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vendredi 17 mars 2023

Petite route du Seigneur

 
croquis sur la terrasse

Petit saut à Moscou, pour diverses raisons, et pour remonter le moral de mon amie Yana, dont le mari vient de mourir. Le même jour, je suis allée à l'office funèbre, puis rencontrer un monsieur français qui m'a bien aidée, je suis passée à la banque, je suis revenue pour le repas des funérailles et j'ai terminé la soirée chez Dany... J'étais crevée, et je suis revenue le lendemain sous la pluie battante, mais voilà que le soleil est de retour, sur la neige sale qui fond maintenant vraiment. 

Yana est une femme encore très jolie, très vulnérable; et j'avais grande compassion de la voir rester veuve. "J'ai eu tellement de mal à en trouver un comme lui, s'est-elle exclamée au repas en fondant en larmes, et voilà que je l'ai perdu!" Comme je la comprends, comme il doit être cruel de perdre un mari qu'on a eu tant de mal à rencontrer, et de nos jours, on a souvent beaucoup de mal, surtout quand on est une personne vulnérable au tempérament atristique. "Cela ne m'est jamais arrivé... ai-je confié plus tard au père Valentin.

- Oui, mais dans votre cas, je pense que l'environnement français contemporain n'a pas dû vous faciliter les choses..."

Je me souviens d'une amie ravissante, qui avait trouvé son mari très tard et me disait qu'elle avait l'impression d'être miraculée. Et elle ajoutait: "Il est pur..."

Génia, le défunt, était manifestement très aimé de tous ceux que le deuil avait rassemblés et dont je connaissais une partie. Comme souvent avec les Russes, j'avais l'impression que nous fondions tous littéralement dans l'amour réciproque, comme du beurre au bain-marie. J'avais hésité à prendre ma vielle, mais la première fois que j'avais vu Génia, je lui avais chanté un vers spirituel, 'la petite route du Seigneur", et il avait versé une larme. J'ai donc pensé qu'il fallait le chanter à ses funérailles.

Dès que Yana a vu l'instrument, elle m'est tombée dans les bras: "Oh, vous allez chanter? Je n'osais pas vous le demander, et vous y avez pensé!"

J'ai pris soin de préciser que Génia, parce qu'il était bon et que nous allions tous prier pour lui, ne passerait pas à côté de la petite route, ni du paradis et de son arbre merveilleux...



La petite route du Seigneur, enregistrement de 2011

Avec ma tante Mano, qui est restée toute sa vie auprès du même homme, en vertu de la grande qualité morale de l'un et l'autre membres de son couple, nous avons évoqué un fiancé que ma mère avait eu avant mon père, et que Mano trouvait adorable. A 16 ans, maman avait eu la maturité de lui dire: "Jacques, si vous ne pouvez m'imposer à vos parents, je ne vois pas comment nous pourrions passer notre vie ensemble". Mais le pauvre garçon, qui avait alors épousé l'élue de sa famille, laquelle n'avait pu elle-même épouser celui de son coeur, n'avait jamais oublié maman et toujours parlé d'elle. 

De nos jours, il n'y a souvent ni exigence ni respect, et les gens se marient par peur de la solitude, lassitude, ou parce qu'ils ne peuvent trouver le courage de rompre une liaison de hasard, mais il y avait alors ces pressions sociales et familiales qui pouvaient briser la vie de jeunes gens sérieux, désireux de mener une vraie vie de couple, et n'imaginant même pas qu'il pouvait en être autrement.



J'ai pas mal discuté de la situation générale, avec le père Valentin, entre deux portes, et il m'a rapporté une citation du saint patriarche Philarète de Moscou qui disait à peu près: "Il faut aimer ses ennemis, abhorrer ceux de l'Eglise, et combattre ceux de la Patrie". 

J'ai regardé une émission avec un politologue orthodoxe russe, Mikheïev. Il parlait de la confiscation de la laure de Kiev par Zizilenski et le gros mitré placé à la tête de la filiale de Constantinople. Les gens se rassemblent en foule pour essayer de sauver les lieux de cette profanation évidente, que va-t-il leur arriver? Le ministre de la culture parle des nombreux saints couchés dans les Grottes depuis des siècles comme de "pièces de musée", ce qui est tout dire. Mikheïev dit très justement que le gouvernement ukrainien est en tous points semblable au gouvernement bolchevique, applique les mêmes méthodes, pour les mêmes raisons, que cela soit ou non mâtiné de néonazisme, de néopaganisme, de libéralisme ou tout ce qu'on veut: le fond de l'affaire, c'est la destruction du christianisme, c'est la haine du Christ, et aussi de la population slave indigène, qu'elle soit ou non consciente de la manipulation. 


 

J'avais bloqué sur FB deux orthodoxes qui me piaillaient aux chausses le jour où l'une d'elles m'avait déclaré que si l'Eglise était persécutée en Ukraine, c'est qu'elle était "l'émanation du KGB", ce qui prouve bien qu'elle n'avait rien suivi mais reprenait avec enthousiasme les calomnies médiatiques débitées depuis des années, au mépris de toutes les avanies subies par de dignes hiérarques et de fervents croyants. Car en Ukraine, l'émanation du KGB, c'était le "patriarche" autoproclamé Philarète, et c'est pourquoi on avait, contre toute attente, choisi Alexis II pour succéder à Pimène à la chaire patriarcale de Moscou, dont il était pourtant le locus tenens. Il y a longtemps, de surcroît, que le SBU ukrainien est beaucoup plus proche du KGB originel que le FSB russe actuel. D'où l'échec de Philarète, au moment de la Perestroïka: le KGB de l'époque l'avait avisé qu'il ne se mêlait plus des affaires de l'Eglise.

 Une artiste peintre russe libérale publie une photo d'un paysage du Donbass ravagé par les combats et se demande comment la Russie pourra jamais se laver de cela, qui retombera sur ses enfants, ceci, cela et le reste. Elle ne se pose pas une minute la question de savoir d'où tout cela provient, la Russie est coupable de tout, par définition; elle est la seule à bombarder, et tout ce qui pourrait contredire cette vision unilatérale est de la propagande de Poutine. Les huit ans d'atrocités au Donbass, cela n'intéresse pas ce genre de personnes. Pas plus aujourd'hui qu'alors. Le fils du père Parfionov, qui fait à Vladimir de si beaux pastels, a été tué à la guerre. Beaucoup d'amis de mon électricien sont morts également. Comme d'habitude, tandis que des dindes et des dindons comme cette artiste peintre ou ces orthodoxes, marchent dans les plus sombres combines, les meilleurs sont tués en priorité. Et cela, d'ailleurs, des deux côtés.


La jeune femme enceinte, soi-disant rescapée d'une maternité bombardée par les Russes, dont les médias français avaient fait leurs choux gras, est à présent à Moscou, et figure sur la liste "Mirotvorets" des ennemis de l'Ukraine à abattre, pour avoir tenté de rétablir la vérité sur cette affaire. On a publié un article et une traduction à ce sujet sur VK:  https://www.kp.ru/daily/27475/4730640/

    « J'ai survécu et j'ai dit la vérité. Maintenant pour l'Ukraine, je suis un ennemi » :  le sort de la « Madonne de Marioupol 


Nous avons rencontrés la "Madonne de Marioupol" Marianna Vyshemirskaya. Nous l'avons trouvée à ... Moscou.

Il y a exactement un an, le 9 mars 2022, la photo déchirante d'une fille enceinte de Marioupol s'est répandue dans le monde entier. Elle se tenait avec une éclaboussure de sang sur le visage dans le contexte d'un immeuble aux fenêtres brisées. "Les Russes ont bombardé la maternité !" cria l'Occident. "Nous avons besoin de plus de sanctions !" - a exigé le vice-président américain Kamala Harris.

Sanctions, bien sûr, ajoutées.

Qu'est-ce qui ne va pas avec cette fille maintenant ? Où est-elle?

Cette photo a fait le tour du monde il y a un an avec une fausse légende. La fille dessus est Marianna Vyshemirskaya. Elle a raconté ce qui s'est réellement passé

"Il n'y a pas eu de raid aérien"

Marianne a 30 ans. En fait, elle est née à Donetsk, mais lorsqu'elle s'est mariée, elle a déménagé à Marioupol, deux ans avant le début de l'opération spéciale, alors que la ville était encore sous le contrôle de l'Ukraine. Marianna a gardé son blog, purement féminin - sur les cosmétiques, les nouveautés en matière de produits de beauté. Elle comptait plus de 30 000 abonnés selon les statistiques. Mais tout cela ne peut être comparé à la renommée mondiale qui lui est tombée à la veille de la naissance de son enfant.

- Lorsque ma photo est parue dans les journaux, j'étais totalement sans moyen de communication. Et j'ai tout découvert quand je suis rentré chez moi, à Donetsk. Je suis allé en ligne et - il s'avère que je suis victime d'un raid aérien russe. Bien qu'il n'y ait pas eu de raid aérien! De cette "gloire", je n'ai retiré qu'un seul moment positif - ma famille a découvert que j'étais en vie.

Soit dit en passant, l'Occident et l'Ukraine ont alors utilisé la photo de Marianna dans son intégralité - sur les couvertures de tous les médias. Mais après que la jeune fille ait raconté comment tout s'était réellement passé à l'époque à Marioupol, l'Ukraine l'a immédiatement ajoutée à sa célèbre base «Peacemaker» - où des listes d '«ennemis de la nation» sont affichées. Et l'Occident nulle part, même en petits caractères, n'a réfuté les couvertures de magazines avec Marianna. Il faisait comme si elle n'existait plus.

Et la voici, juste devant moi.

- Dis-moi, comment t'es-tu retrouvée sur ces clichés ?

- J'étais à l'hôpital numéro 3. Je voulais me rendre à la maternité n ° 1, qui était la principale à Marioupol. Mais le régiment Azov (une organisation terroriste interdite en Russie. - NDLR) a senti qu'il n'en avait plus besoin et a chassé tout le monde de là.

Dans la maternité où j'ai atterri, il y avait aussi des FAU. Pas directement avec les femmes en travail, mais dans le bloc suivant. Ils sont venus nous prendre de la nourriture et ont dit qu'eux-mêmes n'avaient pas de provisions. Quand je parle de cela, en Ukraine, ils écrivent que je suis un traître et que je les diffame. Mais je vous dis comment c'était. Ils se sont discrédités en occupant un bâtiment sur le territoire de l'hôpital, violant la Convention de Genève sur la protection de la population pendant les hostilités. Plus tard, j'étais dans le bâtiment où se trouvaient les Forces armées ukrainiennes. Leurs fenêtres étaient remplies de sacs de sable. Et dans nos chambres - verre ordinaire. Je veux dire, ils se cachaient juste derrière nous.

- Que s'est-il passé dans votre hôpital ?

- Le matin du 9 mars, tout était calme. Puis des explosions ont commencé à se faire entendre. Il n'y a pas eu "d'arrivée" dans notre maternité. Mais à un moment donné, les fenêtres ont été soufflées par l'onde de choc. Le verre a failli toucher mon lit. J'ai réussi à me couvrir d'une couverture. La panique s'ensuivit, bousculade. Tout le monde a couru. Ils m'ont poussée, je suis tombée sur les fenêtres, je me suis coupé le ventre et la tête... J'ai été l'une des derniers à partir, car j'attendais le moment de retourner dans la salle pour un sac avec des affaires. Je ne pouvais pas l'abandonner, il y avait tout pour l'enfant. Et il était impossible d'acheter quoi que ce soit autour.

Avez-vous vu que vous étiez photographiée ?

- Je n'ai pas remarqué tout de suite. Ce photographe était sans gilet "Presse". Tout en noir. Puis j'ai remarqué qu'il avait un appareil photo. Je lui ai demandé de ne pas me photographier. Il a dit : "Pas de problème." Mais, comme il s'est avéré, il n'a pas arrêté de me photographier.

"LES MILITAIRES RUSSES VIENNENT NOUS APPORTER DE LA NOURRITURE ET DE L'EAU"

Où avez-vous été évacué ?

- À l'hôpital de la ville. Le même jour, j'ai accouché. Mon petit et moi avons passé encore 2 semaines là-bas. Personne n'était autorisé à sortir, c'était dangereux dehors. Il n'y avait ni lumière ni chaleur. J'emmaillotais mon enfant sous les couvertures, le réchauffant de mon souffle. Il n'y avait pas d'eau, ils buvaient de la "technique", de la nourriture aussi. Il y avait des jours où nous n'arrivions à manger qu'un quart de tasse de soupe... Quand les Forces armées ukrainiennes sont parties, les militaires russes sont arrivés, ils nous ont immédiatement apporté leurs rations sèches et de l'eau. Et de l'eau bouillante en bouteille pour se réchauffer. Et puis j'ai pu partir pour Donetsk.

- Et avant cela, il y avait une possibilité de sortir de Marioupol? Lorsque la ville était sous les Forces armées ukrainiennes, on parlait de « couloirs humanitaires ».

- Oui, il n'y avait pas de couloirs ! L'armée ukrainienne n'a laissé personne sortir de la ville ! Certains, je ne sais comment, se sont infiltrés à travers eux. Peut-être pour de l'argent.

Quand je suis revenue à Donetsk, j'ai eu l'occasion d'aller en Turquie, où étaient mon mari (déjà ex), des parents. Et en Europe... J'y serais acceptée et retenu, si seulement je disais ce qu'ils veulent. Mais je n'avais pas un tel désir. Je voulais rentrer chez moi.

"COMMENT POUVEZ-VOUS DÉPLOYER DES TROUPES À PROXIMITÉ DES FEMMES ENCEINTES ?"

- Avez-vous commencé à parler de ce qui s'est réellement passé uniquement lorsque vous étiez à Donetsk?

- Non, pas tout de suite. De retour à Marioupol, à l'hôpital après l'accouchement, alors que la ville était encore sous les Forces armées ukrainiennes, des journalistes de l'American Associated Press sont venus me voir, je leur ai tout dit, comme vous maintenant. Mais ils n'ont laissé que ce dont ils avaient besoin. Et déjà à Donetsk, quand j'ai transmis toute la vérité, des messages d'Ukraine me sont parvenus - que je suis maintenant une ennemie pour eux.

Ont-ils écrit exactement comme ça ?

- Le plus offensant c'est qu'ils ont écrit des choses désagréables sur mon enfant. Ils voulaient ma mort et la sienne. Je ne comprends pas comment est-ce possible ? Et écrit notamment aux jeunes mamans. Mon âme s'est retournée. Je n'ai menti à personne. Mais j'ai pardonné à tout le monde, je n'ai aucune colère contre eux. Mais j'ai de grandes questions pour le commandement ukrainien - comment pouvez-vous donner des ordres de prendre position dans des bâtiments résidentiels, des hôpitaux ? Oui, même à côté de femmes enceintes ?

EN ATTENTE DU PROCES AVEC KHODORKOVSKY

- En conséquence, vous vivez maintenant à Moscou ?

- Je suis venu à l'invitation du Fonds national Rodina à un événement pour les enfants du Donbass. Et déjà à Moscou, on m'a proposé de devenir le visage de ce fonds. J'ai déjà fait de l'humanitaire, j'aime ça. Nous avons déjà voyagé en RPD, RPL, apporté de l'aide.

- Avez-vous amené votre fille avec vous ?

- Non, elle est à Donetsk, car elle ne va pas encore à la crèche. Et je ne gagne pas encore assez pour embaucher une nounou.

- Déjà installée à Moscou ?

- Oui, j'en ai l'habitude. Beaucoup de choses à faire et de rencontres. Et maintenant, les procès sont sur le point de commencer.

- Qui ?

- Avec Khodorkovski. Il a posté ma photo sur ses réseaux sociaux, et en dessous - une comparaison de Marioupol et de Leningrad assiégée. Il m'a simplement utilisée à ses propres fins, pour sa propagande. Je lui ai demandé de retirer la photo, mais il ne l'a pas fait.

Voulez-vous de l'argent de sa part ?

- Je veux juste qu'il supprime ma photo.

- Et avez-vous essayé de contacter les médias occidentaux qui vous ont imprimé sur les couvertures ?

- Différents journalistes sont venus me voir, à l'exception des Ukrainiens. J'ai donc accordé une interview au journaliste italien Giorgio Bianco. Certes, il n'est jamais sorti dans les médias, il l'a publié sur sa chaîne YouTube, mais même cela a été immédiatement bloqué. De l'armée de l'air britannique, Marianne Spring a fait beaucoup de matériel avec moi, bien qu'avec ses remarques, mais quand même ... Et le reste des médias occidentaux, avec qui j'ai parlé, ont fini par ne pas publier d'interview avec moi. Pourquoi auraient-ils besoin d'une vérité inconfortable ?                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                         

samedi 11 mars 2023

Adieu l'hiver, merci le carême

 


Si j'en crois la météo, c'est notre dernier jour d'hiver, qui s'en va en beauté. Il a fait moins quinze cette nuit, au matin, j'ai trouvé les vitres de la véranda brodées de givre, et au delà, au dessus des isbas, un ciel rose où flottait une demie lune blanche. Demain, il fera déjà plus cinq, et on annonce de la pluie pour la semaine prochaine! Mais aujourd'hui, après le soleil matinal, tourbillonnent de gros flocons immaculés; et je suis des yeux leurs volutes obsédantes, ultime féérie avant la boue puis la verdure renaissante.

J'ai ramassé le sommet de mon saule rongé par les deux affreux, Nounours et Alba, enfin je les soupçonne fortement. Mon idée est de faire prendre racine à ce débris pour le planter. J'essaie de me consoler en me disant que le saule pleureur nain avait aussi souffert, il n'en restait qu'un petit bout, mais il a repris et poussé d'un mètre cinquante l'été dernier.

Une artiste-peintre locale m'a demandé de venir rencontrer, dans son atelier, un Français qui est parti il y a un an, juste avant l'intervention, avec sa femme russe. Ils vivent maintenant dans un village près de Nijni-Novgorod. Ce Français est devenu orthodoxe déjà en France, mais il ne supportait plus la propagande ni le climat délètere et hostile, y compris dans sa paroisse. Cependant, il avait envie de voir des compatriotes: là où il est, il n'y en a pas des masses. C'est pourquoi l'artiste a fait appel à moi. Et elle l'a emmené aussi au café la Forêt, pour rencontrer Gilles, le lendemain. Je n'y suis pas allée, parce que j'ai besoin de m'isoler, de me recentrer, de me recueillir, de faire mon carême, principalement en m'évitant les mondanités, et en me livrant à la contemplation et à la création.  

Cette artiste, dont la spécialité est de peindre des chats dans un style illustratif, veut lancer à Pereslavl un carnaval des chats annuel. Chacun doit avoir un masque de chat et un costume, mais un beau costume, éventuellement historique, pour associer l'événement à Pereslavl, et pour en faire quelque chose d'esthétique. Moi, je veux bien, mais deux choses me dérangent: d'abord, cela prend du temps, de faire un costume, un masque, et ensuite, tout cela est censé prendre place rituellement le premier dimanche de mars, cela arrivera au moment de la maslennitsa, avant ou juste après, quant le carême débute dans la concentration extrême... "Oui, m'objecte-t-elle, mais pour la mairie, c'est une période creuse touristique, et cela ferait venir un peu de monde dans les hôtels. Et puis tout le monde n'est pas croyant ni pratiquant...

- En effet, mais moi, si..."

Je fais le carême sans fanatisme, mais j'ai besoin de le faire, et d'autant plus dans un contexte où on m'invite sans arrêt. J'ai besoin de ce recul, de cette orientation vers l'éternel. J'étais paniquée à l'approche de cette période, et je me rends compte à quel point j'en avais finalement besoin, à quel point elle m'est bénéfique. Et d'autre part, le carême est suivi, à Pereslavl, le café français s'en rend compte. Pas sûr que le carnaval des chats tomberait très bien...





On est forcé de constater que dans tous les pays, les démons ont leurs élevages d'imbéciles malléables, prêts à se jeter dans la rue au signal pour détruire leur propre pays avec enthousiasme. C'est ce qui est arrivé à l'Ukraine, c'est en train d'arriver à la Géorgie, j'ai prié saint Gabriel, qui lui-même priait pour la Russie, de tempérer le processus, évidemment manipulé. On voit tous les fuyards russes passer la fontière en sens inverse, quel cirque... 

Parallèlement, dans les pays de l'est qui se retrouvent au mains de l'OTAN et de son UE féale on manifeste souvent pour ne pas se laisser entraîner à la boucherie où on tient tellement à les jeter, par gouvernement compradore interposé. 

A propos de la manipulation ukrainienne, que je voyais à l'oeuvre depuis la première révolution orange, en 2004, voici un document à l'usage de ceux qui, à l'instar du métropolite de Daru, se font tourner la tête par les agents ukrainiens qui noyautent les paroisses françaises:

https://vk.com/wall678646659_12753

Cela, je l'ai vu passer dès 2014, quand personne ne voulait en entendre parler, nulle part, surtout pas dans ces mêmes paroisses françaises. C'est ce genre de choses qui m'a vaccinée contre la presse "démocratique" à géométrie variable. C'est plus convaincant que les fake news que me postaient des orthodoxes pour me désabuser! Un jour pas mal de gens auront honte d'avoir cru d'emblée la propagande antirusse, et cautionné tout cela. La question est pourquoi? Parce que bien que le communisme soit une idéologie occidentale, inculquée au moyen d'une rééducation féroce par des gens qui, en majorité, méprisaient les Russes et les détestaient, il reste un moyen de stigmatiser ceux-ci et de leur mettre sur le dos tout ce qui ne va pas sur la planète et, en fin de compte, malgré leurs protestations d'amour pour la "vraie Russie" qui n'est pas celle d'aujourd'hui, ceux qui boivent les calomnies avec avidité font la preuve que le communisme n'est pour rien dans leur russophobie, il n'en est que le prétexte, et on la trouve chez des slavistes distingués aussi bien que chez des descendants d'émigrés. On la trouvait déjà chez les occidentalistes russes du temps de Dostoievsky...

 Si avoir adhéré à une dictature idéologique de gré ou de force devait stigmatiser les peuples pour l'éternité, alors il faudrait traiter la France de la même manière, avec son absurde révolution maçonnique et sa dékoulakisation vendéenne féroce, ou même surtout l'Angleterre, ce cancer de l'Europe, avec sa tumeur maligne américaine. Et puis enfin, toutes ces ex républiques sur lesquelles l'Amérique, et tout ce que ce terme recouvre, s'est jetée comme la vérole sur le pauvre monde, ont largement participé à l'Union soviétique et à tout ce qui s'y est passé, en bien ou en mal. Et n'ont aujourd'hui d'existence et de frontières que parce qu'elle les leur a données, sur des bases arbitraires, les privilégiant systématiquement par rapport à la Russie. En ce qui concerne la Géorgie, elle a fait cadeau à la Russie de Staline, et ni l'Ossétie ni l'Abkhazie, d'après l'ouvrage historique d'un Ossète que j'ai traduit autrefois, ne se considèrent comme parties intégrantes de son territoire. 

Les plus lamentables des Géorgiens, avec l'aide de toujours les mêmes malfaiteurs, feront de leur pays un trou noir comparable à l'Ukraine. Il ne faut pas se donner si inconsidérément aux visages pâles à la langue fourchue, comme les Ukrainiens, pour quelques brioches distribuées par une mégère terrifiante, et des chimères européennes. 

Mais elles ont la vie dure, ces chimères, mon électricien, pourtant patriote, reste absolument persuadé qu'en Europe, coulent des ruisseaux de lait et de miel. Les gens n'aiment pas remettre leurs représentations en question. C'est pourtant ce que j'ai fait, car, bien que russophile depuis mon adolescence, je croyais cependant dur comme fer que l'Amérique nous "protégeait". Elle nous protégeait comme le racketteur ou le souteneur, d'un danger qui n'en était pas un, car je suis à présent convaincue que même Staline n'ambitionnait pas d'avaler toute l'Europe, avec qui il était plus profitable à l'URSS de commercer. Il s'est donné un glacis pour protéger son fief, et point à la ligne. Les diverses félonies et atrocités commises par l'OTAN m'ont assez vite ouvert les yeux. Dès les années 90.

Cependant, j'étais encore loin de pressentir le caractère absolument sinistre, fourbe et maléfique des gens à la manoeuvre. Je l'ai compris avec la Yougoslavie, puis le Donbass, puis le délire Covid...

Ce "gaz hilarant" est un bol d'air frais, offert par Slobodan Despot au milieu des miasmes : https://www.youtube.com/live/MxYNIYwH5jg?feature=share



jeudi 9 mars 2023

Mars radieux

 


Lorsque je travaillais à Moscou, je détestais le mois de mars, encore si hivernal, un printemps qui, en France, serait considéré comme un hiver rude, et cela au moment où on n'en peut plus du mauvais temps. Mais ici, c'est une autre affaire, j'observe qu'en fin de compte, ce premier mois du printemps est le plus beau de l'hiver. Tout scintille au premier soleil, il fait encore très froid la nuit, mais le jour, le fond de l'air est doux. Le ciel dégèle avant le lac, et de grandes et légères banquises de nuées dérivent au dessus de nous, des ombres courent, des rayons fusent, des giboulées s'abattent, pleines de lumière, au loin l'horizon s'assombrit, mais les flocons étincellent. Hier matin, tout était givré, un fantastique univers de dentelles, aujourd'hui, tout resplendit, et le vent souffle, il est tombé beaucoup de neige, brillante, légère, immaculée. D'ici quinze jours, peut-être même avant, tout cela va commencer à fondre, et j'en profite comme je profite des derniers feux et des dernières tiédeurs de l'automne, de cette féérie somptueuse que l'hiver nous offre avant de partir. Son départ sera brutal, comme cette étrange bascule polaire des jours qui commence à s'accentuer vertigineusement, c'est comme un oeil qui s'ouvre, de plus en plus grand, et la clarté s'y déverse.

C'est le moment de dessiner, car les mois précédents, il faisait trop froid pour cela. Et je sens que d'ici quelques jours, ce sera fini, la neige se changera en boue, il faudra attendre le moment ou l'herbe ressurgira, avec les crocus et les jonquilles.  

J'ai vu avec consternation que mon petit saule crevette, qui avait fait une si belle poussée, a été cassé en deux, et je soupçonne Nounours ou Alba d'avoir commis ce méfait. Je l'avais planté il y a deux ans et il m'aurait déjà, cette année, partiellement caché la terrasse de mon voisin et ses occupants sous l'oeil desquels se trouve tout mon jardin. J'en aurais pleuré. Les saules poussent ici à une vitesse supersonique, mais quand même, je lui avais donné une jolie forme, une longue tige coiffée d'une couronne, et il me faudra encore patienter deux ans pour faire écran aux observateurs de ma vie et ne plus avoir l'impression d'être une ourse dans sa fosse au zoo, attendant qu'on lui jette des poissons...  Et puis surtout, je tremble à l'idée de déprédations ultérieures, je n'ai plus l'âge d'attendre dix ans pour avoir des arbres qui ressemblent à quelque chose. Rosie aussi se précipitait sur tout ce qui poussait pour l'arracher ou le ronger.

Un jeune Français m'a appelée hier, il était rentré en France, et on l'a arrêté, parce que sur les réseaux sociaux, il avait commenté l'épisode de la jeune Cassandre et sa pancarte "Qui?", au moment du Covid, en fournissant des graphiques parlants et gênants. Bien qu'au regard de la loi, il n'y ait pas vraiment moyen de l'inculper, la juge, pour lui pourrir la vie, parce que, comme il est souvent allé en Russie, il lui avait caché son passeport,  et pour l'empêcher d'y retourner, l'assigne à résidence depuis des mois, sans procès, et pour une durée illimitée, le soumettant à son arbitraire. Du jour au lendemain, une vie peut être suspendue aux décisions d'un petit fonctionnaire haineux. C'est un beau garçon, catholique tradi, gilet jaune. Une cible...






lundi 6 mars 2023

le saint Archipel

 


le saint Archipel, bande annonce

Il y a quelques temps, j'ai vu la déclaration d'un cinéaste, Sergueï Debijev, auteur d'un documentaire sur les îles Solovki, "le saint Archipel". J'y suis particulièrement sensible, car mon pèlerinage d'il y a déjà presque cinq ans m'avait profondément impressionnée, et ce qu'il en dit correspond à ce que j'avais ressenti. De plus, ses considérations sur les conséquences en Russie des événements actuels et la possible évolution de la société me semble répondre aux espoirs de pas mal de gens autour de moi. J'ai donc transcris tout cela, heureusement pour moi, il parle de façon très claire.  



Transcription

Vous savez, comme dans le mécanisme des montres chères, il y a des pierres précieuses sur lesquelles s’appuient les axes de tous les engrenages qui tournent autour d’eux, il y a dans l’état, et dans le monde peut-on même dire, des centres spirituels sur lesquels tourne toute cette époque. Et ce ne sont pas des centres commerciaux, ce sont ces puissantes enclaves, ces lieux imprégnés de prière, ou ces récéptacles énergétiques où se fait l’histoire, où se fait la prière pour nous tous, où les hésychastes débouchent sur un sens profond, où se déroule vingt quatre heures sur vingt quatre une prière incessante. Par ailleurs, les gens peuvent ne pas le ressentir. Beaucoup peuvent même ne pas le savoir. Et en ce sens, les Solovki m’apparaissent comme comme le lieu le plus sévère et le plus intéressant de ce travail spirituel parce qu’aux Solovki, au monastère, la composante touristique est complètement absente, il n’y a pas de ces rangées interminables de boutiques de souvenirs et de petits cafés ou autres que beaucoup de monastères, par ailleurs, utilisent. C’est la sévérité nordique du monastère qui dit tout. Quand on regarde ces murs faits de blocs énormes, on ne comprend même pas comment cela a pu être fait de main d’homme, quelles astuces d’ingénieurs ont pu être employées. Sans la providence divine, on ne comprend simplement pas comment c’est possible. L’été qui dure au mieux un mois, la nature rude, la froide mer Blanche, c’est de là que vient le caractère de la communauté, cette sévérité, ces offices vingt quatre heure sur vingt-quatre, et on comprend combien ce centre spirituel est important, quelle puissante influence il exerce sur de nombreux processus sociaux.

 Il est clair qu’il y a beaucoup de centres de cette sorte, , on peut les citer, c’est bien sûr Jérusalem, l’Athos, et tous nos monastères innombrables et magnifiques. Mais nous avons décidé de commencer par les Solovki, car il y a là quelque chose qui sort de l’ordinaire, provenant de la manifestation extrême de cette sévérité et de cette force que l’on ressent là bas, car lorsqu’on se trouve aux Solovki, on est tout simplement dans l’éternité. On comprend qu’elle existe, cette éternité, et qu’on est dans une sorte de relation avec elle, et au bout de littéralement une semaine, on oublie l’existence du monde extérieur, on comprend que la présence de Dieu sur terre, ce n’est pas une figure de style, c’est une énergie absolument réelle qu’on cesse de percevoir comme une expression littéraire.

Vous savez, auparavant, à l’époque soviétique, venaient à Valaam des ferrys sur lesquels, pour tout dire, tout le mode buvait, se livrait à la débauche et faisait la fête. Ensuite, on courait sur l’île avec des chansons et des feux d’artifice et on repartait. Eh bien avec les Solovki,  ce n’est pas pareil, y venir avec de tels objectifs, ce n’est pas pensable et il faut dire qu’il convient même de faire attention, si on y vient pour faire la bringue, on ne sait pas du tout comment ça peut tourner. Et c’est cette incapacité des gens à comprendre que tout est sérieux, que tout est honnête, que ces temps que nous vivons sont très transparents, que tout peut y être discerné très nettement. Et si tu fais quelque chose de bien et de plus spirituel et sincère, tu recevras en réponse quelque chose d’équivalent. Mais si tu fais le malin, alors ce qu’on appelle le karma immédiat te revient dans la figure, pour s’exprimer en termes hindouistes.

C’est pourquoi débarquer aux Solovki juste comme ça n’est pas facile, d’abord parce que la route elle-même ne l’est pas, en hiver, n’y parvient qu’un petit avion de 12 places toujours complet, la période de la navigation est très courte, il y a très peu d’hôtels. Il y en a un très cher, de 8000 à 25 000 roubles la nuit, et il est toujours plein. Il y a des chambres chez l’habitant mais il faut aussi réserver six mois à l’avance, c’est pourquoi les Solovki sont un endroit où on peut pas aller comme ça à l’aventure. Il faut s’y préparer et comprendre pourquoi on y va. La visite des Solovki est une épreuve spirituelle sérieuse ; parce que si tu viens en train, par exemple, puis en bateau, tu ne sais pas comment sera la mer Blanche ce jour-là et si tu ne vas pas te retourner les tripes à bord. Et ce sera le cas, parce que le calme est rare, là bas. Ensuite il y a là bas les voyages à Anzor, une ile magnifique, très puissante et mystérieuse, vraiment très forte, avec son église du Golgotha, une ile surprenante et là, beaucoup de voyages s’accompagnent de pénibles épreuves pour l’organisme.

De sorte que voilà, mais je ne veux effrayer personne, bien sûr, il y a là bas des offices étonnants par leur profondeur, leur vérité, qui induisent un stade d’approfondissement, car les Solovki sont un endroit étonnemment imprégné de prière, et l’on y sent l’héritage de saint Germain et de saint Zossime.

Parler de ces puissants noeuds spirituels doit ouvrir les yeux des gens sur le fait que tout ne se passe pas seulement dans les villes, au gouvernement, dans les écoles et les cinémas, que la vie a de multiples facettes dans sa structure spirituelle, et comprendre que oui, nous nous heurtons sans arrêt au monde matériel, il nous influence et tout et tout, mais ce monde s’est peu à peu si complexifié, que la quantité d’informations qui tombe sur chacun de nous au même moment est impossible à assimiler, c’est là un processus délibéré pour plonger les gens dans la confusion. Ce n’est pas seulement que sont apparus de nouveaux vecteurs de toutes sortes d’informations. Il me semble que c’est un processus concret, délibéré de la part d’ennemis du genre humain, appelons les choses par leur nom, qui, dans un paroxysme infernal, essaient de défaire l’homme en lui enlevant des morceaux de son temps, de son âme, de son intellect, de son besoin d’utiliser des informations. Et il faut dire qu’ils y sont arrivés dans une bonne mesure, parce que depuis le moment où l’humanité est passée de l'orientation vers certaines maximes philosophiques, certains dogmes spirituels à cette utilisation incontrôlée de diverses sortes d'images et d'informations bruyantes, cela a beaucoup affaibli les gens.  Et maintenant la question qui se pose, c'est le travail sur le côté spirituel de l’homme, son coeur, son sentiment du Mystère, sur ces profondeurs cousues en l’homme par défaut, sur ces centres intérieurs spirituels qui sont endormis au moment présent.  Or c’est ce lien entre les centres de force extérieurs et des fils conducteurs intérieurs invisibles qu’il faut renouer, et le pèlerin qui va en pèlerinage ne donsidère pas tout cela comme un simple voyage touristique, mais il comprend qu’il part à la recherche d’une nouvelle expérience spirituelle, d’une révélation, d’un apaisement, que c’est important, que ce n’est pas une action superficielle pour cocher une case.

Je suis allé au mont Athos, ce sont des choses qui se trouvent en dehors de la zone du monde contemporain empoisonné par l’idée du progrès, voilà, d’après moi, le Progrès, c’est une idée absolument fausse, c’est l’emmêlement, le crochet auquel l’homme s’est pris en temps voulu et qui l’ont pratiquement détourné. Comme on a détourné, par exemple, notre pays l’Empire russe, de la voie magistrale qu'il suivait vers la ville insvisible de Kitej, vers des concepts importants, tout cela fut on ne sait pourquoi défiguré par ces chimères matérialistes, et l’on s’est efforcé de faire de l’Homme une sorte de biorobot qui ne réfléchit pas par lui-même sur ce qu’il fait ou sur ce qu’on lui dit.

Mais peu à peu,  après qu’on ait surmonté ces choses liées à la révolution et à l’athéisme, et cette chimère communiste socialiste, sont arrivés d’autres ennemis, peut-être encore plus forts extérieurement avec leur pseudo culture agressive, éclatante, impudente et en bien des aspects, démoniaque, qui ont fait de nous des consommateurs disciplinés, à qui l’on donne pratiquement des instructions de vie. Ces instructions se résument à ce qu’on doit naître, étudier, finir un institut, mettre maximum un enfant au monde, ce qui en soi, est déjà révélateur, prendre un crédit pour toute sa vie, le rembourser, et pour finir, on nous brûle, ou on plante un arbre sur nos restes.

Il me semble que la vie de l’homme a un autre sens, qu’il n’est pas né pour juste remplir une fonction, et quitter ce monde dans la déception, qu’il a quand même une mission, qu’on l’a conçu créateur, et dans le monde contemporain, il n’est pas facile de changer ce tableau. Et ne pas le faire, si on est doué de quelques possibilités, j’estime que c’est simplement commettre un crime. Si on regarde cela de l’extérieur en se moquant, je suis plus intelligent que tout le monde et je sais comment il faut faire, alors on voit à sa façon. C’est pourquoi si on quelque chose à partager, il faut le faire, et y mettre toutes ses forces, son talent, son expérience, et toute son âme, sinon il faut reconnaître qu’on ne fait que perdre son temps sur cette terre maudite.

Les orthodoxes ont une approche sérieuse du cinéma, malheureusement les films orthodoxes, et pas seulement orthodoxes, les films documentaires dans leur ensemble, ont du contenu mais la forme est si ringarde, poussiéreuse et ennuyeuse qu’on en peut pas les regarder, et l’on doit surmonter cette situation de façon à faire des films qui touchent le coeur des gens profondément croyants qui comprennent ces pensées profondes et sacrées. Il est indispensable que se crée une harmonie entre la contenu de ce qu’on veut dire, et la forme, parce que dans le monde contemporain, la forme a pris une grande importance. L’expressivité du film, la qualité de la prise de vue sont en soi le moyen d’une exposition brillante et inspirante et à mon grand regret, je peux compter de tels exemples sur les doigts de la main. Mais c’est partout u problème, et il me semble qu’à l’heure actuelle, la conscience de ceci commence à se manifester au niveau du gouvernement.

Dans tous les cas, en Russie, tout récemment, le président a publié toute une liste, pour ainsi dire, de thèses fondamentales sur lesquelles la politique de l'État devrait être fondée et la vie de la société en tant que telle, or les valeurs traditionnelles, la religion et la famille y sont au premier plan.

De sorte que la compréhension que c’est une guerre entre la lumière et les ténèbres qui se déroule maintenant sous nos yeux, et en ce sens, j’estime que nous avons beaucoup de chance, car nous sommes au premier rang pour le voir. Nous nous trouvons maintenant en plein coeur de l’Histoire, et personne ne sait ce qu’il adviendra, si les gens continuent à ne pas avoir de bases spiirituelles, si leurs assises traditionnelles sont faibles, ils n’ont aucune défense, ils ne sont pas en position de vaincre. Or la guerre se déroule au plan des idées, c’est là qu’est le nerf de cette guerre, au plan de l’esprit, et ne se joue ni en Ukraine, ni avec l’Europe, ni avec le globalisme, c’est une guerre des grands principes, et si on les comprend profondément, si on comprend que la tradition, ce n’est pas le passé, mais l’éternité, si on comprend que la vie de l’Homme ne se résume pas à des biens matériels, du confort et des plaisirs de 5 minutes, mais que chacun de nous est quand même l’objet d’un plan divin, que chacun a sa mission, si tu as cette vision des choses, alors tu es fort, alors tu es un guerrier de l’esprit, tu es invincible.

Il me semble que ceux qui prennent les décisions ont enfin commencé à écouter les sages qui transmettent ce que je dis depuis des années et nous arrivons maintenant à un moment historique où le Mystère se révèle, à ce point de l’existence où il devient difficile de feindre, et les libéraux mondialistes ne sont déjà plus capables de se cacher, soit ils fuient les lieux où ces opinions traditionnalistes existent, soit ils se transforment en traîtres et en ennemis. 

D’autre part, ils étaient fort nombreux dans les lieux publics, dans les milieux de la télévision et du journalisme, , dans le milieu intellectuel ou « créatif », metteurs en scène de théâtre, cinéastes, écrivains, et pour eux, maintenant, ce n’est pas simple, parce que le temps est venu où il deveint clair qu’ils remplissaient l’agenda de quelqu’un d’autre, l’agenda a changé, les gens comprennent peu à peu que la voie où ils les poussaient n’était pas la bonne, que c’était un cul-de-sac,  en réalité très court, la voie de la géhenne de feu, et on commence à en sentir la chaleur... Et tous ces discours, et ces promesses que tout le monde sera heureux, que chacun aura son heure de gloire, que le principal, c’est le confort et la satiété, et suffisemment d’argent, mais du sens personne ne parle. Tout cela est mis entre parenthèses, et ceux qui parlaient des valeurs traditionnelles, de l’importance de la compréhension de ces principes religieux, ont été repoussés dans une position marginale.

Or maintenant, ces pôles changent et je suis sûr que peu à peu, ces gens qui ont cette vision du monde (que tous doivent être pareils, comme des pingouins, être bien sages, payer ses crédits et avoir une conception multiculturelle des choses, des valeurs communes à toute l’humanité, tous ces trucs tolérants), ils n’auront bientôt plus de place dans le monde, en tous cas dans notre monde traditionnel. Ils le comprendront eux-mêmes. Il commence à se produire en ce moment ce qu’on pourrait appeler une épuration naturelle. C’est-à-dire que ce processus nr’a pas été enclenché, du genre nous allons maintenant trouver tous les ennemis et les expulser, ce sont eux-mêmes qui s’en vont, parce qu’ils comprennent que le sol vacille sous eux, ils n’ont pas de bases, dans une socité traditionnelle, ils n’ont pas de fondations,  ils sont comme au sommet d’une aiguille, et c’est pourquoi je crois qu’il faut trouver et promouvoir des gens nouveaux dans l’espace de la société, et il y en a forcément, mais ils ne se battront jamais eux-mêmes pour une place, c’est le travail du gouvernement de les trouver, de les persuader, de leur demander de s’occuper d’affaires d’importance nationale. Telle que la retransformation d’une population en peuple ; c’est là le problème le plus important de nos jours, car la destruction de la société traditionnelle a provoqué l’atomisation de chacun dans l’isolement. On leur a donné des buts illusoires, et un système illusoire de conceptions. Lequel ? Tu es le plus important, tu es le meilleur, tu dois recevoir de la vie tout ce que tu veux, , tu sais tout mieux que les autres, tu es le plus intelligent, l’opinion générale ne doit absolument pas t’intéresser, tu dois sans cesse satisfaire ton appétit de consommation, et moi, moi, moi, moi... Et maintenant, voici un temps qui s’appelle « Nous ». Et alors que cette question a qu and même pleinement émergé, « moi » ou bien « nous », il apparaît que « Moi », c’est celui qui ne veut pas participer aux affaires de l’Etat, qui se moque du passé comme du futur, il ne s’intéresse qu’au jour d’aujourd’hui, être bien, au chaud, manger de bonnes choses, dormir dans un bon lit.

C’est là le point que nous avons atteint aujourd’hui, c’est-à-dire que les pôles changent de place sous nos yeux, et nous allons voir ce que ça donne. Nous sommes à l’intérieur de l’Histoire et j’estime que nous avons beaucoup de chance d’être vivants au moment où le monde se trouve dans un processus de destruction, nous voyons tout cela arriver et nous ne pouvons faire de pronostics d’avenir, même pas au sujet de demain. Même ceux qui prennent les décisions au plus haut niveau, ils ne savent pas ce qu’elles vont donner. Aussi fasse le Ciel que la providence non seulement s’en mêle, comme elle l’a déjà fait, je le crois,  mais qu’elle nous conduise, au besoin au travers des épreuves, au travers parfois des déceptions et la destruction de nos représentations précédentes, sur une voie cependant lumineuse et nous garde de l’apocalypse approchante, qui nous attend tous, comme on le sait, mais il est en notre pouvoir de la rencontrer avec un certain bagage spirituel et de repousser les choses, car plus nous serons nombreux à approcher de ce final spirituellement enrichis, plus il nous sera facile de continuer à faire face à notre vie personnelle dont il est constemment question.

Mais je crois qu’à l’heure actuelle, la providence divine se manifeste de faàon très visible, et ce que nous obesrvons aujourd’hui, c’est effectivement une grande bataille, la grande bataille des forces de la lumière avec les forces des ténèbres. Et j’espère que dans tous les domaines, le cinéma, où déjà disparaissent des salles tous ces démons dans le genre de Batman, et le théâtre, où nous verrons sans doute de plus en plus de mises en scène classiques, et dans les arts plastiques où dominentt toute cette folie et toutes sortes de déchaînements sataniques, la musique, la littérature, tout doit changer. Et en conséquence les gouvernants et leur relation avec les gens. De sorte que la transformation de ceux-ci, d’une population, d’un éléctorat, en un peuple uni, armé d’idées puissantes et lumineuses, c’est la principale tâche, le principal but, et j’espère que les événements iront précisément en ce sens.


 l'interview, pour les russophones


Extrait du film: le vieux moine dit que la Russie sera la dernière arche...



Miracles génétiques

 


La routine, dépôt chez les cosaques de vivres pour les soldats, nettoyage de la cour, nous approchons de la débâcle, mais il neige, plus qu’au mois de février. Cependant, il y a de la douceur dans l’air, les nuages dérivent, ils sont pleins de lumière, j’ai vraiment de la chance que ma rangée d’isbas subsiste, ce sont elles qui font de notre « petit coin », comme dit Ania, la voisine, un endroit encore vivant et pittoresque. Je suis régulièrement assistée par mes deux géants féeriques, Nounours et Alba. Ils sont gentils, touchants, ils adorent venir chez moi. Assise sur la terrasse au premier soleil, j'ai fait un dessin de notre mois de mars rayonnant entre deux averses de neige.


C’était hier le dimanche du triomphe de l’orthodoxie, commémorant la victoire sur l’iconoclasme qui a profondément secoué la chrétienté au VIII° siècle. Liturgie épiscopale, très longue, trois heures, et tout de suite après, visite par les paroissiens d’une exposition sur Marie Skobtsov, sainte Marie de Paris, cette moniale russe qui, à Buchenwald, était allée mourir à la place d’une jeune mère de famille. L’exposition consistait en panneaux explicatifs avec des photos et des citations, dans l’église voisine de la Mère de Dieu de Vladimir, commentés par l’auteur de deux livres sur sainte Marie. Tout cela m’était relativement familier, car je suis devenue orthodoxe dans l’émigration à Paris, et j’ai traduit avec une amie des Asmus la vie de la fondatrice de Bussy, la mère Eudoxie, qui, d’ailleurs, n’était pas en très bons termes avec la sainte, et cette dernière avait visiblement une forte personnalité, comme dit mon père Valentin, les saints ne sont pas toujours faciles à vivre ! En revanche, c’était certainement très exotique pour tous les autres, pour les paroissiens locaux. Une dame a demandé si on était bien sûr que mère Marie eût été canonisée par l’Eglise russe. Mais oui, bien sûr, lui a-t-on répondu, puisque l’Eglise hors frontières s’est réunie au patriarcat de Moscou...

Dans la foulée, pratiquement, j’étais invitée à une exposition de peintures, à côté, des dessins aux feutres de Pacha Morozov, qui est un excellent peintre, et j’y ai fait des mondanités, ce dont je n’avais aucune envie, mais n’ai pas vraiment regretté non plus.



Je pense souvent à Ania Ossipova, si profondément russe, en dépit de parents communistes de chez communiste, qui l’ont élevée dans la ligne du parti. Dans le même style de mystère ou peut-être de miracle, j’ai vu une vidéo sur une jeune fille partie vivre seule à la campagne, comme ses ancêtres, dans une petite isba impeccable, où elle fait tout elle-même, en presque parfaite autonomie, elle a quand même l’électricité. Elle doit avoir au moins vingt-trois ou vingt-cinq ans, car elle a étudié l’iconographie à Saint-Serge, mais elle semble en avoir quinze. Un être pur, paisible, heureux de ce qu’il a et de la liberté, de la plénitude que lui donne cette vie modeste et active. Elle manifeste toutes les qualités du paysan russe d’autrefois, dont l’amour du travail bien fait. A la question du journaliste, de quoi es-tu le plus contente, elle répond « ma maison ».



Krestina fait son bricolage, jardine, peint des icônes, coud elle-même ses vêtements de style traditionnel, et joue du synthétiseur, à défaut d’un piano. Je trouvais d’utilité publique de la présenter partout, à la télé, dans les écoles, mais en fait, j’ai vu que c’était plus ou moins déjà le cas, c’est la vraie vedette, on la filme sans arrêt. Un exemple de bonheur, de vie courageuse, simple et honnête, et de modestie. 

Quand j’étais jeune, je détestais la ville, et après deux années de fac, je rêvais déjà d’être bergère en haute Ardèche. J’ai rêvé toute ma vie du bonheur de Krestina, qui est celui de tout être humain normal, en fin de compte, mais moins simple, je redoutais de partir seule, je voulais vivre à la campagne avec un compagnon. Je l’admire de s’en passer, et du reste, elle a certainement plus de chances d’en trouver un là où elle est, autonome, calme, déterminée et joyeuse, que si elle était restée en ville, à courir après des chimères, en menant, comme la plupart des gens, une existence aliénée et stressante d'esclave tarifé.

 





mercredi 1 mars 2023

Printemps carémique

 


C’est officiellement le printemps, et l’on peut dire qu’il est dans l’air, les oiseaux recommencent à chanter, chiens et chats batifolent, la lumière revient et même le soleil. J’ai lamentablement séché le dimanche d’Adam et l’office du pardon. La vieille Antonina me l’a doucement reproché et je le lui pardonne parce que c’est le moment et qu’elle est adorable. La venue du carême m’a jetée dans une sorte de panique boulimique et honteuse, j’étais revenue la veille de Moscou, je n’avais pas envie de bouger, je regardais avec terreur arriver ces offices interminables... Et puis bon, le lundi, je suis partie à l’église, et je me sentais calme, réfugiée en moi-même. Je n’ai pas compris grand chose au sermon de notre évêque, comme d‘habitude, heureusement qu’il est publié ensuite sur le site de l’éparchie. Il a une voix sourde, peut-être que je le deviens aussi, ou bien l’acoustique est mauvaise. En me donnant sa bénédiction, il m’a demandé si j’avais une traduction du canon de saint André de Crète. Oui, bien sûr, tout le triode avec le canon. Ce que j’ai saisi de son sermon, c’est que saint André parle à son âme et s’entretient avec Dieu, ce que nous devrions faire plus souvent.

Le lendemain et le surlendemain, j’ai tout lu chez moi, le canon et les complies, car j’attendais l’électricien, qui m’a tout laissé en plan avec le matériel au milieu. J’irai demain à la cathédrale pour la dernière lecture, afin de ne pas traumatiser Antonina. Je ne sais plus qui me disait récemment que si l’on ne comprenait pas le slavon d’église, ce n’était pas grave, ça passait quand même. Eh bien je ne suis pas d’accord avec cela. Lundi, j’avais trouvé online un canon en russe, mais un russe archaïque, poétique et noble, je n’ai pas tout de suite compris que ce n’était pas du slavon, je me disais : « J’ai dû faire des progrès, je comprends tout ». C’est important de comprendre, quand même, il y a un côté très pédagogique dans le canon, tous ces liens avec la bible, et puis les grandes complies sont une vraie fontaine de grâce. Je lis cela et il me pousse des ailes. C’est même étonnant. Je me souviens de ce que m’avait dit le père Barsanuphe à propos de la prière : « Il y a des choses que je ne peux vraiment pas vous expliquer, elles sont inexplicables, mais quand on pratique la prière, c’est un fait d’expérience, ça marche. Faites l’expérience ».

Ca marche mais pas à tous les coups. Il y a une attitude intérieure à avoir. Si on ne l’a pas, les canaux sont fermés. En effet, il faut parler avec son âme, et s’entretenir avec Dieu. Et lorsque s’établit et s’approfondit cette conversation subtile, on doute de moins en moins, le coeur s’emplit d’une plénitude paisible, et l’on pèche quand même, mais cela n’a plus la même importance, ce sont des accidents de parcours, pourvu qu’on garde le contact, ils n’empêchent pas d’avancer.

Je pensais à ce qu’a écrit cette femme sur le bonheur au bord des abimes infernaux, ces fenêtres et ces portes qui s’ouvrent sur le paradis. Il y a quelque chose d’extraordinairement profond, simple et merveilleux dans ce qu’elle décrit là, quelque chose que je ressens de toute mon âme et qu’elle le ressente aussi est pour moi très encourageant, je veux dire éclairant. Je peux lire d’un oeil distrait des kilomètres de bondieuseries, sans que cela ne m’éclaire tellement, même parfois au contraire, et voilà tout à coup ce signal venu d’en haut, d’autre part ...Tout cela fait place à l'insoutenable beauté d'une fleur, à la ligne d'horizon, à la miraculeuse légèreté des nuages. C'est comme si on nous envoyait des salutations de quelque part au dessus, de l'extérieur, nous indiquant: regardez ici, ne regardez pas en bas! Marchez sur l'eau, n'ayez pas peur!

Il y a quelques temps, j’étais tombée sur la conférence que nous avait faite à Solan l’higoumène de Simonos Petra, et qui m’avait alors donné de si précieuses indications. Il disait que nous devions vivre avec les péchés dont nous ne pouvons nous débarrasser, les porter comme une croix, les remettre à Dieu et c’est ce que je fais. Le texte de Natalia a soudain légitimé mes échappées dans les nuages, les étoiles, les feuillages, j’ai compris que c’étaient là des moments où notre âme, notre corps et Dieu étions complètement en phase, en osmose, et se baignaient dans cet échange. Alors on peut me dire tout ce qu’on veut, que Dieu n’existe pas et que s’Il existe, c’est un parâtre qui nous martyrise, mais il faut ne jamais avoir été dans cette osmose-là pour dire des choses pareilles. Et pourtant, oui, il se passe des choses affreuses qui sont essentiellement le fait des humains, et où Dieu n’a pas grand chose à voir, mais les incroyants voudraient un Dieu dictateur qui « fît notre bien », que nous le voulions ou non, comme tous les dictateurs de toutes couleurs et drapeaux, nous savons en quoi cela consiste.

Je suis allée sur la page d'une dame très férue d'astronomie et de physique quantique, et de la spiritualité qui va avec; et sur le moment cela m'a donné le vertige. Certes, cela me confirme dans mon intuition que tout est sacré et que tout est lié, je ne sais même pas d'ailleurs comment on peut considérer les choses autrement, à moins d'être mutilé de son imagination, de sa sensiblité, de sa capacité à envisager les arrière plans et les intrications purement poétiques de l'existence. Mais c'est si énorme, qu'on a du mal à se représenter que Cela qui existe et qui nous porte, puisse avoir une relation personnelle avec nous. Pourtant, c'est justement ce dont me parlait la mère Hypandia: "Songez que cette  Divinité n'a qu'une idée, dans son incommensurable puissance créatrice, c'est de converser avec cette toute petite âme que vous êtes." Le père André du monastère sainte Elizabeth de Minsk a fait lui aussi un sermon très intéressant, où il est question de nous mettre dès maintenant en conformité avec Ce vers quoi nous allons, et que c'était là le sens du carême, et peut-être aussi la raison de ma profonde panique, au seuil de celui-ci.

Et pourtant, la prière est rassurante, et puis "il y a plusieurs maisons dans la maison de mon Père", c'est-à-dire que, comme la Terre où nous sommes est faite à notre mesure, de sorte que chacun y trouve sa place, dans les douces plaines ou les rudes sommets, dans les villes ou les campagnes, sur le bord de la mer ou dans la forêt, et que nous ne voyons pas l'abîme de l'Univers qui la contient, ainsi le Royaume où nous allons est possiblement adapté à ceux qu'Il accueille, selon leur degré de maturation spirituelle. Mais enfin, c'est sûr que cela va nous changer, et qu'il faut s'y préparer...


Assis devant le paradis

Pleurait Adam et chantait :

Paradis, mon paradis,

Mon beau paradis !

C’est pour moi que tu fus créé,

C’est par Eve qu’il me fut fermé.

 Je ne vois déjà plus

 Les nourritures paradisiaques,

Je n’entends déjà plus,

Les voix archangéliques

 J’ai péché, Seigneur, j’ai péché,

Dieu miséricordieux,

 Pardonne à celui qui déchut !

Paradis, mon paradis,

Mon beau paradis...



[1] Poème spirituel traditionnel




dimanche 26 février 2023

Paradis retrouvé

 


Dimanche du pardon, et demain la première semaine de Carême, la plus dure avec la semaine sainte. Ceux à qui je voudrais demander pardon ne sont souvent plus en vie, ou très loin. Mais j'ai pu offenser des gens sans le vouloir, ou par négligence, ou bien le pardon réciproque n'entre pas dans leurs catégories mentales... 

J'ai fait un saut à Moscou pour un concert de gousli de Dima Paramonov, Liéna et ses filles sont venues avec moi. C'était très joli, des chansons de noces, des vers spirituels. Une musique pleine de vent et d'espace, de larges cours d'eau, de pluie et d'oiseaux, une musique pure et bénéfique. Une toute petite fille dansait sans arrêt, entre deux rangées de fauteuils. 

Puis je suis allée à une soirée crêpe chez Xioucha, il y avait le père Valentin, le père Dmitri et sa femme, le diacre Sergueï, Thomas et un copain belge, Olia, et Irina Pavlova, dont j'ai récemment commenté la vidéo sur l'ostracisme par les libéraux des gens qui ne pensent pas comme eux. Xioucha voulait me la présenter, ça partait d'un bon sentiment, mais je n'ai pas pu lui parler, car tous étaient d'humeur à plaisanter et à raconter des blagues russes. Je me suis surtout entretenue avec Thomas des gens qui, malgré leur culture et leurs diplômes, restent aveugles à des choses évidentes. Il connaît ça dans sa famille. Lui-même est pourtant plutôt de gauche, et m'a dit que le communautarisme était dans la mentalité russe, ce qui n'est pas faux, c'est même le seul élément du communisme qui me semble cadrer avec cette mentalité telle qu'elle était avant rééducation violente, encore qu'il n'avait pas le même caractère, c'était la communauté paysanne traditionnelle que nous avons connue aussi, au moyen âge, et la "sobornost" orthodoxe, telle qu'on la voit à travers les romans de Dostoivevski. Je lui ai dit que ce sens de la communauté était sain, et que je n'avais vraiment rien contre, ce que je reprochais au communisme était d'un autre ordre, c'était le matérialisme progressiste au front bas, le désastre culturel, avec le mauvais goût qui en découle, la violence exercée sur ceux qui ne partagent pas l'idéologie obligatoire, l'ingéniérie sociale, le dressage des populations. Je soutiens l'économie traditionnelle, exterminée autant par les capitalistes que par les communistes, et la nationalisation des banques et de tout ce qui est d'importance nationale, énergie, chemins de fer, hôpitaux et éducation, bien que dans ce dernier cas, j'estime que doivent exister aussi des écoles privées ou la possibilité d'enseigner les enfants chez soi, pour éviter le formatage auquel l'état se livre facilement.

J'ai continué cette conversation plus tard avec le père Valentin. La confiscation de la culture par les "libéraux", comme en France, d'ailleurs, l'action délétère de la télévision et de ses programmes dégradants. Ce n'est pas le tout de prôner les "valeurs russes" encore faut-il le mettre en pratique. Nous avons évoqué l'abominable variété patriotique qu'on entend trop souvent, entre le mauvais rock et le mauvais rap, il faut bien avouer qu'au moins, pendant la seconde guerre mondiale, les chansons étaient d'un autre niveau, il y en avait de magnifiques. La soupe américanoïde qu'on nous sert encore est si étrangère à la Russie, le problème est qu'on nous a rendus, dans notre propre pays, étrangers à nous-mêmes, à notre génie, à notre histoire. J'ai vu le député Piotr Tolstoï agressé par les hyènes de BFMTV. Le seul souci de ces harpyes était de le déstabiliser et de le discréditer, et l'argument était que les élites russes condamnaient l'occident décadent mais y envoyaient leur argent et leurs enfants, et que Tolstoï lui-même avait vécu en France et appris le français. Je trouve que sur ce point, il n'a pas su leur répondre. D'abord parce qu'effectivement, les élites russes ont eu ce tort, et qu'il fallait le reconnaître. Mais ajouter que les Russes, comme lui épris de la culture européenne, avaient compris qu'entre les mains de leur caste, elle disparaissait complètement, et que les pires ennemis de la France, et de sa culture, c'était précisément leur engeance. Quand on aime la France, on ne peut aimer ni Macron et ses horribles séides et commanditaires, ni BFMTV, ni les instances de l'Union européenne, ni le mouvement Woke. 

Or la télé en Russie reste également entre les mains de gens qui détestent la Russie, la méprisent et évitent soigneusement de relever le niveau et de réintroduire sur les ondes la culture nationale authentique.

Néanmoins, comme Irina Pavlova, le père Valentin fait preuve d'un certain optimisme. Il pense que c'est une question de temps, que le pays va renaître. Il m'a raconté qu'un jeune homme de sa famille avait été coffré lors d'une manif de libéraux, et condamné à 13 jours de placard, mais traité avec tant d'égards que sa propre mère avait demandé qu'on lui imposât des travaux d'intérêt général. Je pense pour ma part qu'on devrait les envoyer passer deux semaines au Donbass, pas sur le front, mais simplement observer ce qui se passe là bas, et si ce que nous clamons depuis huit ans, c'est de la "propagande de Poutine"... Ceux qui le font reviennent généralement avec la tête à l'endroit.

Liéna va plusieurs fois par semaine travailler comme aide-soignante dans un hopital militaire où se trouvent de très grands blessés qui n'auront plus jamais une vie normale, dans le meilleur des cas. Je pense à ceux qui ont tout fait pour qu'une pareille chose arrive et qui font tout pour que cela se prolonge. 

Aujourd'hui, on fait mémoire d'Adam chassé du paradis et voilà que je tombe sur cette publication de Natalia Kornileva qui reflète complètement mon état d'esprit actuel:

C'est une chose étonnante: plus le monde se fait béant comme l'enfer, plus mon âme se remplit avec acuité d'une chose qu'il était devenu depuis longtemps indécent d'évoquer: les vagues d'un B-O-N-H-E-U-R si intense qu'on s'y dissout sans laisser de trace avec sa propre imperfection et la saleté du monde qui s'y colle.  

Tout cela fait place à l'insoutenable beauté d'une fleur, à la ligne d'horizon, à la miraculeuse légèreté des nuages. C'est comme si on nous envoyait des salutations de quelque part au dessus,de l'extérieur, nous indiquant: regardez ici, ne regardez pas en bas! Marchez sur l'eau, n'ayez pas peur!

De plus en plus souvent, on se fige au milieu de la journée, apercevant soudain la courbe délicate d'un arbre penché, la rayure rougissante du ciel sur le jardin. 

Et l'on comprend tout à coup que ce sont des fenêtres. Au travers desquelles on peut sortir (entrer?) et aussitôt se retrouver au paradis, dans ce même Royaume, où nous voulons tous tellement pénétrer. Un jour, quelque part... Et elles sont là, les voilà. Les fenêtres, les portes. Partout. Et chacun peut les franchir...


Удивительное дело: чем страшнее зияет гееной мiр, тем острее заполоняет душу то самое, что долгие годы и выговорить-то было неприлично: приливы такого пронзительного с-ч-а-с-т-ь-я, что растворяешься в нём без остатка, в котором и собственное несовершенство и налипшая от мiра грязь.

Всего этого больше нет, а есть невыносимая красота цветка, линии горизонта, нерукотворная лёгкость облаков. Тебе будто посылают приветы откуда-то сверху, извне, указуя: смотри сюда, не опускай взгляд! Иди по воде! Не бойся!

Все чаще замираешь посреди дня, вдруг выхватив зрением тонкий изгиб поникшего дерева, алеющую полоску неба над садом.
И вдруг понимаешь, что это окна. Через которые можно выйти (войти?) и немедленно оказаться в раю, в том самом Царстве, куда мы все так хотим когда-то попасть. Когда-то, где-то… А они – вот они. Окна, двери. Повсюду. И каждый может…