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mercredi 13 juin 2018

Jour polaire

Ayant bu trop de thé avec Xioucha, je n'ai pas pu m'endormir avant trois heures du matin, ce qui m'a permis de constater que l'aube pointait déjà à deux heures: il y a bien déjà un net phénomène de nuit polaire et de jour polaire à Pereslavl.
2 heures du matin



Je suis complètement vaseuse, et pourtant, on ne peut pas dire que j'ai fait l'hôtesse empressée, c'est plutôt Xioucha et son Igor qui m'ont aidée à résoudre toutes sortes de problèmes. Je suis devenue pathologiquement incapable d'affronter les ennuis quotidiens.
Mon jardin réclame mon attention, et je n'arrive pas à faire face, il faut que je trouve une organisation qui limite mes interventions au minimum, soit des arbustes à fleurs, des fleurs grandes et solides, qui font de grosses touffes, poussent toutes seules et limitent les zones de tonte et de désherbage: astilbes, hémérocalles, roses trémières, fougères, hostas, iris d'eau, lupins, hortensias, spirées...
J'ai vu ce matin que les baies des chèvrefeuilles comestibles étaient mûres. C'est un délicieux petit fruit acidulé. Mes chèvrefeuilles comestibles sont encore très petits. Ils sont commercialisés maintenant par le catalogue français Briand sous le nom de baies de mai. Ils ne supportent ni la sécheresse ni le mistral, j'avais essayé à Pierrelatte.
la palissade est entièrement bleue

les lupins

hosta


Des fleurs comme cela fleurissaient chez maman, mais beaucoup plus tôt.

La baie de mai ou chèvrefeuille comestible

J'ai attaqué le livre du père Valentin "Ivan le Terrible comme type religieux". C’est un thème intéressant, car en effet, la coexistence chez le tsar de ses traits de caractère bien connus avec un sentiment religieux réel mérite réflexion... L’auteur ne trouve pas à Ivan l’excuse de l’enfance martyre et dit qu’il est le seul à l'évoquer vraiment, qu’il a bénéficié d’un entourage aimant jusqu’à huit ans, que sa personnalité était formée et que son problème était plutôt l’absence totale d’éducation, la permissivité complète, mises à part les obligations de passer des heures en réceptions et rituels qui évidemment n’étaient pas de son âge, les mauvaises fréquentations, les gens qui l’encourageaient dans ses travers, et qu’aucun boïar n’aurait songé à le renverser ou à le tuer, que les luttes politiques concernaient la régence et la prééminence auprès de lui. Il le représente comme un vrai petit con cruel et débauché de la jeunesse dorée jusqu’à l’incendie de Moscou et la révolte qui l’a suivi, événements qui ont produit sur lui une sorte de révélation mystique. Je dois dire que les informations sur ce personnage sont si contradictoires qu’on s’y perd un peu. D’Anastassia, il dit qu’elle était extrêmement pieuse et entièrement soumise à lui, ce qui lui convenait très bien et explique pourquoi il en avait gardé le souvenir du seul amour de sa vie. Il ne croit pas que son veuvage ait joué un rôle clé dans la modification de son règne. Cependant, à travers les témoignages des étrangers, on a du tsar avec Anastassia une image presque idéale, et après Anastassia, apparaît le sombre tyran. Je penche plutôt pour ma version d'Anastassia qui était sans nul doute pieuse, et soumise, mais aussi intelligente, forte et équilibrante. 
Dans sa chronologie de la vie d’Ivan, il fait mourir Fédia avant Novgorod. Ailleurs, je crois chez Catherine Durand-Cheynet, il tombait en disgrâce après Novgorod. Et je me souviens que sa fin n’était pas claire : éxécuté après la décapitation de son père ou envoyé avec sa famille à Kirillobelozersk où il serait mort quelques années plus tard, de maladie.
Je crois que l’auteur veut s’élever contre la tendance de certains patriotes orthodoxes russes à canoniser le tsar, et il publie en fin de livre une lettre du patriarche Alexis qui va dans le même sens. Je partage ce point de vue, tout ce que j’ai lu de contradictoire ne permet pas de penser raisonnablement qu’il ait été un souverain idéal et encore moins un saint… Et l’on a beau dire que les étrangers le calomnient, sans doute ne comprennent-ils pas la Russie, la religion orthodoxe, les Polonais méprisent l'une et l'autre, certains passages sonnent pourtant vrai, et certains témoins ne me semblent pas faux. Ils ne font en tous cas pas de propagande, à une époque où la presse, Dieu merci, n’existait pas. Ils racontent ce qu’ils voient, rapportent ce qu’ils entendent, à travers leurs préjugés naturellement, et en fonction de leur auditoire. Mais je lui voyais une sorte de fragilité secrète ulcérée, et cela n’est pas le point de vue de ce livre. A vrai dire moi-même je n’en suis pas sûre. Ses lettres donnent l’impression d’un homme sombre, sarcastique, pas spécialement fragile,  sauf quand il évoque son enfance ou sa femme, ou cette nostalgie qu’il manifeste de la vie monastique et de son pèlerinage de jeunesse à Saint Cyrille. Mais je réserve mon opinion, qui peut être encore déroutée. 
Je crois qu’il faut que j’assume le côté légendaire, littéraire et recréé de mon livre, quitte à continuer à explorer l’époque. Pour comprendre ce "beau monstre" qui m'interpelle à travers les siècles et ne me lâche pas. Peut-être que celui à qui j’aurai le mieux rendu justice, c’est Fédia. Car je  sens qu’il a été victime de son père, et que c’est probablement pour sauver ses fils qu’il a fait ce que lui ordonnait le tsar... C'est sans doute bien lui l'âme en peine orthodoxe du XVI° siècle, morte tragiquement et dans une grande tristesse qui, selon le rêve de Pierre-René Mélon à mon sujet, me suit pratiquement depuis l'enfance et attendait de moi une réparation que je lui ai donnée peut-être au delà de ce qu'elle méritait vraiment, mais qu'est-ce que le mérite, à l'aune de l'amour chrétien ou de l'amour tout court?

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