Il fait un froid terrible, les feuilles des fougères, qui me ravissaient comme chaque année en déployant leur manteau translucide sous leurs petites têtes courbées, ont gelé. Quelle tristesse... la belle saison est si brève, et voilà qu'elle s'annonce pourrie. J'ai pitié des plantes et des bêtes autant que de moi-même, dont les printemps sont déjà comptés.
Pereslavl, outre "l'architecture" de ses nouvelles maisons qui ne ressemble à rien, se distingue par ses rues défoncées à un point indécent, le délabrement de certains quartiers, des terrains vagues qui suivent des destructions incompréhensibles et qui s'installent pour des années, avec déversements subreptices d'ordures, tas de ciments, poutres abandonnées, ferrailles... Cependant les "administrations" successives et leur architecte-conseil fantôme font mumuse avec l'aménagement jamais terminé de la plage municipale qui ne s'imposait pas; l'achat de faux topiaires en plastique, car le plastique inaltérable, il n'y a rien de mieux, on les a répartis dans toute la ville, au milieu du désastre, c'est bien festif. Et dernièrement, l'asphaltage du sommet des buttes qui constituent l'ancien rempart, dernier lieu de poésie et de charme naturel de cette malheureuse cité. Pour que les sacro-saints touristes puissent marcher là haut avec des talons aiguilles, peut-être? Quel genre de crétin a pu concevoir un tel projet? En revanche, les rues au dessous des remparts, où circulent les voitures et les autobus de ces mêmes touristes sont toujours aussi défoncées. Pour elles, il n'y a pas d'asphalte prévu. On fait un petit morceau de temps en temps, pour calmer la populace et c'est marre.
Mon humeur n'est guère pascale... Mais si, mais si, j'essaie de ne plus remarquer tout cela, ou de passer par dessus, seulement je le mentionne quand même pour ne pas me faire accuser de tout trouver ici idéal.
Dany m'avait parlé d'un ado qui avait voulu "changer de genre", dans l'Oural, et que les autorités du coin ont soustrait à l'autorité de sa mère, qui bien sûr, s'opposait aux mutilations catastrophiques et irréversibles impliquées par une telle opération . "Comment? M'étais-je écriée. Mais le changement de genre par voie chirurgicale a été interdit en Russie!" Et en effet. Piotr Tolstoï répond à un journaliste qui lui reproche d'avoir voté cela en temps de guerre, comme s'il n'y avait pas plus urgent, que précisément, il fallait le faire maintenant, avant que les partisans de ce type de mesures ne prennent de l'importance, et que c'était pour garder une société normale à leurs descendants que les Russes faisaient la guerre à ceux qui cherchaient à imposer leur étrange style de vie au monde entier. Alors que penser? Qu'au niveau local, un chaud partisan de l'Occident et ses valeurs soutient sournoisement ce genre de choses? Si c'est le cas, il faudrait mettre au pli ce saboteur et ses pareils. Car en effet, c'est contre tout cela que se battent et meurent les soldats russes. Il s'avère, d'après ce que j'entends dire, que ces soldats manquent de beaucoup de choses et que c'est la population qui finance directement l'armée, c'est-à-dire les innombrables groupes de soutien, qui récoltent des fonds, offrent des drones, du matériel, des uniformes, de vieilles voitures ou les réparations d'icelles, des médicaments, des bains de vapeur intinérants, ce n'est pas "la guerre de Poutine", c'est la guerre des Russes, et peut-être que je ne me trompais pas en pressentant que la Russie était un énorme Donbass potentiel. On verra bien. Si c'est le cas, ce n'est pas gagné pour nos ennemis, et si nous mourons tous, ce sera, dans le contexte, ce que nous aurons encore de mieux à faire. Car la société de la caste n'est pas faite pour les hommes ni même pour le bétail.
pour les russophones
Je traduis ici le propos d'un soldat, Dmitri Joukov, qui me frappe par sa profonde lucidité et son courage: "Je me bats ici pour des raisons simples et banales. Des raisons personnelles. D'abord, je n'ai rien à faire à Kiev, où je serais pendu la tête en bas sur le Maïdan pour des activités que j'ai menées avant celui-ci. J'ai aidé le Berkut, organisé des processions religieuses pour l'unité avec le monde russe.. Et ensuite... je me bats pour la sainte Russie et la foi orthodoxe. si nous gagnons, il y aura davantage de Christ sur la terre, et si nous perdons, il y en aura moins". http://rys-strategia.ru/news/2024-05-01-18528
En voilà un, au moins, qui ne se trompe ni de combat ni d'ennemi.
"Que pouvons-nous faire?" me demandait mon peintre d'hier. Rester solidaires et déterminés. Prier. Crier la vérité. Si l'Ukraine est le laboratoire du monde entier, le Donbass est celui de notre résistance, envers et contre tout, y compris nos propres traîtres et affairistes.
A ce point de mes réflexions, je tombe sur celles de Slobodan Despot, ô combien judicieuses:
"Dans un système aussi bien tenu
en main, il ne peut rien se passer et
il ne se passe, de fait, rien. L’opposition sincère, en particulier depuis
la dystopie covidienne, transmigre
vers des formes d’organisation
«citoyennes» qui s’illustrent par
leur amateurisme et leur naïveté.
On pétitionne, on manifeste, on
concertationne, on lettrouvertise,
on s’éparpille très vite en clans et
en factions et l’on n’aboutit, concrètement, qu’à fournir aux agences du
pouvoir des listes de suspects. En
un mot, on fait comme si l’on était
encore en démocratie en s’obstinant à ignorer les preuves criantes
de son abolition fournies par le
pouvoir lui-même. Le déploiement
de techniques de subversion dignes
de la guerre secrète — comme
l’infiltration cognitive développée
par le psychologue Cass Sunstein
sous l’ère Obama — contre ces
formes de contestation légales et
légitimes illustre la transposition
de méthodes d’influence psychologique venues du monde militaire
dans le champ civique. Face à un
tel appareil de contrôle, soutenu
par une machinerie de propagande
médiatique unanime, la contestation démocratique loyale n’a aucune
chance. Sa tragédie est qu’elle ne
l’a toujours pas compris. Autant
réclamer le référendum d’initiative
citoyenne au roi Hérode.
Les Européens de l’Ouest ont une
sorte de circonstance atténuante: ils
sont nés au milieu d’une clairière
historique. Rien dans leur éducation ni dans leur univers culturel ne
les avait préparés à ça. Ils se sont
lancés dans une lutte inégale sur
un terrain miné sans même dresser un portrait-robot de leur adversaire, de ses moyens et de ses motivations. Ils ont cru le plus souvent
qu’il ne s’agissait que de lever un
malentendu alors que la lutte est
ontologique: elle se terminera par
l’anéantissement d’un camp ou
de l’autre. Beaucoup, particulièrement en Suisse, essaient de maintenir coûte que coûte leur foi dans la
bienveillance foncière des «autorités». Au stade actuel, leur confiance
s’apparente à de l’infantilisme".
L’office de la mise au tombeau a duré quatre heures et
demie. J’ai réussi à m’asseoir un peu mais quand même. J’avais préparé sur mon
téléphone un site qui donne le texte des lectures et des prières, mais peine
perdue. Par moments, j’ai cru que j’avais rattrapé le fil, mais non, cela ne
correspondait pas à ce qui se passait dans l’église. Je me souviens combien
j’étais transportée par cet office à Solan, par ces stances poétiques,
douloureuses et cependant espérantes, et la mélodie byzantine, si sobre et
émouvante. Et là, ne comprenant rien, fatiguée de parcourir mon écran des yeux,
j’ai fini par laisser tomber. Evidemment, des tas de pensées me couraient dans
la tête. Mais que faire ? J’essayais la prière de Jésus. Je n’étais pas
dans l’ambiance. Dany l’était jeudi, pendant la lecture des douze Evangiles,
elle a ressenti ce que j’avais éprouvé il y a des années, à savoir qu’il ne
s’agissait pas d’une commémoration, mais que nous étions transportés deux mille
ans en arrière pour vivre tout cela avec le Christ et ses proches. Enfin ça,
c’est quand on est en état de grâce et je ne l’étais pas tellement.
Quand
quelqu’un entrait dans l’église, une grande lumière frappait le mur et il la
reflétait presque comme un miroir, tant elle était vive. Au moment de la
procession, quand on a ouvert la porte devant le clergé et les fidèles, je n’ai
plus vu, en face de moi, qu’un énorme soleil, un disque chatoyant et rayonnant,
et je n’étais pas aveuglée, mais je ne voyais absolument rien d’autre, j’avançais
à l’intérieur d’un astre, et peu à peu je distinguai la foule des paroissiens,
mais ils semblaient dissous dans cet embrasement, des ombres ou plutôt des
silhouettes, de la lumière dans la lumière. Ce soleil de la mise au tombeau m’a
rappelé l’arc-en-ciel du matin de la Théophanie, à Cavillargues, se levant à
travers une pluie brillante. Je n'étais pas en état de grâce, mais j'avais la certitude d'être guidée, prise en mains, c'était cela que je me disais, tandis que les prières incompréhensibles boudonnaient autour de moi. Accepte les choses telles qu'elles sont. Tu n'es pas en état de grâce, et autrefois tu l'as été, eh bien, est-ce que tu le mérites? Autrefois tu ne le méritais pas non plus. Mais cela t'a été donné. Et maintenant, cela ne l'est pas, il faut l'accepter. Et j'ai rencontré cette source éblouissante qui semblait m'attendre et m'a engloutie.
Ce soleil de Pâques, je l'ai retrouvé dans les textes que j'ai lus chez moi de la mise au tombeau, et du canon pascal lui-même, que j'ai plus ou moins chanté à l'avance. Mais la procession nocturne s'est déroulée sous la pluie. Comme d'habitude, le clergé et le choeur couraient comme des lapins, je n'ai jamais compris pourquoi il fallait défiler à ce rythme, et derrière, on n'entend plus rien que les conversations de ceux qui viennent en touristes, tout en veillant à ne pas trébucher sur les inégalités du terrain. Je suis arrivée bonne dernière du marathon pascal 2024, il y avait bien encore derrière moi deux ou trois jeunes gens, mais je crois qu'ils s'étaient mis à flâner et avaient oublié la Pâque.
Du père Ioann et de sa Pâque à Glebovskoié m'est parvenue une photo ardente à tous points de vue, par la couleur, et la ferveur.
Aujourd'hui, j'étais invitée par les parents de la jeune fille francophone rencontrée récemment. Ce sont des paroissiens de la cathédrale, initialement, des peintres de Moscou qui vivent principalement ici, et ont magnifiquement restauré leur vieille maison du XIX° siècle, qui se trouve maintenant flanquée d'une construction neuve mastoque, disproportionnée, qui leur a volé la vue sur les églises. Ils ont acheté cette maison pour la sauver, et autour d'elle, les autres perdent peu à peu tout caractère et toute beauté. La famille entière est très sympathique, chaleureuse et paisible, le père, la mère la grand-mère, le jeune frère de Macha, avec sa physionomie douce et enjouée très russe, un amoureux des plantes... Nous nous sommes très bien entendus. Je crois qu'ils seront pour moi le même genre d'amis qu'Anna Ossipova et sa famille, et cela me fait plaisir car je n'aime pas trop les rapports passionnels et tordus qu'installent avec moi un certain type de personnes. Le père de Macha est très conscient de ce qui est en train de se passer au niveau mondial; on le traite de complotiste, comme quoi le même genre de malfaiteurs inspire la même réthorique, pour tous nous désarmer et nous mettre en cage. Discréditer les gens lucides n'est jamais qu'une technique d'ingéniérie sociale. "Je vois tout cela, mais je ne sais pas que faire", dit cet homme assez découragé. Nous le sommes tous, devant l'ampleur de ce mal, dont Dany me dit avoir pris conscience pendant la Pâques: un mal métaphysique, que plus rien n'arrête, et qui fait presque passer les bouchers des temps anciens pour de gentils boy-scouts. Car ils ont les moyens de s'attaquer au plus profond de notre être, de détruire les âmes, et c'est ce qu'ils veulent, la leur, il y a longtemps qu'ils l'ont perdue. J'ai répondu que je comptais sur Dieu et aussi l'entraide, la résistance passive, et le développement d'anticorps culturels et spirituels, la conservation de ce que nous pouvons encore sauver et transmettre. Dieu merci, ici, on n'en est pas encore au point où l'occident en est arrivé, mais il a ses serviteurs zélés, et depuis longtemps. Raspail croyait en l'émergence d'isolats, et moi d'archipels de lumière.
La destruction de l’orthodoxie est au
programme, avec la complicité de Bartholomée-Saroumane, qui établit, devant ces
menées infâmes, un paravent religieux convenable à l’usage du niais occidental
moyen. On a arrêté le magnifique métropolite Arsène, de la laure de
Sviatogorsk. Et qui porte
la main sur un tel homme, quel genre de gnomes ? Le même genre qu’au temps
du saint patriarche Tikhon, déjà avec la bénédiction de Constantinople. Je
félicite les orthodoxes occidentaux qui soutiennent cette entreprise. A
noter que Prilepine, dans son désir de blanchir les rouges et de récupérer les
orthodoxes, nie toutes les exactions de la guerre civile et des années qui ont
suivi, ce n’étaient que des débordements que le pouvoir communiste n’avait pas
ordonnés, il n’y était pour rien, au contraire, Lénine avait rétabli le
patriarcat. Il n’a jamais entendu parler de « l’Eglise rénovée »,
équivalent du machin honteux mis en place aujourd’hui sous l’étiquette
autocéphale ? Sans doute n’a-t-il pas lu la lettre que le patriarche
Tikhon avait adressée aux bolcheviques ? Il n’a sans doute pas non plus eu
connaissance de son commentaire, quand la rupture d’une canalisation d’égoût
avait « embaumé » le mausolée de Lénine : « Telle relique,
tel onguent »...
La
destruction de l’orthodoxie et même des habitants de l’Ukraine. J’ai écouté
l’interview floutée d’un ancien officier de l’armée ukainienne qui émet la même
hypothèse que moi : la soi-disant « aide à l’Ukraine » consiste
à financer l’extermination de la population par les Russes, en prolongeant une
guerre insensée qui n’a pas d’autre justification possible. « Si j’étais
une ordure cynique, c’est ce que je ferais », dit le militaire.Pour la remplacer par une autre. Des esclaves
métissés, sans doute, entre les plantations Monsanto, les fermes à GPA et à
organes et l’exploitation du gaz de schiste... Vous vouliez l’Europe, eh bien
vous l’aurez. Et l’Europe deviendra l’Ukraine, qui en est le laboratoire.
Prions pour que la Russie elle-même ne prenne pas le même chemin.
pour les russophones
Sur le fond de ces réflexions, j'ai constitué un petit florilège de celles des autres. Antipresse et sa dissection des totalitarismes protéiformes mais de même essence. Et d'abord, cet extrait de l'article pénétrant de Slobodan Despot:
Ces premières années de son exil,
Miłosz les vivra comme dans une
douve, serré entre deux murs. Dans
son dos, celui de la prison d’où il s’est
échappé. Devant lui, celui de l’incompréhension occidentale. Il est frappé
par l’incapacité des Occidentaux à
imaginer un ailleurs, à se projeter
dans la tête et la vie d’autrui. En 1952,
il publie un essai qui entrera dans
l’histoire: La pensée captive. Essai sur
les logocraties populaires. La survie de
l’âme sous une dictature de l’absurde
jusqu’alors inédite en est le sujet
principal. L’incompréhension de ce
tourment chez ceux qui ne l’ont pas
vécu dans leur chair en est le corollaire:
«L’homme de l’Est ne peut pas
prendre les Occidentaux, et en particulier les Américains, au sérieux,
justement parce que la plupart n’ont
pas passé par les expériences décisives - celles qui nous instruisent
sur la relativité de nos jugements
et de nos habitudes. Leur manque
d’imagination, surtout, est vraiment
effarant. Parce qu’ils sont nés et ont
été élevés dans un certain ordre
social et dans un certain système
de valeurs, ils estiment qu’un autre
ordre est “contre nature” et qu’il ne
pourra se maintenir.
Je descends encore une fois dans
les tréfonds de ma mémoire personnelle. Le contraste entre la grisaille
des rues de Belgrade à la veille de
notre émigration et les couleurs
franches qui m’ont sauté aux yeux
en Suisse: pelouses d’un vert inouï,
géraniums à toutes les fenêtres, cars
postaux jaunes, tenues de ski bariolées. Telles des ombres chinoises
restent gravées dans ma rétine ces
silhouettes de passants marchant
voûtés, à petits pas, avec leurs filets à
provisions chichement garnis. Et l’on
était dans le plus détendu des pays
de l’Est… Et puis le labyrinthe ténébreux des rues de Budapest, vers 1986,
piqueté de réverbères anémiques, et
sans un seul panneau pour vous indiquer le chemin. Et ce quai de gare à
Sofia où le voyageur étranger n’avait
pas le droit de poser le pied, et où un
jeune soldat aussi effrayé que moi
me fit remonter dans le train avant
que j’aie pu remplir ma gourde au
robinet… La peur et le manque. Le
manque et la peur. Ai-je de bonnes
raisons de penser que ce que j’ai cru
laisser derrière moi là-bas m’est
promis ici, ou n’est-ce que l’effet
d’une vieille hantise? D’une méfiance
pour ainsi dire génétique
Des gens m'ont dit en France, et même des orthodoxes, quand je parlais du Donbass, il y a dix ans, que l'Ukraine ne les intéressait pas, que c'était loin, à cela je vois deux raisons, soit ils ne voulaient pas savoir ce qu'y tramait le patriarche Bartholomée dont ils dépendaient, soit ils ne voulaient pas se donner des angoisses en ouvrant les yeux sur ce qui pouvait arriver. La description que donne Slobodan, c'est exactement ce que j'ai ressenti en URSS, et pourtant, beaucoup de Russes en ont la nostalgie. Et c'est ce que je commence à ressentir en France aujourd'hui.
Et voici ce qu'ajoute Eric Werner dans le même numéro:
Il n’y a rien d’étonnant à ce que le régime occidental défende bec et ongles le régime
policier aujourd’hui installé à Kiev. La sagesse populaire ne dit-elle pas: qui se
ressemble s’assemble? Et n’est-ce pas «notre démocratie comme réalité» que nous
protégeons là-bas?
Un tribunal suisse vient de condamner à une peine de prison ferme un écrivain qui avait tenu des propos «homophobes». Le procureur local s’est félicité
de cette décision en disant que les gens
savaient désormais quelles étaient les
«limites» à ne pas franchir. Etc.
Sauf que le même jour, on apprenait
qu’un enseignant, toujours en Suisse,
venait de se faire licencier en raison de
son «orientation sexuelle». C’était un
excellent enseignant, il faisait très bien
son travail, mais il était homosexuel et
ne s’en cachait pas, ce qui avait déplu
à une partie de la population: je vous
laisse deviner laquelle. En sorte que les
autorités lui ont signifié son congé.
On voit donc à quel point ce régime
est sincère quand il dit qu’il veut
lutter contre les discriminations, les
«discours de haine», etc. En réalité, il
s’en fiche complètement. On voit même
qu’il est le premier à violer ses propres
lois en la matière lorsque la nécessité
s’en fait sentir. Je ne sais pas comment
les autorités ont justifié ce licenciement,
peut-être ont-elles dit qu’il ne fallait
pas se montrer trop strict dans l’application des lois existantes. Là aussi, il y
a certaines limites, etc. De toutes les
manières, comme on le sait, les autorités sont au-dessus des lois. Cela règle le
problème
Ici, c'est Nicolas Bonnal qui en remet une couche. On peut penser qu'il n'est pas du genre optimiste, mais je déconseille néanmoins; à toute personne tentée de le faire; d'assister aux JO.
JO,
attentats, tyrannie et guerre mondiale : Yannick fait le poing et résume
brillamment les étapes de ce qui devrait se passer (évidemment, ils peuvent
reculer, reporter…). Faux drapeau puis vraie folie : Antoine confirme, qui
parle de CENTAINES DE MORTS lors de ces attentats nécessaires mais chéris :
exercices partout en Bourgogne… Allez, tout va bien se passer. On campera à
Moscou en juin : « je défends ma patrie, moi », déclare d’Ukraine au Figaro
pépère un enthousiaste et jeune représentant de « l’Empire des cons » (Philippe
Grasset). Draghi en embuscade pour la tournée générale : vaccin, CBDC, camp
numérique. « Dans le monde réellement renversé » (Debord) le complotiste
devient celui qui dénonce un complot, pas celui qui le commet ; de même le
criminel devient celui qui dénonce un génocide, évidemment pas celui qui le
commet avec l’assentiment de tous leurs parlements. Priez très fort.
Il y a quelque chose de terriblement pathétique dans la façon dont une bande de mafieux psychopathes pousse, avec des ficelles énormes, une fourberie éhontée et des geules de cauchemar façon joker de Batman, des foules apathiques à une guerre dont massivement elles ne veulent pas, qu'elles ne sont d'ailleurs plus en mesure de supporter, après les aventures dans lesquelles on a précédemment précipité leurs ancêtres. Certes, un petit pourcentage de crétins iront peut-être avec enthousiasme participer à un conflit destiné au premier chef à achever les populations européennes qui renâclent, ils n'auront pas volé leur mort stupide, leur suicide téléguidé. Et si le maléfique Glucksmann succède au maléfique Macron, les Français pourront acter qu'ils ne sont plus que les occupants résiduels d'une satrapie, d'un protectorat, dont la purge ethnique n'est qu'une question d'années. Les Russes, eux, quoiqu'on puisse penser de leur gouvernement, savent mieux pourquoi ils se battent: pour leur peau. Ceux qui ne le savent pas sont déjà plus ou moins partis alimenter la propagande de leurs pires ennemis.
Quand on ajoute à cela que Xavier Moreau a vu tous ses comptes fermés, que Christiane Deviers Joncourt est spoliée de sa maison, et autres exemples de brimades révoltantes...
La fête du
printemps avait maintenant vraiment commencé, avec l’herbe tendre et les
jonquilles, la rose de Noël, les branches couvertes de lumineux bourgeons
verts, le vent doux qui flâne et murmure, le soleil qui roule entre les sabots
des nuages échevelés. J'ai même vu, au petit matin, un vol de montgolfières qui soufflaient comme des dragons. Or cette nuit, nous aurons des gelées, et demain huit
degrés... Je suis allée à la liturgie de la Cène, ce matin, à l’église de
Glebovskoïé, à une vingtaine de kilomètres de Pereslavl, en direction de
Moscou. Je vois cette église depuis des années, elle est très harmonieuse,
petite et bleue, mais juste sur la route de Moscou à Arkhanguelsk. Elle a été
dévolue au père Ioann, qui officiait à un moment à la cathédrale, et qui m’a
vivement engagée à venir le voir. J’ai rencontré sur place un couple de Moscou
qui a une datcha dans le coin, et veut m’inviter après Pâques. D’après le père
Ioann, il a peu de paroissiens, les gens du coin ne vont pas à l’église,
beaucoup s’en vont. Il a des moscovites qui viennent pour lui, des enfants spirituels, et aussi
de nouveaux arrivants dans le pays. Son intention est de créer une véritable
communauté de gens qui s’entraident et qui participent à la vie de la paroisse.
Du coup, tout est un peu fait de bric et de broc, là dedans, hétéroclite.
Il m’engage à lui faire des icônes, une de ses paroissiennes a appris
spécialement la technique pour
venir en aide à la communauté.
La liturgie
était longue, parce qu’il officie seul et confesse seul les gens, le jeudi
saint, tout le monde se confesse. Dans la foulée, c’était l’office de l’onction
des malades, que l’on administre pendant le carême, et comme je l’avais manqué
à la cathédrale, j’y ai eu droit chez le père Ioann. Il nous a lu une liste
impressionnante de péchés potentiels, dont certains me paraissaient de vraies
peccadilles, et je restais accablée. Cependant, ensuite, il nous a invités, le
couple de moscovites, une vieille paroissienne, une jeune femme pieuse et moi,
au café local, qui n’avait pas le standing du café moyen de Pereslavl. Et
devant le menu affiché, malgré ma faim, je ne savais que prendre, rien n’était
carémique ! Je le lui ai dit : « Moi, je mangerais bien tout,
mais après la liste de péchés que vous nous avez lue...
- Des pommes
de terre frites et du poisson, ça vous dit ?
- Eh bien,
si vous me donnez votre bénédiction...
- Prenez,
prenez ! Moi, par exemple, je ne fais pas le carême, pour des raisons de
santé.
- Et quand
on est vieux et crevé ?
- Ca peut
vous dispenser aussi ! »
Une fois
assis, il nous a raconté : «Au mont Athos, un higoumène a proposé à ses
moines de la crème glacée en fin de carême. Ceux-ci étaient en état de choc,
comment, de la crème glacée ? Et lui leur a dit : c’est pour que vous
ne vous preniez pas pour des saints, avec votre ascétisme, et que vous n’alliez
pas juger les autres. Si je lis toute cette liste de péchés, c’est que je vois
arriver en confession des gens qui me déclarent : ah moi, je n’ai aucun
péché ! Alors il me faut leur remettre les idées en place. Mais vous, eh bien vous ne pècherez pas par orgueil, du coup: vous avez mangé du poisson un jeudi saint!»
Lui-même fait plutôt ascétique, et très fervent, très impliqué dans sa mission.
Au retour, j’ai
dû dormir, tant j’étais fatiguée, quatre heures d’office, et puis la chute de
la température, les brusques changements climatiques m’épuisent. Du coup, j’ai
lu chez moi les douze évangiles de la Passion, je me sentais incapable de
ressortir. D'un autre côté, j'ai tout compris,
Mes chats
m’ont ramené une grosse couleuvre noire, avec deux taches jaunes de chaque côté
de la tête. Rita aboyait furieusement, et la couleuvre essayait d’intimider les
deux chasseurs, soit Moustachon et Robert. J’ai pris l’animal sur une pelle
pour lui sauver la vie en le transportant ailleurs. Moustachon et Robert
opèrent ensemble, c’est une association de malfaiteurs bien rôdée. Je pense que
c’est d’ailleurs la raison pour laquelle Moustachon a laissé Robert entrer chez
moi. Autrement, il monte une garde impitoyable et vigilante.
Jour de pluie, bien nécessaire, et j'éprouve un plaisir béat à faire la sieste dans la pénombre, en ouvrant les yeux ensuite sur une fenêtre grise où les branches encore noires du poirier sont rongées par les mille reflets blancs des gouttes d'eau qui grouillent sur les vitres. Je regarde avec attendrissement mes bégonias français, celui des Belges et celui d'Elizabeth. Ils ont pris, et comme s'ils étaient investis d'une grâce particulière, poussent joyeusement. Celui des Belges fleurit déjà, celui d'Elizabeth épanouit des feuilles, ces feuilles rondes et vernissées doublées de rouge qui ont quelque chose d'art nouveau, et cela fait des années que je n'en vois plus dans aucun magasin. J'ai vu avec satisfaction sur internet que le saule frisé que j'ai planté pour me cacher la maison et la terrasse du voisin, d'une part se taillait facilement, et d'autre part ne prendrait pas des proportions gigantesques, ce qui lui sauvera peut-être la vie quand j'aurai perdu la mienne.
C'est le samedi de Lazare et il n'y avait pas beaucoup de monde, à l'église, je crois que je ne suis pas la seule à être épuisée par ce carême tardif, les gens qui ont un vrai potager et qui doivent déjà y trimer sans le secours d'une nourriture consistante ont certainement du mal à tout concilier. Quand je suis allée baiser la croix, notre évêque s'est exclamé à ma vue: "Mais quelle jeune fille élégante! Quel style!" Je n'avais, en fait, que des vêtements que je traîne depuis des années, dans le genre sport et décontracté, mais ça fait toujours plaisir, et les autres vieilles sont venues avec attendrissement me parler des compliments de monseigneur! En revanche, comme je discutais avec Antonina juste avant la communion de nos douleurs respectives, le père Andreï nous a demandé avec bonhommie de nous taire, sinon monseigneur allait nous gronder!
J'ai beaucoup aimé l'homélie de notre évêque, j'irai la lire sur la page de l'éparchie, car je n'ai pas tout compris, mais ce qui m'a plu, c'est qu'à propos de la résurrection de Lazare, lui qui est scientifique de formation a fait allusion à la nature des particules dont Dieu est le maître absolu, et qu'il peut combiner et recombiner à sa guise. Or moi qui ne suis pas scientifique du tout, dans une discussion avec le défunt mari de ma cousine qui l'était beaucoup plus que moi, je lui avais dit la même chose, en réponse à ses doutes sur la résurrection: "Lorsque tu meurs, les particules qui te composaient se libèrent, mais elles sont immortelles, qui te dit qu'elles ne peuvent pas te recomposer?" Et j'avais vu qu'il était ébranlé...
Le métropolite Arséni, de la laure de Sviatogorsk, qui m'a toujours fait une grande impression de dignité et de courage, a été arrêté par le pouvoir ukro-otanien pour qui la liquidation de l'orthodoxie est une priorité des premiers jours du maïdan. L'orthodoxie ne peut être tolérée que sous la forme otano compatible du Phanar, ses expressions occidentales authentiques étant vouées à devenir, à mon avis, de plus en plus clandestines. J'ai commandé pour lui quarante jours de prières.
Z.W. m’a envoyé une vidéo d’une jeune Russe qui dit expressément que
Poutine marche pour l’ordre mondial, et me demande ce que j'en pense. En ce qui concerne une partie de ce
qu’elle raconte, il y a matière à se
poser des questions, je m'en suis posée, je m'en pose. Je ne peux avoir qu'un avis personnel, basé sur mon intuition et mon observation de ce qui nous est accessible, de ce que j'ai vu, entendu ou lu. Cependant,elle me semble, par moments, exagérer et
même biaiser, ce qui n’est pas bon signe, ce qui jette, à mes yeux, une ombre sur tout le reste de son discours. Ce qui est sûr, c’est que comprendre
ce qui se passe vraiment ici n’est pas simple et qu’on ne peut se bercer de
l’illusion que Poutine est le sauveur du monde, d’ailleurs, à part Jésus Christ sur
un plan spirituel, personne n'est en mesure de jouer ce rôle. « Ne mettez pas votre
confiance dans les princes et les fils des hommes, en eux il n’est point de
salut ».
Elle remarque qu’il y a un grand contraste entre ce que dit Poutine et ce qu’il fait, et
c’est exact, en tous cas à l’intérieur du pays. Retour aux traditions, mais les
ministères de la culture successifs ne semblent exister que pour permettre
encore plus de destruction du patrimoine et financer des spectacles dégradants
à l’occidentale, au détriment de la qualité et de la production nationale.
Récemment, j’ai appris par Dany qu’un adolescent qui voulait changer de sexe a
été retiré à sa mère qui s’y opposait par les autorités, alors qu’il existe, si
j’ai bien compris, une loi interdisant les interventions médicales en ce sens. Comment
se fait-il ? De même, on va lutter contre l’immigration, mais on construit
à Moscou encore une mosquée géante. Poutine, dit la jeune femme, laisse péricliter
les villages russes faute d’infrastructures minimales, mais installe trente
villages modernes pour des Africains; « c’est comme en France »,
commente la journaliste. Cependant là, je soupçonne qu’il s’agit de villages établis
à l’intention des Afrikanders, qui sont massacrés en Afrique du sud, facilement
assimilables en Russie, travailleurs et entreprenants. Ce n’est pas la première
fois que j’entends parler de cela, et, renseignements pris, il s’agit des
Afrikanders, pour qui c’est pratiquement une question de vie ou de mort, et qui
ne représentent pas un afflux de population colossal. Il n’en reste pas moins
qu’on ne soutient pas vraiment la paysannerie, bien que le retour à la terre ne
soit pas empêché non plus, si l’on ne demande rien à personne et qu’on va s’installer
au fin fond du nord dans un village perdu, alors qu’en France, ce n’est pas
garanti. Un retour aux traditions et à la souveraineté impliquerait la
propagande du retour à la terre et des encouragements à ceux qui l’opèrent,
ainsi qu’une mise en valeur de la culture paysanne. Il y a une complaisance
judiciaire envers les criminels asiates ou caucasiens quand ils agressent des
Russes, cela me semble le fait de la corruption des juges par des bandits de
ces nationalités, et non forcément celui du gouvernement lui-même, mais il est
bien connu que les ramifications de la pègre et de la mafia s’insinuent
partout, ici comme ailleurs. La différence avec la France est que les Russes,
souvent, ne se laissent pas faire, là encore, la résistance locale joue
sûrement son rôle.
Autre point
inquiétant, la soumission au covidocircus, aux mesures, au vaccin, beaucoup
moins tyanniques et prolongées qu’en occident, cependant. La jeune femme
attribue ce fait à la résistance du peuple russe, et elle n’a sans doute pas
tort, je l’ai aussi pensé. Le peuple russe n’a pas bien passé le test d’obéissance
que les Français ont remporté haut la main, dénonçant leurs voisins et traquant
les contrevenants dans l’espace public. Des gens ont été acculés à se faire
vacciner, sous peine de perdre leur travail, dans le meilleur des cas, ils ont
quand même développé des covids, parfois à répétition, pour les autres
conséquences, mystère. On en parle peu. La thèse d’un ami poutiniste français,
c’est que le gouvernement russe ne voulait pas prendre le risque d’une
opposition prématurée et déclarée au système mondialiste. Peut-être. N’empêche
que c’est la principale raison que j’aurais de douter.
La numérisation.
Oui, c’est vrai, cependant, il faut tenir compte du fait que les
gouvernements, quels qu’ils soient, sont obligés de s’aligner sur les avancées
technologiques qu’adoptent leurs concurrents, ennemis ou ennemis potentiels.
Pour l’instant, cela ne prend pas le caractère coercitif et inhumain que cela
prend ailleurs, mais cela peut venir, peut-être est-ce encore la résistance
passive du peuple russe qui joue son rôle.
Le
démolissage du service public, commencé sous Eltsine et poursuivi sous Poutine.
Elle considère que les années quatre-vingt-dix n’étaient pas si horribles que
cela, et que si l’on doit prendre un point de comparaison, il faudrait choisir
les années soixante-dix quand tout allait super bien. mon impression
personnelle est que d’une, les années quatre-vingt-dix étaient vraiment un
désastre qui laisse un très mauvais souvenir à beaucoup. Le comptable du café,
qui a la cinquantaine, me disait qu’on commençait à vivre mieux et qu’on ne
voulait pas tout foutre en l’air pour les petits libéraux de Moscou. Mon voisin
à la radio considère qu’on n’a « jamais mieux vécu ». Et d’autre
part, les deux voyages que j’ai faits en URSS dans les années soixante-dix, qui
plus est à Moscou, et pas en province ou dans les campagnes, ne m’ont vraiment
pas laissé une impression de prospérité merveilleuse et de joie de vivre en
dépit de tout ce que me racontent les Russes maintenant. Je n’envisageais
absolument pas de quitter nos années soixante-dix pour les leurs. La fille du
père Valentin, partie à Paris à la fin des années quatre-vingt-dix, disait à sa
mère communiste : «Le communisme, c’est les Français qui l’ont réalisé, la
médecine et l’éducation sont gratuites, tout le monde reçoit des allocations,
et la vie y est plus douce que chez nous ». Quand au quotidien des
campagnes, il ne semblait pas non plus très riant, je me souviens de ces files
grises de paysans mal fagotés qui venaient acheter à Moscou ce qu’ils ne
trouvaient pas chez eux. Ce que j’ai vu ne correspond pas au mythe...
Enfin elle
évoque l’alcoolisme comme un véritable fléau, et j’observe que les choses ont
beaucoup changé sur ce plan. Dans les années quatre-vingt-dix, tous mes copains
étaient des alcoolos finis, ce n’est plus du tout le cas aujourd’hui, on ne
voit plus d’ivrognes écroulés partout, son affirmation est de l’éxagération
épique. Déjà, en 18, un ami, à Férapontovo, me disait qu’on ne voyait plus d’ivrognes
et que les routes étaient meilleures. Pour les routes, à Pereslavl-Zalesski, on
ne peut pas dire cela, mais disons que les routes fédérales sont en bon état.
La pauvreté,
dont elle trace un tableau épouvantable, et c’est pareil, je ne dis pas que
tout le monde est riche, mais je pense qu’il faut nuancer. Elle le fait en
indiquant que les Russes sont souvent propriétaires de leur appartement, et ne
paient pas de loyer. Et les impôts qu’ils payent dessus sont dérisoires, les
charges, même si elles ont sensiblement augmenté, n’atteignent pas les sommets
fantasmagoriques des charges en France, en relation avec les salaires respectifs.
Il y a de très petits salaires, cependant, mon électricien m’a dit que chez
mosenergo, il touchait 150 000 roubles, soit 1500 euros, il a acheté une
maison à crédit. Et j’ai vu une affiche de recutement pour des chauffeurs
routiers avec une proposition de salaire de 100 000 roubles. A côté de
cela, les postiers d’ici touchent 12 000 roubles, les employés du
supermarché sont recrutés à 25 ou 30 000 roubles, ce qui est loin d’être
royal. Mais je ne suis pas une spécialiste des chiffres et de l’économie. Personne ici, à ma connaissance, ne meurt de faim. Les magasins sont pleins, et l'histoire des appartements gelés, à moins que cela ne se produise et que je ne sois pas au courant, c'était dans les années 90.
La
dépopulation. Eh bien là, je ne la crois pas beaucoup. Elle parle de quatre-vingt-milions
de Russes au lieu de 140 millions, et ne semble pas trop sûre elle-même de
cette différence fantastique entre les chiffres réels et les chiffres officiels.
Ce que j’observe, c’est que la natalité est réellement encouragée par l’attribution
d’un « capital maternel » de 10 000 euros qui permet parfois d’acquérir
une maison ou un appartement, avec un complément personnel, l’attribution d’appartements
communaux à des familles nombreuses, comme ce fut le cas pour un de mes amis, d’aide
alimentaire, aussi, la fille du père Valentin a droit à de nombreux produits
gratuits. Je n’ai pas le sentiment que le gouvernement planifie l’extermination,
ou disons la disparition de sa population. Il est, me semble-t-il, plutôt
économe de la vie des soldats et des civils en Ukraine, Marioupol est
reconstruite en un temps record. C’est vrai que la justice juvénale retire parfois les
enfants aux familles nombreuses pauvres, ce qui est un scandale, la justice
juvénale a été instaurée sous pression occidentale, chez nous, on les retire
aux familles dissidentes, c’est probablement le but occulte de cette
institution.
La démolition
de l’armée. Là non plus, à priori, et sans être spécialiste, au feeling, je ne
pense pas que le gouvernement actuel soit à incriminer, car l’essentiel du
travail avait été fait sous Eltsine, et j’ai même entendu dire que si Poutine n’était
pas intervenu plus tôt, c’est qu’il était occupé à réarmer discrètement, en
tous cas, on voit aujourd’hui qu’il ne fait pas la guerre avec des moteurs de
machine à laver. Depuis le début de l’affaire du Donbass, et même bien avant,
je savais que l’occident ferait tout pour déclencher une guerre avec la Russie,
et Poutine a reculé huit ans devant l’obstacle. Pour réarmer ? Quand l’intervention
a commencé, j’ai pensé qu’il avait fait profil bas le temps de le faire et qu’il
avait été drôlement astucieux...
A ce propos,
elle ne parle pas de ce qui s’est passé au Donbass dès 2014, elle prétend que
les Russes et les Ukrainiens étaient bien copains, qu’ils étaient des frères,
et que les gouvernements occidentaux et russe ont organisé cette guerre, sans
aucune motivation de part et d’autre, faisant peur aux uns avec le désir de
conquête imaginaire de la Russie, aux autres avec les dangers imaginaires de l’OTAN,
et c’est là que je tique vraiment. Parce que moi, depuis des années et des
années, j’ai observé l’atitude agressive et fourbe de l’OTAN envers la Russie, ses
provocations permanentes, la réticence des autorités russes à entrer dans la
danse et même à considérer les occidentaux comme des ennemis, et la tolérance
envers les intellectuels libéraux qui soutenaient la propagande occidentale.
Elle définit l’armée russe comme complètement détruite, avec des armes
rouillées, des types peu mobilisés, on dirait les discours de Van der Layen au
parlement européen. Je sais qu’il y a des disfonctionnements dans l’armée
russe, que les soldats sont obligés de payer des pièces de leur équipement, mais
quand même, question armements, les Russes ne semblent pas à court, ni
fonctionner avec des bouts de fil de fer. Je crois que le danger otanesque est
bien réel et que la plupart des Russes le comprennent bien, et tout le monde a
vu comment cela se passait en Serbie. La population du Donbass, quand elle s’est
mise à résister, prenait des bombes sur la gueule, et subissait des exactions
affreuses. La propagande antirusse menée en Ukraine depuis la chute de l’URSS n’était
pas le fait de Poutine. Et je me souviens avec horreur des commentaires
ukrainiens sur les « doryphores » grillés dans la maison des
syndicats à Odessa, des gâteaux en forme de bébés russes mangés dans les
discothèques, des manifestants criméens accueillis à Kiev à coups de barre de
fer, et autres amabilités des « frères » contre lesquels la jeunesse
russe avertie qui fuyait en Géorgie ou ailleurs ne voulait pas se battre. C’était
un concentré de méchanceté stupide, dans le genre de la télé française ou de
certains intellectuels ou même orthodoxes de chez nous.
Elle parle
du démembrement de la Russie, objectif du projet Harvard de Kissinger, et oui,
c’est clair, ce projet existe, et il est ouvertement soutenu depuis longtemps
par des libéraux russes, Echo Moskvy etc... En effet, si Poutine est
souverainiste, comment tolère-t-il par exemple le centre Eltsine, centre de
propagande pro occidentale et antirusse situé à l’épicentre du projet, la ville
d’Ekaterinbourg ? Comment l’a-t-il laissé construire, comment le
laisse-t-il ouvert, en temps de guerre ? Mikhalkov, qui est un chaud
partisan de Poutine, a consacré toute une émission à cet abcès purulent. D’après
la jeune femme, tout ceci est le fait d’une « secte juive » (à ne pas
confondre avec les juifs normaux et gentils, bien entendu) qui, depuis
New-York, organise tout cela, et Poutine en est membre. A moins que le
métropolite Tikhon, qu’on dit son père spirituel, et le patriarche Cyrille n’en
soient complices, on se demande comment il concilie tout cela avec une foi
orthodoxe affichée, si on en est là, alors cela craint vraiment, tout le monde
aux catacombes... Que des juifs, disons qu’une mafia juive, qu’une secte, chez
nous, on dit les straussiens, soit impliquée dans la destruction de la Russie
par l’Ukraine, et réciproquement, je n’en doute pas tellement, cela remonte à
1917, et même avant, et la preuve en est à mes yeux la haine écumante de la
compagnie BHL, Glucksmann, Ackerman, Nuland, et autres néocons situés dans
divers pays, qui elle non plus ne date pas d’hier et à propos de laquelle
aucune accusation de racisme, pourtant largement justifiée, n’a jamais été proférée. Et puis la mafia
juive n’est pas la seule en cause, il y a d’autres mafias, les intérêts de la
famille Biden, par exemple, Blackrock, Monsanto... Maintenant que toute l’affaire soit une
symphonie à laquelle Poutine participe avec enthousiasme... Mais peut-être ont-ils
des moyens de pression. Je ne saurais le dire. Disons que je sais pour qui se
battent les Ukrainiens, qu’ils le sachent ou non : pour eux. Les Russes se
battent pour la Russie et le savent, même si l’on admet que ce n’est pas
forcément tout à fait le cas de leur gouvernement.
Est-ce ou n’est-ce
pas le cas ? Moi, à l’intuition, je dirais que la guerre est réelle entre
le gouvernement russe et les gouvernements occidentaux. Le gouvernement russe
défend-il sa terre et son peuple ou bien son fief mafieux ? Peut-être les
deux. Peut-être son cul d’abord et le peuple ensuite. Et puis parfois, les
affaires n’empêchent pas les sentiments... En tous cas, si la moitié de ce que
déclare cette jeune femme est vrai, Poutine est bien meilleur comédien que Macron.
La jeune femme dit que 30% des Russes soutiennent Poutine, en réalité.
Peut-être que s’il laissait émerger des opposants sérieux, ses scores ne
seraient pas les mêmes, mais je pense qu’il bénéficie d’un soutien populaire
suffisemment large, surtout en ce moment, évidemment.
Pour ce qui
est de la médecine, je ne la contredirai pas, c’est plutôt la cata. « En
Union Soviétique, tout était gratuit ». Oui, mais j’ai entendu raconter
aussi des horreurs sur la médecine soviétique, et du reste, j’ai été soignée
gratuitement, à Pereslavl-Zalesski, je ne faisais pas une confiance aveugle au
personnel, mais c’était gratuit. Que ce soit ici ou chez nous, en effet, la
privatisation de la santé publique démolit complètement la qualité des soins,
mais il y a du blé à faire, et des requins à l’oeuvre, pas besoin d'inviter une secte juive à la curée.
Auparavant,
j’ai écouté l’interview du père Tkatchev où il recommande aux orthodoxes
ukrainiens de fuir Sodome sans se retourner. Il dit que l’ethnos n’a plus le
même sens qu’avant, parce que tous les ethnos ont été cassés. On avait fait l’expérience
de créer l’inimitié entre deux peuples frères, les Ukrainiens et les Russes,
qui appartiennent absolument au même ethnos, beaucoup plus qu’un breton et un
basque ou un provençal, par exemple, avec la même culture, la même histoire et
la même foi, et qu’on y était arrivé. Le peuple russe avait une grande homogénéité, il s'apparentait à une espèce de famille mystique, d'où le désarroi de Napoléon qu'on sent si bien dans Guerre et Paix, devant ce phénomène incompréhensible, le peuple qu'il pensait délivrer de la tyrannie et qui se levait contre lui comme un seul homme, et cela, un siècle seulement avant la révolution d'octobre et la guerre civile. On arrive à tout avec une rééducation qui
joue sur les mauvais sentiments, comme on l’a déjà vu au XX° siècle. C’est très
triste, dit-il, mais c’est comme ça. Et la Laure de Kiev ? Ses reliques
profanées, ses objets saints dispersés à l’encan dans une Europe apostate et sacrilège? Eh bien tant pis pour la Laure de Kiev, son
sort démontre d’autant plus la nécessité de partir sans se retourner. Je me suis
fait la même réflexion, quand je suis partie moi-même, au fond. Sans se
retourner, c’est le plus difficile... Autant pour la Laure de Kiev que pour Notre-Dame,
la France de mon enfance ou le monastère de Solan. Mais quand j’ai vu que
Macron avait reçu Bartholomée à l'Elysée, ce fut comme la revendication du crime qui s’affichait
avec insolence, sa signature affichée: en effet, il fallait partir, je n'en doute pas. Et il ne faut plus se retourner.
Que la thèse de la jeune Russe soit ou non exacte. Je fais confiance au père
Tkatchev. Il a vu ce qui se passait là bas, il en vient. Il est parfois un peu
raide, mais au moment du covidocircus, il n’avait pas peur d'exprimer la vérité. Il
dit qu’un noir orthodoxe lui est plus proche qu’un Russe renégat, et que les
gens vont désormais se regrouper par affinités spirituelles, morales,
intellectuelles, éthiques. C'est ce que je ressens quand j'écoute Youssef Hindi, par exemple, et je le ressentais à Solan, où les gens sont d'origine très diverse. Et c’est probablement ce qui s’esquisse dans le
mouvement des étrangers occidentaux vers la Russie et son orthodoxie. Le père Tkatchev évoque la responsabilité collective de Dostoievski, qui nous fait assumer à tous le péché d'un seul, et qui fait du salut d'un seul le salut de tous, cette révélation qui m'a fait découvrir le christianisme, à l'âge de quinze ans. C'est de cela qu'il faut se souvenir, devant ce qui nous arrive.
Si j'étais plus jeune, je songerais à l'issue de mon roman Epitaphe. Pas pour des raisons de survivalisme, mais pour vivre debout encore quelques temps.
Je commence à sentir le poids de la vieillesse, je
suis vite fatiguée, je suis percluse de douleurs, il faut dire que le carême
n’arrange rien. Je le fais à contre-coeur, et je ne lis pas les kilomètres de
prières que je lisais les autres années. J’ai même du mal à aller aux offices. Samedi matin, sachant qu’il serait interminable, je n’ai pas pu me décider à m’y
rendre. Le jeune prêtre qui m'a confessée hier m'a dit que j'avais peut-être, comme disait Raymond Devos, une "crise de foi". De foi, je ne sais pas, peut-être une overdose de bondieuseries, cela m'arrive, par moments. Le père Andreï m'a appelée pour me remonter le moral et m'engager à regarder un film soviétique sur mère Marie Skobtsov, "mère Marie". Un bon film, orienté, naturellement. La mère Marie est uen femme très bien, qui s'est égarée dans la religion, la pauvre, mais elle aurait fait une bonne communiste, et au moment de se sacrifier, dans son camp de concentration, incrimine Dieu et son injustice, elle a comme un doute, "Eli, Eli, lama sabactani". Comme si du point de vue communiste, pour mourir sauvée, il lui fallait douter du Dieu chrétien. Mais du point de vue communiste, c'est dans le néant total, qu'elle se précipite héroïquement, et si Dieu a fait un monde si affreux, comment croire aux lendemains qui chantent? Et si chantent ces lendemains, quelle importance a une vie dont tous les élans sublimes aboutissent dans un sac noir?
En tous cas, pour me remonter le moral en ce moment, un film sur l'occupation allemande, ce n'est pas vraiment le bon truc, étant donné le contexte. Heureusement, le printemps est enfin là, le vent tiède et rêveur, la danse du soleil avec les nuages, le semis verdâtre des bourgeons sur les branchages, les petits oiseaux affairés, les chats qui se prélassent. Et le voisin ne met pas sa radio depuis déjà deux jours, c'est un miracle, j'ai prié pour. Peut-être qu'il a eu des réflexions d'un autre voisin...
J'ai trouvé, sur une page intelligente, cette citation qui m'a intéressée:
"Quand je suggère qu'il faudrait réduire à quatre le nombre d'heures de travail, je ne veux pas laisser entendre qu'il faille dissiper en pure frivolité tout le temps qui reste. Je veux dire qu'en travaillant quatre heures par jour, un homme devrait avoir droit aux choses qui sont essentielles pour vivre dans un minimum de confort, et qu'il devrait pouvoir disposer du reste de son temps comme bon lui semble. Dans un tel système social, il est indispensable que l'éducation soit poussée beaucoup plus loin qu'elle ne l'est actuellement pour la plupart des gens, et qu'elle vise, en partie, à développer des goûts qui puissent permettre à l'individu d'occuper ses loisirs intelligemment. Je ne pense pas principalement aux choses dites « pour intellos ». Les danses paysannes, par exemple, ont disparu, sauf au fin fond des campagnes, mais les impulsions qui ont commandé à leur développement doivent toujours exister dans la nature humaine. Les plaisirs des populations urbaines sont devenus essentiellement passifs : aller au cinéma, assisté à des matchs de football, écouter la radio, etc. Cela tient au fait que leurs énergies actives sont complètement accaparées par le travail ; si ces populations avaient davantage de loisir, elles recommenceraient à goûter des plaisirs auxquels elles prenaient jadis une part active."
"Éloge de l'oisiveté" Bertrand Russell
D'abord, elle me confirme, contrairement à ce que proclament avec des sarcasmes haineux les commentaires sous les vidéos de retour à la nature, à la vie paysanne et au folklore, que les gens opprimés des périodes obscures avaient le temps. On ne décore pas sa maison, et le moindre de ses instruments de travail faits main, et ses costumes de fête, on ne chante pas, on ne danse pas, on ne joue pas d'instruments, on ne mémorise pas chansons, épopées et contes, quand on n'a pas de temps pour cela. Et pas d'élan, pas d'inspiration, pas de vie en soi. Bien entendu que tout cela est une escroquerie, c'est ce qui rend ces commentaires si agressifs. Ces gens ne supportent pas l'idée qu'au lieu de s'être "élevés socialement", ils ont déchu comme jamais, et vivent une existence de merde, ils ont besoin de penser, pour justifier leur condition, que leurs ancêtres vivaient comme des porcs exploités sous la schlague, dans la boue, en émettant tout au plus des grognements, avant que des philanthropes vinssent leur apporter les lumières du Progrès.
La solution est-elle de travailler moins, je n'en suis pas sûre, il faut d'abord travailler autrement, en accord avec les rythmes de la vie, et les siens propres, revenir à un travail indépendant, qui a du sens. L'impulsion subsiste certainement chez pas mal de gens, elle connaît des résurgences génétiques, le problème est que déjà plusieurs générations ont grandi sans aucune transmission, et dans le meilleur des cas, les gens vont faire des merdes de mauvais goût dans les maisons de la culture, ils ne savent pas vers quoi se tourner, et ne sont plus équipés pour créer quelque chose de beau, c'est-à-dire d'authentique, tellement on leur a pourri la vision et l'audition dès la petite enfance, et souvent avec l'académisme, qui a seul droit de cité aux yeux des profs. Je vois parfois même des folkloristes qui, en, dehors de leur domaine, raffolent de kitscheries qui me font froid dans le dos. Une spécialiste du flolklore s'enthousiasme, sur les réseaux, pour une espèce de porcelaine effrayante, un éléphant avec des défenses de sanglier couvert de fleurettes et de dorures et un regard obscène, que je ne supporterais jamais chez moi. D'autres, revenus à la terre, se bâtissent une baraque affreuse du genre qui me fait cuire les yeux partout alentour. Le mal est profond...
"Epitaphe" est sorti en russe, la couverture me plaît beaucoup. Et puis mon éditrice est normale, intelligente, profonde, honnête. C'est bien reposant. J'ai offert un exemplaire à Katia, qui va lire des extraits à la présentation. Je le lui ai dédicacé ainsi: "à ma chère Katia, la panthère rose de notre arche russe." Elle en était ravie!
côté face le cimetière de Cavillargues, côté pile, le ponton des Messerer, près de Ferapontovo
panthère rose...
Il y a
quelques temps, deux créatures des ténèbres, habillées en bigotes, ont apporté dans une église
une icône piégée. J’ai vu aussi, mais la nouvelle m’a échappée avant que je ne
l’eusse répercutée, qu’à la Laure de Kiev, on effectuait le tri entre les
reliques de saints « ukrainiens » purs et homologués, et les reliques
de saints russes, on va faire quoi de ces dernières? Abomination de la désolation... Le père Tkatchev a déclaré que l'Eglise orthodoxe ukrainienne n'avait pas su conserver la Laure, et que c'était irréparable, il incite les orthodoxes à fuir en Russie. Un article d’Igor Drouz envisage la prochaine interdiction
de l’Eglise russe en Europe, sa mise au ban de la société, et Bartholomée en
profite pour installer les bases de l’intégration de son orthodoxie oecuménique
et LGBT compatible dans la « Religion du futur », à l’usage des niais
et des dupes. C’est là que je suis contente d’être ici. Tout ceci me serait complètement insupportable, à la
longue. Je ne me vois pas aller confesser mes péchés à quelqu’un qui prend les
vessies pour des lanternes, quelle que soit la qualité de sa vie intérieure et
de sa personne par ailleurs.
On a vraiment l’impression que le projet Ukraine nous
concerne tous, c’est le laboratoire de notre futur auquel il serait temps de
dire non en bloc. Le machin autocéphale anti russe et uniate va s’étaler comme
une flaque d’huile; difficile de ne pas y tremper les pieds. Les croyants qui n’accepteront pas, comme en Ukraine, l’orthodoxie made in USA, seront poursuivis et persécutés.
Dany me
disait qu’après avoir sacrifié notre roi et notre tsar, on sacrifiait nos
peuples, et c’est exactement cela. On associe souvent la révolution aux aristocrates français guillotinés, aux aristocrates russes assassinés, déportés
ou exilés, mais c’est le peuple qui a payé le plus lourd tribut. 800 000
vendéens, liquidés de façon impitoyable et atroce, et en Russie, toutes les
horreurs de la collectivisation, après celles de la guerre civile... En réalité, l’Europe a été assassinée par sa
caste intellectuelle bourgeoise révolutionnaire qui dans tous les pays qui la
composent, déteste les petites gens, et particulièrement la paysannerie. Ceux
qui participent à cela contribuent à notre suicide. Nicolas Bonnal cite à ce
propos Dostoievski, en visite à Londres et Paris, et le compare à Jack London,
dont les terribles descriptions des bas-fonds de Londres concurrencent les
descriptions du goulag par Soljénitsyne. On dit que Dostoievski était un esprit
prophétique, il l’était dans une certaine mesure, mais je me rends compte que
tout était déjà installé pour nous fabriquer la science-fiction où nous sommes,
il savait seulement réunir les pièces du puzzle pour voir quel tableau il
composait... Il y a des gens qui sont capables de prendre le recul et la hauteur nécessaires à la lecture des signes.
Le petit cochon ébahi devant le massacre de son troupeau, sur la
vidéo que j’ai produite de l'action mafieuse et vile entreprise contre son éleveur, me poursuit et me rappelle un gamin palestinien ensanglanté
et abasourdi, errant parmi plusieurs personnes blessées et tuées, ou le petit Russe du Donbass titubant dans les ruines de sa maison, avec un regard d'adulte dans une figure de bébé. C’est que les crimes
commis le sont contre toute la vie. De la même façon que les colons américains entassaient
avec fierté les crânes des bisons qu’ils exterminaient pour affamer les
indiens. La barbarie, la fourberie et l’ignominie, lorsqu’elles passent toutes
les bornes, appellent le châtiment, la justice de Dieu ou la justice immanente,
comme vous voudrez. La vie recrachera les grands bandits au pouvoir depuis trop
longtemps, comme un noyau indigeste ou une boisson toxique. Ils couleront d’elle
comme le pus d’un furoncle. J'espère vivre assez longtemps pour voir, depuis le temps que je suis assise au bord de l'oued, passer dans ses eaux les cadavres de nos ennemis.