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vendredi 6 juillet 2018

Elizarovo



Malgré des tas de choses en train, j'ai fait ma petite révolte et je suis partie direction Iouriev-Polski voir le village d'Elizarovo. Car je l'ai appris récemment, il appartenait à la famille Basmanov, au père, Alexeï, puis à son fils Féodor, celui-là même qui est le héros de mon livre. C'est Alexeï de sinistre mémoire qui a fait construire l'église. J'ai quand même mis un cierge pour tout le monde, avec les péchés qu'ils ont sur la conscience, ce n'était pas du luxe. L'église est très belle, pure, simple. L'affreux Alexeï Danilovitch a financé ce bel endroit, sans doute pour être sûr qu'on prierait pour lui aussi longtemps qu'on y célébrerait des offices, on prie toujours pour le fondateur de l'église.
J'ai aperçu de loin l'extraordinaire clocher, du XIX° siècle, je pense, peut-être du XVIII°, en tous cas plus récent. Tout d'un coup, une flèche de lumière sur le fond du ciel russe plein d'énormes nuages au ventre bleu, aux crinières d'argent bouclé. J'ai su immédiatement que c'était celui d'Elizarovo. Car je ne faisais pas exactement un pèlerinage, puisque la famille Basmanov était loin d'être exemplaire. Mais il y a quand même des liens entre nous, maintenant, forcément... alors le coup de projecteur sur le clocher s'explique.
L'église fait partie du contingent que patronne le monastère saint Nicétas. Il rayonne sur tous les environs, réparant patiemment les ravages de l'époque communiste, et les moines vont célébrer une fois par mois, partout, à tour de rôle. A l'intérieur de l'église d'Alexeï Danilovitch, plus de fresques, plus grand chose, à part l'architecture élégante et simple. Dans la partie plus récente, un iconostase en contreplaqué, des icônes collages de papier sur contreplaqué, une église sinistrée avec trois vieilles et une jeune fille.
Je suis allée faire ce que je n'avais pas fait depuis longtemps: une aquarelle dans la campagne, une petite rapide, format carte-postale, comme à Cavillargues... mais sans fidèle petit spitz. Dans le vent, les herbes et les fleurs, sous les magnifiques nuées, ces nuées russes dont je ne connais pas l'équivalent, avec des architectures monumentales et complexes, d'infinies nuances, et sur la campagne se poursuivant en permanence, des ombres profondes et de grands rayons. Je pensais aux personnages qui avaient édifié l'église et qui étaient les seigneurs du coin, Basmanov père et fils. Ils avaient vu comme moi ce village et ces collines, ils avaient parcouru ces environs à cheval, ils étaient entrés dans cette église, ils avaient foulé ce sol... Ils étaient ici chez eux. Je me demandais si Fédia ressemblait à son image devenue classique de beau brun fatal à l'oeil clair et sauvage. J'imaginais tout ce monde, avec des vêtements russes du XVI° siècle, caftans, ceintures de soie et bottes damasquinées ou brodées...
Près d'un passage à niveau, j'ai acheté trois pommes à une vieille qui tentait de les vendre aux automobilistes. Elle vendait trois pommes...
A la maison, les travaux se poursuivent. Il fallait finir des détails qu'avait laissés l'équipe précédente, mais j'ai dû refaire aussi ce qu'elle avait mal fait. Ce sont trois bonshommes assez pittoresques venus de Nijni Novgorod, de Diveïevo, même, pour être précise, qui me font tout cela. L'un d'eux a là bas une maison à vendre (et à finir). 

L'église des Basmanov, consacrée à la naissance de saint Jean Baptiste, est au milieu, avec une forme pyramidale typique
de l'époque.
une isba des environs


Cet ensemble bleu, qui me réconcilierait avec la tuile métallique, est au village voisin de Riazantsevo

l'église de près
ma "carte postale" du jour....

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