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lundi 1 février 2021

Saint Ouar

 


Le père Valentin m'a emmenée à l'église principale des vieux-croyants de Moscou, c'est tout un ensemble, avec une boutique et une cantine, plusieurs églises. Il est surprenant qu'elles soient d'un style occidentalise, alors que l'église attenante bâtie au XIX siecle pour les tenants du vieux rituel qui reconnaissaient l'église nikonienne est dans un style neorusse charmant. D'après le père Valentin, il y a beaucoup de différences entre les textes utilisés par les vieux-croyants et ceux des nikoniens qui se basent sur les originaux grecs. Il s'est beaucoup intéressé à la question, pour des raisons linguistiques et par sympathie romantique pour les vieux-croyants. Il considère qu'on a eu raison de corriger ces textes. En réalité, ces corrections seraient sans doute bien passées, si on n'avait pas modifié des choses plus évidentes, plus cruciales et moins importantes touchant au rituel. Il m'a dit que les tsars avaient fait plusieurs tentatives pour réparer le schisme, en proposant de réintégrer les tenants de la vieille foi en leur permettant de garder leurs usages, mais seulement une partie d'entre eux à réagi favorablement. À un moment, la vieille foi menaçait, si l'on peut dire, de devenir majoritaire dans le peuple qui restait attaché à ses usages. 

Il voulait me faire un cadeau pour mon anniversaire et comme je m'extasiais sur les icônes de laiton émaillé, il m'a demandé d'en choisir une. J'ai pris saint Ouar, non parce que c'était la plus belle, mais parce que c'est un saint que l'on prie pour les gens morts dans l'incroyance. 

Je lui ai rapporté que d'après ma famille, au moment de mettre dans le caveau des Pleynet les cendres d'Henry, la tombe et nos proches avaient été brusquement inondés de soleil par une brèche dans les nuages. "C'est bien sûr un signe.... M'a-t-il dit. 

- C'est bien ainsi que je l'ai ressenti, mais si ma famille en a été frappée, rien ne saurait la pousser à franchir le pas, elle vit sans cela et je suis la seule à y prêter une véritable attention. C'est pourquoi j'ai choisi saint Ouar."

Le territoire de ces églises était blanc de neige sous une vive lumière et des vapeurs flottaient dans l'azur, derrière les coupoles dorées ou multicolores. Je m'enfoncais dans ce spectacle qui me faisait oublier les immeubles en béton, et j'en ressentais une impression de répit et de grâce, songeant que la Russie demeurait en de tels endroits et certainement pas dans les défilés des navalnichons. J'ai eu même réconfort plus tard dans la cantine de l'endroit, quand le père Valentin a prié silencieusement pour bénir le repas. Une sorte de paix bénéfique et chaude. 

Je suis ensuite allée chez Xioucha, que je n'avais pas vue depuis une éternité. Un de ses ados a décrété qu'il était pour Navalny, j'ai eu la flemme de lui demander pourquoi, mais je le regrette. Il est très musicien mais chante en anglais à la guitare électrique, et tout cet anglosaxonisme africanisant universel de rigueur m'emmerde. Sa fille aînée est sortie de l'âge ingrat et elle est devenue un être humain agréable. Elle est très artiste, elle dessine très bien, elle coud et aime à créer des modèles de vêtements. 

Enfin je suis partie à la rencontre d'Albert qui était revenu à son état normal et était prêt à me couper les cheveux 

La veille, Skountsev était venu répéter avec moi pour que j'apprenne à jouer en groupe, ce qui n'est pas possible à distance. Nous avons fait un récital à la famille Asmus. Je mesure la distance entre l'univers de Skountsev et de ses fils, et aussi des cosaques de Pereslavl et leurs enfants, et puis les navalnichons, béats devant la culture de masse de la matrice mondialiste. Xioucha m'a raconté que la fille d'une de ses amies libérale ayant amené chez elle, à l'issue d'un meeting, des navalnichons bourrés ou jointes, ou les deux, cela s'était terminé par une bagarre dans l'escalier, puis par des depredations commises sur les voitures garées dans la cour. "Le voilà, notre avenir radieux," m'a-t-elle dit en rigolant.

Ce matin, j'ai vu que France Musique annonçait l'arrestation des enfants du pianiste Berezovski, il se trouve qu'ils habitent l'appartement du dessous, et j'ai vu l'un d'eux il y a 2 jours, un charmant petit intellectuel de 15 ans au physique asiatique. Sa mère raconte d'après France Musique, qu'il a été embarqué, avec sa sœur, qu'on avait voulu leur faire signer un papier et que c'était "pire que sous Staline".  Connaissant ce genre de public, je dirais que pour ce qui est de Staline, c'est sans doute très exagéré, mais que si les enfants Berezovski ont conservé leurs deux yeux, leurs deux mains et leur mâchoire, c'est que c'est toujours mieux que chez Macron. On les a d'ailleurs aperçus dans l'escalier en pleine forme. https://www.francemusique.fr/musique-classique/les-enfants-du-pianiste-russe-boris-berezovsky-arretes-a-moscou-92385

 C'est sur que sous Staline, on ne les aurait pas relâchés aussi vite. Et d'ailleurs les manifestations auraient été impensables, Navalny lui-même aurait été discrètement enlevé ou liquidé avec efficacité et non victime d'une indigestion passagère de soi-disant poison violent. 




dimanche 31 janvier 2021

Les navalnichons

 À l'église du père Valentin, encore beaucoup de masques, mais pas d'hostilité envers ceux qui ne le portent pas. Quand j'ai reçu l'eucharistie, j'ai voulu baiser le calice, comme de toute éternité et comme on fait à Pereslavl, mais le père Valeri m'a arrêtée, la chose est interdite, ici, je l'avais oublié. Et on se confesse pas, on écrit ses péchés sur un bout de papier. Les prêtres les ramassent, je ne sais pas ce qu'ils en font. Il y avait peu de monde, c'est que beaucoup de paroissiens du père Valentin, bien que lui-même soit monarchiste, s' apprêtaient à aller manifester pour Navalny. Ils avaient autre chose à faire
Après l'office, je suis allée à la chocoladnitsa avec Dany. Nous venions de déjeuner en devisant derrière la vitrine, quand nous avons vu les trottoirs se couvrir d'une foule dense de jeunes gens bien nourris, bien frais et bien habillés qui criaient:"à bas l'état policier". Et cela sans représentants féroces de l'état en question pour leur taper dessus, leur faire sauter un œil, la mâchoire ou une main, comme dans la démocratie de Macron l'eborgneur, ni les traîner par les cheveux ni les disperser à coups de canons à eau.

Dany et moi venions de discuter de la France et de ce qui se passe, et du fait que la Russie était le dernier pays de culture chrétienne et européenne on l'on pouvait vivre et respirer. En effet, mais les créatures des ténèbres qui sont en train de détruire l'Amérique avec Biden et l'Europe avec des satrapes de service tels que Macron et Merkel ont décidé de passer à la vitesse supérieure en injectant à la Russie le virus Navalny. Qu'on puisse se fier à cette gueule en biais au regard de poisson mort est pour moi un mystère total, mais il faut dire que les générations élevées hors sol n'ont plus aucun discernement et cela dans tous les pays. Ce qui m'étonne, c'est quand des gens équipés d'une certaine culture se laissent abuser par de tels bateleurs, mais quand on voit ce qui s'est passé en 1917, et qu'on se souvient du tableau de Repine ou une foule de gens bien sous tous rapports et propres sur eux défilent galvanisés et les yeux hors de la tête... Pas mal de gens se laissent prendre aux mouvements de rue qui donnent tout à coup de l'éclat à leurs existences minables. 

Consternation totale chez le père Valentin, sa fille Liena, son gendre Aliocha et moi-même. Liena m'a parlé d'une amie de la famille, une aristocrate émigrée aux ancêtres frondeurs dont la famille était revenue en Russie dans les années 50, qui trouve tout à fait normale la dislocation éventuelle de la Russie en plusieurs petits fiefs gouvernés par des satrapes de la Caste. 

La Russie sera ramenée aux frontières qu'elle avait au temps d'Ivan le Terrible, et si cela se produit, comme il y a de fortes chances, au moins resterai-je sur son territoire au lieu de me retrouver dans une espèce d'Ukraine où les Russes seront brusquement étrangers chez eux, obligés de se renier ou de constituer partout des Donbass résistants pour essayer de rester eux-mêmes. 

J'espère que nous n'aurons pas de visites triomphales des traditionnels oiseaux de malheur, BHL, Glucksmann, Ackerman et autres Alexievitch, et que si cela se produit, ils se prendront enfin dans la gueule non une tarte à la crème mais une grenade degoupillée.

Nous regardons ce soir passer les cons avec le poignant sentiment de grands malheurs à venir.

.


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samedi 30 janvier 2021

Albert

 

Les cosaques Olga et Romane sont venus voir mon terrain, dans le but d'y construire une palissade, à la place du grillage que le voisin Oleg m’avait posé, pour créer un début d’écran visuel. Ce sont eux aussi qui se chargeront des arbres, ils ont un ami paysagiste. Romane me déplacera aussi sans problème le perron et l’escalier, je prendrai mon petit-déjeuner loin de la maison moche et de ses occupants, parmi les fleurs du poirier et du prunier, puis les feuillages d’été et d’automne, et j’aurai la vue, pour l’instant, sur l’isba de l’oncle Kolia, et sur mes fleurs. Je crée aussi un écran végétal préventif de ce côté là. Peut-être devrai-je remercier le voisin pour m'avoir obligée à envisager cela, car ce sera beaucoup plus agréable. Evidemment, cela me cause aussi toutes sortes de dépenses et me prive de potager, du moins pour l'instant, mais je trouverai peut-être une solution. Mélanger fleurs et légumes, par exemple. Le perron là où il sera me mettra à l'abri des regards, tout en me donnant de jolis points de vue. Je ne me voyais pas, quand je sors hirsute et hagarde pour déjeuner tranquille en plein air, faire coucou aux habitants de la maison voisine sur leur terrasse qui me surplombe...

Romane est un grand type baraqué avec un anneau d'argent à l'oreille, habillé comme un cosaque, et Olga est aussi vêtue à la cosaque, robe longue, cheveux enfermés sous un foulard noué sur la nuque. Elle porte son dernier bébé sous sa veste ouatinée avec juste la tête qui dépasse. Les cosaques font beaucoup d'enfants, et ils les élèvent très bien.

Olga et Romane sont très sympas. En fait, tous les cosaques sont très sympas. C’est pourquoi quand même je me cramponne à Pereslavl: les orthodoxes, les cosaques, le café français et son patron, et mon merveilleux évêque.

Je suis ensuite partie pour Moscou ou je n'étais pas allée depuis longtemps. Soi-disant Poutine a supprimé les mesures anti covid mondialistes, mais on a exigé que je fasse semblant de m'accrocher sur la gueule le masque que je traîne dans une poche, à la station service et dans l'espèce de centre où mon coiffeur Albert exerce ses talents. De plus, le gardien n'a jamais voulu me laisser entrer avec ma chienne qu'il avait malheureusement repérée.

Albert a proposé de m'accompagner à la voiture, que j'avais laissée près de chez le père Valentin, pour revenir ensuite me garer près de son centre. L'aller-et-retour représentait une sacrée distance, j'avais mal partout. En chemin, je me suis rendu compte que mon Albert était complètement bourré. Il me l'a d'ailleurs avoué lui-même en ajoutant qu'il était un imbécile et en m'assurant que néanmoins il me ferait une coupe super. Arrivé près de la voiture, il a fondu en larmes: non, il ne serait pas capable de me couper les cheveux... "Bon, Albert, ce n'est pas grave, on fera ça lundi...

-Non, non, plus jamais...

-Mais si, Albert, je vous rappellerai...." 

Je m'étais décidée à me faire couper les cheveux mais il faut croire que ce n'était pas mon destin ! Jamais Albert ne m'avait fait un coup pareil, un génie du ciseau, un travailleur, un père de famille.. . J'ai cru comprendre qu'il s'était disputé avec sa femme.

Après une pareille aventure, j'ai accepté avec reconnaissance le verre de mousseux que m'offrait Kolia, le fils du père Valentin. Ce dernier m'a proposé de la vodka avec des airs de conspirateur, mais j'ai préféré continuer au mousseux. "Il s'est disputé parce qu'il avait bu, et ensuite il a bu parce qu'il s'était disputé" m'a dit Kolia qui s'y connaît.





 



Moustachon et Blackos dans l'ignorance que j'allais partir pour quatre jours.

lundi 25 janvier 2021

Mars en janvier

Aujourd'hui, température et lumière du mois de mars, c'est le printemps; tout fond. Sauf que ce n'est pas le printemps. Impossible, il y a encore devant nous tout février, et mars, ici est plus rude que les hivers les plus mémorables en France.
Néanmoins, j'en ai profité pour aller dessiner au lac; en voiture, car aller à pied sur la glace savonneuse ne me disait rien.
Les nuages étaient pareils à des échevaux d'argent roulés dans de la nacre. Le soleil resplendissait comme un disque blanc et calme dont les rayons rebondissaient sur ces légères vapeurs. J'oubliais les horreurs de notre temps dans cette brèche d'éternité que la beauté ouvre dans les rideaux tirés du quotidien.



Auparavant, je m'étais entretenue au téléphone avec un jeune vendeur d'une pépinière qui procure des arbres de grande taille. Mais je ne peux pas en prendre de trop énormes non plus, car le transport et la plantation seraient trop chers. Je me suis arrêtée, sur deux pins de 2.50 de haut. Ils prennent de 20 à 40 cm chaque année, mais il leur faudra un an ou deux pour recommencer à pousser après la plantation. J'ai pris aussi un sureau canadien, avec un feuillage jaune et de grosses fleurs blanches. Il pousse très vite, et il aime les endroits où la nappe phréatique est proche, il assainit même le sol où il se trouve, et il ne vient pas plus haut que quatre mètres, ce qui suffit à créer un écran, sans dérober toute la lumière. J'adore les sureaux, il y en avait plein dans le Gard, les soeurs de Solan faisaient du sirop de leurs fleurs.
Cela fait des temps que je me creuse la tête pour me soustraire à la vue de ceux qui vivront sous mes fenêtres, et m'épargner celle de leur boite d'allumettes plastifiée, avec la bagnole posée avec amour sur l'énorme masse de terre importée par cet imbécile, comme un char d'assaut sur un monument soviétique de la seconde guerre mondiale. Il faudra bien trois ou quatre ans pour y parvenir, et je ne sais pas combien de temps je vivrai encore.
Il me faudra faire creuser une petite mare, pour éviter que toute l'eau ne stagne dans ma cave. 
Skountsev me dit qu'il a violé toutes les règles, en construisant sa maison si près, et m'a donné des adresses pour déposer un recours, mais cela reviendrait à une déclaration de guerre, et je n'aurais plus de vie, seulement un conflit permanent avec un crétin. Personne ici ne respecte aucune règle, et beaucoup ont un mépris de la nature et de ses impératifs absolument colossal, ce qui n'est pas dans le tempérament russe classique, mais bien dans celui du soviétique de base, comme dans celui du capitaliste, d'ailleurs, leur mentalité est le résultat du même lavage de cerveau et aboutit à l'éducation du parfait mutant moderne, qui produit à son tour des rejetons maussades à l'esprit et au coeur atrophiés.
Ce sont ceux-là que, dans le monde entier, la super mafia utilise pour régler ses comptes avec les gouvernements qui ne lui conviennent pas, soit qu'ils gênent les affaires, soit que leurs  propres intérêts mafieux soient contraires aux siens.
Chez les cosaques et les folkloristes, on ne voit pas de telles gens ni de tels enfants. 
Si Poutine avait pris soin de concrétiser ses discours sur les ciments spirituels et culturels de la Russie, Navalny aurait moins de petits cons à fanatiser pour mettre ici le bordel souhaité par l'Empire. Mais ses ministres de la culture successifs n'ont eu qu'un seul souci, détruire le patrimoine, empêcher la renaissance culturelle russe en fermant le centre de folklore ou le centre de culture slave, promouvoir ce qui déconstruit et pervertit, casser l'éducation, faire de la télé un instrument d'abrutissement et d'avilissement. Il a même laissé édifier et fonctionner ce centre Eltsine d'Ekaterinbourg qui est un organisme de propagande pro américaine et russophobe particulièrement toxique, où l'on emmène les enfants par classes entières apprendre combien l'histoire russe, jusqu'à sa colonisation des années 90 par l'occident démocrate, était épouvantable et déshonorante. Ce qui grandit dans les villes est en tous points aussi consternant que ce que nous avons en France, et dans le monde entier. 
Devant cet assaut des orques de Sauron qui se reproduisent à toute vitesse, comme des cellules cancéreuses, il faut faire, à l'instar des cosaques de Pereslalv, qui ont de si merveilleux enfants, ce que l'on peut, à son niveau. Pereslavl devint hideux, je persiste à faire de ma maison un endroit harmonieux, à écrire, peindre, chanter, et promouvoir la défense de nos valeurs, de notre héritage, de notre foi. Que Dieu nous vienne en aide, et en fin de compte, en qui avoir confiance, sinon en Lui? "Ne mettez pas votre confiance dans les princes et les fils des hommes, en est eux il n'est point de salut". 

dimanche 24 janvier 2021

LISEZ-MOI ÇA!

 


Une critique de Yarilo dans Antipresse, site d'information libre de tout sponsor douteux.

LISEZ-MOI ÇA! • «Yarilo» de Laurence Guillon

Ce qu’il apporte. Au XVIe siècle, de ce côté-ci de l’Europe, nous savons repérer Henri III en France, Elisabeth en Angleterre…et la lecture de Dumas nous a plongés dans les évènements tragiques de la Saint-Barthélémy. A la même époque, que se passe-t-il en Russie? Qui règne? Ivan le Terrible, ou plutôt «le Grand», traduction exacte du qualificatif russe. Qu’en savons-nous? Sauf erreur, son règne ni sa personne n’ont été l’objet d’une œuvre romanesque digne de ce nom en langue française. C’est chose faite avec Yarilo, le roman de Laurence Guillon, qui nous conte l’histoire de Féodor Basmanov, proche du tsar, de sa famille, sur un fond historique pour le moins brutal, puisque c’est la période de l’Oprichnina. Le massacre de la Saint-Barthélémy dans La Reine Margot, ou les assassinats des Rois maudits sont des bluettes en comparaison. Pour autant, il n’y a aucune complaisance. C’est l’âme de ces personnages qui intéresse l’auteur. Ils sont mus par des forces denses, complexes, profondes. On y voit que la grande histoire était faite par des pécheurs, certes, mais conscients de l’être, et sachant qu’ils auraient des comptes à rendre à Dieu. La médiocrité est donc inconcevable. L’écriture de Laurence Guillon est digne de son sujet et la rédemption de Fédia est simplement bouleversante.

Ce qu’il en reste L’auteur nous embarque dans un voyage qui va bien au-delà de la réalité historique ou géographique. Même si elle décrit les paysages par touches délicates qui émouvront ceux qui les connaissent. A travers ce qu’on pourrait qualifier de conte, elle nous fait approcher du cœur de «l’âme russe» et de ses ressorts. Le terme est galvaudé, mais je n’en trouve pas d’autre. Cette histoire est bien plus qu’une belle histoire. Elle est ancrée dans une terre qu’on aborde avec le cœur, et qui peut toucher sans être comprise. Ce que réussit Laurence Guillon, c’est précisément de nous aider à connaître la Russie à travers une époque très brutale que nous approchons souvent à travers beaucoup de clichés teintés d’incompréhension voire de condescendance. Son écriture de conteur est fluide, de cette simplicité sophistiquée assez rare, et l’usage qu’elle fait des poésies traditionnelles est pertinent. Elles permettent de nous familiariser avec l’insondable immensité de cette terre.

A qui l’administrer? Ceux qui aiment Tarkovski, Répine, la Russie en général et en particulier, se délecteront de lire une œuvre en langue française, certes, mais qui décrit ce monde de l’intérieur. Comme quoi c’est possible, mais pas donné à tout le monde. C’est un peu comme si Rebecca West, après son voyage en Yougoslavie (Agneau noir et faucon gris), avait écrit un roman dont les protagonistes seraient le roi Lazar et son entourage à l’époque de la bataille de Kosovo. Ceux qui sont intrigués par le titre,_Yarilo_, n’ont plus qu’à lire, car il révèle encore une autre facette de ce conte, parmi tant d’autres qui en font la richesse. Comme tous les bons livres, il nous transforme. D’une manière ou d’une autre.

  • Laurence Guillon,Yarilo, Editions du Net, 2018. Une suggestion d’Anne Demonet.



Editorial d'Antipresse, par Slobodan Despot:
 

samedi 23 janvier 2021

Limonov et Navalny

 De - 26, nous sommes passés à + 3 en quelques jours, c'est difficile à vivre, pour les climatodépendants. Je cherche des espèces d'arbres qui me cacheraient vite la baraque du voisin, sa bagnole qui flotte majestueusement au dessus de ma clôture, et cela dans les plus brefs délais. Il y a des gens, dont il est le premier, qui trouvent fabuleux de contempler une maison en plastique et une bagnole plutôt qu'un espace naturel avec des roseaux, des fleurs sauvages et des buissons.

J'essaie d'écrire mes souvenirs d'enfance, c'est un exercice suprenant, qui ne se traite pas comme un roman, et m'amène à une certaine introspection, et au delà de cela, à toutes sortes de réflexions. Je tiens à laisser derrière moi ce témoignage, ces traces aussi des gens que j'ai connus et qui le méritent bien. Ils sont encore si présents dans ma mémoire, et pour les petits enfants de mes cousines, ils sont aussi éloignés dans le temps que pour moi la grand-mère Caroline qui fut exilée avec son mari en Belgique au moment de la guerre de 70.... Ou bien encore Gustave Flaubert ou Dostoievski, de l'univers desquels je me sens beaucoup plus proche que la science-fiction dans laquelle je termine ma vie.

...

En Russie, on semble mettre fin à la comédie des masques, et l'on ne peut que s'en réjouir. Mais parallèlement, la mère Merkel, après nous avoir foutu l'Europe en l'air avec l'invasion migratoire par elle amorcée, a décidé d'inoculer à la Russie le virus Navalny, comme autrefois le Kaiser lui avait inoculé le virus Lénine, qui ne représentait alors pas grand chose, exactement comme le trublion tout juste rapatrié, mais, avec beaucoup de fric et de propagande derrière, en achetant ici et là manifestants et snipers, ça peut le faire, comme en Ukraine, et tout le monde s'y emploie, Soros, l'oligarque Khodokorvski, tapi à l'étranger dans sa toile, toutes sortes de BHL, Glucksmann, Ackermann et autres avatars de la haine russophobe enragée, à l'intérieur comme à l'extérieur. J'ai trouvé ce texte remarquable d'Edouard Limonov:


"On m'a demandé dès le matin," qu'est-ce que tu n'aimes-tu pas chez Navalny? "

La réponse est: tout .

Je n'aime pas sa bouche de travers, sa femme desséchée et tirée à quatre épingles, ses enfants, ses excellentes photographies et son photographe, ses convictions, son argent de trouble origine, l’expression dégoûtée de son visage, son lourd squelette américanoïde, ses chemises, sa démagogie...Un faux derche, un cafard, une balance, un requin.

Navalny est un bourgeois moderne typique, une ordure, en un mot. Et une ordure d'un nouveau type – un néo bourgeois.

Son père soviétique - un sacré renard –avocat militaire, l'un des principaux avocats de l'armée, - a donné naissance à ces deux  hommes: Oleg et Alexey. Une mauvaise race est apparue, un type de personnes étranger à la Russie...

Un étranger, en un mot, qui n’est pas des nôtres. Et il n'a pas de nuque. "


Il est intéressant de comparer la physionomie de Limonov et celle de Navalny. Le visage aiguë, intelligent, provocateur de l'écrivain, la face molle et le regard vitreux et fuyant du blogueur tant aimé de la presse occidentale.

En fait, la définition qu'il donne de Navalny me paraîtrait assez bien convenir, avec quelques nuances, à Macron, Trudeau et toute espèce de satrape et de magouilleur au service de la mafia supranationale, ou infranationale, qui s'est emparée par fraude des USA et cherche à déstabiliser la Russie. On les dirait tous issus, comme le Covid, du même laboratoire, tenu par les mêmes bienfaiteurs de l'humanité.

On m'a fait remarquer que Limonov était un "national bolchevique". Ce n'est pas grave. D'ailleurs bolchevique n'est pas le mot juste, enfin pas aujourd'hui. Les bolcheviques sont maintenant aux USA, en Europe, sous forme de cocopitalistes, de libéraux trotskistes, de néocons, avides de casser toute forme de structure sociale ou traditionnelle normales et de liquider la race blanche et sa civilisation, partout, sauf pour l'instant en Russie. C'est bien d'ailleurs ce qui les enrage, cette résistance des Russes qui ont même réussi à russifier quelque peu leur merveilleux projet. Or si Limonov relève d'un communisme, c'est précisément de cette forme bâtarde devenue sous Brejnev presque supportable. Disons qu'il était national communiste ou même national soviétique. 

Ce qui est clair pour moi, c'est qu'entre Navalny et la clique infernale, je dis bien infernale, au sens propre du mot, qui essaie de nous le refiler comme la vérole, et un national soviétique, en dépit de mon antisoviétisme primaire, je choisirais le second. Si les nostalgiques de l'URSS ne faisaient pas cet immonde révisionnisme par rapport aux victimes des répressions diverses, et aux destructions culturelles, je ne serais à présent pas très loin de leur donner la main. Je serais tout à fait favorable à une nationalisation des banques et des entreprises vitales pour la nation, des chemins de fer, des routes, des parcs nationaux, de l'éducation, de la médecine. De toute façon, le cocopitalisme mondialiste ne cherche qu'à spolier la population de la planète pour la réduire à une masse indistincte de serfs, tandis qu'il s'appropriera tout ce qui échappe encore à son contrôle. Et son contrôle est complètement mafieux, avec des aspects idéologiques délirants et franchement sataniques.



jeudi 21 janvier 2021

Adieu monsieur Gauthier.

 


J'ai appris la mort du beau-frère de maman, qui était aussi le condisciple de mon beau-père et de mon oncle Henry, Pierre Gauthier, le père Gauthier, un petit homme jovial au parler méridional pittoresque; et c'est aussi tout un pan de ma vie qui disparaît. Henry, mon beau-père Pierre, ou Pedro, et le père Gauthier, étaient tous des élèves de l'institution Notre Dame de Valence, dont les deux derniers gardaient un affreux souvenir, Henry pas tellement, et en plus, il y sonnait la cloche, ce qui le faisait traiter de fayot!

Il était le fils du directeur de la chocolaterie Aiguebelle à Donzère et à la fin de la guerre, quand il était encore adolescent, des communistes espagnols avaient assassiné son père, acte pour lequel ils avaient été condamnés à trois mois de prison, un peu comme aujourd'hui ceux qui se prennent six mois avec sursis pour un viol collectif ou un lynchage de rue.

Il avait trouvé alors un grand soutien moral auprès de la famille de mon beau-père, paysans à Pierrelatte, et épousé l'une des filles de la maison, Marthoune; leur attachement réciproque était un sujet d'émerveillement, et aussi de plaisanteries diverses, c'étaient Philémon et Beaucis. Il a suvécu dix ans à Marthoune, les voici maintenant réunis.

Ils avaient une vieille maison bourgeoise à Sorgues, et sans enfants, recevaient leurs neveux et affiliés, je me souviens de joyeux dîners gastronomiques, Marthoune cuisinait très bien. Et le père Gauthier était un bon vivant, un joyeux compagnon. 

Ils se sont ensuite retirés aux Granges Gontardes, près de Pierrelatte et de Donzère, et nous fêtions chez eux la veille de Noël, avec la nombreuse famille Fargier. Sa femme préparait le loup pêché par son beau-frère à Sète, avec de la sauce hollandaise. Nous y allions le dimanche, aussi, jouer à la belote, les neveux passaient dire bonjour, avec leurs enfants. Maman et Marthoune comparaient leurs fleurs et en échangeaient. 

Les convives sont partis un par un pour l'autre monde, Simone, qui m'avait conseillé la littérature russe quand j'avais quinze ans, avec le résultat que l'on sait. Pedro, qui me manque toujours. Marisette et Jean. Marthoune. Maman...

C'est toute la France que j'ai connue qui s'en va. Ce qu'elle gardait de familial, de chaleureux, de traditionnel, de pittoresque.... 

Il est allé rejoindre ceux qui lui manquaient autant qu'à nous et que rassemblaient les tablées familiales, les déjeuners de chasse, les belotes du dimanche et les bons restaurants, les parties de rigolade, entre Pagnol et Audiard.

Adieu monsieur Gauthier. Adieu, la France... 


Départ

 

Près de nous se dressait un grand Christ douceâtre

Dans les reflets rosés de sa robe de plâtre,

 Montrant son cœur à nu de ses doigts repliés

Que d’un regard inquiet tu regardais bouger.

Et j’aurais bien voulu qu’ils bougeassent vraiment,

Que dans ses bras ouverts,  ma pauvre chère maman,

Il te prît aussitôt pour t’emporter là bas,

Où sont partis les gens que tu crois voir chez toi.

Nous n’avons pas pu boire encore jusqu’à la lie,  

Le calice trop amer de cette maladie.

Nous n’avons pas gravi  jusqu’au lointain sommet,

L’aride Golgotha qui nous fut préparé.

Et nous allons de pair, toi et moi, pas à pas,

Dans cette contrée floue que tu ne connais pas.

Soleil de mon matin, tu n’es plus que la cendre

De ta vie consumée qui s’éteint sans m’attendre.

                                      …

Sous les grands arceaux nus de cette vieille église,

Marthoune reposait dans sa barque scellée.

Sur le point de partir, fallait-il qu’elle nous dise,

Lasse depuis longtemps des jours qui  s‘éternisent,

Vers quel rivage étrange  elle s’était embarquée.

Et nous, depuis le quai, au travers du brouillard,

Ne distinguons pas bien les lointains obscurcis,

Vers lesquels  à ton tour tu vas partir aussi,

Comme tout un chacun doit le faire tôt ou tard.

A la vie qui s’enfuit, tu tenais bien pourtant,

Et tu vas recueillant ça et là tournoyant,

Les reflets qu’il t’en reste dans ce vent ténébreux

Qui les prend et les jette et ne laisse rien d’eux.

La vie, la douce vie de jour en jour coulant,

Du matin jusqu’au soir, de l’hiver au printemps,

Le rire des enfants et les mots qu’on échange,

La fleur qui s’épanouit et le pain frais qu’on mange,

Et les oiseaux qui passent et les chats assoupis,

Les courses, le jardin, les repas entre amis,

De jour en jour coulant, le sable des instants

Est à présent compté.

Il en reste si peu

Que voici le dernier,

Celui qui mène à Dieu,

Et va nous séparer.

 

Il va nous séparer, mais pour bien peu de temps,

Sortons, ma chère maman, de l’église endeuillée.

Au dehors le mistral essorant les nuées

Nous lave un grand morceau d’azur étourdissant

Où des constellations d’oiseaux avec lenteur

Filent leurs astres blancs dans sa claire rumeur.

Comment croire à la mort devant le dais glorieux

Que déploie la lumière après ces funérailles,

 Devant la liturgie que célèbrent les cieux

Repoussant les vantaux de la froide grisaille?  

Ce sont là haut nos anges qui nous font ces grands gestes,

Tracés dans la splendeur du soir déjà doré,

Et c’est le courbe éclat de leur envol céleste

Qui  soulève nos âmes et  vient les consoler.

 

Pierrelatte décembre 2011