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samedi 23 janvier 2021

Limonov et Navalny

 De - 26, nous sommes passés à + 3 en quelques jours, c'est difficile à vivre, pour les climatodépendants. Je cherche des espèces d'arbres qui me cacheraient vite la baraque du voisin, sa bagnole qui flotte majestueusement au dessus de ma clôture, et cela dans les plus brefs délais. Il y a des gens, dont il est le premier, qui trouvent fabuleux de contempler une maison en plastique et une bagnole plutôt qu'un espace naturel avec des roseaux, des fleurs sauvages et des buissons.

J'essaie d'écrire mes souvenirs d'enfance, c'est un exercice suprenant, qui ne se traite pas comme un roman, et m'amène à une certaine introspection, et au delà de cela, à toutes sortes de réflexions. Je tiens à laisser derrière moi ce témoignage, ces traces aussi des gens que j'ai connus et qui le méritent bien. Ils sont encore si présents dans ma mémoire, et pour les petits enfants de mes cousines, ils sont aussi éloignés dans le temps que pour moi la grand-mère Caroline qui fut exilée avec son mari en Belgique au moment de la guerre de 70.... Ou bien encore Gustave Flaubert ou Dostoievski, de l'univers desquels je me sens beaucoup plus proche que la science-fiction dans laquelle je termine ma vie.

...

En Russie, on semble mettre fin à la comédie des masques, et l'on ne peut que s'en réjouir. Mais parallèlement, la mère Merkel, après nous avoir foutu l'Europe en l'air avec l'invasion migratoire par elle amorcée, a décidé d'inoculer à la Russie le virus Navalny, comme autrefois le Kaiser lui avait inoculé le virus Lénine, qui ne représentait alors pas grand chose, exactement comme le trublion tout juste rapatrié, mais, avec beaucoup de fric et de propagande derrière, en achetant ici et là manifestants et snipers, ça peut le faire, comme en Ukraine, et tout le monde s'y emploie, Soros, l'oligarque Khodokorvski, tapi à l'étranger dans sa toile, toutes sortes de BHL, Glucksmann, Ackermann et autres avatars de la haine russophobe enragée, à l'intérieur comme à l'extérieur. J'ai trouvé ce texte remarquable d'Edouard Limonov:


"On m'a demandé dès le matin," qu'est-ce que tu n'aimes-tu pas chez Navalny? "

La réponse est: tout .

Je n'aime pas sa bouche de travers, sa femme desséchée et tirée à quatre épingles, ses enfants, ses excellentes photographies et son photographe, ses convictions, son argent de trouble origine, l’expression dégoûtée de son visage, son lourd squelette américanoïde, ses chemises, sa démagogie...Un faux derche, un cafard, une balance, un requin.

Navalny est un bourgeois moderne typique, une ordure, en un mot. Et une ordure d'un nouveau type – un néo bourgeois.

Son père soviétique - un sacré renard –avocat militaire, l'un des principaux avocats de l'armée, - a donné naissance à ces deux  hommes: Oleg et Alexey. Une mauvaise race est apparue, un type de personnes étranger à la Russie...

Un étranger, en un mot, qui n’est pas des nôtres. Et il n'a pas de nuque. "


Il est intéressant de comparer la physionomie de Limonov et celle de Navalny. Le visage aiguë, intelligent, provocateur de l'écrivain, la face molle et le regard vitreux et fuyant du blogueur tant aimé de la presse occidentale.

En fait, la définition qu'il donne de Navalny me paraîtrait assez bien convenir, avec quelques nuances, à Macron, Trudeau et toute espèce de satrape et de magouilleur au service de la mafia supranationale, ou infranationale, qui s'est emparée par fraude des USA et cherche à déstabiliser la Russie. On les dirait tous issus, comme le Covid, du même laboratoire, tenu par les mêmes bienfaiteurs de l'humanité.

On m'a fait remarquer que Limonov était un "national bolchevique". Ce n'est pas grave. D'ailleurs bolchevique n'est pas le mot juste, enfin pas aujourd'hui. Les bolcheviques sont maintenant aux USA, en Europe, sous forme de cocopitalistes, de libéraux trotskistes, de néocons, avides de casser toute forme de structure sociale ou traditionnelle normales et de liquider la race blanche et sa civilisation, partout, sauf pour l'instant en Russie. C'est bien d'ailleurs ce qui les enrage, cette résistance des Russes qui ont même réussi à russifier quelque peu leur merveilleux projet. Or si Limonov relève d'un communisme, c'est précisément de cette forme bâtarde devenue sous Brejnev presque supportable. Disons qu'il était national communiste ou même national soviétique. 

Ce qui est clair pour moi, c'est qu'entre Navalny et la clique infernale, je dis bien infernale, au sens propre du mot, qui essaie de nous le refiler comme la vérole, et un national soviétique, en dépit de mon antisoviétisme primaire, je choisirais le second. Si les nostalgiques de l'URSS ne faisaient pas cet immonde révisionnisme par rapport aux victimes des répressions diverses, et aux destructions culturelles, je ne serais à présent pas très loin de leur donner la main. Je serais tout à fait favorable à une nationalisation des banques et des entreprises vitales pour la nation, des chemins de fer, des routes, des parcs nationaux, de l'éducation, de la médecine. De toute façon, le cocopitalisme mondialiste ne cherche qu'à spolier la population de la planète pour la réduire à une masse indistincte de serfs, tandis qu'il s'appropriera tout ce qui échappe encore à son contrôle. Et son contrôle est complètement mafieux, avec des aspects idéologiques délirants et franchement sataniques.



jeudi 21 janvier 2021

Adieu monsieur Gauthier.

 


J'ai appris la mort du beau-frère de maman, qui était aussi le condisciple de mon beau-père et de mon oncle Henry, Pierre Gauthier, le père Gauthier, un petit homme jovial au parler méridional pittoresque; et c'est aussi tout un pan de ma vie qui disparaît. Henry, mon beau-père Pierre, ou Pedro, et le père Gauthier, étaient tous des élèves de l'institution Notre Dame de Valence, dont les deux derniers gardaient un affreux souvenir, Henry pas tellement, et en plus, il y sonnait la cloche, ce qui le faisait traiter de fayot!

Il était le fils du directeur de la chocolaterie Aiguebelle à Donzère et à la fin de la guerre, quand il était encore adolescent, des communistes espagnols avaient assassiné son père, acte pour lequel ils avaient été condamnés à trois mois de prison, un peu comme aujourd'hui ceux qui se prennent six mois avec sursis pour un viol collectif ou un lynchage de rue.

Il avait trouvé alors un grand soutien moral auprès de la famille de mon beau-père, paysans à Pierrelatte, et épousé l'une des filles de la maison, Marthoune; leur attachement réciproque était un sujet d'émerveillement, et aussi de plaisanteries diverses, c'étaient Philémon et Beaucis. Il a suvécu dix ans à Marthoune, les voici maintenant réunis.

Ils avaient une vieille maison bourgeoise à Sorgues, et sans enfants, recevaient leurs neveux et affiliés, je me souviens de joyeux dîners gastronomiques, Marthoune cuisinait très bien. Et le père Gauthier était un bon vivant, un joyeux compagnon. 

Ils se sont ensuite retirés aux Granges Gontardes, près de Pierrelatte et de Donzère, et nous fêtions chez eux la veille de Noël, avec la nombreuse famille Fargier. Sa femme préparait le loup pêché par son beau-frère à Sète, avec de la sauce hollandaise. Nous y allions le dimanche, aussi, jouer à la belote, les neveux passaient dire bonjour, avec leurs enfants. Maman et Marthoune comparaient leurs fleurs et en échangeaient. 

Les convives sont partis un par un pour l'autre monde, Simone, qui m'avait conseillé la littérature russe quand j'avais quinze ans, avec le résultat que l'on sait. Pedro, qui me manque toujours. Marisette et Jean. Marthoune. Maman...

C'est toute la France que j'ai connue qui s'en va. Ce qu'elle gardait de familial, de chaleureux, de traditionnel, de pittoresque.... 

Il est allé rejoindre ceux qui lui manquaient autant qu'à nous et que rassemblaient les tablées familiales, les déjeuners de chasse, les belotes du dimanche et les bons restaurants, les parties de rigolade, entre Pagnol et Audiard.

Adieu monsieur Gauthier. Adieu, la France... 


Départ

 

Près de nous se dressait un grand Christ douceâtre

Dans les reflets rosés de sa robe de plâtre,

 Montrant son cœur à nu de ses doigts repliés

Que d’un regard inquiet tu regardais bouger.

Et j’aurais bien voulu qu’ils bougeassent vraiment,

Que dans ses bras ouverts,  ma pauvre chère maman,

Il te prît aussitôt pour t’emporter là bas,

Où sont partis les gens que tu crois voir chez toi.

Nous n’avons pas pu boire encore jusqu’à la lie,  

Le calice trop amer de cette maladie.

Nous n’avons pas gravi  jusqu’au lointain sommet,

L’aride Golgotha qui nous fut préparé.

Et nous allons de pair, toi et moi, pas à pas,

Dans cette contrée floue que tu ne connais pas.

Soleil de mon matin, tu n’es plus que la cendre

De ta vie consumée qui s’éteint sans m’attendre.

                                      …

Sous les grands arceaux nus de cette vieille église,

Marthoune reposait dans sa barque scellée.

Sur le point de partir, fallait-il qu’elle nous dise,

Lasse depuis longtemps des jours qui  s‘éternisent,

Vers quel rivage étrange  elle s’était embarquée.

Et nous, depuis le quai, au travers du brouillard,

Ne distinguons pas bien les lointains obscurcis,

Vers lesquels  à ton tour tu vas partir aussi,

Comme tout un chacun doit le faire tôt ou tard.

A la vie qui s’enfuit, tu tenais bien pourtant,

Et tu vas recueillant ça et là tournoyant,

Les reflets qu’il t’en reste dans ce vent ténébreux

Qui les prend et les jette et ne laisse rien d’eux.

La vie, la douce vie de jour en jour coulant,

Du matin jusqu’au soir, de l’hiver au printemps,

Le rire des enfants et les mots qu’on échange,

La fleur qui s’épanouit et le pain frais qu’on mange,

Et les oiseaux qui passent et les chats assoupis,

Les courses, le jardin, les repas entre amis,

De jour en jour coulant, le sable des instants

Est à présent compté.

Il en reste si peu

Que voici le dernier,

Celui qui mène à Dieu,

Et va nous séparer.

 

Il va nous séparer, mais pour bien peu de temps,

Sortons, ma chère maman, de l’église endeuillée.

Au dehors le mistral essorant les nuées

Nous lave un grand morceau d’azur étourdissant

Où des constellations d’oiseaux avec lenteur

Filent leurs astres blancs dans sa claire rumeur.

Comment croire à la mort devant le dais glorieux

Que déploie la lumière après ces funérailles,

 Devant la liturgie que célèbrent les cieux

Repoussant les vantaux de la froide grisaille?  

Ce sont là haut nos anges qui nous font ces grands gestes,

Tracés dans la splendeur du soir déjà doré,

Et c’est le courbe éclat de leur envol céleste

Qui  soulève nos âmes et  vient les consoler.

 

Pierrelatte décembre 2011


mardi 19 janvier 2021

Le Jourdain de Pereslavl

 


L'église des Quarante Martyrs est très jolie, à l'intérieur comme à l'extérieur. Et si l'année dernière j'avais du mal à tenir debout, cette fois, j'ai bien encaissé, mes genoux vont beaucoup mieux, ce que je ne croyais pas possible. J'ai dit à l'évêque que je fêtais mes 50 ans d'orthodoxie, et il m'a félicitée, en ajoutant qu'alors, il n'était pas né. A vrai dire, j'ai dû recompter, car j'avais du mal à le croire, mais si, cinquante ans. L'ataman de l'association des cosaques m'a aussi serrée sur son coeur.

Une vieille digne et souriante m'a dit, en voyant se préparer la procession: "Ah maintenant, on va bénir notre Jourdain de Pereslavl". Et elle a ajouté avec un air ravi que nous avions enfin un hiver normal. Monseigneur Théoctyste nous a prévenu qu'il commencerait la bénédiction dans l'église, car il n'avait pas envie de geler sur place. Le moment venu, nous sommes descendus vers la rivière, sous les arbres entièrement givrés, et nos haleines faisaient de grands panaches de vapeur. L'air scintillait de paillettes de glace en suspension. On avait découpé une brèche et dressé une croix translucide, ornée de petites lampes. Je regardais les cosaques, cramponnés à leurs lanternes et leurs bannières. On agitait sans cesse l'eau de la brèche pour l'empêcher de se refermer. Malgré ma doudoune, je sentais le froid me saisir, comme si une coque de glace se refermait sur moi, et je plaignais notre évêque, en ses ornements liturgiques blancs, sans gants, cela devait être dur. Au dessus des toits enneigés, je voyais un croissant livide et brillant et je pensais à la chanson d'Aristide Bruant: 

"Elle voyait par les nuits d'gelée

La voûte étoilée

Et la lune en croissant

Qui brillait blanche et fatidique

Sur la p'tite croix d'la basilique

Rue Saint Vincent..."

Ce qui naturellement est un peu insolite dans un environnement aussi russe.

Pendant que nous remontions vers l'église, un couple a commencé à se déshabiller, et l'homme, vêtu d'une chemise blanche, s'est plongé dans l'eau noire par trois fois, avec un signe de croix. 

Depuis le matin, et tout le temps du service, je me trouvais dans  une sorte de joie paisible inexplicable, et je me souviens que lorsque ma tante Jackie était morte, j'avais ressenti la même chose, à l'église, comme un encouragement, le signe qu'on l'avait prise en mains et que tout allait bien pour elle. C'était la première fois, depuis qu'Henry nous a quittés, que je sortais de cette tristesse latente, avec un sentiment de confiance enfantine, comme si un ange souriant me disait au fond du coeur qu'on s'occupait des gens pour qui je prie...

 










Ce matin, je suis arrivée à la cathédrale à peine en retard. Je me suis confessée et j'ai communié avec la même impression de légèreté et de joie subtile. La bénédiction des eaux s'est faite dans l'église à côté, et j'ai pu remplir ma bouteille. Les prêtres, comme d'habitude, se faisaient un plaisir d'administrer une douche d'eau bénite à leurs paroissiens, ils nous aspergeaient en riant, positivement ravis; de vrais gamins. Cette année, pour cause de Covid, il y a moins de monde, c'est-à-dire que ceux qui viennent chercher de l'eau bénite parce qu'ils y voient seulement un moyen magique de se soigner se sont abstenus, les amateurs d'exploits sportifs dans les eaux glacées également. Il faisait moins froid, seulement - 16°, et Gilles m'a annoncé ensuite au café que nous aurions +3 et la gadoue à la fin de la semaine, et bien sûr, la patinoire dès que tout cela va regeler....

Monseigneur Théoctyste a posté la version russe de l'article que j'avais écrit pour "Parlons d'orthodoxie" sur ma conversion. Dima Paramonov m'a dit qu'il avait lu cela "comme si c'était du cinéma".

la queue pour remplir les bouteilles


lundi 18 janvier 2021

Les eaux du Jourdain

 Je me suis avisée ce matin que la venue imminente de la fête de la Théophanie marquait le cinquantième (cinquantième!!!) anniversaire de mon entrée dans l'orthodoxie. J'allais avoir dix neuf ans, j'étais étudiante aux Langues O. J'avais été introduite à l'église de Vanves par mon professeur de russe, madame Marcadé; pourtant très opposée, par la suite, à ma conversion. Après avoir rencontré le père Serge Chevitch, j'avais dit à ma famille que j'avais vu un saint, ce qui n'avait pas été acceuilli avec beaucoup de sérieux. Pourtant, c'était le cas. Mais c'était le père Barsanuphe qui m'avait prise en mains, en fin de compte. Et après avoir passé trois mois à courir me geler au skite du Saint Esprit avec le bel enthousiasme de la jeunesse, j'avais sauté le pas pour la Théophanie. 

Je me souviens que ma tante Renée était venue assister à la chose et que cela m'avait déstabilisée. J'avais ressenti tout à coup une trouille immense, alors que je ne rêvais que de ça depuis trois ans. J'avais l'impression d'accomplir quelque chose de fatal qui dépassait mon intention de départ, de sortir de ma matrice française. Des années plus tard, alors que je m'étais éloignée de l'Eglise pour toutes sortes de raisons, madame Marcadé m'avait dit qu'elle était hostile aux conversions de Français, parce que cela les coupait de leurs racines, mais qu'une fois que c'était fait, ils ne revenaient pas en arrière et que par conséquent, elle me priait, "bougre de gourde", de reprendre une pratique religieuse.

Dans le train qui me ramenait en province, j'avais rencontré un moine de saint Antoine le Grand, le monastère du père Placide, et lui avais rapporté les paroles de madame Marcadé. "Les racines des orthodoxes français sont au ciel", m'avait-il répondu.

Pourtant, par la suite, d'abord en Russie, puis au monastère de Solan, je m'étais aperçue que ma petite greffe entée sur l'arbre orthodoxe retrouvait une sève ancestrale qui me reliait au plus ancien de cette matrice française, ce plus ancien, ce plus vivifiant, ce plus éternel que des scories récentes m'avaient masqué.

Je regrettais que l'événement n'eût pas eu lieu pour Pâques, mais cette fête de la Théophanie m'est au fil des années devenue très chère. D'abord, elle précède de peu mon anniversaire, elle est liée à l'eau et à l'Esprit, au coeur de l'hiver, et elle s'accompagne toujours pour moi, sinon de révélations, du moins de signes.

Je me suis couchée hier baignée de larmes, en pensant à ma famille, à mon oncle Henry, et j'avais du mal à m'endormir. D'autant plus que les sermons et considérations religieuses que je vois passer sur internet me découragent plutôt qu'autre chose. Au réveil, je me sentais légère, paisible, ma tristesse était devenue lumineuse. Si nulle que je sois sur le plan spirituel, Dieu ne me laisse pas tomber.

Ce soir, j'irai aux vigiles de la Théophanie à l'église des Quarante Martyrs, à l'embouchure de la rivière, où officiera monseigneur Théoctyste. J'aurais pu aller à un autre endroit où l'on m'avait invitée, mais nous avons pour une fois des températures de saison, le gel de la Théophanie, traditionnellement le point culminant de l'hiver, il fait - 26. Je ne voulais pas me lancer sur les routes avec un retour de nuit. 


les eaux du Jourdain, vers spirituel intrerprété par

Andreï Baïkalets et Ekaterina Kotova

vendredi 15 janvier 2021

Le pain et le vin

 


Grand soleil et froid, - 18°. Je pense beaucoup à Henry et le recommande souvent à Dieu, mais je n’arrive pas à lire l’acathiste pour les défunts tous les jours, je l’ai fait pour maman et Patrick et j’ai terriblement honte de ne pas mieux l’accompagner. Cela fait plus de neuf jours qu’il est mort, le neuvième jour, j’ai lu l’acathiste. Je l’ai lu un jour sur deux. D’après la tradition orthodoxe, son âme a commencé à s’éloigner des lieux où il a passé sa vie, elle sera arrivée le quarantième jour après son décès.

Parfois je me représente qu’il a retrouvé sa vieille copine Jackie, maman, mon père, Baby, papi et mamie, l’oncle Louis. Il sera enterré demain avec eux, dans le caveau de papi, à Annonay. Nous avons unanimement souhaité lui faire une place bien méritée, dommage que je n’ai pas pu y mettre aussi mon père.

Mano lit tous les jours l’hommage que je lui ai rendu dans mes chroniques sous le titre « un bouquet d’oeillets » et que Philippe lira demain à ses funérailles. Martine voudrait trouver un bouquet d’oeillets blancs à cette occasion, mais ce n’est pas la saison, j'espère qu'elle pourra en trouver un poussé sous serre sur la côte d'Azur... Nous avons pleuré ensemble sur Skype à 3000 km l’une de l’autre.

A cause des mesures sadiques des médiocres enragés qui se sont emparés de la France, ceux qui l’accompagneront à Annonay mercredi ne pourrons même pas se réunir au restaurant pour se remonter le moral.

La mère d'un ami loue en ce moment la moitié de ma maison. Elle fait partie d’une espèce de communauté religieuse ; les offices se font par internet, elle a sans arrêt des conférences avec des gens de cette communauté, à distance. Je ne sais pas pourquoi mais cette obstination à vouloir entraîner les autres dans son truc, et puis cet air perpétuellement joyeux, cela commence à me rappeler les charismatiques cathos, et du reste, elle est oecuméniste, sa communauté sans doute aussi. Ce qui a de terrible dans ce genre de chose, c’est qu’apparemment, le discours est chrétien, et pourtant, il me paraît faux, je ne reconnais pas ce que j'ai découvert dans l'orthodoxie, c'est-à-dire au fond ce qui était notre vision des choses au moyen âge. C’est comme le pape qui fait appel au discours chrétien pour nous faire accepter n'importe quoi. Elle a toujours l’air de celle qui comprend, quand son interlocuteur est dans la plus profonde erreur, et me convie à ces conférences, peut-être devrais-je m’imposer cela, histoire de voir. Il y a des gens, comme ma Liouba, qui me donnent une grande impression de spiritualité, sans être si démonstratifs, et discuter avec elle est toujours extrêmement éclairant, alors que là, j'ai l'impression que nous ne parlons pas la même langue. Si j’ai bien compris, sa communauté est sans cesse en communication sur internet, sans cesse prêches et conférences, actions caritatives ou missionnaires de toutes sortes, rencontres interconfessionnelles, et elle me demande ce que je fais de concrètement chrétien, mais je ne sais pas... Je vis et respire avec cela depuis longtemps, et j’ai bien conscience de ne pas en être très loin, mais je ne me vois pas passer mon temps en conférences fraternelles et activités humanitaires frénétiques, tout cela me rappelle, avec « l’air joyeux », tout ce qui m’avait fait fuir dans mon enfance vers une spiritualité plus intériorisée, plus silencieuse, plus virile et plus lumineuse. Quand elle me parle de gens qui rayonnent, j’ai l’impression de voir ces illuminés au sourire perpétuel qui me fichaient le malaise, et non le starets Thaddée ou saint Porphyre. Elle approuve toutes les mesures anticovid, et lorsque je lui ai posé la  question : «Mais quand même, la communion eucharistique, il s’agit du Corps et du Sang du Christ, non ? Avec les mêmes propriétés que le Christ lui-même ?

- Mais cela reste quand même du pain et du vin, c’est notre communion fraternelle qui en fait le Corps et le Sang du Christ.

- Je comprends bien que cela reste du pain et du vin, mais investis du Corps et du Sang du Christ, qui nous rendent participants au Christ, je vous dis ça, alors que je suis du genre à avoir du mal à croire, mais ce n’est pas seulement un symbole de notre fraternité, c’est le Corps et le Sang du Christ sous forme de pain et de vin, sinon, on est où là ?"

Je ne sais pas ce qu’elle m’a répondu, en fait je ne pense pas avoir compris, et je me dis que si j’avais été convaincue, j’aurais compris et m’en serais souvenue. Il me reste à interroger mon père Valentin, je crois que c'est un de ses sujets favoris. Question théologie, je suis au niveau de la grand-mère russe de base.

dimanche 10 janvier 2021

Participation

 Pour Noël, je me suis confessée à monseigneur Théoctyste. Je lui ai dit que j'étais très paresseuse, que je devais toujours me pousser pour prier ou aller à l'église, que cela me coûtait des efforts énormes, que souvent je n'avais pas la tête à ça, et aucune joie spirituelle, alors qu'en principe, je devrais me précipiter à l'église sur les ailes de la grâce, après toute une vie dans l'orthodoxie, même si je ne me suis pas donné tout le mal nécessaire. Il a pris un air amusé: "On voit bien que vous n'entendez pas la confession des moines! Tout va bien! Vous êtes dans la bonne direction! "

Ensuite, j'ai appelé mon père Valentin pour lui souhaiter un joyeux Noël. Nous avons discuté un peu. "Je devrais passer au dessus de ce qui arrive à nos divers pays, de ce que s'efforcent d'en faire tous les satans à l'oeuvre, je devrais prendre de la hauteur, languir après la patrie céleste, et cesser de me désoler pour nos patries terrestres, je veux dire la mienne et la vôtre qui est devenue la mienne, encore que la vôtre n'en soit pas au point où en est la mienne, mais on lui a fait quand même beaucoup de mal, et on est bien décidé à lui en faire encore plus, à nous faire tous disparaître. Je devrais attendre la parousie. Il y a des gens qui voient les choses comme cela et qui me reprochent de ne pas surmonter. Eh bien vous ne pouvez pas savoir comme je le vis mal. Je ne surmonte pas du tout. Cela me rend malade de voir disparaître la France dans un magma multiracial et multiculturel ou plutôt complètement privé de toute espèce de culture, et l'idée que la Russie prenne le même chemin me rend malade aussi. Certes je n'ai pas d'enfants, Dieu m'a d'ailleurs peut-être épargnée en me les refusant, mais j'en suis malade pour les enfants des autres. Je déteste le monde qu'on nous fait. Je l'ai d'ailleurs détesté dès l'enfance. Mais à côté de ce que nous vivons aujourd'hui... Savoir que la civilisation qui nous a formés va disparaître quasiment avec nous est quand même un sentiment curieux, inédit, et assez tragique... 

- Laurence, mais comment vous dire? Je trouve ce sentiment bien naturel et je le partage..."

Bon, il y a des gens qui meurent pour leur patrie terrestre, et aussi pour les gens de chair et de sang, tous mortels qui l'habitent, et pour leurs proches. Il y a peut-être des détachements dont on n'est pas capable avant d'avoir quitté son corps et ce monde, et qui, du reste, par l'insensibilité qu'ils nous donnent, ne sont pas de saison. Je voyais ce matin un texte russe qui m'a beaucoup plu, du peintre Andreï Fedorov, dont j'ajoute un tableau:

Participation

Une curieuse impression de participation profonde à l'histoire de ma Patrie a commencé à s'affirmer en moi depuis quelques années. Bien sûr, je vivais sur cette terre, j'étudiais dans les manuels, je prêtais serment, je faisais allégeance. Je m'intéressais vivement, je débattais, j'écoutais. Je parlais et pensais en cette langue, j'émettais des jugements. Mais une fois, nous avons sur un coup de tête fait un saut de 600 verstes à Ostachkov. Nous voulions simplement nous baigner dans le lac Seliguer. Nous avions bourré la voiture d'enfants, de maillots de bains, de "Kadarka" dans des sacs en papier… A Borissoglebsk, j'ai eu un choc, et nous avons erré dans les lieux marqués par saint Irinarque. Depuis, le Temps des Troubles m'est entré profondément dans l'âme comme une écharde. Que n'ai-je pas lu depuis sur ce thème, avec qui n'ai-je pas débattu. J'avais pris conscience de la dimension incommensurable de ces événements redoutables et de la quantité de mensonges et de falsifications qui les entouraient, à commencer par les déformations et l'omission des intrigues autour de l'investiture de la dynastie des Romanov; jusqu'à leur complète défiguration à la période soviétique. Maintenant, il est très difficile de s'y retrouver, il y a trop de charlatanisme et d'incompétence. Encore une fois, l'esprit de notre temps, déchu jusqu'aux sensations de bas étage invérifiées et aux cendres jetées ni là où il le faut, ni en juste quantité. Et en dépit de tout, la mémoire historique survit dans le peuple sous forme de rumeur, de légendes et récits. On cherche jusqu'à aujourd'hui et on trouve parfois des trésors enfouis par les habitants des villages brûlés, cachés la veille des massacres de masse… Et quelquefois, au moment de l'éclairage automnal des eaux des rivières, on retrouve des armes superbement conservées et les os des guerriers. Et beaucoup de choses se conservent dans les noms des villages. Voici Douchilovo (du verbe dushit', étouffer). Ici étaient disposées des rangées de potences, où les Polonais ont supplicié mes compatriotes par centaines, et ici vivent les descendants des équipes qui les ensevelissaient. voici les innombrables Gari, Gorelki. Pogoreltsi (de la racine gor, brûler), brûlés par les conquérants avec tous leurs habitants. .. Et tout cela fut longtemps et attentivement caché et tu. D'après l'un des spécialistes respectés de la région, coulaient ici des rivières de sang, et la Russie était pleine de gémissements. Ce que les conquérants rapportaient scrupuleusement dans leurs écrits. Mais il est en quelque sorte inconvenant de mettre cela en lumière. C'est trop intolérant... Nous roulions le long de la route qui longeait le théâtre de ces événements, le vieil itinéraire reliant Kostroma à Nijni. Et partout s'élevaient les ruines des églises, construites par nos ancêtres pour célébrer cette victoire. Il faut reconnaître qua dans beaucoup d'endroits existent des signes qui rappellent ces événements. Ici fut écrasée la milice de Kinechma, et tous les guerriers égorgés et enterrés dans une fosse commune… Ici au contraire, on mit en pièces un détachement de bourreaux polonais avec un certain seigneur un tel… Et depuis cet endroit en marche sur Kostroma se déplaçaient les régiments des bourgs et villages voisins… Et les églises, les chapelles, les sanctuaires… La Russie est un pays secret. Il faut beaucoup l'aimer d'un coeur pur pour qu'elle s'ouvre dans toute sa grandeur, surmontant le charme sans prétention des champs abandonnés; des prairies fleuries, des bois, des fourrés et des neiges qui la couvrent une grande part de l'année… Il faut savoir discerner dans le visage d'un simple gars de la campagne non pas un représentant de la populace, comme il est admis maintenant dans la société glamour, mais le vrai propriétaire de toute cette tristesse et de cette soif de liberté, ce mot presque mort, qui reflète très exactement les desseins et les élans de l'homme russe. Et il serait temps d'arrêter de mentir, au moins à soi-même. Ce sont précisément les pertes humaines monstrueuses de mon peuple qui ont permis l'existence de cette agréable partie mondaine qu'on appelle le monde libre. Et cela ne fut pas le résultat de l'enivrement sadique de tyrans appuyés par les mitrailleuses des détachements de blocage, mais d'une cause que personne ne peut jamais exprimer par des mots… on ne peut en saisir l'explication que dans ces merveilleuses chansons que chantent encore parfois les gens et qui n'ont rien à voir avec les refrains vulgaires de "Zolotoie Koltso" ou de Babkina.

Ce texte m'inspire toutes sortes de réflexions. Il est difficile à traduire, car il fait appel à des mots qui recouvrent des réalités très russes qui n'ont pas vraiment d'équivalent français. Ce qui est traduit par participation relève de cette participation qui nous fait communier dans l'eucharistie, par exemple. C'est cette notion qui a fait du peuple russe une espèce de famille. J'avais vu un concert donné par des moines du mont Athos. Le vieil higoumène qui les dirigeait l'avait conclu par une homélie sur la fraternité donnée à tous les orthodoxes par leur communion au même calice, quel que soit le pays où ils vivent. Ce qui est une réalité, tant que la politique ne s'en mêle pas. Le peuple russe, avant que des idéologies étrangères ne vinssent le diviser, était une famille, qui pouvait avoir ses brebis noires et ses mauvais sujets mais qui se levait comme un seul homme si on l'attaquait, pour défendre peut-être quelque chose de plus mystique que sa perpétuation historique, je ne pourrais comparer cela chez nous qu'à l'épopée de Jeanne d'Arc. D'une façon générale, il me semble historiquement plus homogène que le peuple français, car son sentiment d'appartenance est plus lié à un ensemble de valeurs, à une foi, à une culture commune qu'à un terroir donné, et les différences linguistiques sont d'ailleurs beaucoup moins marqué dans les différents territoires russes que dans l'espace français. Et quand au folklore, on a vu qu'avec d'innombrables variations locales, il présentait un fond uni et unique. Ce peuple s'est levé comme un seul homme une première fois quand les Polonais sont arrivés à Moscou et se sont emparés de la Russie par l'entremise de leur créature, le faux Dimitri, un aventurier qui se faisait passer pour le fils assassiné d'Ivan le Terrible. Un immense soulèvement populaire, dirrigé par la marchand Minine et le prince Pojarski, avait libéré le pays d'une présence étrangère méprisante et cruelle qui s'était fait haïr en quelques mois, j'ignorais d'ailleurs moi-même que les exactions avaient pris une telle ampleur dans tout le pays, et que les occidentaux les aient cachés est compréhensible, dans la mesure où présenter les Polonais comme d 'éternels martyrs, les civilisés de l'est, et les Russes comme des sauvages est un des ressorts de la politique russophobe. Le second grand soulèvement fut celui que rencontra Napoléon, pourtant persuadé qu'apportant les "lumières de la démocratie" à ce pays de moujiks obscurs pressurés, il serait accueilli avec joie. Et le troisième, celui qui triompha de l'Allemagne nazie, quand communistes ou non, les Russes s'unirent pour chasser l'envahisseur.
Je m'étonne cependant que ces exactions polonaises aient été dissimulées depuis si longtemps. C'est qu'en Russie même, il y a toute une frange de gens qui ne communient pas au même calice, soit qu'ils n'aient pas de calice du tout, et l'aient même en horreur, soient qu'ils l'aient renié, pour des raisons idéologiques ou bassement intéressées. Ceux-là méprisent le simple gars de la campagne, et son folklore immémorial tout autant que sa foi orthodoxe. Curieux que je me sente aussi "participante" à ce peuple, et précisément, en fin de compte, par cette communion au même calice, et à tout ce qui l'a édifié tel qu'il est. Sans doute parce que je n'ai pu participer à la communion du calice français, ni à tout ce qui avait édifié la France, parce qu'en réalité, cela ne m'était pas offert, sauf sous forme de paysages, de bâtiments et de littérature. Il ne m'arrivait plus la sève vivifiante des origines.
tableau d'Andreï Fedorov

Hier soir, j'étais invitée par les cosaques de Pereslavl. Olga avait préparé avec la jeunesse la crèche russe qui se présente comme un théâtre de poupées mettant en scène la Nativité. C'était très bien interprété par des enfants convaincus, mais les chansons étaient enregistrées au lieu d'être chantées, ce qui est dommage. J'en ai chanté une, avec les gousli. Après la représentation, nous avons dîné tous ensemble. Un cosaque a dit sa joie de voir les enfants grandir avec des traditions que, dans sa génération on n'avait pas connues, car elles étaient bannies par le pouvoir soviétique. Une femme a remercié Olga, en retenant des larmes d'émotion, d'avoir donné à sa fille l'amour de tout ce qui était russe. J'étais à côté de notre cosaque suisse, Benjamin, de sa femme et de son petit garçon qui était fasciné par les pois blancs sur ma blouse rouge. J'ai fait un discours moi aussi, et parlé succintement de ce que m'avaient suggéré les réflexions du peintre Fedorov à leurs propos. J'ai dit l'importance de restaurer cet esprit qui nous fait participer les uns aux autres, et participer à nos ancêtres, à tout ce qui nous entoure, à la fois dans le présent et le passé, dans un présent porté par tout le volume insondable de ce qui le précède et le produit sans cesse. Le cosaque qui avait remercié Olga m'a dit que Benjamin et moi n'étions pas venus ici par hasard, et que nous avions un rôle à jouer sur place, où nous devions rester coûte que coûte. "Nous avons donné naissance à un îlot, où nous restaurons tout cela pour le transmettre, et des îlots semblables apparaissent un peu partout. De la sorte, goutte à goutte, nous nous étendrons et formerons des ruisseaux et des rivières." Cela m'a fait penser à la théorie des isolats professée par Jean Raspail. Tous ces gens sont très chaleureux, très purs, avec des enfants nourris d'épopées, de grands sentiments, qui respectent les adultes et semblent épanouis.




jeudi 7 janvier 2021

Visiteuses russes

 Il y a plus de 20 ans, la fille de mon père Valentin, Macha, pour laquelle j'ai une grande tendresse, était partie pour la France, avec son amie Ania. Sachant qu'elles voulaient aller à Marseille; je souhaitais les présenter à mon oncle Henry et à ma tante Mano. Dans mon esprit, il s'agissait juste d'une visite, mais Mano avait compris qu'il fallait les héberger, et après avoir accepté, avait commencé à se faire un sang d'encre à cette idée. Elle avait peur que les deux innocentes jeunes Russes ne désirassent aller en discothèque, où elles risquaient de se faire enlever pour la traite des blanches, et elle m'avertissait qu'elle n'avait pas l'intention de les accompagner pour les chaperonner! Regrettant déjà d'avoir initié tout cela, j'avais protesté que ces jeunes filles n'allaient jamais en discothèque, que ce n'était pas du tout leur genre. 

Une fois les deux étudiantes sur place, ce fut le grand amour immédiat, entre elles, mon oncle et ma tante qui appréciaient beaucoup leur fraicheur, leur gentillesse, leur gaieté et leur spontanéité. "Elles sont comme nous étions dans les années 40, on ne voit plus de jeunes comme elles de nos jours".  Apprenant qu'Henry avait été résistant, elles l'avaient aussitôt accablé de questions, auxquelles il avait été ravi de répondre, car il ne rencontrait pas dans sa famille un intérêt aussi passionné! Il leur avait montré tous ses souvenirs et coupures de journaux. Par la suite, je n'ai pas fait de séjour à Marseille sans qu'Henry et Mano n'évoquassent avec tendresse leurs deux visiteuses russes. 

De mon côté, quand j'étais allée voir la mère de Macha, Inna, la femme du père Valentin, qui était communiste, elle m'avait dit avec respect: "Vous m'aviez caché que vous aviez un oncle partisan, un héros de la résistance!"

Ania vient de m'envoyer, avec ses condoléances, les photos qu'elle a gardées de ces moments:



 

   J'ai la certitude que mon oncle Henry est bien, à présent, qu'il est soulagé, et qu'il est mystérieusement près de nous. J'ai bu un verre de mon vin de pommes à sa mémoire. Le voici maintenant près de maman, de ma tante Jackie, sa grande copine, qui lui avait dit, alors qu'il avait dix-huit ans et qu'il était très timide: "Henry, si tu veux plaire aux filles, il faut les faire rire!" Il a retrouvé mon père, son copain Loulou du "club des Laveuses". Mon grand-père et ma grand-mère qu'il adorait. Mon beau-père Pedro avec lequel il avait été à l'institut Notre-Dame de Valence. Tous ceux qui nous étaient et nous sont encore si chers.