Nous avons donc fait connaissance avec le père Alexandre, un homme très intéressant, profond, original, qui s'implique dans le développement de la vie culturelle locale. Il organise un festival dans un lieu saint du coin, la montagne de sainte Marie (l'Egyptienne) menacée par un projet de carrière, les termites du démon sont vraiment partout. Il a besoin de moi pour chanter des chansons françaises anciennes lors de ce festival, en été, ça me laisse le temps de répéter! Car il a un projet de reconstitution du moyen âge français, et le père américain Joseph Gleason, émigré à Rostov avec sa nombreuse famille, célèbrerait la liturgie des Gaules chère à l'ECOF et théoriquement antérieure au schisme du XI° siècle, dont on dit pourtant que la reconstitution est sujette à caution.
Il dispose pour tout événement culturel d'un splendide local, une vieille maison restaurée, une vraie maison russe avec des fenêtres sculptées, qui fait partie de tout un ensemble. Si j'ai bien compris, une jeune femme biélorusse venue s'installer à Rostov, Anastassia, restaure tout ce qu'elle peut avec un mécène.
Le père Alexandre "aime la beauté", et je partage pleinement son état d'esprit. La maison a été aménagée avec goût, avec des meubles et des objets plus ou moins anciens, en respectant les murs et les plafonds de bois. Si objets contemporains il y a, ils s'intègrent parfaitement. Et l'on s'y sent merveilleusement bien, c'est une maison qui repose les yeux, l'âme et l'esprit.
Elle comporte une petite partie galerie, où je pourrais exposer ultérieurement mes aquarelles, mais le projet immédiat, c'est une expo des oeuvres des petits élèves de Liéna, couplée avec un concert de ces mêmes élèves, et notre participation d'adultes, dans le cadre d'une manifestation informelle autour d'un thé, cela en décembre. D'ici là nous pourrons aussi répéter dans ce lieu magnifique, et d'ailleurs, nous l'avons fait, à la grande joie du père Alexandre, qui nous accompagnait. Il connait Kotov, de l'ensemble Sirin, le joueur de gousli Strelnikov, et autres folkloristes.
Je lui ai chanté le roi Renaud et la blanche biche, et puis un vers spirituel russe, ma vielle marchait, il faut dire qu'à force de piquer des crises de nerfs dessus, je finis par savoir lui parler.
Liéna est partie ensuite donner ses cours, et il nous a emmenées au restaurant d'en face, Katia et moi, nous avons abondemment discuté de nos expériences respectives, comment nous sommes arrivées à Pereslavl, de nos projets sur place. Le père Alexandre est très francophile, et comprend même un peu le français. Il est très conscient de ce qui est en train de nous arriver et des menées sournoises pour installer le même chaos en Russie. Comme je lui parlais de Vologda et Ferapontovo, il nous a dit: "Là bas, c'est autre chose, c'est la zone au delà de ce que j'appelle l'horizon des événements, soit cette bande de stabilité qui borde un trou noir.
- Et le trou noir, c'est Moscou? demande Katia.
- Oui. Nous, nous sommes dans la bande de stabilité, où arrivent des gens comme vous, ou comme Anastassia, cultivés, dissidents et plus ou moins malmenés par la vie, seuls, marginalisés, en un mot victimes de la modernité. Vologda, Ferapontovo, ce sont d'autres gens, qui ne sont pas soumis à la force d'attraction et restent simples, vrais, paisibles, avec en effet des intellectuels locaux profonds."
Devant les événements terribles qui se profilent un peu partout, le père Alexandre, comme tous les gens que je rencontre dans le folklore ou la culture ici, estime qu'il faut sauver ce qu'on peut là où nous sommes, importés ou non. Et se regrouper, d'ailleurs pas seulement dans une optique culturelle, mais dans une perspective de survie physique et surtout spirituelle.
Il dispose pour tout événement culturel d'un splendide local, une vieille maison restaurée, une vraie maison russe avec des fenêtres sculptées, qui fait partie de tout un ensemble. Si j'ai bien compris, une jeune femme biélorusse venue s'installer à Rostov, Anastassia, restaure tout ce qu'elle peut avec un mécène.
Le père Alexandre "aime la beauté", et je partage pleinement son état d'esprit. La maison a été aménagée avec goût, avec des meubles et des objets plus ou moins anciens, en respectant les murs et les plafonds de bois. Si objets contemporains il y a, ils s'intègrent parfaitement. Et l'on s'y sent merveilleusement bien, c'est une maison qui repose les yeux, l'âme et l'esprit.
Elle comporte une petite partie galerie, où je pourrais exposer ultérieurement mes aquarelles, mais le projet immédiat, c'est une expo des oeuvres des petits élèves de Liéna, couplée avec un concert de ces mêmes élèves, et notre participation d'adultes, dans le cadre d'une manifestation informelle autour d'un thé, cela en décembre. D'ici là nous pourrons aussi répéter dans ce lieu magnifique, et d'ailleurs, nous l'avons fait, à la grande joie du père Alexandre, qui nous accompagnait. Il connait Kotov, de l'ensemble Sirin, le joueur de gousli Strelnikov, et autres folkloristes.
Je lui ai chanté le roi Renaud et la blanche biche, et puis un vers spirituel russe, ma vielle marchait, il faut dire qu'à force de piquer des crises de nerfs dessus, je finis par savoir lui parler.
Liéna est partie ensuite donner ses cours, et il nous a emmenées au restaurant d'en face, Katia et moi, nous avons abondemment discuté de nos expériences respectives, comment nous sommes arrivées à Pereslavl, de nos projets sur place. Le père Alexandre est très francophile, et comprend même un peu le français. Il est très conscient de ce qui est en train de nous arriver et des menées sournoises pour installer le même chaos en Russie. Comme je lui parlais de Vologda et Ferapontovo, il nous a dit: "Là bas, c'est autre chose, c'est la zone au delà de ce que j'appelle l'horizon des événements, soit cette bande de stabilité qui borde un trou noir.
- Et le trou noir, c'est Moscou? demande Katia.
- Oui. Nous, nous sommes dans la bande de stabilité, où arrivent des gens comme vous, ou comme Anastassia, cultivés, dissidents et plus ou moins malmenés par la vie, seuls, marginalisés, en un mot victimes de la modernité. Vologda, Ferapontovo, ce sont d'autres gens, qui ne sont pas soumis à la force d'attraction et restent simples, vrais, paisibles, avec en effet des intellectuels locaux profonds."
Devant les événements terribles qui se profilent un peu partout, le père Alexandre, comme tous les gens que je rencontre dans le folklore ou la culture ici, estime qu'il faut sauver ce qu'on peut là où nous sommes, importés ou non. Et se regrouper, d'ailleurs pas seulement dans une optique culturelle, mais dans une perspective de survie physique et surtout spirituelle.
Liéna |
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