Quelqu’un m’a
adressé cette information où, sans parler de l’apparence de jésuite propre sur
lui du charmant conférencier, à elle seule assez parlante, je lis
personnellement des tas de choses entre les lignes, les dernières, qui définissent le propos de la conférence..
« Ces difficultés (invasions, conquêtes, pouvoir
soviétique) ont eu comme conséquence un certain isolement des orthodoxes,
Et une certaine méfiance envers les occidentaux. »
Là, il est tout
de suite visible qu’on le déplore. On déplore et l’isolement, et la méfiance.
Or moi, en tant qu’orthodoxe convertie, je considère qu’en fin de compte, tous
ces événements ont été voulus par Dieu pour préserver les orthodoxes le plus
longtemps possible de l’influence occidentale qui a, d’une part dénaturé en
partie l’orthodoxie et d’autre part, introduit dans l’empire russe des idées
regrettables qui ont conduit à la révolution.
Quant à la méfiance, elle est
bien naturelle, quand on considère le sac de Constantinople par les Croisés, la
campagne des chevaliers teutons contre la Russie arrêtée par le saint prince
Alexandre Nevski, lequel Alexandre
Nevski, plutôt que de se soumettre au pape, a préféré les Tatars: il suffisait
de leur payer tribut pour avoir la paix, pratiquer sa foi et conserver ses us
et coutumes. Alors qu’en choisissant le pape, la Russie aurait perdu l’une
et les autres. Ensuite, avec la conquête polonaise de la Petite Russie, on a vu
arriver le cheval de Troie uniate, destiné à convertir les orthodoxes de force,
et cette politique occidentale, comme l’a montré le théologien grec Théodore
Zissis, est encore appliquée en Ukraine de nos jours, sous une autre forme, et
avec la complicité enthousiaste du patriarche Bartholomée. Il y a encore les exactions hallucinantes de
cruauté commises par les Croates catholiques contre les Serbes pendant la
guerre. Donc des raisons d’être méfiants, les orthodoxes en ont eu de très
sérieuses.
Pour en revenir à l’isolement, et en ce qui concerne la Russie, je
dirais que grâce à cet isolement, dû aux Tatars, aux dimensions du pays, à sa
nature inhospitalière, elle a développé une culture extrêmement originale avec
des éléments d’une insondable antiquité, qu’à mon avis aucun peuple européen n’a
pu conserver à ce point, culture qui fut par la suite ignorée et méprisée de la
noblesse occidentalisée, béate d’admiration devant l’efficacité des protestants
et « l’art » des catholiques, les idées des « Lumières » et
la franc-maçonnerie, mentalité que l'on retrouve aujourd'hui chez les libéraux. Les pays orthodoxes
ont échappé à la Renaissance, ce retour en arrière à un paganisme hellénistique
décadent et à des antiquailleries que la vivacité et la spontanéité du moyen-âge
chrétien avaient dépassées tout en les intégrant naturellement. La Renaissance qui vit surgir l’hérésie
protestante de l’hérésie catholique, l’esprit bourgeois et capitaliste, ennemi
de la communion chrétienne, de la société organique naturelle où tous les
éléments sont reliés et complémentaires, comme dans une cathédrale, de la
conception cosmique et traditionnelle du monde, du désintéressement, du don. Un
esprit matérialiste, rationaliste, prométhéen, terriblement efficace, d’ailleurs,
puisqu’il est la marque de ce monde, dont nous savons qui est le prince. Je ne vois pas comment on pourrait regretter d’avoir
été tenu à l’écart de tout cela, sauf à être soi-même dénaturé, surtout quand on
voit, et cela se voit maintenant d’une façon éclatante, quel gigantesque asile
de fous totalitaire cette civilisation finit par mettre en place. Que pour
survivre les peuples orthodoxes aient dû plus ou moins « se mettre au
niveau » technologique de cette civilisation satanique et mortifère mais
très puissante, était peut-être inévitable aux yeux de leurs dirigeants. Mais l’Eglise
n’a pas à participer à cela, sauf à se renier, et nous en arrivons au deuxième
point de la conférence annoncée :
Le modèle des Eglises autocéphales nationales a
rendu aussi difficile le cheminement des Orthodoxes vers la modernité.
Là, ce qui me
vient immédiatement à l’esprit, c’est pourquoi les orthodoxes doivent-ils
cheminer vers la modernité ? Comment un prêtre peut-il envisager un
cheminement orthodoxe vers la modernité ? Il me paraît clair que si l’Eglise
a un chemin, c’est vers le Christ, son second avènement et l’Apocalypse, avec
le souci d’y parvenir entière, intacte, en conservant le plus de brebis possibles
à l’écart des gouffres de perdition. La modernité n’a absolument rien à voir là
dedans, ou plutôt, elle est précisément LE gouffre de perdition number one, ce n’est plus un gouffre, d’ailleurs,
c’est même un maelström ! Cela devrait être visible à tout chrétien
authentique, ce l’était aux yeux de tous les grands saints orthodoxes du XX°
siècle. Aucun ne nous a prêché de cheminement vers la modernité. Je vois ici le
titre d’un livre de saint Païssios l’Athonite que j’ai sous la main : « Avec
crainte et douleur pour le monde contemporain »… De toute évidence, saint
Païssios ne cheminait pas vers la modernité. Moi non plus. Quand j’ai choisi l’Orthodoxie,
je n’ai pas choisi la modernité, j’ai choisi la Tradition et l’Eternel Présent
qui est l’écume d’un passé toujours vivant, ce que ne me donnait pas le
catholicisme romain ni le monde dans lequel j’étais née, progressiste, effréné,
superficiel, artificiel, égoïste, de plus en plus hideux et vulgaire. Si on
tient à cheminer vers la modernité, ce n’est vraiment pas la peine de devenir
orthodoxe ou de le rester, il suffit d’être protestant, ou catholique de
gauche, il est vrai que le fin du fin, pour ceux-ci comme pour les orthodoxes
sympathisants, serait de faire de l’orthodoxie quelque chose de comparable,
avec quelques icônes et de jolis chants… «L’orthodoxie intelligente et
occidentale » dont m’a cassé les oreilles un jour une adepte de cette
dérive. La modernité est certes une donnée dont on est forcé de tenir compte,
malheureusement, mais pour faire face aux problèmes qu’elle pose, car elle pose
surtout des problèmes, il existe la fameuse « économie » qui
fonctionne si bien dans l’orthodoxie. Ainsi aujourd’hui, les femmes font des
icônes, ce qui ne leur était pas permis, sans doute à tort, au moyen âge. Mais
ce genre d’aménagements survient, sans toucher à l’essentiel, sous la pression
de l’histoire, de façon organique.
Ici je bute sur
le premier élément de la phrase que j’avais laissé pour la fin : le modèle
des Eglises autocéphales. C’est le modèle des Eglise autocéphales qui nuit au
glorieux cheminement des Orthodoxes vers les lendemains qui chantent de la
modernité. Ce modèle des Eglises autocéphales tellement mis à mal par le
patriarche Bartholomée, qui s’affirme en tant que pape orthodoxe, dans l’affaire
ukrainienne. C’est vrai que ces Eglises autocéphales de Serbes, Roumains et
levantins arriérés, toutes ces structures défendues au fil des siècles par le
sang des martyrs, des saints princes et guerriers locaux, contre les divers musulmans,
tatars, ottomans, polonais, oustachis, croisés, chevaliers teutons, ça fait
désordre, ce n’est pas compatible… avec quoi ? Je vous laisse vous poser
la question et tirer vos conclusions, cela vaut vraiment la peine d’y
réfléchir.
Pour moi, qui
suis une arriérée assumée, la réponse est claire. Les Eglises autocéphales qui
constituent l’Orthodoxie, la vraie, sont une fâcheuse persistance d’un état d’esprit
archaïque normal dans un monde complètement perverti, abruti et confus que des
oligarchies pas si occultes que ça sont en train d’organiser en société globale
sous l’autorité d’un gouvernement mondial. Il ne paraît pas si difficile d’atomiser
les plus petites d’entre elles, mais l’Eglise russe est un plus gros morceau,
et c’est la seule qui n’est pas au pouvoir politique et militaire de l’OTAN, le
gouvernement de son pays ne l’étant pas encore non plus. C’est là que l’infamie
commise en Ukraine apparaît dans sa vraie perspective.
Aux foules de
consommateurs et d’esclaves amnésiques ébahis sur lesquelles entend régner ce
gouvernement mondial, il faut une religion syncrétique pour sous-hommes, projet
décrit dans les années 80 par le père Séraphim Rose dans son livre « l’Orthodoxie
et la religion du futur ».
S’il ne reste
plus que deux papes en lice et que les Eglises locales « arriérées »
sont soumises à celui de Constantinople, la « religion du futur », la
communion arc-en-ciel dans l’extase œcuménique des confessions « intelligentes
et occidentales » pourra commencer à se constituer.
Traitez moi de
complotiste, si vous voulez. Je sais déjà que si par malheur le patriarcat de
Moscou pliait devant ce projet, ce qu'à Dieu ne plaise, j’irais retrouver les vieux-croyants, ce serait
pour moi la preuve éclatante qu’ils étaient dans le vrai, ce que je crois déjà
à beaucoup d’égards.
Grand merci Laurence pour cette mise au point salutaire. Je suis française de "souche", d'une famille catholique.Après un long parcours cahotique je suis devenue orthodoxe, dans l'Eglise russe, et en remercie le Seigneur chaque jour. J'aime et admire particulièrement le métropolite Onuphre et son Église: persécutés ils bénissent...
RépondreSupprimerMerci à vous de votre réaction réconfortante et saine!
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