7, 8 et 9 juillet 2025
Complètement épuisée et vaseuse, je n'ai pas trouvé le courage d'aller à l'église, le dimanche matin. Katia, Fiodor et Elena, si. Le prêtre a pris une photo de Katia et de Fédia avec un journal orthodoxe où, en l'honneur des saints Piotr et Févronia, symboles de l'amour conjugal, s'affichait en première page une famille idéale. Le prêtre a donné un chapelet à Katia: "Prie pour lui". Katia a finement observé que la couverture du journal était un signe, et qu'il ne restait plus qu'à organiser la cérémonie.
Avant le retour au front, Fédia m'écoute chanter un vers spirituel accompagné sur les gousli. Il n'avait jamais entendu cet instrument traditionnel, ni la chanson, et il en est très ému. Je trace sur lui un signe de croix.
Nous l'avons ramené à un poste de contrôle, au milieu de la steppe, sous un soleil ardent. Le chauffeur Génia était en retard, car sa camionnette l'avait lâché. "Revenez-nous vite! nous dit-il.
- Nous reviendrons avec de l'aide!
- Revenez, avec ou sans aide, pour lui, pour nous!"
L'aide humanitaire est le meilleur moyen qu'a trouvé Katia de revoir son fiancé et d'adoucir sa vie. Elle est extrêmement nécessaire et très bien venue. Nous avons pris congé, bouleversées de voir Fédia et son camarade repartir en enfer.
Tout au long de ce voyage qui m'a, comme prévu, tellement surmenée, j'ai ressenti une véritable paix intérieure, en dépit de l'angoisse de tomber malade dans une région en guerre où j'étais de passage. La certitude d'avoir fait ce que je devais, et d'avoir trouvé en cela une direction pour la suite des événements. Au plus près des nôtres, et au plus loin de toute la sombre pantomime des monstres qui ont tramé tout cela. En chemin, je disais au père Nikita que j'avais bien du mal à pardonner aux fourbes sanglants responsables de ce malheur: "Ils n'ont plus grand chose d'humain, m'a-t-il répondu. Il faut comprendre que pour ces gens, nous sommes des inutiles et des gêneurs. Ils se figurent que tout leur appartient. Nous respirons leur air, buvons leur eau, occupons leurs terres, dépensons leurs ressources. Il leur faut donc nous éliminer, car ils sont la caste supérieure, et nous des sous-hommes."
Ce tableau correspond bien au personnel politique de toute l'UE, qui ne s'en cache même plus. Je suis donc confirmée dans tout ce que je pensais au sujet de cette affaire, et calmement certaine d'avoir choisi le bon camp.
Nous avons envoyé une petite vidéo à Serioja le balalaiker, qui nous a répondu: "Coucou à tous les artistes! Je suis bien content qu'on ne vous ait pas enlevées, il nous aurait fallu payer une rançon ou aller vous chercher au fond des steppes. Si vous répétez l'opération, je pourrais vous accompagner,d'abord parce que vous n'avez pas froid aux yeux, et ensuite parce que certains de nos gars y sont déjà allés, et que les soldats nous achètent pas mal de balalaïkas, je ne sais pas ce qu'ils en font, s'ils s'en servent pour se taper dessus, mais c'est un fait, et un petit concert avec master class serait bien venu!"
Au retour, nous avons fait escale à Zadonsk, une jolie petite ville où j'avais autrefois séjourné, et qui se trouve à mi-chemin. Nous nous sommes inclinées sur les reliques de saint Tikhon de Zadonsk. La ville a a été fondée seulement au XIX° siècle, et comme en beaucoup d'endroits, marquée par les marchands. Les marchands et les paysans, c'était le socle du pays. Il y a bien des fautes de goût à Zadonsk, mais tout de même, quelle différence avec Pereslavl-Zalesski! La ville reste homogène est charmante, très propre, pimpante, et la "mise-en-valeur" si souvent catastrophique n'y a pas fait trop de dégâts.
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