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lundi 14 février 2022

soupière bretonne

 


Nous avons eu le mois de janvier au mois de décembre, le mois de février au mois de janvier, et on dirait que nous sommes partis pour mars en février. Et ce serait très bien, si je savais qu'en mars, nous aurons avril, mais je crains un retour de bâton! Je fais beaucoup de considérations météorologiques, mais cela joue un tel rôle dans notre vie!

Me voici de nouveau dans les mondanités, avant-hier, je suis allée au vernissage de l'artiste peintre Ioulia qui avait séjourné chez moi et dessine les maisons traditionnelles de Pereslavl en voie de disparition. C'était dans une galerie qui expose aussi des objets artisanaux et des antiquités. Tout à coup, je vois une soupière qui m'avait l'air complètement bretonne et me rappelait le bol à oreilles avec mon nom dessus dans lequel je buvais dans ma petite enfance, chez mes grands-parents. Renseignement pris, elle l'était. 

Un écran diffusait des vues anciennes de Pereslavl, avant même les destructions soviétiques. C'était si incroyablement joli, d'innombrables coupoles, de belles maisons de bois, des prairies, et tout semblait en bon état et non en perpétuel chantier.

En sortant, j'ai vu un coucher de soleil fantastique, un ciel incandescent, par dessus la neige devenue si vite sale, et une maison jaune. La fulgurance brève d'une énorme braise. 

Hier soir, c'était l'épisode 2 de mon interminable jubilé, la fête pour ceux que je connais ici. Nous n'étions au départ pas très nombreux, mais Génia le balalaiker est arrivé avec sa petite amie, sa mère, ses soeurs et Katia et nous avons tous chanté. J'ai eu mon trou de mémoire, mais j'avais prévenu tout le monde. A part le trou, j'ai aussi fait des erreurs que je ne fais jamais dans le texte des chansons... Mais bon, cela aurait pu être pire. Et la soirée a été très chaleureuse, avec des perspectives pour l'utilisation culturelle du local de Gilles. Il y avait ma voisine Ania et son fils Aliocha qui est en train de devenir beau. Il y avait aussi Jan, le réparateur de lives anciens, sa femme Olga et leur fils Daniil. J'ai appris qu'il y avait un autre Hollandais dans le pays et que celui-ci avait une ferme, avec des vaches hollandaises et d'excellents produits laitiers. Une bonne compagnie. J'apprécie la chance que nous avons de pouvoir nous réunir, comme des gens normaux dans une période normale, sans irruption de robocops, comme en France. 

Maintenant, il me reste à préparer l'épisode 3 et final à Moscou, c'est une autre paire de manches. Il y aura beaucoup plus de monde, et il me faut aller m'en occuper là bas. Je crois que ce sera la dernière fois. Cela commence à être au dessus de mes forces et de mes moyens. L'année prochaine, je ferai quelque chose ici, viendra qui voudra ou pourra.

Je dois aussi aller au service d'immigration montrer patte blanche, et c'est pour moi une vraie corvée. La corvée annuelle.




samedi 12 février 2022

Va-t-en guerre

 On sent que l'hiver est dans sa partie printanière, maintenant. D'abord, il fait plein jour à huit heures du matin, et puis la neige commence à fondre. C'est naturellement trop tôt, et nous aurons encore des retours de froid. Mais il se peut que l'hiver ayant été précoce, le printemps le soit aussi. Comme on l'attend, ici... Et pourtant, cet hiver a été magnifique, on les souhaiterait tous comme cela.


J'ai installé la petite maison dans les étagères de mon bureau, et Georgette ne la quitte plus, car elle est protégée, près de moi, c'est juste le rêve. Les autres ne s'intéressent pas du tout à cette boîte. Pour illustrer cette chronique, c'est mieux que la gueule de Macron.  

Je fête mon jubilé au café après demain, et je ne me sens pas du tout prête à chanter pour mes invités, je pense d'ailleurs que je n'y arriverai jamais. Cela m'embêterait d'abandonner parce que j'ai quand même fait des progrès, mais comme on dit, qui trop embrasse mal étreint. Depuis la covid, des textes que je connaissais par coeur m'échappent tout à coup, ou je me mets à jouer de travers quelque chose qui ne me posait pas de problèmes. D'un autre côté, m'obstiner rééduque certainement ma pauvre cervelle... Je vais peut-être me limiter, comme répertoire, aux vers spirituels. C'était d'ailleurs mon intention, mais Skountsev me fait tout apprendre.

Hier, j'ai vu un journaliste de Rossiiskaïa Gazeta; il était sympa et me posait des questions intelligentes. Nous nous sommes rencontrés au café. Je parlais russe avec aisance, j'en étais même étonnée. Quelle que soit la langue, il est sans doute plus facile de répondre à des questions intelligentes qu'à des questions idiotes. Cette nuit, j'ai mal dormi, et j'ai remarqué que le lendemain, dans ces cas-là, j'avais de grosses défaillances... J'espère que cet état est passager. Sinon, je vais finir par me remettre à fumer.

Le journaliste, Constantin, a remarqué que les étrangers en Russie, à part ceux qui y font du business, cherchent une Russie idéale et ne s'intéressent pas à la Russie contemporaine, c'était une des questions abordées. Je lui ai répondu que si je n'idéalisais pas tant que cela la Russie, je ne m'intéressais absolument pas à ses aspects contemporains, en effet, non plus que je ne m'intéresse à ceux de la France; je rejette la modernité depuis mon enfance. Certes, ai-je précisé, j'ai eu un petit moment rock'n'roll dans ma jeunesse, parce que c'est difficile, quand on est jeune, de rester toujours à l'écart. Mais je m'intéressais au bon rock, pas à la variété de merde. Tout dépend aussi de ce qu'on entend par contemporain. Ce qui m'intéresse n'est pas forcément ce qui est vieux, mais ce qui est traditionnel, enraciné, inscrit dans le cosmos. Je suis beaucoup plus consternée par la disparition de la transmission traditionnelle que par celle des objets eux-mêmes. S'ils étaient remplacés, ce ne serait pas si grave. Quand mes cosaques chantent une chanson ancienne, elle est contemporaine, car on la répète depuis des siècles, et elle vit encore, toujours renouvelée. Mais elle ne fait pas partie de la modernité et de sa civilisation hideuse et néfaste.

Je me suis lancée dans la confection de bugnes, recette de ma grand-mère transmise par ma tante Mano. Cela sentait le cognac et la fleur d'oranger dans la cuisine. Des odeurs d'enfance française. Une enfance qui me hante, je me souviens de maman qui voulait "rentrer chez elle", c'est-à-dire dans l'appartement qu'avaient ses parents dans les années 30... Après la mort de ma grand-mère, j'étais extrêmement déprimée. Je faisais une overdose de deuils. Et puis j'avais rêvé d'elle dans sa cuisine de l'Armençon, mais tout y était lumineux et transfiguré, y compris elle-même. C'est dans cette cuisine que se confectionnaient les bugnes. 

Les voix discordantes, à propos du convoi français, tout au moins, se font de plus en plus entendre. L'une d'elles propose aux gens de filer vite fait à la campagne, de s'organiser en communes néorurales, de sortir du système, et en effet, ce n'est pas une mauvaise idée, je serais jeune à l'heure qu'il est, c'est ce que je ferais. Mais je ne sais pas si les transhumanistes seront plus tolérants aux réfractaires de la permaculture que l'ont été les communistes aux paysans russes dans les années 20 et 30... Cependant, jeune, je le ferais quand même, je préfèrerais mourir debout à la campagne qu'en ville, bouffée par les rats. 

Ce qui m'inquiète, c'est que les médias français parlent beaucoup du phénomène, d'après ce qu'on me dit, et invitent de vrais connards aux différents faux débats, pour exaspérer les gens. Je ne pensais pas en arriver un jour à voir dans la classe dirigeante un ramassis de malfaiteurs arrogants et incultes, fourbes, lâches et retors, dont on doit se méfier à chaque pas, et cela, alors que je n'ai jamais eu pour elle une estime excessive... Mais enfin à une certaine époque, je n'aurais pas imaginé qu'ils fussent ignobles à ce point. 

La propagande anti russe atteint des sommets de mensonge fantasmagorique. Pourtant, je ne croyais pas trop à la fameuse guerre, parce que contrairement à ce que racontent ces menteurs professionnels, la Russie n'a pas besoin de s'étendre indéfiniment, elle a bien assez à faire avec ses propres régions; mais il est certain que d'une part, elle ne peut abandonner au nettoyage ethnique des populations russes sur un territoire arbitrairement placé dans ce golem de fabrication soviétique qu'est l'Ukraine; et d'autre part, elle ne peut tolérer qu'on la menace à ses frontières, et lui reproche des mouvements de troupe sur son propre terrain. Si les psychopathes hagards des gouvernements occidentaux et leurs bonimenteurs ne font pas une saloperie de trop, ce ne sont certainement pas les Russes qui lanceront le mouvement. Mais comment savoir, quand on a affaire à des dingues ivres de pouvoir qui se prennent pour des surhommes? 

Comme la vérité sur l'opération covid se fait peu à peu jour, bien glauque, celle sur le Donbass transpire parfois, une journaliste officielle s'est laissée aller à montrer les bombardements de civils par les gentils démocrates ukrainiens agressés par les méchants russes, ouin, ouin, snif. 

https://www.facebook.com/watch/?v=642862063713213

Il paraît que la direction de sa chaîne était furieuse. Eh oui, parfois, les journalistes ont encore des réflexes professionnels à peu près normaux, ça arrive. Il y a même de temps en temps un ou deux députés honnêtes à l'Assemblée ou au parlement européen. 

N'empêche qu'il faut vraiment s'appliquer pour garder le moral et son calme. Je conseille de regarder la capsule 64 de Stratpol. Xavier Moreau y fait des mises au point très nécessaires, sur l'histoire russe, sur l'Ukraine, sur les famines organisées qui n'avaient pas le caractère d'un nettoyage ethnique, car elles ont touché toutes les régions de l'ancien Empire où les paysans avaient une certaine aisance, et un caractère indépendant, c'étaient les paysans qui étaient visés, pas les Ukrainiens. La révolution n'a pas été faite par les Russes. Ses considérations générales à la fin de la vidéo, le parallèle avec 1984, sont très intéressantes, ce qu'il dit sur le muselage et la vaccination forcée des enfants. Il souligne que le totalitarisme, pour s'installer solidement, demande de notre part la trahison de ceux qui nous sont chers, le sacrifice à Moloch.

Dans les raisons que j'avais de partir, comme je le répète assez souvent, il y avait mon refus de rester, en cas de guerre, dans le mauvais camp celui de l'agression hypocrite et fourbe, telle que je l'ai vue à l'oeuvre en Irak, en Serbie, et en Ukraine, avec le Donbass. Sans compter que je n'adhère absolument pas aux "valeurs occidentales" délirantes qui deviennent complètement totalitaires. Je suis soulagée d'en être ici un peu à l'abri. A noter que mon journaliste n'a émis aucune objection quand je lui ai dit que l'occident n'avait  plus rien de démocratique. Je crois que cela commence vraiment à se voir!

Je crains que voyant la hideuse vérité de l'opération covid sortir du puits bien puante, la caste ne provoque une guerre avec la Russie pour ne pas avoir à en répondre. Ce serait en quelque sorte le plan B de cette bande de salopards qui a pris le pouvoir quasi universel. J'ai envie de pleurer quand je vois tant de braves gens sur les routes, et les torrents d'insultes que des tarés méprisables leur déversent dessus. Je crois que de toute l'histoire humaine, nous n'avons jamais eu de dirigeants aussi haïssables. Même Gengis Khan avait un certain code d'honneur et il risquait au moins sa peau.




jeudi 10 février 2022

Piège?


Plusieurs personnes m'ont interpellée sur mon soutien au mouvement des camionneurs canadiens, m'implorant de ne pas tomber dans ce piège. J'ai même publié une vidéo envisageant la chose, car au fond, je ne suis sûre de rien, sinon de la sincérité et du courage de ceux qui y participent. Après tout, la caste est extrêmement fourbe et puissante, et je ne suis pas extra-lucide. 

Cependant, et le débat est ouvert, je tiens à faire le point de ce que je ressens

Il y a une grande différence entre ce mouvement et, par exemple, la révolution de couleur de Kiev soutenue massivement par les médias occidentaux, l'appareil américain, la mégère Nulland qui allait distribuer des brioches aux émeutiers, BHL en pleine hystérie russophobe. On en parlait sur toutes les ondes, on ne parlait pas, en revanche, des policiers lynchés à qui on arrachait les yeux, des snipers embusqués sur les toits qui tiraient sur les deux camps, des néonazis et de leurs exactions, des contre-manifestants venus de Crimée en autobus, dont on attaquait le véhicule à coups de barres de fer. Malgré les discours de Trudeau qui accuse les camionneurs de tout et n'importe quoi avec une tête de traître idéal, on n'observe rien de tel au Canada. Les manifestants sont d'abord en nombre impressionnant, et ensuite d'une conduite exemplaire. Un article notait tout cela point par point. Je le mets ici: 

https://leblogdejeannesmits.blogspot.com/2022/01/camionneurs-de-la-liberte-ottawa.html?fbclid=IwAR1on7rGg6S4usND8CCXyjnQgpuJ0ayfe8op6ab-hW0uJvNRYSUuhrx3xNg 

Il semble qu'ils soient épaulés par des gens très compétents, et ils désamorcent habilement la propagande écrasante par des vidéos qui démontrent l'inanité des mensonges.

https://www.facebook.com/standupwtp/videos/242474378057202

 Néanmoins, il est évident qu'ils ne sont pas soutenus par l'appareil médiatique et politique mondial. Ils le sont par Trump, qui est lui-même honni par cet appareil. Et semble-t-il, ce qui est plus surprenant, par Elon Musk, peut-être assiste-t-on à une lutte interne au mouvement transhumaniste des malfaiteurs de l'humanité... Mais parfois la division des crocodiles profite aux petits poissons. 

Leur force est dans leur belle unité, et à mon avis, dans le fait que si minés que soient le Canada ou les USA par le politiquement correct et la caste mafieuse, beaucoup de gens sont encore indépendants. On ne contrôle pas si facilement les indépendants, raison pour laquelle on tient tellement à les faire disparaître. En France, les camionneurs précisent qu'il leur est difficile d'imiter leurs collègues d'outre Atlantique parce qu'ils ne sont pas propriétaires de leurs camions... Une amie me disait aussi que les syndicats d'outre Atlantique aussi sont plus indépendants et plus compétents. Enfin la France est travaillée par la gauche depuis un demi-siècle et il suffit de crier à l'extrême droite pour casser tout mouvement qui cherche à dépasser les clivages. Cependant, une vidéo du docteur Fouché, ce matin, ne doute pas de la nécessité d'emboiter le pas aux Canadiens. Et puis en fin de compte, que proposent ceux qui sont sceptiques, que nous faut-il faire, attendre que toute cette folie nous amène à un enfermement général et infernal? 

Voici des échos de ces voix discordantes:http://sous-les-lambrequins.blogspot.com/2022/01/mais-pourquoi-le-15-fevrier-lendemain.html 

 https://www.facebook.com/isa.labelle.121/videos/467009788358270

Toujours est-il que Trudeau a peur, qu'il n'est pas le seul. Et que l'opération Covid bat sérieusement de l'aile. J'ai donc aussi l'impression qu'il ne faut pas pousser le complotisme trop loin, sinon, on n'entreprend plus rien et on reste fasciné, comme le lapin devant le serpent python.

Ou alors, on s'en remet à Dieu et on prie dans sa tour d'ivoire semi monastique, c'est encore une option possible. Car si quelque chose m'inquiète un peu, c'est peut-être justement une excessive gentillesse, les pières à l'univers et l'attente d'un monde nouveau et radieux, même si l'on peut connaître un moment d'euphorie, quand on sent que les oppresseurs vacillent et que le vent commence à s'engouffrer dans les brèches. 

samedi 5 février 2022

Souvenirs de France

 


Je viens d’avoir 70 ans, et j’ai du mal à comprendre ce qui m’arrive, c’est le terme de la vie humaine selon le psalmiste, « quatre-vingts ans pour les plus forts, et le reste n’est que peine et douleur ». Pourtant, après la covid, je me sens en pleine forme, j’ai même un accès de coquetterie, je me suis fait couper les cheveux parce que je les perdais, cela me va mieux, c’est plus pratique, et comme j’ai minci, je me suis aussi acheté des fringues, une nouvelle doudoune noire, chaude et chic, dans le genre sportif classe, un petit chapeau rose.

Dernièrement je voyais des considérations sur l’immortalité de l’âme, quelqu’un disait que la personnalité des gens était totalement détruite par la démence sénile, et c’est malheureusement vrai, quoique celle de maman subsistât, mais elle n’était pas allée au bout du processus, au stade de ces vieilles que je voyais échouées dans des coques, complètement végétatives. Le père Valentin m’avait dit que les gens comme ça étaient pareils à des musiciens dont l’instrument est cassé et qui ne peuvent plus produire de musique. Le père Placide affirmait qu’après la mort, ils retrouvaient toute leur conscience. Saint Païssios avait déclaré à une amie moniale qu’il avait prise en stop que les fous allaient directement au paradis parce qu’on ne pouvait imaginer plus grand dépouillement que de perdre sa raison.

Une autre chose qui me trouble, c’est l’anésthésie. L’anésthésie, c’est un morceau de vie complètement effacé. On s’endort et se réveille  juste après. Cependant, on doit rêver, puisqu’un médecin m’avait dit que je lui avais raconté des tas de choses. En ce moment, déjà depuis plusieurs années, je ne me souviens pas de mes rêves, et mon sommeil ressemble à l’anesthésie, et pourtant, je rêve forcément.

Dans mes moments de pire angoisse à l’hôpital, je me voyais forcée d’entrer dans un cul de sac où j’allais me désintégrer, et où tout ce que j’avais pu vivre perdait complètement son sens, et priant ce matin, je demandais à Dieu de m’indiquer clairement que tout cela n’était pas vrai, que « mort où est ta victoire, mort où est ton aiguillon ? » Mais j’eus aussitôt la pensée qu’Il me l’avait indiqué et même souvent, que j’avais eu une grande expérience mystique inattendue qui m’avait donné l’avant-goût de l’autre monde, car il n’y entrait pas les éléments de celui-ci qui pouvaient déclencher un état contemplatif profond, beauté de la nature, ou même de la liturgie, c’était l’au-delà qui pénétrait dans mon en-deça et me faisait déboucher sur l'éternité. Le problème est que si on se souvient de ce genre de moment, on en perd le goût, comme celui du poulet quand on l’a déjà mangé. Mais bon, j’en ai toujours des échos atténués, des rappels, de petits signes. Dommage que je préfère souvent les satisfactions sensuelles immédiates au labeur intérieur qui nous prépare à franchir le seuil de ce que nous approchons jour après jour. Il faut savoir commencer à quitter son corps avant qu’il ne nous quitte.

Un bonhomme a pris contact avec moi, il veut des cours de français, et je fais un rejet total de ces cours, qu’on me paye une misère et qui m’emmerdent profondément. J’ai tant de choses à faire, et si peu d’années pour les mener à bien ! C’est un homme simple et très gentil qui s’est épris de la France où il voudrait retourner, un ancien entrepreneur en construction, qui s’intéresse à des trucs ésotériques et m’a parlé d’une espèce de communauté où il habite. Très amical, très serviable. Il  m’a proposé de faire gratuitement les petits travaux que je planifie, une entrée et une terrasse à l’opposé du voisin et de sa maison envahissante, mais qui, si modestes soient-ils, me coûteront de l’argent. Il est prêt à tout pour développer une amitié avec la Française de service. J’ai pensé à lui proposer un échange, je lui donne des cours, il me fait les travaux. J’ai cependant un peu peur qu’il soit du genre, comme dit Katia, à « ne pas connaître de limites », ce qui lui paraît un défaut russe et même post-soviétique : le résultat des appartements communautaires et de l’idéologie collectiviste. Pas de notion de la vie privée des autres.

Deux jours plus tard, n’y tenant plus, il m’apportait deux courges et un bidon d’eau de source, puis il commençait à décroûter mon escalier couvert par endroits d’une épaisse couche de glace.

Katia est passée le jour de mon anniversaire avec un hortensia en pot, très joli, mais les plantes souffrent chez moi l’hiver, il y fait très sec, et les hortensias classiques ne poussent pas sur mon terrain, il n’y pousse que l’hortensia russe blanc de base. Ou alors il faudra le garder en pot et le rentrer l’hiver. Elle est revenue hier soir, nous avons discuté et je lui ai montré mes photos de famille, qui la fascinent. Peu de Russes en ont gardé, parce qu’après la révolution, elles pouvaient être le signe qu’on appartenait à des couches sociales destinées à l’élimination, « koulaks », marchands, cosaques, prêtres, intellectuels... Et on les détruisait.

Elle s’émerveille du monde paisible qui se reflète dans ma collection, de l’élégance des gens représentés, qui ne faisaient pourtant pas partie du grand monde. «Baby, Mano, Gabriel, Madeleine, Michelle, tous ces noms font penser aux héros d’une saga et certaines photos sont vraiment dignes d’une exposition, certains portraits sont d’une grande qualité. J’ai hâte que vous écriviez vos souvenirs de famille.  

- Je les écris, mais je me suis arrêtée, parce que j’ai besoin de trouver la stucture adéquate. Il me semble que je devrais les catégoriser par thèmes après des chapitres d ‘introduction générale, par exemple les fêtes, l’école, l’église, les livres, etc...

- Oui, en effet, si vous suivez l’ordre chronologique, cela vous fera partir dans tous les sens, je ferais comme vous ».

Chaque fois que je regarde ces photos, j’ai la larme à l’oeil. Celles des années 70 et 80 sont de très mauvaise qualité, le noir et blanc tient mieux la route. Il y a un  changement de perception temporelle entre le noir et blanc et la couleur, le noir et blanc fait reculer les sujets dans un univers plus lointain, vers le XIX° siècle. Alors que la couleur rapproche de notre époque. Mais cela correspond aussi à une fracture historique, car notre « merveilleux nouveau monde » a accéléré son avènement avec les années 60, déjà si vulgaires, si tonitruantes et cacophoniques, après les années 50 qui restaient raffinées, élégantes et cultivées.

Je regardais ces tablées familiales des années 80 qui m’ont longtemps fait l’effet de rester une partie de ma vie quotidienne et qui sont tombées dans le passé révolu, alors que beaucoup de ceux qui sourient et plaisantent, et qui m’étaient si chers ne sont déjà plus de ce monde. Il n'y a pas si longtemps que, lorsque j'étais en France, j'allais déjeuner au restaurant avec ma soeur, mon cousin Patrick et le père Gauthier, tous deux décédés...

J’ai tout à coup retrouvé la sensation du velours d’un fauteuil bleu où ma grand-mère est assise, sur une photo. C’était le fauteuil où ma mère attendait les clients de son hôtel, devant la télé, un élément si quotidien, si familier, et qui a complètement disparu de notre vie, avec l’hôtel lui-même, et tout à coup me revenait le toucher de ce tissu, le corps de maman quand nous venions nous blottir près d’elle.

Je continue mes dessins français, cela prépare le terrain.




Aigues-Mortes, Sainte-Marie,

Douces rives de belle France,

Où sur les frissons blancs des vagues assoupies

De grands oiseaux de mer doucement se balancent

 

Aigues-Mortes, Saintes-Marie

Sous le fort mistral départies

A vos vitraux d’azur le soleil accroché

Répand le sang brûlant de ses rayons blessés

 

Aigues-Mortes, Saintes-Marie

Aux quatre vents bien élargies

Reviendra-t-il jamais le saint roi d’autrefois

Dans sa robe de lys, sur son blanc palefroi ?

 

Aigues-Mortes, Saintes-Marie

Verrons-nous demain déferler

Sur vos ruines de sel blanchies

De sombres foules d’étrangers, 

 

De conquérants et de bandits,

De bateleurs et d’usuriers,

Qui vendront vos fils au marché

Sous l’amer soleil du midi ?

 


mardi 1 février 2022

Crèche américaine

 


Il est tombé encore de la neige, j'ai déneigé, mais pendant que je faisais des courses, le chasse-neige est enfin passé, et j'avais à nouveau tout ce qu'il avait projeté sur les côtés à débarrasser, sinon, ça gèle et ça devient très difficile à enlever. Le temps de poser mes paquets, j'ai vu qu'Aliocha et son père étaient en train de le faire pour moi, ce qui m'a paru très réconfortant! Une Russe parlait sur Facebook des attentions de sa voisine, je peux en dire tout autant sur Ania et sa famille.

Quand je vois toute cette neige, j'ai peine à croire que dans deux mois, elle aura peut-être disparu et que commenceront à pointer des crocus, premiers petits lampions de la fête printanière...

La boite aux lettres, pour une fois, était pleine à craquer. J'avais une carte de voeux, envoyée par une Américaine, Kathy Clark, que j'avais rencontrée sur Facebook en jouant à la Ferme, il y a de cela peut-être treize ou quatorze ans, je travaillais encore au lycée, et nous sommes toujours restées en contact. C'est une carte qui, en se dépliant, forme une crèche en papier découpé. J'ai trouvé l'attention très gentille et la crèche très touchante, même si elle est arrivée non pas le jour de Noël mais la veille de mon anniversaire! C'est loin, l'Amérique...

Je comprends encore bien l'anglais, mais je ne le parle pratiquement plus. 

J'avais aussi une carte de la mère Hypandia, du monastère de Solan, ce qui m'a touchée tout autant. 

Je devais fêter mon jubilée à Moscou lundi, dans une salle que je loue, mais le père Valentin, sa famille et ses prêtres sont tous malades de l'omicron, apparemment, les Soutiaguine aussi, on me demande instemment de repousser de 15 jours. Ce qui, si Xioucha n'obtient pas grâce, me coûtera l'avance que j'ai donnée, soit 200 euros, et il me faudra repayer l'intégralité. Je dois dire que ça fait cher les réjouissances, et je suis bien ennuyée.

Je pense avoir aussi l'omicron, car j'ai un peu mal à la gorge depuis quelques jours. Mais comme je suis bourrée de vitamines, de zinc et d'oméga 3, ce n'est pas tragique. D'ailleurs, on a beau nous l'agiter, dans la terreur de voir disparaître la covid si pratique pour maintenir les gens muselés et enfermés, l'omicron n'est jamais qu'un gros rhume ou une petite grippe...

Je vais sortir l'année 16 de mon blog en russe, et du coup, peut-être essayer de le publier en français. Yarilo devrait être publié bientôt également, car la correction est terminée. Tout arrive...

Tout arrive, même l'âge impossible de 70 ans, qui sera le mien dès demain.


J'attire l'attention sur ce lien donné par Nicolas Bonnal, sur l'épopée des camionneurs: 

Le blog de Jeanne Smits: Camionneurs de la liberté à Ottawa : l'astucieuse et encourageante analyse d'une journaliste canadienne

Des gens nous prédisent que tout cela va mal finir, que c'est manipulé, en tous cas, pas par ceux qui sont derrière le covid, car Trudeau n'a vraiment pas une tête de vainqueur, et les médias officiels ont observé le silence habituel. J'espère, en dépit de ces prophéties de malheur, encore qu'elles puissent ne pas être dépourvues de fondement, car il arrive que la vie reprenne le dessus, la vie est comme l'eau courante, quand on lui met trop d'obstacles et de pression, elle explose et emporte tout.

Je recommande aussi à ceux qu'inquiètent les bruits de guerre, la dernière capsule de Xavier Moreau. Il me paraît parfois un peu trop optimiste, mais je partage ici son point de vue: 



dimanche 30 janvier 2022

Les routiers sont sympas

 



C'est donc du Far West que nous vient l'étincelle qui met le feu aux poudres et la trouille au ventre de la caste maudite. Je suis avec passion l'épopée des routiers canadiens. Et dans le fil de commentaires, je trouve des choses étonnantes, par exemple les commentaires d'une Ukrainienne qui dit exactement ce que nous répétons depuis des années, contre la version officielle des événements, et j'ai fait une capture d'écran.

Calomniés comme les habitants du Donbass et comme les Gilets Jaunes, les Canadiens excédés se soulèvent derrière leurs camionneurs. Et l'on voit surgir de bonnes bouilles, de braves gens, heureux de retrouver leur liberté, leur dignité, de recommencer à espérer. On les oublie toujours, derrière la chienlit Woke que la presse nous exhibe sans arrêt, et que favorisent les compradores mondialistes. Mais ils existent et les voilà partis sur les routes, avec leurs drapeaux et leurs sourires, pour "récupérer leur pays" et c'est bien de cela qu'il s'agit. 

Le vent tourne, dirait-on. Selon le proverbe: "Aide-toi, le Ciel t'aidera", j'espère qu'il va bien nous aider, je prie pour cela.

Une bonne rétrospective de toute cette histoire de fous dont nous sommes les victimes: https://vk.com/away.php?to=https%3A%2F%2Fodysee.com%2F%40Vivresainement%3Af%2Fla-tour-du-covid%3A3%3Ffbclid%3DIwAR2sJquHu4Cmr4FtRfyFg0koItaf-7GQWncWnIHkBtH662dg-iUpe62afNY&post=19879744_4896&cc_key= 


Je ne suis pas allée à l'église, parce que j'ai un peu mal à la gorge, et je fais une crise de cocooning. Gilles m'a demandé de faire des dessins "français" pour son café, et je me suis dit, pourquoi pas? Je les fais d'après des photos que j'ai prises autrefois, mais s'y ajoute l'émotion de l'exil. Et puis, pendant que je dessine, je pense, et parfois même je pleure, quelque chose se produit en moi, une fermentation fertile, une croissance.

Je fais aussi de l'aménagement intérieur. J'ai disposé des étagères supplémentaires, j'avais besoin de mettre à l'abri des chats mes objets les plus chers, et c'est fait. Il y a là une statuette faite  par ma cousine Anne, une autre par maman, avec un oeuf peint et des vases que je lui avais offerts.


Prise d'une inspiration subite, j'ai invité la voisine Olga qui me proposait un chien. Elle les a tous casés, et veut garder le dernier. J'ai invité aussi la voisine Ania, et nous avons pris le thé. J'ai appris que le dernier affreux chat à squatter chez moi était celui d'autres voisins, le type boit, sa femme est partie, le chat, qui venait de temps en temps en visite, a décidé que chez moi, c'était nettement mieux, et moi, je n'ai aucune envie de la garder. C'est un vieux et puissant  matou, qui se faisait tout petit, et commence maintenant à jouer les caïds.

Par ces voisines, j'ai appris que notre coin était oublié de la mairie. Personne ici ne répare jamais rien. Les camions qui sont venus défoncer notre rue et perturber notre nappe phréatique avec leurs incessants chargements de terre deux années de suite, on ne sait pas trop d'où ils viennent. Le voisin d'en face, et cela le fait remonter dans mon estime, a un jour sauté sur le marchepied de l'un d'eux pour dire au chauffeur: "Si je te revois par ici, je te casse la gueule". Et un autre voisin, un peu plus loin, a carrément fait décharger une énorme pièce de béton en travers du chemin pour arrêter la noria. Depuis, le flot s'est tari. 

Cela me fascine. Dix ou quinze fois par jour pendant deux étés de suite, des types viennent déverser chez nous des tonnes de terre. Et l'on ne sait pas d'où ils sortent, et pour les arrêter, il suffit de deux mecs nerveux et décidés...

Au fond, c'est comme avec les camionneurs canadiens. Il faut remettre les cons en place, sinon, c'est bien connu, ils osent tout...


vignes 












 

jeudi 27 janvier 2022

Etrangers orthodoxes



Nil a dit à sa mère qu’il avait rencontré plus de gens en trois mois en Russie qu’en dix ans à Toulouse. Il a eu l’impression d’enfin pouvoir vivre intensément. Ce fut mon cas autrefois, et personne ne comprenait pourquoi j’allais dans la Russie ruinée des années 90 et m’y trouvais fort bien. Apparemment, on ne comprend pas mieux Nil. Génia m’a écrit des plaisanteries sur ses bringues avec Sérioja, mais je ne crois pas que ce soit l'essentiel. Il était en pleine extase dionysiaque, alors que jusque là, il étouffait positivement. On a fait de la France un pays irrespirable, et j’ai vu tout le processus.

Aujourd’hui, je devais aller chez une juriste établir l’enquête pour le service d’immigration, car voici venu le moment d’aller montrer patte blanche. Hier, Gilles commentait la loi sur les visites médicales périodiques imposées aux étrangers. Personne n’y comprend rien. Mais il semble qu’elle concerne les gens qui travaillent ici, pas ceux qui ont un permis de séjour permanent. En revanche, si on va à l’étranger, il faut au retour repasser toutes les visites médicales nécessaires à l’obtention du permis de séjour. Tout ceci demande vérification. J’ai remis à plus tard, car j’avais aussi rendez-vous avec un écrivain orthodoxe de Saint-Péterbourg qui faisait une enquête sur les étrangers orthodoxes venus s’installer en Russie, et s’étonnait d’en trouver autant. Il a vu Iakov et le père Gleason à Rostov, qui est en train de monter un village américain où il attend dix familles! Et mis sur ma piste par Iakov, il voulait m’interviewer. Je n’avais pas le numéro de l’Américain Silouane, mais j’avais celui du Hollandais relieur, Jan, venu s’installer il y a quelques mois à Pereslavl. J’avais fait la connaissance de sa femme Olga quand elle cherchait une maison, il y a un an. Ce fut pour moi l’occasion de rencontrer l’un et de reprendre contact avec l’autre. J’avais beaucoup sympathisé avec Olga, c’est même quelqu’un avec qui je pourrais avoir de vrais liens d’amitié. Elle est simple, directe, naturelle, intelligente. Jan connaît des paroissiens de Solan venus de Belgique, Nicolas et Anne, que j’apprécie beaucoup, comme quoi le monde est petit. L’écrivain, Vladimir, était émerveillé. Tous ces orthodoxes occidentaux lui paraissaient déjà former une sorte de mouvement qui allait prendre de l’ampleur. « Et puis, me dit-il, ce sont des gens instruits, qualifiés, que nous avons tout intérêt à accueillir. »

Ian avait été moine catholique, mais il avait quitté le monastère avant de rencontrer Olga. Et il a aimé l’orthodoxie, parce qu’il s’y est senti chez lui, il l’a trouvée plus chaleureuse, avec une approche individualisée de chaque personne, même à l’intérieur du monachisme. Cela me paraît vrai, les orthodoxes sont fermes sur les questions de dogmes et de rites, mais souples et compréhensifs dans l’approche personnelle de chacun. Il est parti à cause des dérives idéologiques de l’occident, en particulier la théorie du genre imposée à l’école. « La Hollande a été pendant 500 ans un pays de liberté où trouvaient refuge beaucoup de proscrits. Nous n’avons connu de dictature qu’au moment du nazisme, et maintenant, depuis deux ans, avec la covid. »

Entre Vladimir et la famille de Jan, j’ai passé une après midi très intéressante, nous étions tous sur la même longueur d’onde. Jan nous a montré son atelier, où tout est irréprochablement propre et en ordre, alors que je travaille au milieu des chats et des poils d’iceux voletant partout.. Il commence à avoir des commandes de reliures et de restaurations de livres anciens, mais même s’il fait des prix russes, en tenant compte de la différence de cherté de vie et de revenus, il faut quand même que son travail extrêmement délicat soit payé, et cela n’est pas toujours évident pour les commanditaires.