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mardi 18 juillet 2023

Les roses du métropolite

 


Je sens arriver le moment où la maison d'oncle Kolia va être saccagée. J'ai vu partir dans une benne les humbles vestiges de sa vie, j'ai même récupéré un baquet de bois, malheureusement irréparable, mais comme m'a dit Ania, cela peut servir à planter des fleurs... 

J'ai souvent photographié et dessiné cette jolie maison. Elle venait de la campagne, on l'avait démontée au village et remontée ici. J'écoute le coeur serré les bruits qui annoncent son éxécution, et la voix du propriétaire ne me laisse guère espérer de miracle. A mon avis, ce n'est pas un poète.

Au café, j'ai discuté de ce genre de choses avec la sensible Iana. Elle me disait que Sobianine avait tué Moscou, et que la plupart des architectes à l'oeuvre dans cette ville étaient des fils d'apparatchiks totalement dépourvus de talent mais ni d'arrogance, ni de prétention, ce qui ne m'étonne guère, au vu de l'OVNI de verre dont j'ai déjà évoqué la présence aussi hideuse qu'indiscrète. La veille, à la réunion des pèlerins, une dame se demandait et me demandait ce qui s'était passé, quelle étrange mutilation intérieure avait privé les gens de toute espèce de sens esthétique, et par là même bien souvent de sens poétique et de perception du spirituel. Ils ne voient même pas où est le problème. Pourtant, parfois, la mémoire génétique laisse arriver un être humain normal parmi les mutants. Mais beaucoup de mal a été fait, partout. 

Le métropolite Paul, recteur de la Laure de Kiev, a été emmené en détention provisoire par les autorités scélérates et antichrétiennes du pays 404. Voici ce qu'écrit la journaliste Marina Akhmedova:

Le recteur de la Laure des Grottes de Kiev a été transféré de résidence surveillée à domicile en détention provisoire, après une demande de caution d'un montant énorme, 33 millions de grivni. Presque 1 million de dollars. Il a encore plaisanté dans sa cage du tribunal que maintenant, il n'était plus Mercedes (c'était le surnom qu'on lui donnait) mais Tesla, tout le temps avec un bracelet, et celui-ci se décharge. A sa sortie sous escorte du tribunal, pour aller en détention provisoire, il a confié sa croix et sa crosse à son avocat. L'avocat lui a baisé la main. 

J'aurais bien aussi, aujourd'hui, baisé la main de Paul. Qui aurait su, qui aurait su que c'est précisément  lui, homme d'affaire qu'on affublait du sobriquet de Mercedes, qui aurait les reins si solides. Que justement lui, le pragmatique Paul, aurait les reins plus solides qu'Onuphre.

En 2010, flânant dans la Laure, je rencontrai le père Paul par hasard. Je lui pris une interview et on me le reprocha depuis l'Ukraine, après sa publication, Paul paraissait trop bien, dans mon article, nous avions parlé des roses de la Laure, de son jardin bien aimé, et il m'avait semblé alors que Paul lui-même avait des fleurs et un beau jardin dans le coeur. Et on me disait: "Parle-lui de sa Mercedes! Parle-lui de sa montre! Parle-lui de ses millions!" Mais je ne savais rien de tout cela, j'avais vu la Laure, les roses, le jardin, et au milieu de tout cela, un prêtre à la conversation intéressante. Et je ne pouvais pas imaginer ce jour-là, assise devant lui, qu'il deviendrait le principal héros et martyr de l'Ukraine.

Il a dit depuis sa cage, que sa mère n'avait pas à avoir honte de lui, qu'on le jugeait pour sa foi, et non pour un crime. Et lui-même n'en veut à personne, mais remet les enquêteurs et le procureur dans les mains de Dieu. Ce sont là des paroles terribles dans la bouche de Paul. Car à présent, il n'est plus seulement un prêtre, c'est un martyr. Il est proche de Dieu. Mais ni les enquêteurs, ni les procureurs ni ce qui tient lieu maintenant de président à l'Ukraine ne redoute pour l'instant ces mots, car ils n'en connaissent pas la signification. Mais moi, hier, j'aurais baisé la main de Paul.

https://youtube.com/shorts/QIsx43-t4J0?feature=share

Un ami russe sur VK m'envoie dans la foulée ce commentaire:  À propos de la protection des valeurs européennes par l'Ukraine. Je regarde souvent la chaîne Khodorkovsky media en russe : sur cette chaîne se produisent des représentants de l'élite culturelle "russe" ("les navalnistes"). Leur discours est beaucoup plus radical que celui de l'Occident (je juge sur la chaîne LCI). Parmi les "valeurs occidentales" défendues par l'Ukraine, selon les intellectuels "russes", le CHRISTIANISME est en premier : L'Occident est le bastion du christianisme du monde (sic !) et l'Ukraine est l'avant-garde des chrétiens contre les satanistes de Poutine !

Ce qui me dégoûte particulièrement dans la mafia qui nous dirige et son golem ukrainien, c'est sa duplicité cynique, sa fourberie vile, ce perpétuel recours aux larmes de crocodile. On voit actuellement le souci qu'a le gouvernement ukrainien du christianisme. Dans la même veine, on clame dans la presse vendue que les Russes castrent leurs prisonniers, alors que ce sont les Ukrainiens qui ont mis en oeuvre cette pratique. Cela s'appelle l'inversion accusatoire, un procédé particulièrement indigne. J'avais moi-même constaté que Khodorkovsky manipulait son public, avec un reportage visiblement bidon cherchant à prouver au libéral russe de base que l'insécurité en Europe était un mythe, et quand j'avais affirmé le contraire dans un commentaire, je m'étais faite injurier par des gens qui de toute façon écoutent seulement la propagande occidentale ou pro occidentale, et l'on me soupçonnait de ne pas être "une vraie Française".A quoi le même ami me répond (en français): 

Je connais très bien le public cible de Khodorkovski media : c'est l'ancienne élite culturelle et scientifique de l'URSS ou les héritiers de cette élite. À l'époque de l'URSS, cette caste (en russe elle s'appelle "интеллигенция") avait d'énormes privilèges et ils ont joué le rôle de juges de tous les autres. Leur image du monde a toujours été très simple : en Russie vit "le peuple russe maléfique", mais il y a des intellectuels qui sont porteurs du bien ("les rayons de lumière dans le royaume des ténèbres"). Ces personnes ont reçu une bonne éducation, mais cela ne les empêche pas du tout d'appeler le noir blanc si cela confirme leur statut de "rayons de lumière". Après tout, il est évident pour toute personne saine d'esprit que la politique de l'Occident n'a pas de priorité pour la protection des valeurs chrétiennes : aucun chef d'état occidental ne le dit  (sauf peut-être Orban) et l'Occident n'exige certainement  de l'Ukraine aucune "protection des valeurs chrétiennes". Mais cela n'empêche pas les intellectuels "russes" de penser dans une image du monde qui n'a aucune corrélation avec la réalité. Votre exemple est une belle illustration de ce dont je parle : si vous pensez quelque chose qu'une française "ne devrait pas penser", par conséquent, vous n'êtes pas une vraie française, pour eux tout est simple !

Cette élite correspond en tous points à la nôtre, je veux dire à celle de la France. C'est le même public.

Et sur ces entrefaites, Nicolas Bonnal m'envoie un article fort intéressant d'Alexandre Douguine. Le pont de Crimée et le destin de la Russie | Геополитика.RU (geopolitika.ru)

La révolution par le haut peut empêcher la révolution par le bas.

À propos de la nouvelle attaque sur le pont de Crimée. Remarquez l'entêtement forcené de l'ennemi. C'est la marque de fabrique des Malorossiens. Mais aujourd'hui, c'est de mauvais augure.

Ils ont commencé à bombarder Donetsk en 2014 et ne s'arrêtent pas un seul jour.

Ils ont attaqué le territoire d'anciennes régions russes - Belgorod, Koursk, Briansk - et continuent.

Ils ont commencé à tuer des Russes par des attaques terroristes, et ils le font encore et encore.

Ils ont attaqué des installations nucléaires, et ils le font encore et encore.

Il en va de même pour le pont de Crimée. Tant que l'Ukraine existera avec cette population folle et ce régime maniaque, il est tout simplement stupide et irresponsable de penser que son comportement changera. À mon avis, il faut mettre fin à la simulation d'une vie paisible en Russie, reporter les élections (nous avons déjà élu Poutine, et toute autre personne ne l'est évidemment pas) et passer à une mobilisation totale.

Les changements de personnel sont inévitables ; les retarder devient un processus suicidaire. Nous avons affaire à un ennemi complètement fou, extrêmement agressif et dément. Et il a l'Occident derrière lui. Il n'y a pas de remède à la rage.

Et bien sûr, nous devons encore et toujours nous tourner vers les causes.

Qui a préparé et réalisé l'effondrement de l'Union ?

Qui l'a applaudi et en a profité ?

Tous sont responsables de la catastrophe dans laquelle nous nous trouvons déjà et qui, en fait, ne fait que commencer.

L'élite russe actuelle a été formée dans les années 90. Elle est composée de criminels historiques.

Le libéralisme est un crime contre la Russie. Poutine a commencé à changer cet état de fait, mais pendant 23 ans, y compris le SWO, 5 % des libéraux se sont échappés, 0,000001 % ont été punis ou expulsés de force, 15 % ont changé d'opinion pour devenir patriotes (sincèrement ou par nécessité, peu importe). Et le reste des complices (les libéraux) sont à leur place. Aujourd'hui, ils entravent de toutes leurs forces le processus de transition du pays vers l'armée, les réformes patriotiques et la renaissance de la civilisation.

Gorbachov et Eltsine, longtemps maudits par le peuple et l'histoire russe, ne le sont pas encore pour l'élite. La Perestroïka et les réformes des années 90, qui pour le peuple et l'histoire sont une trahison et une catastrophe, y compris pour toutes les figures du premier plan de l'époque, sont pour l'élite "l'âge d'or" et "le début de l'histoire de la réussite personnelle". Nous sommes aujourd'hui en guerre acharnée contre 1991, contre Gorbatchev, contre Eltsine, contre cette Anti-Russie qui s'est d'abord renforcée en Russie même.

Sans cette Anti-Russie russe, il n'y aurait pas d'Anti-Russie en Ukraine et dans d'autres États post-soviétiques, pas d'Anti-Russie pop des Pougatchev et des Galkin, pas d'Anti-Russie des migrants scalpant les Moscovites.

Vous ne pouvez pas vaincre les conséquences sans éliminer les causes qui ont conduit à la catastrophe.

Autre chose : ce qui se passe en Russie n'est-il pas une "guerre civile latente" ?

D'un côté, le peuple et l'armée, qui, après la mobilisation, est presque la même chose. De l'autre côté, les tours libérales qui persistent à s'opposer à toute nouvelle avancée dans le sens du patriotisme.

Et seul Poutine empêche la situation de passer de la phase latente à la phase ouverte.

N'était-ce pas là le but de la mutinerie de Wagner ? Elle n'aurait pu être et n'a été éteinte que par Poutine, le fusible de la guerre civile. Il est légitime non seulement du point de vue du peuple, mais aussi du point de vue de la volonté du ciel, du point de vue de la Providence. Mais les élites encore libérales ne le sont pas. Elles ne sont légitimes d'aucun côté.

Le début de la NWO a été le moment de l'invasion parabolique du début supérieur de notre histoire, car le peuple russe a été créé à l'origine pour l'avenir - pour la bataille finale avec la civilisation de l'Antéchrist. Cette bataille commence maintenant.

Poutine, qui se tient au-dessus de la mêlée, ne peut pas sacrifier le peuple et le front.

Il ne veut pas sacrifier l'élite.

Théoriquement, une nouvelle élite peut être créée, et même rapidement, mais un nouveau peuple est impossible par définition, bien que les libéraux des années 90 y aient sérieusement pensé, en exterminant et en séduisant lentement les anciens.

Les guerres civiles ont leur propre logique inexorable. Une révolution par le haut peut empêcher une révolution par le bas. Et la révolution d'en haut peut être créative, tandis que la révolution d'en bas détruira tout. Mais les conditions préalables sont précisément créées par le sommet - sa politique aliénée de la société, compradore, exploiteuse, irresponsable et à courte vue.

La situation devient de plus en plus aiguë : soit une révolution par le haut, soit une guerre civile.

Agir avec fermeté ne signifie pas qu'il faille procéder immédiatement à une frappe nucléaire. Nous devrions essayer d'autres mesures qui n'ont pas encore été déployées, à savoir

  • l'élimination drastique des agents ennemis des postes clés de l'État,
  • un remaniement du personnel,
  • lancer une véritable mobilisation de la société,
  • cesser de dire que "nous avons été trompés", éliminer purement et simplement cet argument, car seuls ceux qui croient peuvent être trompés, mais c'est un crime de croire l'Occident,
  • d'abolir la paix dans le pays et
  • et de déclarer la guerre dans le pays.

Qu'est-ce que l'état d'urgence (Ernstfall) ? C'est la fin du temps de paix et de ses règlements et le début du temps de non paix. Pour tout le monde, et pas seulement pour les habitants des nouvelles régions ou de la région de Belgorod. En temps de paix, les règles d'urgence s'appliquent : un danger menace le pays, l'ensemble de la société, l'ensemble de l'État, et tous les moyens sont bons pour le repousser.

Et seulement si tout cela (et nous n'avons même pas encore commencé) ne suffit pas, alors nous devrions envisager la possibilité d'attaquer l'ennemi avec des armes nucléaires.

C'est ce que craint le régime de Kiev : que nous cessions de divaguer et que nous commencions à le combattre réellement avec des moyens conventionnels. Il tombera alors. C'est pourquoi l'Occident, par l'intermédiaire de ses agents - et qui sont les libéraux russes, sinon des agents occidentaux ? - et nous incite à passer immédiatement ( !) à un scénario extrême (ou plutôt, craignant les conséquences au dernier moment, à ne pas passer à l'action).

Ce n'est que sous l'état d'urgence que l'on détermine qui détient la véritable souveraineté. Le souverain qui déclare l'état d'urgence et qui prend des décisions dans ses conditions, en s'appuyant non pas tant sur la loi que sur la volonté et l'esprit. Le sujet ne naît que dans l'état d'urgence. Dans les autres cas, il s'agit d'un sujet conditionnel (soit un sujet, soit un objet), et seul l'état d'urgence met tout à sa place.

Traduction par Robert Steuckers

Or justement, j'ai eu une conversation avec Dany sur le fait qu'en dépit de la superiorité russe dans cette guerre, elle ne prend pas fin, on continue d'envoyer en masse à une mort certaine des Ukrainiens capturés au lasso, des soldats russes sont tués, de nombreux civils jusqu'en Russie même, les civils sont pris en otages par les ukro-otaniens qui n'hésitent pas, depuis 2014, à les exterminer, ce sont pour eux des sous-hommes surnuméraires, l'Eglise aussi est prise en otage depuis cette époque, et persécutée plus que jamais. "Ce sont des mafieux, me dit Dany, les mafieux sont capables de tout, et s'ils perdent, d'autant plus. Nous ne savons pas à quels chantages ils recourent, tous les moyens sont permis." Une partie des Ukrainiens sont des Russes, et la partie enragée a été dressée contre la Russie comme un pit-bull, ses réflexes sont irrémédiablement conditionnés.

J'avais depuis longtemps l'intuition que la "démocratie" était la porte ouverte à la ploutocratie et à son atroce dictature, quelle dictature peut-être plus atroce que celle des riches dépourvus de toute conscience et de toute culture? Et ces riches psychopathes qui se croyaient les maîtres du monde voient leur projet de mondialisme transhumaniste compromis...

Valérie Bugault donne à mon intuition le cadre de sa science et de sa compréhension dans cette vidéo très intéressante. Savoir où nous en sommes peut nous permettre de réagir correctement, ou simplement nous éviter la honte de prendre leurs horribles vessies pour des lanternes: 







Настоятеля Киево-Печерской лавры перевели из-под домашнего ареста в СИЗО, запросив в качестве залога огромную сумму - 33 миллиона гривен. Почти миллион долларов. Он ещё шутил в клетке в суде, что теперь он не Мерседес (такая у него была кличка), а Тесла - все время с браслетом, а тот разряжается. Уже выходя под конвоем из суда, чтобы отправиться в СИЗО, он передал крест и посох своему адвокату. Адвокат поцеловал его руку.

Я бы тоже сегодня поцеловала Павлу руку. Кто б знал, кто б знал, что именно у него, хозяйственника, человека, которого дразнили Мерседесом, окажется такой хребет. Что именно он, прагматичный Павел, будет иметь хребет крепче, чем Онуфрий.

В 2010 году я, гуляя по Лавре, случайно встретила отца Павла. Я взяла у него интервью, и меня ругали с Украины после того, как оно вышло - слишком хорошим у меня получился Павел, мы с ним говорили о розах в Лавре, о его любимом саде, и мне тогда показалось, что у самого Павла в душе - тоже цветы, красивый сад. А мне говорили - "Про Мерседес с ним поговори! Про часы! Про миллионы!". Но я ни о чем этом не знала, я видела лавру, розы, сад и посреди всего этого интересного для разговора священника. И я даже думать не могла в тот день, когда сидела напротив него, что он станет главным подвижником и мученником Украины. 

Он сказал из клетки, что матери его нечего стыдиться, судят его за веру, а не за преступление, и сам он ни на кого не обижен, но передает следователей и прокурора в руки Божии. Это страшные слова из уст Павла. Ведь он сейчас не только священник, он - мученик. Он близко к Богу. Но ни следователи, ни прокурор, ни то, что сейчас играет роль президента Украины, этих слов пока не боятся потому, что не понимают их значения. А я бы поцеловала руку Павлу вчера

samedi 15 juillet 2023

Monde libre

 


Le briefing de Slobodan Despot, cette semaine, est particulièrement pénétrant. Il m'a appris la mort de Milan Kundera, un écrivain que j'estimais beaucoup et qui avait une densité des pays de l'est, sur le fond de la vanité intellectuelle française. Je me souviens d'une de ses réflexions, disant à peu près que notre vision des choses est obscurcie par l'habitude, mais que si nous pouvions voir le monde d'aujourd'hui tel qu'il était avant qu'on nous l'enlaidisse à ce point, nous pleurerions de désespoir. Il avait écrit aussi tout un développement sur le sourire dans la photographie. Il observait qu'il ne venait à personne, dans l'antiquité, ni par la suite, de représenter un personnage officiel en train de se fendre la gueule. César, Adrien, plus tard les différents rois d'Europe, sont on ne peut plus sérieux sur leurs portraits. Au début de la photographie, les gens posaient avec le même sérieux. Puis on a commencé à prendre des instantanés, où les gens souriaient, et à présent, tous les portraits officiels nous offrent un masque ricanant qui déforme les traits et dissimule la personnalité. Et en effet. Le portrait ancien représentait la personne, la concentrait tout entière dans l'oeuvre du sculpteur, du peintre ou du photographe, cela tenait encore du portrait du Fayoum, cela avait donné naissance à l'icône, ce n'était pas rien... Alors que la photo actuelle de gens connus est un argument publicitaire, et l'on voit les grands méchants loups exhiber, sous leurs brushings, des sourires à quarante-huit dents qui me paraissent plus menaçants que séduisants, et, en tous cas, tout à fait dépourvus de sincérité. Le sourire est un instant, si on le fige, il devient souvent étrange, il est fait pour passer, comme un rayon de soleil, j'ai des photos souriantes de mon père mais je préfère celles où il est grave, où ses traits sont au repos.

Slobodan enchaîne sur une réflexion d'Alexandre Douguine à propos de la France, qui aurait "déjà connu son apocalypse". Cela me paraît aussi extrêmement pénétrant, et dans le fond, pourquoi l'Apocalypse ne se ferait-elle pas, à la surface de la terre, de façon progressive? Quand j'ai vu "Nécron", selon le surnom donné par Slobodan à cette créature des ténèbres, et qui lui va si bien, j'ai vraiment su qu'il nous apportait la mort, je n'ai pas compris comment il avait pu avoir assez de votes pour arriver au pouvoir, même en tenant compte de la fraude très possible. Et quand Notre-Dame a brûlé, il m'est apparu clairement que c'était la fin. Jusqu'à Nécron, c'était la dégénerescence bourgeoise et la destruction sournoise, après son élection, c'est la course à l'abîme de la Damnation de Faust.

https://www.youtube.com/live/bY_MVvsKUFc?feature=share

Je suis la proie d'un grand surmenage, tout le monde veut me voir ou me faire participer à des manifestations, et je me sens vidée. Hier, j'avais une rencontre prévue de longue date avec des pèlerins venus d'une paroisse de Moscou, où les offices sont célébrés en russe et non en slavon d'église. On m'a demandé mon avis à ce sujet. J'ai répondu que j'avais assisté pendant plusieurs années à des offices en français, quand j'étais à Solan, et comme c'était fait avec beaucoup de rigueur, cela ne me dérangeait pas du tout, et même, j'appréciais de tout comprendre, car si je me retrouvais dans les prières habituelles, les longues lectures bibliques des offices de fête ou du grand Carême me passaient loin au dessus du bonnet, et que je préférais parfois lire tout cela en français chez moi. Mais que je craignais les réformes, souvent la porte ouverte à n'importe quoi, comme ce fut le cas en France avec l'abolition du latin. En réalité, je ne vois pas où est le problème, dans la mesure où les offices en russe sont autorisés par le patriarche, comme du reste les offices des vieux-croyants, dont on a levé l'anathème, et qui pour une partie d'entre eux, ont rejoint le patriarcat.

Ces gens étaient tous extrêmement gentils, cultivés, ils m'ont posé des questions intelligentes et difficiles. Tout cela a duré trois heures, et j'ai aussi un peu chanté. J'ai vendu des livres. J'étais crevée.

D'après mon éditeur, tout le stock de livres qu'il avait est parti, le mien arrive à sa fin, ce n'est pas encore le best-seller, mais ça s'écoule, je vends toujours plus qu'en France!

Ensuite, à peine rentrée, j'ai eu la visite de deux amies, Iana et Olga, toutes deux veuves de fraîche date, les malheureuses. Iana nous a raconté que des amis dissidents, partis aux USA dans les années 90, revenaient à présent à Moscou, à cause de l'atmosphère irrespirable, le covid, le wokisme, la théorie du genre, la russophobie. C'est un choc pour elles deux de constater que la tendance s'est complètement inversée, et que le monde libre, pour l'instant, c'est ici. Cependant, la jeunesse libérale fout le camp. Mais, dit Iana, ils ont la cervelle lavée, ne croient plus en rien, n'ont plus de patrie, ni de considération pour leurs aînés qu'ils prennent pour des imbéciles, avec des idéaux dépassés, incapables de gagner de l'argent, des loosers. Iana me semblait elle-même plutôt libérale, cela lui a visiblement passé, bien que beaucoup de choses la choquent ou l'inquiètent, mais c'est compréhensible, moi aussi. Sans doute existe-t-il un tel public, eh bien qu'ils s'en aillent. Les jeunes gens que j'ai vus l'autre jour ne s'en vont pas, eux, et ne méprisent ni leurs aînés ni leur pays, ni leur tradition, ni leur culture, ni leur foi.

Elles m'ont fait part de leur grande déception, car l'Europe les fascinait, elles gardent un souvenir ému de leurs voyages, le naufrage culturel et spirituel actuel les laisse sans voix. Mais elles sont obligées d'admettre ce qu'elles constatent.

L'opinion pittoresque d'un soldat russe sur cette question: https://vk.com/video317834478_456239246