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samedi 30 septembre 2023

C'est présenté...

 


J'ai l'impression que dans la malheureuse maison de l'oncle Kolia s'installent d'autres amateurs de musique de merde et de radio non stop. Par ce jour d'automne délicieux, peut-être le dernier, quand l'air est doux et doré comme le miel, plein de murmures, de feuilles tourbillonnantes, d'abeilles affairées, cette intrusion pachydermique de rhinocéros contemporains est particulièrement éprouvante. Outre la crainte de de déménager, j'aurais regret à abandonner mésanges, hérissons, papillons et autres créatures qui trouvent refuge dans mon microcosme, et puis je me demande parfois si Dieu n'a pas laissé les choses arriver de cette manière pour éprouver ma patience et m'amener à dépasser ce qui m'exaspère, s'il ne m'a pas attribué, avec mes gousli, mes icônes, mes chats, mes fleurs et mes coins sauvages, un rôle de vigie, parmi les diverses expressions de la hideur et du vacarme insensé qui caractérisent la société post-moderne..  

Ma prestation chez le tsar Ivan ne s'est pas passée comme prévu, car elle a pris la forme d'une interview par une collaboratrice du musée, et je n'ai pas eu le temps de chanter tout ce que nous avions répété, et puis Skountsev a pris un peu haut la chanson cosaque, j'avais du mal à monter la voix, avec mes problèmes ORL récurrents... Néanmoins, le public était nombreux, enthousiaste, ému autant que moi-même.Un homme très sombre m'a demandé si, en tant qu'artiste peintre, j'avais tenté de représenter le tsar. J'ai répondu que oui, d'autant plus qu'on en avait fait beaucoup trop d'images grimaçantes. On a passé une vue de ce dessin sur l'écran, et cet homme est venu me serrer ensuite la main et me féliciter, avec un air pénétré. Le père d'Ania Ossipova m'a remerciée d'avoir chanté l'hymne des cosaques du Terek, car en plus d'être un savant communiste, il descend de ces fiers guerriers, et je lui ai promis de prendre mes instruments avec moi, la prochaine fois que j'irais dîner chez lui! Une dame médecin m'a parlé les larmes aux yeux de mon approche pleine d'amour et de sincérité de la Russie et de mes personnages. Un jeune médiéviste m'a confié que son arrière-grand-père était mort en France, que c'était un officier qui faisait partie du corps expéditionnaire. Les collaborateurs du musée m'ont dit qu'en dépit du fait que j'avais écrit une oeuvre littéraire, ils étaient étonnés par ma connaissance de l'époque et de ses usages. On m'a aussi proposé de participer au festival de gousli de Souzdal et à une émission de radio...

J'ai été interviewée par la télé de Iaroslavl et la séance retransmise sur un site culturel. Le musée d'Alexandrov est un musée fédéral, et on avait fait les choses en grand. Je n'ai pas encore de vidéo ni de photo de l'événement. 

Skountsev a fait une intervention pour regretter l'absence d'icône d'Ivan le Terrible dans l'église en fonction. Il m'a montré, sur son téléphone, un article d'internet comme quoi il aurait été canonisé en 1620, et tout un tas d'icônes, contemporaines. Ni le personnel du musée, ni les moniales présentes dans une partie des lieux ne sont d'accord avec cette vue des choses. Moi non plus, je dois dire. Si je ne suis pas d'accord pour le diaboliser à des fins politiques qui ne devraient pas le concerner, je doute vraiment de sa sainteté! Le martyr du métropolite Philippe et de saint Corneille devraient suffire à déconsidérer cette drôle d'idée. Mais il court toutes sortes de thèses farfelues, comme souvent en Russie, à propos de ce personnage. D'après Skountsev, ce n'est pas lui qui a martyrisé Philippe, ou permis son martyre, et il aurait passé dix-sept ans au monastère avant de quitter saintement ce monde. Mais Ivan le Terrible est mort à 54 ans, il faudrait admettre qu'il fût devenu moine à 37 ans, soit en pleine période de l'Opritchnina. Et puis il y a les témoignages des voyageurs et envoyés de l'époque, je peux difficilement croire qu'ils eussent menti de bout en bout, comme des journalistes de LCI ou de BFM TV...

En revanche, je trouverais normal de lui élever une statue devant le musée, comme à tout personnage historique d'envergure, dans une ville marquée par sa présence.

Le musée m'a offert des tas de cadeaux et des roses


2 commentaires:

  1. Terre des Hommes : "Une fois, en Russie, j’ai entendu jouer du Mozart dans une usine. Je l’ai écrit. J’ai reçu deux cents lettres d’injures. Je n’en veux pas à ceux qui préfèrent le beuglant. Ils ne connaissent point d’autre chant. J’en veux au tenancier du beuglant. Je n’aime pas que l’on abîme les hommes."

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    1. Oui, je partage son point de vue, et encore, le beuglant de l'époque est infiniment plus supportable que le tohu-bohu actuel, on n'arrête pas le Progrès....

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