Vendredi soir, la soeur de mon électricien, Olga, qui chante dans un choeur d'église, m'a conviée à venir la rejoindre le lendemain pour commémorer le fou en Christ local, le bienheureux Michenka, là où elle chante et où il est enterré, à l'église de la Trinité, village de Troïtskaïa Sloboda, à la sortie de Pereslavl.
Je ne sais pas comment était le village avant, c'est-à-dire il y a encore dix ans, mais il n'en reste absolument rien. tout a été détruit et remplacé par une accumulation anarchique de maisons affreuses, dont le pompon est remporté par un énorme truc avec des colonnes et un fronton grec, bordé d'une palissade métallique branlante. C'est effrayant de voir avec quelle irrémédiable rapidité le pays est saccagé par ses propres habitants.
L'église est en voie de restauration, l'iconostase me rappelait des images pieuses de communion solennelle, avec quelque chose de tendre, d'enfantin, bien que les icônes soient traditionnelles. Cela tenait plutôt à l'ambiance, légère, nacrée, dorée...
Je suis tombée sur Katia et Nadia, venues aussi fêter le fou en Christ. Il y avait notre évêque qui, me voyant, s'est exclamé avec son air naïf et malicieux: "Oh? quelle bonne surprise!" Puis, au moment de distribuer sa bénédiction à tout le monde: "Est-ce vous qui avez amené vos amies, ou le contraire? Ou bien le hasard?
- Nous nous sommes retrouvées par hasard, moi, c'est la choriste Olga qui m'a fait venir!"
Nous sommes tous allés en procession sur la tombe du bienheureux Michenka, puis j'ai présenté Katia à Olga, qui voudrait chanter du folklore, et la femme du prêtre voulait nous réquisitionner. Elle fait des séances de chant liturgique, et ne serait pas contre y inclure des vers spirituels populaires. Elle voulait absolument me faire revenir le soir même, mais je n'en ai pas eu le courage, car ensuite, j'ai fait des tas de choses ave Nadia et Katia, je n'en pouvais plus. Nous avons rencontré aussi un monsieur qui est un passionné de folklore local. Katia voudrait réunir tout le monde et voir ce que nous pourrions faire, et dans quels locaux, pour que le folklore soit pratiqué en commun par tous ceux qui l'aiment, le folklore, pas d'affreux succédanés kitsch.
Après échanges de coordonnés, nous sommes allées toutes les trois au café Montpensier, qui fait des menus carémiques, d'ailleurs délicieux. Rita y est toujours fêtée par le personnel, elle a droit à son assiette de poulet! Puis nous sommes allées à la galerie qui dépend de la cathédrale, et où je voudrais exposer, mais il faut attendre un an pour avoir la salle. Et ensuite, au centre que vient d'ouvrir l'association d'entrepreneneurs, artisans, fermiers "les Gens Heureux", dans Pereslavl.
Il y avait fromage, miel, friandises et denrées diverses. Nous avons parlé au Suisse cosaque et vieux-croyant Benjamin, qui est apiculteur, de nos projets.
A l'étage, il y a de l'artisanat, enfin plutôt des travaux de dames, ce qu'on appelle artisanat et qui n'en est pas, en Russie comme en France. On organise là des stages d'initiation à la poterie ou autres occupations manuelles, Katia y songe pour des stages de folklore ou des rencontres. J'ai acheté un linge brodé ancien très beau à une bonne femme bonimenteuse qui en faisait des tonnes, et nous expliquait comment soutirer de l'argent à l'évêque et au clergé local pour nos projets, je dois dire que j'ai beaucoup apprécié ces conseils éhontés.
C'est malheureux, mais quand je passe plusieurs heures avec des gens, que je fais plusieurs démarches, je n'ai plus le courage de rien. Et puis j'ai envie d'écrire, en ce moment. Le roman suivant commence à me prendre la tête.
Parfois, je me demande si ça vaut le coup d'écrire quand nous allons peut-être vers l'apocalypse, mais j'écris comme les oies migrent...
L'apocalypse peut-être pas, mais la mort de la France et de l'Europe, à moins d'un miracle, certainement, car tout est fait pour, et c'est de cela que parle mon roman. J'ai lu aujourd'hui le commentaire d'une dame qui économise 500 euros par mois sur le peu qu'elle a pour vivre afin de pouvoir émigrer à temps avec son petit chat. Je vais recevoir un monsieur qui se cherche une maison. Les Grecs sont assaillis par des milliers de types jeunes, agressifs, sur lesquels nous sommes invités à nous attendrir, que nous devrions tous héberger, à qui nous devrions aussi, pour nous conduire gentiment et ne pas nous faire traiter de fascistes, laisser les clés de nos maisons et la vertu de nos filles, puis boucler nos valises et partir ou mourir, et justement, pour dégager les vieux, il y a le coronavirus qui se pointe. Et il y en a qui s'attendrissent. Qui se fichent des petites dames pauvres économisant sur leurs maigres ressources pour se sauver avec leur petit chat, et tout autant des Grecs ruinés, submergés par ces hordes après avoir été occuppés et opprimés quatre cents ans par les ottomans. Non, ces bien pensants sont sensibles uniquement au malheur exotique.
Je ne sais pas comment était le village avant, c'est-à-dire il y a encore dix ans, mais il n'en reste absolument rien. tout a été détruit et remplacé par une accumulation anarchique de maisons affreuses, dont le pompon est remporté par un énorme truc avec des colonnes et un fronton grec, bordé d'une palissade métallique branlante. C'est effrayant de voir avec quelle irrémédiable rapidité le pays est saccagé par ses propres habitants.
L'église est en voie de restauration, l'iconostase me rappelait des images pieuses de communion solennelle, avec quelque chose de tendre, d'enfantin, bien que les icônes soient traditionnelles. Cela tenait plutôt à l'ambiance, légère, nacrée, dorée...
Je suis tombée sur Katia et Nadia, venues aussi fêter le fou en Christ. Il y avait notre évêque qui, me voyant, s'est exclamé avec son air naïf et malicieux: "Oh? quelle bonne surprise!" Puis, au moment de distribuer sa bénédiction à tout le monde: "Est-ce vous qui avez amené vos amies, ou le contraire? Ou bien le hasard?
- Nous nous sommes retrouvées par hasard, moi, c'est la choriste Olga qui m'a fait venir!"
sur la tombe du bineheureux Michenka |
Après échanges de coordonnés, nous sommes allées toutes les trois au café Montpensier, qui fait des menus carémiques, d'ailleurs délicieux. Rita y est toujours fêtée par le personnel, elle a droit à son assiette de poulet! Puis nous sommes allées à la galerie qui dépend de la cathédrale, et où je voudrais exposer, mais il faut attendre un an pour avoir la salle. Et ensuite, au centre que vient d'ouvrir l'association d'entrepreneneurs, artisans, fermiers "les Gens Heureux", dans Pereslavl.
Il y avait fromage, miel, friandises et denrées diverses. Nous avons parlé au Suisse cosaque et vieux-croyant Benjamin, qui est apiculteur, de nos projets.
A l'étage, il y a de l'artisanat, enfin plutôt des travaux de dames, ce qu'on appelle artisanat et qui n'en est pas, en Russie comme en France. On organise là des stages d'initiation à la poterie ou autres occupations manuelles, Katia y songe pour des stages de folklore ou des rencontres. J'ai acheté un linge brodé ancien très beau à une bonne femme bonimenteuse qui en faisait des tonnes, et nous expliquait comment soutirer de l'argent à l'évêque et au clergé local pour nos projets, je dois dire que j'ai beaucoup apprécié ces conseils éhontés.
C'est malheureux, mais quand je passe plusieurs heures avec des gens, que je fais plusieurs démarches, je n'ai plus le courage de rien. Et puis j'ai envie d'écrire, en ce moment. Le roman suivant commence à me prendre la tête.
Parfois, je me demande si ça vaut le coup d'écrire quand nous allons peut-être vers l'apocalypse, mais j'écris comme les oies migrent...
L'apocalypse peut-être pas, mais la mort de la France et de l'Europe, à moins d'un miracle, certainement, car tout est fait pour, et c'est de cela que parle mon roman. J'ai lu aujourd'hui le commentaire d'une dame qui économise 500 euros par mois sur le peu qu'elle a pour vivre afin de pouvoir émigrer à temps avec son petit chat. Je vais recevoir un monsieur qui se cherche une maison. Les Grecs sont assaillis par des milliers de types jeunes, agressifs, sur lesquels nous sommes invités à nous attendrir, que nous devrions tous héberger, à qui nous devrions aussi, pour nous conduire gentiment et ne pas nous faire traiter de fascistes, laisser les clés de nos maisons et la vertu de nos filles, puis boucler nos valises et partir ou mourir, et justement, pour dégager les vieux, il y a le coronavirus qui se pointe. Et il y en a qui s'attendrissent. Qui se fichent des petites dames pauvres économisant sur leurs maigres ressources pour se sauver avec leur petit chat, et tout autant des Grecs ruinés, submergés par ces hordes après avoir été occuppés et opprimés quatre cents ans par les ottomans. Non, ces bien pensants sont sensibles uniquement au malheur exotique.
au café Montpensier |