Mania et son sixième bébé |
Cette belle histoire
était une invention, elle me l’a précisé en rigolant. Mais ils sont bel et bien
mariés.
Ensuite elle m’a emmenée
chez une vieille amie de ses parents, c’était très gai, dans un appartement du
centre complètement délabré, et tout le monde a chanté, mais j’avais Rita avec
moi, et il y avait dans l’appartement une chienne énorme, qu’il a fallu
enfermer, et qui aboyait, du coup la mienne aussi, cela me gâchait un peu la
soirée, et puis je me sentais complètement ahurie, je n’ai plus l’habitude du
monde et du bruit.
Au retour, j’ai voulu
faire pisser Rita dans la neige, étant donné sa taille, elle fait le contenu
d’un dé à coudre plus parfois une crotte d’oiseau, mais deux activistes me sont
tombées dessus : je la faisais pisser sur leur gazon, celui de l'immeuble. Mais c'est de la neige... ah oui, mais en été, à la place de la neige et de la boue, il y a du
gazon. Je ne sais plus où aller, parce que maintenant, c’est partout qu’il y a
des barrières, des gazons à la con et des plates bandes, généralement de très
mauvais goût, genre bégonias en rangs d’oignon, et je regrette le temps où, à
Moscou, on était libre comme l’air dans des terrains vagues qui prenaient en
été des allures campagnardes spontanées. Maintenant, on ne peut plus garer sa
voiture sans payer des sommes folles, selon une procédure extrêmement
compliquée. On ne peut plus promener son chien, même minuscule. Bref, cela
devient aussi con et tyrannique qu’en Europe, et j’ai de plus en plus de mal à
venir. A Pereslavl, je n’ai pas ce genre de problèmes.
Quand j’ai reculé devant
le chiot Bouton, c’était à cause de ce genre de détails. Eh bien j’ai récolté
Rita, qui ne peut pas se passer de moi cinq minutes…
Hier, je suis allée voir
Mania et son dernier bébé, Doroteïa. Sa fille aînée Aniouta est déjà une adolescente. Les autres
sont des sauvages, au demeurant très rigolos, mais très fatigants. Je ne sais
pas comment elle tient le coup. Elle m’a dit que depuis qu’elle était mère,
elle n’existait plus. Je me demande
toujours quel genre de mère j’aurais été. Il me semble que j’aurais fait preuve
de tendresse mais de sévérité et que j’aurais mis tout le monde au boulot et à
contribution, comme à l’école. Je ne
saurai jamais si je n’aurais pas tourné à la mère et à l’épouse acariâtre.
Dans mon livre, le petit
jeune homme débauché, sodomite et criminel Fédia, est un père et un époux
modèle. On le marie de force, mais il assume, il considère que sa femme est
innocente de la situation, elle est innocente à tous les points de vue, d’ailleurs.
Il remplit sa fonction de chef de famille, et c’est ce qu’elle attend de lui
avec une confiance éblouie, de son époux de 17 ans à moitié sauvage. Mais ce n’est
pas un enfant gâté, c’est un enfant martyr.
Dès que je suis chez les
autres, ici, je n’arrête pas de grignoter.
Nous sommes allées
ensemble chez les Messerer qui organisaient chez eux une exposition de tableaux
de petits formats qui, pour cette raison, ne sont pas chers. Il y avait de très
belles choses, ce qui m’a le plus séduite était beaucoup plus cher que le
reste, j’ai un don pour cela… Néanmoins, je pensais me faire un cadeau de Noël,
mais je n’ai pas eu le temps, car nous sommes parties précipitamment, le mari
de Mania ne pouvant plus faire face à leur meute de gosses dont elle lui avait
laissé la garde. Anna Messerer m’a envoyé la photo de cette série de tableaux.
Maintenant, je me dis que ce n’est peut-être pas moral d’acheter un tableau à
quelqu’un qui, certes d’un grand talent, et peut-être plus connu, brise l’esprit
de l’exposition en pratiquant des prix très au dessus des autres. Je dois
acheter un petit format à une autre spécialiste de cet art qui me l’a mis de
côté, mais je dois aller le chercher moi-même dans la région de Tver, où elle
vit, dans un petit village dont son mari est le prêtre.
J’aime bien Peredelkino, le village des datchas intellectuelles de l'époque soviétique, où l'on trouve celle de Pasternak, celles d'Evtouchenko et Tchoukovski, car on y a construit d’énormes palais avec de gros murs, mais grâce aux pins
immenses qui se bousculent partout, on ne les remarque pas trop. Les datchas
des Asmus constituent une espèce de hameau privé. Au début, il y avait celle
des grands-parents, le père Valentin y a ajouté la sienne, où vivent maintenant
Mania et son mari, et son fils, le père Mikhaïl, s’est construit sur le même
terrain une jolie maison de bon goût.
Chez les Messerer |
Mes trois préférés |
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