l'église de la Protection de la Mère de Dieu |
Hier, je suis allée à l'église par un froid vif. J'avais gardé les enfants de Liéna qui, malades, ne pouvaient l'accompagner, alors qu'elle devait diriger le chœur de l'église, et je suis arrivée vers la fin des matines.
Je me sens chez moi, dans la paroisse de la Protection de Krasnoselskaïa. En franchissant le pont de chemin de fer, je regardais l'enchevêtrement des voies, les lumières dans la nuit, les trains mystérieux qui traversent les espaces incommensurables de la Russie. Et l'église elle-même, que j'ai connue quasiment en ruines, et qui se dresse avec une sorte de fière douceur, emblématique de la Protection, sous laquelle passent tous ceux qui partent et arrivent.
J'ai retrouvé Dany, à l'intérieur, et beaucoup de chers paroissiens. L'icône de la Nativité était posée sous une sorte de grotte constituée de branches de sapins entremêlées de fleurs blanches et lorsqu'on s'inclinait dessus, cela sentait à la fois la forêt et le printemps. Un des petits-fils du père Valentin, qui s'appelle Valentin lui-même, m'est apparu, tout blond et bouclé, dans sa robe dorée de servant d'autel: "Bonjour, Lolo! Joyeux Noël!"
La veille, les sapins surnuméraires avaient été mis à la disposition des gens avec un écriteau: "Servez-vous".
Après, nous avons réveillonné en famille, le père Valentin, sa fille, son gendre, deux amies et moi. J'avais acheté une bûche de Noël du pâtissier Didier, un chef d'oeuvre. Et un prêtre ukrainien avait fait parvenir de délicieuse salaisons de son pays.
Le fils du père Valentin, le père Mikhaïl, m'a demandé avec une sorte d'ironie ce qui se passait en France, la plupart des Russes pensent que les Français nagent dans le lait et le miel et se conduisent comme des enfants gâtés et des emmerdeurs professionnels. Je lui ai répondu: "Il se passe une insurrection que je comparerais à celle du Donbass ou à l'insurrection de Minine et Pojarski au XVII° siècle contre les Polonais et leurs valets sur place. Un peuple qui voit tout à coup qu'on lui vole son pays et qui ne veut pas mourir."
Puis je lui ai développé ce que je pense de la situation. Il était étonné. Nous avons tous les moyens de savoir et ne savons rien, d'une manière générale, et bien que notre destin se décide au niveau d'une toile d'araignée supranationale, nous continuons à ne pas voir plus loin que notre cour d'immeuble et notre facture d'électricité, ce qui est commun aux Russes et aux Français.
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