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dimanche 1 septembre 2019

Provisions pour l'hiver


Début officiel de l’automne qui officieusement s’est pointé début juillet, brusquement, un matin, nous faisant passer d’un seul coup de 28° à 14, mais par la même occasion, été indien. On se demande toujours combien de temps cela va durer…  Je suis venue à bout de mes poires, j’ai terminé le traitement de la production par un clafouti. J’ai fait beaucoup de confitures et lyophilisé énormément de fruits, et maintenant je commence à lyophiliser du persil, pour en avoir du « vrai » cet hiver, et ne pas l’acheter au supermarché. J’ai fait un bortch maigre qu’un bout de viande peut rendre gras : je fais revenir un oignon dans l’huile, je rajoute de l’eau, betterave râpée avec ses fanes, pomme de terre râpée, une tomate, de l’ail, de l’oseille.
Je suis allée à l’église, en me poussant, comme d’habitude, et en me tirant, j’ai même eu la tentation d’arriver en retard pour faire plus court, alors que j’étais prête : « Mais enfin, ça ne va pas ? Tu vas poireauter un quart d’heure sur le seuil  pour dire que tu n’y passeras pas une heure et demie ? Ca devient grave… »
Donc je suis arrivée à l’heure. Et j’ai éprouvé une grande ferveur, une véritable tendresse pour tous ceux que je voyais autour de moi, les petites dames qui vendent les cierges, les paroissiens qui me reconnaissent, leurs enfants, les prêtres…  Je pensais aux miens vivants et morts avec des larmes, à la France livrée aux ténèbres. 
Après  la liturgie, je suis allée au café français. Là, un homme m’a abordée, il s’agissait de Boris Akimov, qui a une ferme-restaurant sur le chemin de laquelle je me suis complètement égarée samedi dernier. Il a aussi une sorte de club rassemblant les gens qui font quelque chose, artisans, entrepreneurs, artistes, sur Pereslavl, et dans lequel il m’inclut. C’est un des fondateurs de Lavka-Lavka, une entreprise écologique et traditionaliste, pour laquelle travaillaient Sérioja Klioutchnikov et Génia Harlamov, ils jouaient de la balalaïka dans le restaurant du même nom, à Moscou, où étaient commercialisés les produits bios des fermiers de ce groupe. Son fils aîné, qui doit avoir douze ou treize ans, m’a beaucoup plu : un vrai petit homme, décidé et digne. Un peu comme mon petit voisin Aliocha.
En sortant de là, je suis tombée sur le pâtissier Didier et sa femme Martha. Je leur ai promis de les emmener à Rostov dimanche prochain…
Tous les jours, je vois sur mon fil de nouvelles de nouveaux assassinats commis par des « déséquilibrés » exotiques, des viols de gamines, suivis souvent d’exactions atroces, mais s’en inquiéter est raciste, cela a toujours été comme ça, paraît-il. Les hordes qui nous déferlent dessus n’y sont pour rien. Est-ce que les mongols de Gengis Khan ne se conduisaient pas comme des gentlemen ? Et les pirates barbaresques ? D’ailleurs, les blancs européens chrétiens sont la source de tous les maux du monde entier, et on peut faire d’eux ce qu’on veut, ils ne méritent pas de vivre.
Une connaissance Facebook se sent soulagée d’avoir acheté une maison en Russie, qui lui donne une position de repli. Un autre, déjà parti, s’en félicite tous les jours, dans son isba lointaine, avec ses poules et ses chèvres.
Mais il y a toujours le même contingent d’imbéciles qui prennent avec enthousiasme le train fantôme pour le pays des horreurs et traitent de tous les noms ceux qui ne leur emboîtent pas le pas, et cherchent à les réveiller. Un correspondant russe a envoyé un tableau dont j’ignore l’auteur, mais qui est saisissant : l’intelligentsia russe défilant « pour la liberté et la démocratie » en 1905…
Quinze ans plus tard, toutes ces dames du monde, ces messieurs distingués, ces jeunes gens, ces lycéens qui vocifèrent sous hypnose, ou se sont-ils retrouvés ? En exil un peu partout, chauffeurs de taxi à Paris, prostituées à Constantinople pour un bout de pain, ou bien aux Solovki, ou bien encore sous terre, sommairement exécutés. Il en est ainsi depuis que des malfaiteurs "veulent notre bien" et nous manipulent, depuis qu’ils nous enfument avec des illusions, nous ôtant, comme à des enfants capricieux et crédules, tous nos garde-fous pour nous précipiter dans la misère et la dégradation. Cela fait deux cents ans que sans arrêt surgissent de nouveaux pitres, de nouveaux maïdans colorés, de nouveaux hallucinés qui font le malheur de leur propre peuple, et le bonheur des araignées obèses qui régissent le monde par delà les brumes bigarrées des jolis mensonges.



5 commentaires:

  1. Chère Laurence,
    le titre de ce tableau est “Manifestation du 17 octobre 1905” et son auteur n'est rien moins que Ilia Répine.
    Cordialement,
    Véra

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    1. Merci, c'est ce qu'on m'a dit aussi, sur Facebook!

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    2. Il partageait l'enthousiasme imbécile de cette foule de zombies, comme quoi l'art dépasse la pensée de l'artiste...

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  2. Mais il est immonde ce tableau! En riant jaune, je constate que c'est le négatif parfait d'une procession avec croix et bannières...

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    1. Mais non, il est très fort! Une bande de fous, de possédés! Et le plus curieux est que le peintre était de leur côté!

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