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jeudi 25 octobre 2018

Chipie


Je n’ai pas de nouvelles de Yarilo, cela me fait un curieux effet de l’avoir lâché dans la nature, et de ne plus pouvoir le lire et le relire, enlevant ici, rajoutant là, corrigeant, ciselant… Reste Parthène, sur lequel il faudra encore travailler, mais il se prête moins aux corrections. C’est surtout le personnage de Piotr Basmanov qui demande à être revu, et cela va sans doute m’amener à changer des choses. Je crois aussi que je vais introduire des conversations entre l’Anglais et sir Jerome Horsey qui pourraient prendre le relais de la correspondance entre l’Anglais et sa sœur Rosamund dans le premier livre. Je ne connaissais pas sir Jerome Horsey quand j’ai écrit Parthène. Depuis, j’ai lu le bouquin du père Valentin…

La couverture que j'ai choisie pour Yarilo. 

Le plus important pour moi n’est pas l’endroit ou la façon de le publier, c’est d’avoir fait ce livre, au mieux que je pouvais avec ce qui est passé à travers moi, et de le mettre à la disposition des autres. Ce matin, j’ai prié ainsi le métropolite Philippe : je le remets entre tes mains…
Je me souviens que de Parthène, autrefois, j’avais beaucoup discuté avec le père Barsanuphe, lors de sa première rédaction,  et je comptais le lui dédier, et le lui envoyer, trop tard...
Après l’automne d’or et l’été indien, nous avons un vrai temps de novembre affreux, pluvieux et sombre. Il fallait bien atterrir un jour ou l’autre, cet ange qui s’attardait a refermé ses ailes d’azur.  J’aimerais maintenant voir arriver la neige, le plus tôt sera le mieux. Rosie ne fait qu’entrer et sortir, bien boueuse, les chats, bien boueux également, escaladent tout, et tout est dégueulasse, il me faudrait briquer toute la journée, ce que je ne fais pas.
Rita est marrante et touchante, intelligente et me suit comme mon ombre. Mais c’est quand même une chipie et une pestouille, « Chipie » est un nom qui lui serait bien allé ! Ce n’est pas l’angélique petit Doggie… elle sait défendre son bout de gras et se jette parfois hargneusement sur les chats, sans aucun dommage pour eux, mais ces brusques explosions de grognements de roquet sont éprouvantes pour les nerfs ! Elle a tendance à monter la garde autour de mon bureau, les chats lui passent par-dessus la tête, ce qui l’agace visiblement.
Le moment approche de changer les roues de la voiture, certains le font déjà, m’aventurer avec les pneus jusqu’au « chinomontaj » sous la pluie me répugne vraiment. Il faut attendre sur le trottoir, et même souvent faire la queue. Pas plaisant. Le luxe de la retraite, même en travaillant chez soi, c’est de ne pas être obligé de sortir quand il fait un temps immonde. Plus d’étoiles, plus de lune, plus de féerie, jusqu’à la neige…
Hier au marché, j’ai acheté du lard pour les oiseaux. Un chien errant très sale errait avec un air si malheureux que j’ai acheté aussi  des morceaux de bidoche pour lui et ses pareils, et j’ai nourri toute une bande de clochards à quatre pattes, une goutte d’eau dans la mer de la misère animale.
Quand j’ai fait les courses au magasin voisin, qui vend des légumes et des fruits, le patron m’a demandé si j’avais des nouvelles du « Français », un type marié à une Russe qui vient ici pendant ses vacances, avec sa femme, et qui est client chez lui. « Non, lui dis-je, je ne l’ai vu qu’une fois, après que vous nous ayez mis en relations, et il a été aimable comme une porte de prison, j’ai même rarement vu quelqu’un d’aussi mal embouché, à la limite, ce n’est pas normal.
- Oui, justement, figurez-vous qu’il est venu chez moi, et il se servait de dattes à l’étalage et crachait les noyaux par terre ! Je lui ai dit : non mais tu te crois où ?
- Quelle honte, quelle honte ! Non mais ce n’est pas normal quand même !
- Il veut obtenir un permis de séjour ici…
- Eh bien, quelle recrue ! »
Je sais qu’il y a des occidentaux qui s’imaginent qu’ici on peut se conduire n’importe comment et avec une femme russe tout se permettre. C’est peut-être le cas, à moins qu’effectivement, ce ne soit simplement « pas normal », quelqu’un qui a une araignée au plafond. Mais cela ne me plait pas : on nous accueille si bien, nous sommes tellement restés un modèle de civilisation que voir cette réputation, à vrai dire bien surfaite désormais, ternie ici par un malotrus m’est désagréable.

la chipie


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