Prise d'insomnie sévère, je suis partie pour Pereslavl à cinq heures du matin, pensant que de toutes façons, je serais crevée le lendemain, alors plutôt que de tourner encore trois heures dans mon lit, autant rouler...
Mal m'en a pris, car il neigeait, et je me suis retrouvée sur le périphérique extérieure, le MKAD, de nuit, dans la tourmente, je ne voyais même pas les lignes blanches de la route, je recevais des paquets de bouillasse à chaque passage de camion, le liquide antigel gras diluait les lumières des phares, sur le pare-brise, et je distinguais les lettres des panneaux au dernier moment. J'étais déjà épuisée en abordant enfin la route de Iaroslavl. Je me suis arrêtée dans une station service au centre commercial Leroy Merlin de Pouchkino pour boire un café. Puis une autre fois quarante kilomètres plus loin, et là, j'ai dormi vingt minutes en attendant qu'il fasse jour.
Si j'étais dans cet état-là, c'est que je n'ai pas arrêté de voir des gens, qui à chaque fois, me servent à bouffer et du thé, le thé, en fin de journée, m'empêche de dormir, surtout à dose massive. J'étais allée chez Macha, avec laquelle on ne peut avoir une conversation normale à cause de ses gosses, ce qu'elle admet elle-même. Je me pose du reste des questions sur les générations nouvelles, car écrivant mes souvenirs d'enfance, je me souviens parfaitement, que la plupart du temps, avec ma cousine, avec ma copine Agnès à la Surelle, ou avec mon amie Carole à l'Armençon, non seulement nous jouions seules, mais nous n'avions aucune envie que les adultes viennent au milieu nous casser les pieds. Ce sentiment était d'ailleurs, à mon avis, réciproque. Les adultes étaient trop contents de pouvoir deviser sans enfants dans les pattes.
Ensuite, je suis retournée chez les Messerer, avec qui j'ai encore bu le thé, puis je suis allée chez Lisa, chez qui j'ai à nouveau bu le thé, et mangé des gâteaux...
Lisa a une impressionnante collection de sifflets et de jouets de terre traditionnels, pas seulement russes, mais d'Asie Centrale, de Pologne, des pays baltes et scandinaves, tout cela entassé dans la chambre minuscule de sa minuscule maison de Peredielkino. Elle a aussi énormément de livres sur la question. Cette passion remonte à son enfance. Elle m'a montré sur un livre trois jouets qui lui ont été ensuite offerts par l'auteur du livre lui-même, quand elle l'a rencontré à l'âge adulte.
Elle a aussi beaucoup de vêtements traditionnels qu'elle fait elle-même, avec des étoffes magnifiques, qu'une association d'enthousiastes imprime à nouveau, et elle les porte pour les fêtes. Dans la vie ordinaire, c'est plutôt le genre sportif, jeans et baskets. Elle fait également des vêtements actuels inspirés par le style traditionnel. Elle m'a montré une jupe qu'elle a composée avec un bout de tissu dont on se servait quelque part de serpillère. Elle a demandé à le récupérer, l'a lavé et utilisé, en lui ajoutant des applications d'autres tissus, et obtenu quelque chose de très stylé.
Je ne sais pas comment elle a le temps de faire tout cela, en plus de son boulot de pédiatre, et de voyager en Russie. Naturellement, elle est jeune, mais quand même, elle a une sacrée énergie. sur le seuil, elle m'a offert une poupée traditionnelle russe qu'elle a faite elle-même.
La veille, j'avais fêté mon anniversaire chez les Messerer, dans leur grande maison qui fait souvent office de galeries de tableaux, les leurs et ceux des copains. Je ne savais où poser les yeux tant il y en avait de superbes, consacrés à Saint-Pétersboug et sa poésie nordique fantasmagorique. C'était en petit comité, par rapport à l'année dernière chez Dany et Iouri, parce que Peredielkino, c'est plus loin, et la salle à manger n'a pas la dimension de leur théâtre. Mais c'était très gai, chaleureux et touchant. Skountsev était là avec sa femme, de sorte que nous avons pu sacrifier à la tradition russe, qui est de chanter à table. J'ai porté un toast "aux couples présents, car moi qui suis seule, je ne peux que saluer ceux qui se sont trouvés sur la base d'un univers spirituel et culturel commun et ont réussi à passer toute leur vie ensemble, plus ou moins dans l'harmonie." Marina Skountsev, les larmes aux yeux, s'est écriée: "Lora, Dieu vous bénisse!"
Sérioja et Tania Lochakov m'ont proposé de fêter chez eux l'anniversaire suivant, eux aussi vivent en dehors de Moscou. Il faut croire que mon anniversaire est en passe de devenir un événement mondain!
au premier plan Kostia Soutiaguine, puis Sacha Messerer |
Skountsev et Marina |
Ritoulia est aussi de la fête |
avec Serioja Lochakov |
Merci Laurence pour ces airs magnifiques et vos amis charmants qui nous font oublier, l'espace d'un moment , l'emprise de Sauron...
RépondreSupprimerEt bon anniversaire !
Merci!
SupprimerUn voyage retour par étapes amicales et chaleureuses... La route, de nuit, sous la neige, des arrêts-thé à "l'auberge Leroy-Merlin", votre périple a un côté "L'Ami Fritz", je trouve. Je veux dire de rencontres fortuites et/ou prévues, qui débouchent sur des moments de vraies fraternités !
RépondreSupprimerA bientôt de vous lire...