chercher un cadre, chez l'encadreur Vladimir. Il est communiste, surtout par horreur du capitalisme, comme la matouchka du père Valentin; pour moi, c'est un serpent à plusieurs têtes et un seul corps, comme on le voit bien en ce moment, avec l'émergence du cocopitalisme de Klaus Schwabe. On nous a jetés les uns sur les autres pendant tout le XX° siècle, pour aboutir au coït final du trotskisme universel avec le fric obscène de quelques capitalistes complètement fadas. La spoliation générale de tout le monde au profit de quelques uns qui veulent notre bien et nous contrôlerons jour et nuit, et jusque dans les chiottes. C'est sûr que devant une telle perspective, je préfèrerais le bon vieux communisme de Brejnev...

Sachant cela, que j'ai bien compris, et dont j'avais l'intuition depuis un bon moment, je devrais m'éloigner dans quelque village perdu que les seigneurs crochus et griffus  de la finance oublieront de réquisitionner, et peut-être le ferais-je, si j'étais plus jeune, mais je me demande si cela vaut la peine de se compliquer ce qui me reste de vie, de me distraire de ce que je peux enfin faire, pour l'instant, sans entraves, écrire, dessiner, jouer de la musique. Evidemment, dans la mesure où des crétins ont la présomption de simplifier Molière pour le mettre à la portée du débile fabriqué par cinquante ans de déconstruction post-soixante-huitarde, on peut se demander si écrire a encore un sens.

Je me souviens du don Juan de Marcel Bluwal, avec Claude Brasseur et Jean-Claude Piccoli, il passait à à une heure de grande écoute, en 1965, et toute la France s'était passionnée pour cette oeuvre. On n'avait pas de problème pour comprendre Molière. Ce n'est pas Molière qui a vielli; ce sont les générations nouvelles que l'on a rendues complètement étrangères à leur héritage, et que l'on a privé des référents culturels minimaux indispensables pour aborder leurs classiques. Ce fut mené de main de maître, la différence du cocopitalisme avec le bolchevisme, c'est qu'il fait dans la patiente fourberie. Le dressage en douceur, moins de mitrailleuses et d'arrestations, plus de boniment et de séduction perverse et avilissante.

Pour ceux que cela intéresse, voici une vidéo sur la question, elle est loin d'être la seule. Vous serez moins surpris, le jour où l'on nous prendra tout. Pour notre bien, évidemment.




J'ai vu que la région de Yaroslavl avait lancé un programme de "rénovation", ou plutôt "d'amélioration"de plusieurs petites villes, parmi les plus jolies, dont la nôtre, qu'on pourrait croire  pourtant déjà suffisemment saccagée. Je mets là le projet pour la rive du lac, à Pereslavl, du côté de la charmante plage municipale où je vais parfois me promener et dessiner. 

c'est bien, ça ressemble à n'importe quel endroit merdique du monde globalisé

Après avoir détruit tout ce qui avait du charme et de la poésie, il faut maintenant transformer les espaces naturels en rue piétonne de supermarché banlieusard européen, banal et sinistre. Ces gens-là, ceux qui décident ce genre de projet, non seulement n'ont ni culture ni goût, mais ils détestent instinctivement tout ce qui est vivant et naturel, et tout ce qui est local. L'encadreur Vladimir m'a confirmé qu'une société de Moscou s'était emparée des abords de la plage municipale pour la transformer en Riviera bien bétonnée et bien asphaltée, avec les petits massifs, les thuyas et les réverbères de rigueur autour des hôtels et des parkings.

Dans le même ordre d'idée, ce qu'a fait mon voisin, déverser des quantités de terre hallucinantes pour écraser dessous le marécage et la nappe phréatique, semble hyper tendance dans la ville de Pereslavl. Tout le monde s'y met. Benjamin le Suisse a perdu sa récolte de pommes de terre, parce que son voisin a fait comme le mien. Tous ceux qui construisent en ce moment des boites d'allumettes sur pilotis, recouvertes de plastique, font précéder l'opération du déversement, sans aucun égard pour ceux qui habitaient déjà sur place, de tonnes et de tonnes de terre qui surélèvent leur fichu terrain d'un mètre par rapport à leurs voisins. 

Et bien entendu, la nappe phréatique ne disparaît pas pour autant. Elle remonte ailleurs, dans les patates de Benjamin, ou chez moi, et le printemps risque de m'offrir des phénomènes spectaculaires. 

Tant qu'on peut encore le voir, un des seuls points de vue pittoresques qu'il me reste, comme c'est le soir, on ne distingue pas trop la bagnole du voisin sur son piédéstal.


Et pour finir, cet extrait du Don Juan que j'avais vu à 13 ans, avec toute la France, à la télévision: