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mercredi 9 mars 2022

Chopin et Debussy

 


Une amie russe m'écrit que certes, comme toujours dans ces cas-là, la propagande est des deux côtés, mais qu'une chose est déterminante pour elle: la haine n'est pas du nôtre. En effet, et cela me frappe depuis le Maïdan, et même avant. J'ai dès le début comparé ce déferlement de méchanceté ukropithèque avec les commentaires russes généralement perplexes et navrés. Je pense que cela repose sur deux facteurs, la réécriture de l'histoire qui attribuait tous les maux de la terre aux Russes, ce qui était bien pratique, car on a toujours besoin d'un bouc émissaire, et le désir furieux d'entrer dans le club des nations priviliégiées et comme disait une donzelle du Maïdan, de porter des petites culottes en dentelle, comme si cette prospérité se gagnait du jour au lendemain sans avoir rien construit chez soi, uniquement à la faveur d'un traité. Il y a aussi des Russes de cette espèce, et ceux-ci soutiennent le Maïdan, nient les exactions du Donbass, ou pensent que cette population minable de soviétiques attardés n'est bonne qu'à être bombardée. A noter qu'en France même, ce réflexe se manifeste vis-à-vis des gilets jaunes de la part du même style de gens, pleins de mépris pour le populo qui est un obstacle au paradis sur terre et ne comprend pas que, dans son altitude éclairée, on veut son bien, à sa façon, et non à la sienne. Eborgner les gilets jaunes n'était pas si grave, et bombarder le Donbass non plus, que faire d'autres de ces imbéciles, comme dirait le docteur Laurent Alexandre, le surhomme transhumaniste? J'ai récemment vu dans un fil de commentaires un Français justifier tout cela par le fait que l'Ukraine devait "récupérer ses terres", vendues d'ailleurs à Joe Biden et à son fils, ce qui impliquait d'exterminer les habitants comme des peaux-rouges, et alors? Des petits blancs de merde. Aucun intérêt. Ceux qui se fichaient du Donbass et pleurent sur l'Ukraine sont exactement les mêmes que ceux qui n'en ont rien à faire des gilets jaunes mutilés, des paysans ruinés, des retraités jetés à la rue, des filles violées et des garçons tabassés, mais adorent les migrants exotiques. 

Quand à la propagande, je ne dirais pas qu'elle est la même des deux côtés, car les mondialistes ont beaucoup plus les moyens, en ce domaine, que le gouvernement russe. Un salaud demande en commentaire à Anne-Laure Bonnel, vibrante de sincérité, morte de fatigue et écoeurée par les horreurs qu'elle affronte en permanence, si les Ruskofs paient bien. Ben non, à en juger par tous ceux que j'ai vus s'impliquer là dedans par idéalisme ou humanisme, ils ne paient rien. Je ne suis pas sûre qu'il en soit de même des journalistes menteurs et des hyènes télévisuelles de l'occident.

Pourtant, je pressens que ce que gilets jaunes et truckers ne pouvaient obtenir, les Russes vont le donner à tout le monde, ils vont renverser la table. Ils ont mis le pied dans le nid de frelons, ils ont ouvert la jarre des djinns. Et si l'on hurle chez les séides de l'OTAN qu'ils ont le monde contre eux, eh bien je ne pense pas que cela soit vrai; en Bulgarie, le président à la botte de Bruxelles se fait huer le jour anniversaire de l'indépendance favorisée par les Russes, venus repousser les Turcs au XIX° siècle. Tous les pays où l'OTAN et la rapacité de la mafia qu'il sert a semé la merde, avec de belles justifications humanistes proférées par des costars et des brushings aux gueules de démons et de sorcières, tous les pays restés fondamentalement normaux et traditionnels regardent les Russes avec une extrême sympathie. On rameute en Ukraine, au mépris complet des populations civiles, tous les chiens infernaux qu'on avait envoyés semer la mort en Syrie ou en Irak, on vomit calomnies et mensonges, on chauffe jusqu'à l'incandescence la cervelle des niais, mais je sens la bascule, le désenchantement général, la fin des sortilèges. D'abord parce qu'une partie du populo du fief des banquiers, ayant constaté combien on avait menti à son propos discerne qu'on puisse mentir sur tous les autres sujets, c'est d'ailleurs ce qui a motivé ma prise de conscience déjà ancienne. Et ensuite, parce que le comportement indigne de nos gouvernements et de ceux qui les soutiennent nous a fait perdre notre dernier prestige. On me dit que Poutine perd la bataille de la com, qu'il n'essaie pas de lutter contre la propagande qui abrutit l'occident, eh bien en effet. Mais j'ai l'impression qu'il ne prend plus cette peine: l'occident, après l'avoir courtisé sous les insultes, puis essayé de lui faire entendre ses arguments de façon rationnelle, il en est arrivé à le mépriser complètement. Et c'est ce que font aussi tous les autres pays qu'il intimidait autrefois par sa puissance et son rayonnement qui était loin d'être toujours justifié. C'est compréhensible, car l'occident d'aujourd'hui, c'est Sodome et Gomorrhe, l'empire de Mammon et de Moloch, François Asselineau l'a noté dans une vidéo où il déclare craindre qu'il ne soit pas du bon coté de la Force, comme on dit.

Que l'on voie chuter finalement et se dissoudre dans un nuage de soufre tous les Lucifer de salon qui ont contribué à nous créer cette situation ne me fera pas verser de larmes, mais que deviendront ceux qui sont sur place et resteront avec d'un côté la ruine économique et de l'autre, des populations exogènes hostiles et violentes?

Nikita Mikhalkov, la bête noire des libéraux russes citoyens du monde, a fait une vidéo que quelqu'un a munie de sous-titres français, et dans laquelle il fait la synthèse de tout ce qui s'est passé autour du Maïdan et du Donbass. Comme d'habitude, c'est très efficace, car tout ce qu'il montre est irréfutable, et souvent, ce sont ses adversaires eux-mêmes qui confirment ses dires, comme dans ce sketch où Zelenski encore acteur plaisante sur les exactions ukrainiennes contre les Russes ou russophones. Les documents sur le Donbass, sur les atrocités des bataillons punitifs à folklore nazi, sur les projets antérieurs au Maïdan de mise au pas de l'est de l'Ukraine, sur le projet d'ukrainisation planifiée dans la haine des Russes établi dès la perestroïka par des étrangers qui veulent notre bien à tous, j'en atteste la véracité, ils étaient connus de moi et de beaucoup d'autres depuis le début, mais pas des européens de base qui maintenant sanglotent sur l'Ukraine et poussent des malédictions parce que leur télé leur en a donné le signal.



l'émission de Mikhalkov



Aldo Sterone, une réflexion pénétrante qui ne concerne pas seulement la Russie

J'écoute Chopin, car Debussy me ferait trop mal, et je songe à mes souvenirs d'enfance qu'il me faudrait écrire, et qui "sont les pires", comme chantait Barbara. Je songe à la chute misérable de l'occident qui produisit et Chopin et Debussy, et moi-même, car en fin de compte, même dans l'Europe individualiste de l'époque moderne, toute oeuvre est collective, toute oeuvre est portée par les générations précédentes, leur culture, les traditions transmises et la nature environnante. Avoir donné Chopin, Debussy, Schubert, les églises romanes, les cathédrales gothiques et sombrer dans la haine de tout cela, dans le wokisme et le LGBT, la théorie du genre, les utérus artificiels et l'infanticide autorisé, pour faire court, la vulgarité, la bêtise et la triste débauche, avoir trahi tout ce qui nous avait fait grands, profonds et universellement humains, telle est notre fin déshonorante et imminente.

lundi 7 mars 2022

Veillée de carême

 Le père Valentin vient d'être opéré, on attend son réveil. Mais quelle force vitale, j'ai vu une photo où, intubé de partout, il communiquait avec ses filles par écrit, avec son sourire habituel, il est solide... physiquement et surtout moralement. 

Je lis pour lui la paraclisis à la Mère de Dieu. Une amie me dit qu'il porte ses prières, et en effet, les miennes, en ce début de carême sont portées, elles ont des ailes. elles sont pleines de larmes, mais elles ont des ailes. Pendant le canon de saint André de Crète, il me venait des images de toute ma vie, et surtout les plus anciennes, comme en surimpression, mon enfance, les gens que j'aimais et qui nous ont quittés, ceux que j'ai laissés en France, et puis aussi les offices à Solan, les chemins que je parcourais autour de Cavillargues et qui me semblaient si lointains... C'était comme un défilé de diapositives qui ne m'empêchaient pas de prier. A la fin, dans les ténèbres, sur le fond de l'iconostase, où quelques couleurs et quelques dorures subsistaient alentour des cierges, monseigneur Théoctyste se détachait à contre-jour, élancé et tout en noir, et sa crosse brillait en deux endroits, comme un signal, une sorte de phare atténué, discret. Son sermon terminé, il a commencé à distribuer sa bénédiction aux fidèles qui faisaient la haie et s'arrêtant près de moi, il me dit: "Tiens, ma joie, vous êtes là!" Il m'a demandé des nouvelles du père Valentin, il va prier pour lui. Il y avait tant d'amour, de ferveur autour de lui, dans cette église, j'avais envie de pleurer, je sentais quelque chose de particulier, d'intense, de beau. Le pressentiment de l'aube au tréfonds de la nuit.

Au retour j'ai appris que le père Valentin, libéré de son tube, avait parlé avec Xioucha au téléphone, mais depuis, il est reparti au bloc. Les prières s'étendent autour de lui sur plusieurs pays. Il a dit avoir vécu les pires moments de sa vie, mais fait preuve d'une fermeté admirable.

Parallèlement, les démons se déchainent de toutes parts, mensonges, calomnies, désinformations, c'est un véritable charivari. La Russie a mis le pied dans un vrai nid de frelons. Une amie me dit que l'archiprêtre d'Odessa Victor est tombé aux mains des nationalistes ukrainiens, il a eu le temps de prévenir, de demander nos prières, il ne pense pas en sortir vivant. Prions pour l'archiprêtre Victor, si le père Valentin s'en sort, peut-être s'en sortira-t-il aussi...

J'avoue ne pas avoir envie de me pencher sur ces ténèbres, autrement que de cette manière, en ces jours du début du carême, quand je vois ces lumières qui s'allument, la chaîne d'amour autour du père Valentin, mon évêque, les regards et les sourires des fidèles de la cathédrale, le père Andreï, le père ukrainien Vassili, son fils Vania, sa fille Macha, cette solidarité, et comment dire? En dépit du tragique de la situation, une sorte de soulagement général et de mobilisation intérieure, dépourvue de haine. 


lundi du grand canon de saint André de Crète



samedi 5 mars 2022

Pas le moment, quand même...

 


Mon père Valentin est très malade, cela s'est déclaré d'un seul coup, on peut même dire qu'il était à l'article de la mort, et j'ai prié pour lui hier soir en pleurant à chaudes larmes. Au moment de ma fête d'anniversaire, l'idée m'avait effleurée que si je le perdais, ce serait terrible. En même temps, je me souviens que lorsque maman avait eu son infarctus, j'étais si angoissée que j'avais peur de vomir dans le métro. Je suppliais Dieu de la garder en vie, et elle a certes vécu quatorze ans de plus, mais elle est morte d'une maladie beaucoup plus affreuse qu'une défaillance cardiaque. Donc je demandais à Dieu de m'aider à supporter si ce n'était pas dans son intention de le conserver parmi nous. Aux dernières nouvelles, il va un peu mieux, une dynamique positive se manifeste, mais il n'est pas tiré d'affaires. Xioucha m'a envoyé une vidéo de lui qui, à peine revenu à la conscience, les yeux encore fermés, mais avec son sourire plein de bonté, nous donne sa bénédiction. Et je me suis mise à vraiment espérer qu'il allait surmonter.  

J'avais rendez-vous chez le dentiste, c'est une jeune femme très gentille et très compétente, j'ai vraiment de la chance qu'elle soit apparue dans cette clinique, avoir un bon dentiste ici, c'est précieux. Si seulement je pouvais trouver un bon généraliste...

En sortant, je suis passée au café la Forêt, je devais accrocher des étiquettes sous mes tableaux, dans la cave. J'y ai trouvé Pacha Morozov qui peignait et quelques artistes féminines, en train de papoter. Un lieu culturel vivant, en somme. Au dessus, au café, j'ai commandé mon gâteau préféré, parce que c'est bientôt le carême. La pensée du père Valentin ne me quittait pas. 

Une journaliste est venue me rejoindre, je l'ai trouvée extrêmement sympathique, naturelle, ouverte, gentille, avec des yeux lumineux. J'ai eu l'impression de m'entretenir avec une jeune amie. Elle m'a demandé comment j'étais venue ici, les questions habituelles, puis ce que je n'aimais pas en Russie, et j'ai dit entre autres, la destruction de la paysannerie que rien ne vient compenser, la destruction du patrimoine culturel, le mépris de ce patrimoine, de la part de gens qui, par ailleurs, proclament que les Russes ne sont capables de rien et vont dans le même temps s'extasier sur l'Europe. Elle m'a dit que tout cela allait maintenant changer, que nous allions tous faire pousser nos patates et restaurer les entreprises et l'industrie russes. 

En ce qui concerne la guerre, j'ai dit que je priais pour tout le monde, mais que ce qui s'était passé dans le Donbass pendant huit ans s'était bel et bien passé et que personnellement, je voyais arriver cette guerre depuis les années 90, la Serbie et l'Irak. J'ai aussi souligné que si les Européens persécutaient les Russes installés chez eux, ici, les gens redoublaient de gentillesse à mon égard et que personne ne malmenait les nombreux Ukrainiens qui vivent à Pereslavl. 

vendredi 4 mars 2022

Les deux frères

 Pendant que j'attendais chez "mes documents", j'ai voulu appeler le père Vassili, de la cathédrale où je vais le dimanche, qui n'avait pas répondu à mon message proposant de venir manger des crêpes. Une voix enjouée me répond: "Bonjour Lolo! Je viendrais volontiers, mais c'est un peu loin!" Je m'étais trompée de père Vassili, c'était le père Basile de Tcheboksary, notre père Basile français. Je m'étais aussi encore trompée de jour pour ma visite chez le dentiste, je deviens une légende dans la clinique stomatologique…

Père Basile m'a dit qu'il ne voulait absolument pas commenter les événements et qu'il disait à ses ouailles: "Fermez votre téléphone, ouvrez votre psautier".  Cela me paraît extrêmement sage et c'est ce que je vais essayer de faire pendant le carême. Néanmoins, des proches le considèrent en France comme un "traître" et l'accusent d'abuser de la vodka, ce qui n'est vraiment pas son cas! Etonnant comme dans un pays pratiquement dissous dans la mondialisation où les patriotes sont conspués depuis 50 ans, on se retrouve une conscience nationale dans la haine de la Russie et la solidarité avec l'Ukraine, en ignorant pratiquement tout de l'une, de l'autre, de leur histoire et de ce qui s'est réellement passé pour en arriver là.

Ensuite, j'ai discuté avec une amie orthodoxe en France, qui m'a dit: "J'ai compris que pour la France, c'était plié, le jour où Notre Dame a brûlé". En réalité, il y a beaucoup de points communs entre une certaine France et l'Ukraine du Maïdan, et notemment l'agressivité péremptoire et les appels à la répression permanente, les ricanements devant les exactions que subissent leurs adversaires, qu'ils soient des gilets jaunes ou des russophones du Donbass. D'ailleurs le Monde, le journal de BHL, se dépêche de calomnier le Donbass avec de soi-disant "prisons secrètes" où sont soi-disant torturés des journalistes ukrainiens, comme Facebook ne marche ici pratiquement plus pour moi, je n'ai pas pu ouvrir le truc, mais je suis bien persuadée que c'est de l'authentique fake news de type inversion accusatoire, procédé constemment utilisé par le gouvernement ukrainien et ses sponsors. L'avocate ukrainienne Tetiana Montian a bien insisté dans son discours à l'ONU sur le fait que les atrocités étaient justement plutôt unilatérales... Mais je suppose que la percée médiatique d'Anne-Laure Bonnel, si évidemment sincère, doit être vite compensée par un seau d'eau sale déversé sur les victimes innocentes de l'est de l'Ukraine... Bon, il faut avoir l'estomac pour le faire, ce qui ne va pas forcément avec une vraie paire de couilles.

Tous les Français ne sont pas unanimement imbéciles, mais disons que c'est la tendance visible, et le bruit produit étouffe tout autre son. Mais comme me le disait cette amie orthodoxe, qu'y pouvons-nous? Des naïfs me demandent encore de traduire ceci ou cela, mais ceux-là même qui, pendant huit ans, se foutaient complètement de la question se ruent sans vérifier sur n'importe quelle propagande, tyrannisant et persécutant ceux qui la contestent avec toute la hargne défoulée de leur soumission précédente aux mesures covid. Ma compassion va aux autres, à ceux qui subodorent l'arnaque et ses conséquences.

En attendant, je vais essayer de m'en tenir aux conseils du père Basile, au moins pendant le carême. 

J'ai reçu pour le thé le père Vassili, sa fille ainée Macha à qui je donne des cours, son fils Vania, qui l'aide à l'église, son fils Serioja et sa fille Katia. Ils sont ukrainiens, de Ternopol, et ont progressivement déménagé ici en passant par Serguiev Posad, où le père Vassili apprenait l'iconographie. La femme du père Vassili est cosaque du Kouban. C'est une adorable famille. Les deux garçons ont chanté ensemble une très belle chanson cosaque, les "deux frères". J'ai chanté la déploration d'Adam sur les gousli, après deux chansons de carnaval.

J'en veux terriblement aux démons à forme (vaguement) humaine qui ont semé la discorde et la mort entre des peuples qu'ils détestent l'un et l'autre avec la même violence. Que le sang de l'un et l'autre côté leur retombe dessus. Le père Nikita a envoyé la photo d'une icône fendue en deux qu'il a recueillie dans une église de village bombardée par les Ukrainiens, près de Donetsk. Mais bon, fermons notre gueule et ouvrons notre psautier. 

 


les deux frères





jeudi 3 mars 2022

Triste maslenitsa

 

a travers les arbres

A la réunion des cosaques, l'ambiance n'était pas à la maslenitsa, le carnaval russe. Slava a dit que Poutine avait pris le chemin de son Golgotha, et qu'il fallait choisir son camp, avec le président et la Russie, ou contre avec les judas. Veniamine a parlé des financiers qui mènent le monde et rappelé que la propagande était des deux côtés. Sans doute, mais la propagande russe, comme on dit, n'a aucun accès à la scène internationale, qui est entre les mains de Google, Facebook etc., et à l'intérieur du pays, des médias diffusent exactement le même message qu'en occident, de sorte que les libéraux russes nient les horreurs du Donbass de la même manière que leurs équivalents parisiens, la différence est qu'ils sont moins nombreux et qu'il existe encore une info différente. Quand on voit la journaliste Anne-Laure Bonnel, qui a certainement bousillé sa carrière en faisant des reportages là dessus, délivrer son témoignage avec un visage défait par l'émotion, et BHL proclamer que ce sont des fake news, alors qu'il sait pertinemment que ce n'est pas le cas, il est difficile de comprendre ceux qui font confiance à Lucifer plutôt qu'à cette tendre idéaliste qui sauve un peu notre honneur dans cette sinistre affaire. Comme le doux Pierre le Corf en Syrie. J'ai dit que de toute façon, j'avais choisi mon camp en commençant à m'investir dans la défense du Donbass en 2014, et même du reste bien avant, on peut dire dès les années 90, quand j'ai compris que les Américains n'étaient pas les chevaliers blancs de la démocratie pour lesquels j'avais pu les prendre dans ma jeunesse. Olga a déclaré que nous avions tous raison, mais qu'elle n'avait pas envie de parler, parce qu'elle avait le coeur trop lourd. Elle a de la famille là bas...

Dans la journée, il a fait encore très beau, et je maudissais Skountsev de me proposer un cours alors que je voulais profiter du soleil. J'ai concilié les deux. Avant et après le cours, je me suis mise sur le perron. J'ai à nouveau dessiné la maison d'Ania, qui m'a envoyé par whattsapp des instructions de prière pour la Russie . J'ai un tel besoin de soleil, à la sortie de l'hiver, que je reste hébétée, à m'en gorger sans pouvoir croire qu'il est là, de plus en plus radieux, et qu'il chauffe, nonobstant toute la folie qui se déchaîne dans le monde. Les chats autour de moi s'étendent aussi à sa rencontre. Tout scintille, tout étincelle. Il me semble parfois qu'il n'y a plus que cela qui m'intéresse, le ciel au dessus des isbas, et bientôt ce qui poussera devant la clôture. D'un autre côté, si je me désintéressais de tout le reste, je sombrerais dans une sorte d'égoïsme sénile...

Je me rends compte que j'ai vécu très longtemps dans l'angoisse de ce qui arrive. Céline disait: "Il y a des gens qui meurent au dernier moment et d'autres qui s'y prennent vingt ans à l'avance, ce sont les malheureux de la terre". Je pense souvent aussi à Tristan Bernard: "Jusque là nous avons vécu dans la peur, maintenant, nous vivrons dans l'espoir".

Je suis allée pour la deuxième fois à "mes documents" pour m'y inscrire, comme d'habitude, c'est une épopée. Quelque part on a écrit que j'étais née à Valence, et ailleurs que j'étais née en France, et maintenant, il faut comprendre et enregistrer que Valence est une ville en France. Donc "mes documents" finira par m'enregistrer, mais ça traîne. C'est un truc très utile qui centralise tous les documents, et Tania m'a demandé d'enfin le faire dans la perspective de demander la citoyenneté russe. En sortant de là, je suis allée au café français où je devais parlementer avec Natacha à propos de mon livre. J'y ai rencontré Lika, Gilles est toujours coincé en France, mais il a décidé d'en profiter pour régler des affaires importantes. J'ai constaté avec satisfaction que dans une banque du secteur, ma carte était opérationnelle. Mais on ne sait pas ce qui peut se passer, je vais sans doute donner des cours de français online. IKEA ferme tous ses magasins en Russie, j'espère avoir le temps de récupérer ma commande de boîte pour chats, afin que Georgette ne soit plus la seule à disposer d'une petite maison. Lika nous a dit: "Finalement, tout cela aura aussi des effets positifs. Plus de covid, on ne nous cassera plus les pieds avec ça. Plus de produits importés, nous fabriquerons les nôtres. Ils ont déjà annoncé qu'ils allaient favoriser les petites entreprises. 

- Oui, dit Natacha, nous serons les parias de la terre, mais nous vivrons à notre façon".

Nous nous sommes embrassées toutes les trois: "Ca va aller, les filles"... 

La prière du starets Ilya, que je lis tous les jours, concerne les trois Russie, la petite, la grande, et la blanche. Je prie pour les trois Russie. Elles m'étaient également chères, et je ne les distinguais pas. Des gnomes sont venus jeter la discorde, dès la révolution de 17, mais je crois encore que cela pourra prendre fin, Skountsev m'a envoyé la vidéo d'une énorme manifestation à Odessa, pour la Russie, c'est-à-dire la Rus initiale, la réconcilitation des trois Russie, et contre le fascisme. A moins que nous ne soyons à la veille des derniers temps. Enfin d'ailleurs nous y sommes. Le tout est de savoir à quel point. Je prie aussi pour la France et ceux que j'y ai laissés. Et ceux qui veulent venir ici, et se sentent bien seuls dans le tohu-bohu hystérique qui se déchaine autour d'eux. Le camp qu'il faut choisir n'est pas d'ailleurs celui de la Russie, mais plus largement celui de la résistance à la dictature mondialiste des ploutocrates transhumanistes et de leurs créatures. Je les crains plus que n'importe qui d'autre. 

A ce sujet, je propose de regarder cette vidéo de François Asselineau, elle est très instructive. Il y a un lien direct entre la folie du covid et celle de l'Ukraine. Lorsqu'il dit qu'il a l'impression que l'occident est désormais le mauvais camp, je partage depuis longtemps ce sentiment.  A noter que si les Canadiens se sont défoulés dans la fête et l'amour universel, avant qu'on ne leur envoie des gorilles, peut-être entraînés dans le cher petit pays, les Français, eux, le font dans la haine des Russes et le soutien sur commande d'une cause dont ils ne connaissent rien. 



 https://vk.com/id563143924?z=video596430196_456247145%2F1db85ec5fc5b1407dc%2Fpl_post_563143924_856 

mardi 1 mars 2022

La surenchère

 

je mets des chats, ça passe très bien!

Ma carte française ne me permet plus de tirer du liquide, le distributeur ne la reconnaît plus. Mais je peux encore m'en servir dans les magasins. Ma page facebook est pratiquement inutilisable, j'attends de voir plus d'amis changer de boutique et passer sur Telegram ou vkontakte, car il va me falloir déménager, en quelque sorte on m'expulse! Cela m'évitera sans doute de me faire insulter par des imbéciles hystériques, ce qui commence à m'arriver et arrive à beaucoup de personnages plus ou moins en vue qui ne sont pas du bon côté. Un homme marié à une Russe a vu son fils se faire insulter à l'école. Tout ce qui pourrait équilibrer la propagande tonitruante qui se déchaîne est censuré. Gilles est coincé à Strasbourg, car tous les vols ont été annulés. Il a dit à sa femme que l'ambiance en France était complètement délirante. J'espère qu'il finira par nous rejoindre et que Nil arrivera aussi à partir. 

L'éléctricien Kolia, venu changer mon compteur, était à peu près dans le même état que mon plombier Rouslan quand il m'a apporté son chauffeau. Il m'a rapporté qu'un militant du Donbass avait été crucifié et brûlé par des Ukrainiens, j'en ai trouvé la confirmation ailleurs, d'ailleurs ce n'est pas la première fois que cela arrive.

Près de la quincaillerie où je venais lui acheter du matériel, j'ai vu deux des enfants du père Vassili, qui est Ukrainien, il est venu de Ternopol, ils m'ont saluée joteusement. J'ai invité toute la famille à venir manger des crêpes jeudi, c'est la maslenitsa, le carême russe.

Autrement, tout est calme, ici, le soleil brille et chauffe, les oiseaux chantent, ce premier jour du printemps est vraiment printanier. J'ai emmené quelque part dans les quartiers en béton de la ville, Génia, qui s'occupe du petit centre culturel de Gilles, et il m'a dit en chemin que les derniers événements lui avaient apporté un sentiment de soulagement, que tout cela pourrissait depuis trop longtemps, qu'il fallait bien que l'abcès crevât, que non seulement le Donbass était martyrisé depuis huit ans, mais en plus l'Ukraine, pillée depuis le même temps, était dans un désastre économique indescriptible. Moi aussi, malgré les problèmes que cela va probablement me causer, parce que lorsque on redoute de voir arriver quelque chose depuis très longtemps, eh bien quand cela se produit, au moins on ne le redoute plus, c'est fait, on y est. Peut-être que c'est pareil avec la mort. 

Le fils du père Valentin, Micha, le père Mikhaïl, m'a envoyé des messages pour me soutenir le moral et me poser des questions sur les réactions des "Français sains d'esprit". Mon filleul, qui fait partie de cette catégorie, m'a appelée ce matin pour se renseigner sur les tenants et aboutissants, je lui en ai parlé et lui ai conseillé des sites d'information et de réinformation. Il m'a dit dans la conversation: "Je sais depuis mon enfance que ce monde est pourri et nous mène à la catastrophe, cela va te paraître prétentieux...

- Non, pas du tout, parce que moi aussi, je le sens depuis l'enfance, j'aimais les indiens et pas les cow-boys, je pense comme je ne sais plus quel chef indien que l'homme est fait pour chasser, pêcher, chanter, danser et regarder les couchers de soleil. A la limite cultiver la terre, avec le même programme.

- En fait, je suis convaincu que si nous ne retournons pas au genre de vie que nous avions au XVII° siècle, nous sommes tous morts. 

- Moi aussi, mais le XVII° siècle commençait déjà à avoir une mauvaise mentalité, je remonterais plus loin. Eh bien tu vois, quand on dit que je suis partiale parce que Poutinienne convaincue, paraît-il, c'est là que s'arrête ma confiance en lui. Un chef d'état contemporain n'admettra jamais une chose pareille, et s'il l'admettait, on ne le laisserait pas faire, ou on se jetterait sur son pays pour l'asservir ou le coloniser. Donc tout chef d'état est plus ou moins obligé de marcher dans cette combine de la surenchère qui nous mène à notre perte, et cela dure depuis plusieurs siècles.

J'essaie d'arranger l'autre partie de la maison pour pouvoir la louer éventuellement, au cas où je me retrouverais privée de ressources, avec une douche qui fonctionne, notemment. Je serai enfin digne d'aimer la Russie, quand je serai complètement fauchée, mais il en est qui comptent sur moi pour payer leur loyer et risquent d'avoir un choc... Et en plus, comme je demande la nationalité russe, je comblerai les voeux de ceux qui me mettent au défi de le faire, pensant que je n'en suis pas cap, alors que cela me simplifierait tellement la vie que je sauterais au cou du premier qui me la présenterait sur un plateau.

J'ai vu deux vidéos qui valent la peine d'être regardées/ surtout quand on ne connaît rien et qu'on sent obscurément qu'on raconte n'importe quoi. C'est celle de l'excellent Christian Combaz:



 

Et ce film très émouvant qui fait le point sur ce qui se passe au Donbass depuis huit ans et date de 2017. Il est fait par une journaliste française; on ne lui a donné, évidemment, aucune audience.





dimanche 27 février 2022

Le poids des rhinocéros


La chaîne SPAS fait un reportage sur le Donbass, plus précisément sur les églises du Donbass, qui correspond en tous points à ce que j'ai vu pendant huit ans sur la question à travers des vidéos qui restaient obstinément confidentielles, la "propagande de Poutine" n'ayant manifestement pas les moyens de les diffuser largement ni de payer des traducteurs. Et dans les commentaire, ukrainiens ou pas, des gens glapissent au mensonge, invoquant Dieu et le Jugement Dernier. En tous cas, pour ce qui est de la simple justice immanente, on la voit à l'oeuvre sous forme du bête retour de bâton, à force de taquiner l'ours, le voilà furieux. Que diront ces orthodoxes quand ils verront de quoi ils ont été les complices, lorsque tout sera révélé? Et qu'est-ce qui pousse des orthodoxes russes à choisir le camp de ceux qui leur crachent à la gueule et martyrisent depuis huit ans leurs frères pour avoir défendu leur culture? Mystère de la bêtise humaine. En France, on observe que les criailleries viennent principalement du côté des "je suis Charlie", des sangloteurs du petit Aylan,  des "je sauve des vies, je porte le masque" ou "je me vaccine", en fait, nous avons affaire à la secte internationale des rhinocéros. Ils vivent dans une autre réalité, et retomber sur terre leur ferait trop mal, ils finiront pourtant par le faire... Comme disait Brassens, la loi de la pesanteur est dure, mais c'est la loi. Et les rhinocéros sont très lourds.
Cependant, je conserve l'impression que la Russie est un gigantesque Donbass potentiel, à l'exception de la crème moscovite et péterbourgeoise, et ceci sur la base de ce que j'ai visité. Mais je peux me tromper.
Comme je le sentais venir, les images des exactions des Ukrainiens au Donbass servent actuellement à discréditer les Russes. Cette désinformation est un des crimes les plus odieux des mafieux qui se sont emparés de l'occident. Ils ont fait la même chose avec la Serbie, l'Irak, la Syrie. Et là, d'une certaine façon, toutes ces vidéos témoignant du martyre du Donbass, que personne ne voulait montrer jusqu'alors, sont un vrai vivier à la disposition des diffuseurs de fake news: comment un occidental qui ne connaît rien à la question pourrait-il reconnaître un Ukrainien d'un autre Ukrainien et où se situe la cible du bombardement, et quand il a eu lieu? 
J'ai une compassion particulière pour les Russes ou descendants de Russes conscients, ou même Français lucides, qui sont coincés en occident. Cela ne doit pas être drôle d'être confronté à chaque pas à cette propagande délirante et à l'hostilité croissante de ceux qui l'écoutent. Moi, je me prends déjà quelques pommes de pin dans la gueule, mais enfin mon milieu ambiant me reçoit généralement cinq sur cinq et c'est réciproque.
J'ai parfois une pensée émue pour la matouchka du père Valentin, la pittoresque Inna Victorovna, qui me prédisait du fond de son fauteuil, la cigarette au bec: "Vous mourrez avec les Russes". Et après tout, c'est bien possible. si la Russie est vaincue et livrée aux mondialistes, il n'y aura plus de place, sur terre, que pour les rhinocéros et les concombres masqués. A l'église, le père Andreï m'a dit: "Vous avez l'air désemparé...
- Eh bien oui, disons que je suis perturbée...
- Tout va très bien se passer."
Et il a répété plus tard en me donnant la croix à baiser: "Tout va très bien se passer, si nous restons avec Dieu."
Après j'ai vu Katia au café français, perturbée, elle aussi. Elle s'est pris quelques paquets dans la figure, et s'étonne de tant de haine de la part de ses compatriotes qui épousent avec tant d'enthousiasme la cause des ennemis mortels de leur pays. Nous avons parlé des livres que je vais sortir et des réactions qu'ils peuvent provoquer. "Vous êtes prête à cela?
- Non, Katia, pas du tout. Non, cela m'est très désagréable. Il est plaisant d'être aimée et comprise, et dans ma vie, il n'y a plus que la création, mais je peux devenir la cible de gens qui d'ailleurs, ne lisent généralement pas ce que j'écris mais réagissent immédiatement à nos divergences d'opinions, à leurs yeux inexpiables, qui font de moi le mal absolu. Moi, j'arrive à faire la part des choses, avec mes contradicteurs, mais pas eux. Il est réconfortant de trouver un écho et, en même temps, je n'aime pas être trop en vue, je n'aime pas qu'on me flatte et qu'on ne me laisse pas respirer. Mais je n'ai pas le choix, ce serait renoncer à moi-même et renier ma vie."


Le dégel se poursuit lentement, le printemps est dans l'air. Le francophile Andreï va venir me faire ma terrasse à l'écart du voisin. Je m'occupe d'arranger la partie qui me sert à loger des amis et peut aussi être louée, car je ne serais pas étonnée d'être privée un de ces jours de la retraite que certains me reprochent tellement de toucher, on ne peut sincèrement aimer la Russie qu'en devenant SDF aux Trois Gares, c'est bien connu. Nous avons de belles nuits étoilées, ce ciel étoilé, je peux même l'apercevoir de mon lit, qui est juste sous la fenêtre, et cela me rappelle mon hamac sur la terrasse, à Cavillargues, où je dormais par les étouffantes nuits d'été. Corriger mes livres me prend du temps et la tête. Je rêve de m'abstraire et des livres et de l'actualité, de me plonger non pas vraiment dans le silence, mais dans la musique, dans la peinture, la contemplation. Le silence est rarement privé de bruits, il est cet état où l'absence de vacarme et de discours permet de discerner les sons et les mouvements de l'âme qui, autrement, nous échappent. 
Je suis allée dessiner dehors, au soleil, qui commence à chauffer, avec le pressentiment de ce printemps russe infiniment serein, d'une sorte de paix à la fois humble et grandiose, presque d'un autre monde. Les arbres nus portaient des fruits d'azur et la promesse lumineuse du renouveau. Il me semblait passer au dessus de tout le reste, dans l'espace éternel de la vie.