Il y a plus de 20 ans, la fille de mon père Valentin, Macha, pour laquelle j'ai une grande tendresse, était partie pour la France, avec son amie Ania. Sachant qu'elles voulaient aller à Marseille; je souhaitais les présenter à mon oncle Henry et à ma tante Mano. Dans mon esprit, il s'agissait juste d'une visite, mais Mano avait compris qu'il fallait les héberger, et après avoir accepté, avait commencé à se faire un sang d'encre à cette idée. Elle avait peur que les deux innocentes jeunes Russes ne désirassent aller en discothèque, où elles risquaient de se faire enlever pour la traite des blanches, et elle m'avertissait qu'elle n'avait pas l'intention de les accompagner pour les chaperonner! Regrettant déjà d'avoir initié tout cela, j'avais protesté que ces jeunes filles n'allaient jamais en discothèque, que ce n'était pas du tout leur genre.
Une fois les deux étudiantes sur place, ce fut le grand amour immédiat, entre elles, mon oncle et ma tante qui appréciaient beaucoup leur fraicheur, leur gentillesse, leur gaieté et leur spontanéité. "Elles sont comme nous étions dans les années 40, on ne voit plus de jeunes comme elles de nos jours". Apprenant qu'Henry avait été résistant, elles l'avaient aussitôt accablé de questions, auxquelles il avait été ravi de répondre, car il ne rencontrait pas dans sa famille un intérêt aussi passionné! Il leur avait montré tous ses souvenirs et coupures de journaux. Par la suite, je n'ai pas fait de séjour à Marseille sans qu'Henry et Mano n'évoquassent avec tendresse leurs deux visiteuses russes.
De mon côté, quand j'étais allée voir la mère de Macha, Inna, la femme du père Valentin, qui était communiste, elle m'avait dit avec respect: "Vous m'aviez caché que vous aviez un oncle partisan, un héros de la résistance!"
Ania vient de m'envoyer, avec ses condoléances, les photos qu'elle a gardées de ces moments:
J'ai la certitude que mon oncle Henry est bien, à présent, qu'il est soulagé, et qu'il est mystérieusement près de nous. J'ai bu un verre de mon vin de pommes à sa mémoire. Le voici maintenant près de maman, de ma tante Jackie, sa grande copine, qui lui avait dit, alors qu'il avait dix-huit ans et qu'il était très timide: "Henry, si tu veux plaire aux filles, il faut les faire rire!" Il a retrouvé mon père, son copain Loulou du "club des Laveuses". Mon grand-père et ma grand-mère qu'il adorait. Mon beau-père Pedro avec lequel il avait été à l'institut Notre-Dame de Valence. Tous ceux qui nous étaient et nous sont encore si chers.
Chère Laurence,
RépondreSupprimervos photos témoignent de cette douceur de vivre d'un monde, héla, aujourd'hui quasiment disparu...
Qu'il devait faire bon vivre dans cet endroit charmant et élégant en compagnie de ceux que vous aimiez !