Le mois de mars, en Russie, c'est le printemps. En France, on appellerait cela un hiver rigoureux, mais par rapport à l'hiver précédent, cet hiver du mois de mars manifeste des différences. D'abord, les arbres commencent à avoir des bourgeons, les chatons de saule gonflent et deviennent soyeux. Et puis il y a des dégels, et des regels, ce matin, j'ai dû me battre avec mon portail, le cadenas est souvent gelé, parfois une des portes prise dans la glace ne peut plus s'ouvrir, et pourtant j'avais nettoyé la veille. J'ai dû faire chauffer de l'eau. Et je suis arrivée en retard à l'église.
On assiste à des espèces de giboulées. Tempête de neige, puis soudain soleil, puis à nouveau tempête de neige, puis soleil, à travers des nuages crispés, où l'argent brillant se mêle au velours sombre.
C'était le dimanche du Jugement Dernier, et c'est le père Constantin qui a fait l'homélie. Il a rappelé que le seul péché qui nous vaudrait des problèmes au Jugement Dernier, c'était l'absence de miséricorde, l'absence d'empathie, et c'est vrai que dans l'évangile concerné, on ne parle de rien d'autre: l'enfer est pour les cœurs endurcis. Parce que dans un coeur endurci, il n'y a pas de place pour l'Amour, cet Amour qui est aux uns insupportable brûlure, aux autres illumination et béatitude.
Parallèlement, j'observe que dans ces derniers temps que semblent être les nôtres, l'endurcissement du cœur et le manque d'empathie, remplacés au gré des intérêts politiques et financiers par une pleurnicherie hypocrite sur commande réservée aux victimes convenables et rentables, réelles ou fabriquées, sont devenus tout à fait à la mode, on peut dire qu'on fait tout pour les cultiver. "Vous n'aviez qu'à travailler plus!" lance notre président à une retraitée qui touche 500 euros par mois et a peut être marné toute sa vie comme une brute dans sa ferme ou son magasin, car c'est à peu près ce que touche un paysan ou un commerçant, ou un artisan. "C'est bien fait pour eux, ce sont des feignants et des minables!" s'écrient tous les bobos devant les gilets jaunes malmenés, éborgnés, mutilés. Un huissier, en Allemagne, saisit le chien de la famille et le vend sur e-bay. Dans une manifestation féministe en Amérique, une petite fille piétine un poupon, pour montrer, sans doute bien conditionnée par sa mère, à quel point elle est peu disposée à jouer le rôle de la maman pleine d'abnégation. Il n'y a pas de raison. On ne va pas se laisser empoisonner la vie par des chiards. Ou par des vieux. L'avortement, l'euthanasie. Poussez-vous de là, ceux qui gênent...
L'idéal de la femme prôné par les médias, les séries, le cinéma, c'est la carriériste, la mégère, la brute, comme on en voit justement parmi les CRS, prêtes à tirer des flash balls dans l'oeil de gamines de vingt ans qui en restent mutilées et défigurées à vie...
L'idéal de l'homme, c'est le cyborg en costar qui se croit plus intelligent que n'importe qui et qui est prêt à écraser tout ce qui se met en travers du chemin de la mafia qu'il sert, et de son idéologie démoniaque.
Dostoïevski avait raison de s'écrier: "Si Dieu n'existe pas, tout est permis!"
Pour moi, l'idéal de la femme reste ma mère qui ne vivait que pour les siens, celui de l'homme mon beau-père paysan, qui a soigné comme son propre père mon grand-père qui le détestait et le méprisait. Au fond, croyants ni l'un ni l'autre, ils restaient pétris de vertus évangéliques. C'était comme cela qu'on les avait élevés.
Le père Constantin rappelait que ce dimanche dernier était précédé du dimanche du fils prodigue, où, contre toutes les convenances de la société patriarcale de l'époque, le père offensé ne cesse d'attendre le retour du vaurien familial et se jette à sa rencontre en courant comme un gamin. Et auparavant, de celui du pharisien et du publicain, où la canaille méprisée de tous mais profondément repentante, repart justifiée, tandis que le juste content de lui ne rencontre pas le Dieu qu'il prétend honorer. Et avant cela encore du dimanche de Zacchée, ou une autre canaille toute aussi méprisée monte sur un arbre sans se soucier des moqueries suscitées, pour apercevoir le Sauveur dont il est profondément indigne, mais parce qu'il manifeste le besoin qu'il avait de lui, celui-ci répond à son attente, et va dîner chez lui...
Je me demandais où je me situais, certainement pas parmi les justes, pas chez les canailles méprisées non plus, ni même parmi les prostituées repenties. Capable d'une certaine empathie, mais pas d'une abnégation évangélique, même pas comparable à ma mère incroyante. Rien de bien glorieux. Mais le sens du beau et du bien en moi est perpétuellement heurté et révolté par ce qui se passe dans cette bacchanale sinistre et hideuse de la modernité, cela prouve au moins que mon cœur est toujours là, qu'il n'a pas tourné au cuir racorni ou à l'éponge de fiel... Le père Barsanuphe me disait lui aussi toujours que la pire des choses, la plus irrémédiable, c'était l'endurcissement du cœur.
On assiste à des espèces de giboulées. Tempête de neige, puis soudain soleil, puis à nouveau tempête de neige, puis soleil, à travers des nuages crispés, où l'argent brillant se mêle au velours sombre.
C'était le dimanche du Jugement Dernier, et c'est le père Constantin qui a fait l'homélie. Il a rappelé que le seul péché qui nous vaudrait des problèmes au Jugement Dernier, c'était l'absence de miséricorde, l'absence d'empathie, et c'est vrai que dans l'évangile concerné, on ne parle de rien d'autre: l'enfer est pour les cœurs endurcis. Parce que dans un coeur endurci, il n'y a pas de place pour l'Amour, cet Amour qui est aux uns insupportable brûlure, aux autres illumination et béatitude.
Parallèlement, j'observe que dans ces derniers temps que semblent être les nôtres, l'endurcissement du cœur et le manque d'empathie, remplacés au gré des intérêts politiques et financiers par une pleurnicherie hypocrite sur commande réservée aux victimes convenables et rentables, réelles ou fabriquées, sont devenus tout à fait à la mode, on peut dire qu'on fait tout pour les cultiver. "Vous n'aviez qu'à travailler plus!" lance notre président à une retraitée qui touche 500 euros par mois et a peut être marné toute sa vie comme une brute dans sa ferme ou son magasin, car c'est à peu près ce que touche un paysan ou un commerçant, ou un artisan. "C'est bien fait pour eux, ce sont des feignants et des minables!" s'écrient tous les bobos devant les gilets jaunes malmenés, éborgnés, mutilés. Un huissier, en Allemagne, saisit le chien de la famille et le vend sur e-bay. Dans une manifestation féministe en Amérique, une petite fille piétine un poupon, pour montrer, sans doute bien conditionnée par sa mère, à quel point elle est peu disposée à jouer le rôle de la maman pleine d'abnégation. Il n'y a pas de raison. On ne va pas se laisser empoisonner la vie par des chiards. Ou par des vieux. L'avortement, l'euthanasie. Poussez-vous de là, ceux qui gênent...
L'idéal de la femme prôné par les médias, les séries, le cinéma, c'est la carriériste, la mégère, la brute, comme on en voit justement parmi les CRS, prêtes à tirer des flash balls dans l'oeil de gamines de vingt ans qui en restent mutilées et défigurées à vie...
L'idéal de l'homme, c'est le cyborg en costar qui se croit plus intelligent que n'importe qui et qui est prêt à écraser tout ce qui se met en travers du chemin de la mafia qu'il sert, et de son idéologie démoniaque.
Dostoïevski avait raison de s'écrier: "Si Dieu n'existe pas, tout est permis!"
Pour moi, l'idéal de la femme reste ma mère qui ne vivait que pour les siens, celui de l'homme mon beau-père paysan, qui a soigné comme son propre père mon grand-père qui le détestait et le méprisait. Au fond, croyants ni l'un ni l'autre, ils restaient pétris de vertus évangéliques. C'était comme cela qu'on les avait élevés.
Le père Constantin rappelait que ce dimanche dernier était précédé du dimanche du fils prodigue, où, contre toutes les convenances de la société patriarcale de l'époque, le père offensé ne cesse d'attendre le retour du vaurien familial et se jette à sa rencontre en courant comme un gamin. Et auparavant, de celui du pharisien et du publicain, où la canaille méprisée de tous mais profondément repentante, repart justifiée, tandis que le juste content de lui ne rencontre pas le Dieu qu'il prétend honorer. Et avant cela encore du dimanche de Zacchée, ou une autre canaille toute aussi méprisée monte sur un arbre sans se soucier des moqueries suscitées, pour apercevoir le Sauveur dont il est profondément indigne, mais parce qu'il manifeste le besoin qu'il avait de lui, celui-ci répond à son attente, et va dîner chez lui...
Je me demandais où je me situais, certainement pas parmi les justes, pas chez les canailles méprisées non plus, ni même parmi les prostituées repenties. Capable d'une certaine empathie, mais pas d'une abnégation évangélique, même pas comparable à ma mère incroyante. Rien de bien glorieux. Mais le sens du beau et du bien en moi est perpétuellement heurté et révolté par ce qui se passe dans cette bacchanale sinistre et hideuse de la modernité, cela prouve au moins que mon cœur est toujours là, qu'il n'a pas tourné au cuir racorni ou à l'éponge de fiel... Le père Barsanuphe me disait lui aussi toujours que la pire des choses, la plus irrémédiable, c'était l'endurcissement du cœur.