Voyage éclair à Moscou, toujours pour affaires. Je suis partie à travers une tempête de neige, on ne voyait rien, juste des ombres d'arbres et des phares pris dans une blancheur tourbillonnante, qui diffère du brouillard en cela que tout bouge, et que des draperies courent devant la voiture, comme si elle chassait devant elle des nuées de fantômes . Mais dans la journée, plus quatre degrés, et c'est reparti pour une dizaine de jours de moins un plus un, avec toutes les misères qui en découlent, toute cette neige fond, et va geler, dégeler, regeler. Nous avons un hiver gris, mou, lépreux et mouillé.
Au moment de reprendre le bus, le contrôleur qui examine mon passeport me dit avec un air ravi: "Laurence Guillon... On dirait un nom d'actrice!" J'ai dormi tout le long du trajet, car mon sommeil nocturne est très perturbé par mes douleurs au genou. Quand je suis arrivée aujourd'hui par le bus, depuis la rangée de taxis à l'affût près de la gare routière, une voix sonore me hèle de loin: "Neglinny pereoulok 3!! En avant, par ici! Venez ma chère!"
En chemin, nous commentons la météo. "Mais qu'est-ce qui vous a amenée ici, ma pauvre! s'exclame le joyeux taxi. Quel endroit pour passer votre retraite! Vous n'auriez pas pu choisir la Crimée? Et au fait, d'où venez-vous?
- De France.
- De France? Ouah ahha ah! Pas possible? Mais enfin, quelle idée? Et Neglinny pereoulok, en plus! Ah vous avez fait fort!
- Vous n'aimez pas Neglinny pereoulok?
- C'est un marécage!
- En effet, et je le regrette, je préfère les hauteurs ventées, mais la maison est finalement très bien, le coin tranquille et les voisins gentils.
- C'est déjà quelque chose, et ce qu'il vous faut faire, c'est une mare. Vous demandez à votre voisin dont je vois la pelleteuse, et vous faites épandre la terre retirée, ça va vous remonter tout ça, et vous verrez, après plus de problèmes.
- Je l'envisage, et un ami me l'avait conseillé, d'ailleurs."
Le joyeux taxi me laisse sa carte. "Je m'appelle Ivan, si vous avez besoin de moi, comment cela se dit, en français?
- Jean."
Il répète "Jean" plusieurs fois, tout content, comme s'il essayait un vêtement neuf.
Rosie m'accueille, trempée comme une soupe. Les animaux sont contents de me revoir, mais je ne sens plus aucun traumatisme, ils savent que de temps en temps, je pars un jour ou deux. Et que je reviens.
L'acquisition d'une voiture se profile. J'en aurais bien besoin. Mais l'achat m'intimide. Pourtant, que de possibilités cela m'ouvrirait... Tous les endroits enchantés qui ne sont pas accessibles autrement, à commencer par Pogost Krest, ses moines et son higoumène.
Au moment de reprendre le bus, le contrôleur qui examine mon passeport me dit avec un air ravi: "Laurence Guillon... On dirait un nom d'actrice!" J'ai dormi tout le long du trajet, car mon sommeil nocturne est très perturbé par mes douleurs au genou. Quand je suis arrivée aujourd'hui par le bus, depuis la rangée de taxis à l'affût près de la gare routière, une voix sonore me hèle de loin: "Neglinny pereoulok 3!! En avant, par ici! Venez ma chère!"
En chemin, nous commentons la météo. "Mais qu'est-ce qui vous a amenée ici, ma pauvre! s'exclame le joyeux taxi. Quel endroit pour passer votre retraite! Vous n'auriez pas pu choisir la Crimée? Et au fait, d'où venez-vous?
- De France.
- De France? Ouah ahha ah! Pas possible? Mais enfin, quelle idée? Et Neglinny pereoulok, en plus! Ah vous avez fait fort!
- Vous n'aimez pas Neglinny pereoulok?
- C'est un marécage!
- En effet, et je le regrette, je préfère les hauteurs ventées, mais la maison est finalement très bien, le coin tranquille et les voisins gentils.
- C'est déjà quelque chose, et ce qu'il vous faut faire, c'est une mare. Vous demandez à votre voisin dont je vois la pelleteuse, et vous faites épandre la terre retirée, ça va vous remonter tout ça, et vous verrez, après plus de problèmes.
- Je l'envisage, et un ami me l'avait conseillé, d'ailleurs."
Le joyeux taxi me laisse sa carte. "Je m'appelle Ivan, si vous avez besoin de moi, comment cela se dit, en français?
- Jean."
Il répète "Jean" plusieurs fois, tout content, comme s'il essayait un vêtement neuf.
Rosie m'accueille, trempée comme une soupe. Les animaux sont contents de me revoir, mais je ne sens plus aucun traumatisme, ils savent que de temps en temps, je pars un jour ou deux. Et que je reviens.
L'acquisition d'une voiture se profile. J'en aurais bien besoin. Mais l'achat m'intimide. Pourtant, que de possibilités cela m'ouvrirait... Tous les endroits enchantés qui ne sont pas accessibles autrement, à commencer par Pogost Krest, ses moines et son higoumène.
Le monastère de la Croix Vivifiante à Pogost Krest
"Il répète "Jean" plusieurs fois, tout content, comme s'il essayait un vêtement neuf."
RépondreSupprimerC'est toujours savoureux de vous lire Laurence !
))))
SupprimerGrâce à vous, nous faisons connaissance avec votre sympathique conducteur de taxi ! Merci pour cet aperçu d'un instant de votre vie quotidienne, ainsi que pour le vidéo du monastère. C'est grâce à vous que j'ai découvert l'existence de la Croix Vivifiante, qui est parvenue à traverser les convulsions du vingtième siècle. - À l'instant même où je vous écris, chez nous, au nord du Québec, il fait -30 degrés. Il est vrai que nous éprouvons des froids exceptionnels, mais il me semble que notre paysage est remarquablement semblable au vôtre : hivernal, austère, mais il a sa beauté. - Vous avez une bonne plume ! Nous vous lisons avec grand intérêt, et un réel plaisir. Votre futur roman sur Ivan le Terrible sera-t-il en Russe ou en Français ? Mes amicales pensées vous accompagnent, en ce début d'année 2018.
RépondreSupprimerJe ne suis jamais allée au Canada, mais je crois que la nature est assez semblable. quand il y a un minimum de lumière, le paysage peut être très beau! Mon livre est écrit en français, mais j'aimerais le publier en traduction russe, l'un n'empêchant pas l'autre.
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