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dimanche 14 avril 2024

Ville invisible

le rempart du monastère Goretski

 En ouvrant une vieille clé USB, je suis tombée sur des photos que j'avais faites la première fois que je suis allée à Pereslavl, en juillet 99. Malheureusement, je crois qu'il en manque beaucoup, j'avais scanné celles-ci au moment de mon déménagement. Combien j'avais aimé cette ville pittoresque et poétique qui gardait son caractère russe capricieux, nonchalant et naturel, malgré les destructions soviétiques et avant le saccage post-soviétique qui l'attendait et qui est presque achevé...  Elle reflétait une véritable douceur de vivre, une paix, une liberté qui ont disparu sous l'afflux des touristes et des voitures, sous le bétonnage et le cloisonnement, le siding de plastique et les barrières métalliques, les toits aux couleurs vénéneuses, les murs de blocs de ciment gris jamais enduits, parce que cela ressemble à de la pierre aux yeux de ceux qui prennent toujours les vessies pour des lanternes, et que la pierre, c'est exotique, ça fait riche. Au début, je pensais qu'on n'avait pas crépi faute de moyens, mais maintenant, j'observe que c'est systématique et sans doute voulu. Le moins qu'on puisse dire est que cela n'embellit pas le paysage...

Devant ce même monastère, il y avait un monument de la seconde guerre mondiale, sous forme d'un tank que les gosses escaladaient et qui a disparu, pour faire place à des maisons bigarrées qui n'ont tenu aucun compte de l'environnement pour s'installer avec insolence. J'ai retrouvé aussi une vue que j'avais prise derrière ce monastère, et qui n'existe absolument plus. L'hiver suivant, j'en avais fait un dessin, que j'ai ensuite offert à mon filleul en France. C'était si équilibré, aéré, harmonieux, tout allait bien ensemble, les maisons, les arbres et les églises. Maintenant, de grosses maisons moches s'accumulent à cet endroit comme si on y avait vidé un énorme seau plein d'objets hétéroclites.





A l'époque, Moscou ne venait pas tellement à Pereslavl, à part les artistes-peintres, parce que c'était considéré comme loin, il n'y avait pas de train, seulement des bus, la route à quatre voies n'avait pas été prolongée. Mais je ne suis pas sûre que ce soit Moscou qui ait tout gâché, ou plutôt si elle l'a fait, c'est indirectement, les habitants voulant vivre comme les moscovites, ou comme ils se figuraient que les moscovites vivaient. "Nous voulons vivre bien" est l'argument pour raser les isbas pittoresques plutôt que de les aménager, à cause du mépris inculqué pour le monde paysan et tout ce qui est ancien. Ou pour construire des châteaux américains et des cottages allemands ou qui voudraient le paraître. Et tout cela, sans aucune considération pour les voisins, pour l'environnement, pour l'ensemble de la ville. On pose sa maison comme un pliant sur une plage bondée, en écrasant les orteils de ceux qui sont déjà là et qui n'ont qu'à se pousser, ou aller plus loin. 




Le monastère saint Nicétas venait d'être rendu au culte, il était dans un très mauvais état, mais quelle beauté, et que d'espace autour de lui, l'âme ouvrait ses ailes à cette vue, comme les oiseaux qu'on voyait passer dans ce ciel immense. L'église avait encore ses coupoles de tuiles de bois essenté, je suppose qu'on n'a pas pu les garder à la restauration. Inutile de dire que ces vues n'existent absolument plus. Tout est déjà grignoté par toujours les mêmes bâtiments anarchiques très laids, sans aucun plan d'urbanisme, et dans l'absolu, un tel site aurait dû être préservé de toute construction, car il contribuait à la valeur historique, artistique, esthétique de la ville mais sans doute que le mot "touristique" concerne exclusivement les mongolfières, les planches à voile, les ailes volantes, les motos, le camping; le restaurant et la plage, et pas la beauté et le silence d'un site intact autour de son merveilleux monastère, avec la source miraculeuse de saint Nicétas qu'on voit sur la photo et qui disparaît aujourd'hui derrière les OVNIs.



Le monastère de la Trinité-Saint-Daniel était lui aussi en très mauvais état, il a été depuis entièrement et magnifiquement restauré, et il fonctionne, Dieu merci. Mais tout l'écrin de cette nature spontanée et de ces maisons traditionnelles devant lesquelles des petites dames discutaient paisiblement, dans le fil de la brise et le calme d'une après-midi d'été, a été ravagé par une pompe à essence, un complexe de matériaux de construction, d'énormes bâtisses au ras de la rue, où plus personne ne s'assied, et où circulent des voitures. 

1999, cela ne me paraît pas si loin, et pourtant, ça l'est déjà. Ce qui s'est passé à Pereslavl se passe à Moscou et dans beaucoup d'autres villes, cela se passe dans le monde entier, d'ailleurs, et grandissent des générations qui ne savent même plus ce que c'est que la poésie ou l'harmonie, ont une vision absolument utilitaire, artificielle, consumériste et morcelée de l'existence, chacun pour soi, chacun s'impose, prend, achète, réquisitionne, le monde entier n'est qu'un champ d'exploitation, un parc de loisirs, un terrain de chasse, un complexe sportif, un centre commercial, un hôtel, un bordel.


La rivière Troubej n'avait pas été encore dépourvue de ses jolies maisons au profit de villas mon rêve abominables, et ici, c'était le lac au pied du "Botik" de Pierre le Grand, je m'y étais baignée: 



Maintenant, les bénévoles du mouvement "Tom Sawyer Feast" s'efforcent de sauver ce qui subsiste, et bravo, mais il ne reste pas grand chose. Les "moscovites", qui ont le dos large, esquissent un mouvement inverse, en restaurant joliment de vieilles maisons ou en construisant dans l'esprit russe (et non dans le kitsch à la russe boursouflé qui n'a rien à voir avec cet esprit), le problème est que la ville a complètement perdu son unité, sa structure, et que ces tentatives sont assez isolées, à la limite, maintenant, c'est ce qui est authentique qui paraît déplacé.

Comme me le disait une amie française à propos des environs d'Avignon, "si nous pouvions voir le monde tel qu'il était il y a cent ans, nous pleurerions de chagin et de honte". J'espère qu'on ne fera jamais avec Gorokhovets, Iouriev-Polski, Ferapontovo ou Elets ce qu'on a fait avec Pereslavl.

jeudi 11 avril 2024

Viande

 J'ai lu un article d'Igor Drouz, journaliste ukrainien orthodoxe et monarchiste, dont je crois devoir faire part aux lecteurs français. 

"Beaucoup d'experts de l'Ukraine, dont moi, disent depuis longtemps que les autorités pro-occidentales de Kiev, s'apprêtent à pousser les femmes à la guerre avec la Russie. Le 2 avril, le président Zelenski a signé une loi sur la création du cabinet électronique de l'appelé. Il comprend la règle selon laquelle le registre collectera toutes sortes de données sur les citoyens, sans aucun consentement, ce qui a été critiqué même par la Direction principale des experts scientifiques de la Rada. Mais le plus intéressant est que ces données seront collectées non seulement sur les hommes mais sur toutes les femmes. L'article 13 de la loi stipule que les autorités soumettent au registre des données tous les citoyens ukrainiens âgés de 18 à 60 ans. 

Autrement dit, toutes les femmes de l'âge spécifié seront inscrites sur la liste des personnes assujetties au service militaire. Certes, le texte indique que les opérateurs du registre, le ministère de laDéfense, l'état-major général des forces armées ukrainiennes, le SBU, le service de renseignement étranger, supprimeront les données des citoyens qui ne sont pas astreints au service militaire. Mais cette réserve ressemble davantage à une tentative des autorités pour rassurer la population. Car si les femmes ne sont pas mobilisées, pourquoi devraient-elles être inscrites dans ce registre? 

Je remarque que les dirigeants ukrainiens font constemment référence à l'expérience de plusieurs années de guerre en Israël et parlent de la "nécessité" de faire de l'Ukraine un "nouvel Israël". Et en Israël, toutes les femmes doivent servir dans l'armée, mais elles servent un an de moins que les hommes. Dans le même temps, le régime Zelensky souligne toujours le rôle prétendument très important des femmes dans l'armée et parle constemment de manière flatteuse des "glorieuses défenseuses". Les politiciens de moindre importance sont encore plus franchement en faveur du service militaire des femmes."

https://ren.tv/blog/igor-druz/946853-feministki-sdelali-ukrainok-pushechnym-miasom

Il parle ensuite de la propagande en faveur du "droit" des femmes à aller se faire trouer la peau dans la boue des tranchées aussi bien que les hommes, du soutien américain à ce genre de projet, de la propagande en faveur de la théorie du genre et du féminisme qui dénient aux gens toutes particularités liées à leur sexe, bref, de tout ce qui peut contribuer à faire de ces soi-disant farouches nationalistes une masse indifférenciée prête à passer à la moulinette au signal, comme les clones dans les romans de Voznessenskaïa. Il évoque aussi l'Eglise orthodoxe, qui représente un point de résistance, car le renouveau spirituel s'accompagne d'un renouveau famillial traditionnel, le père, la mère, les nombreux enfants. au fait, que deviennent les enfants, si tout le monde part se faire hacher menu? Je laisse cela à votre imagination, si vous n'êtes pas trop sensible ni trop renseigné. 

La ressemblance avec les lois récemment édictées par Macron ne vous fait pas tiquer? Et le "nouvel Israël"? Bon, imaginez que les Palestiniens se soient laissé laver le cerveau jusqu'à faire la guerre aux Syriens en prétextant qu'ils sont les seuls vrais arabes musulmans du Moyen Orient, et qu'ils vont créer un grand califat, tandis qu'Israël leur fournirait les armes pour se faire tuer jusqu'au dernier, laissant aux voisins exécrés le soin de nettoyer le territoire tout en se causant à eux-mêmes le maximum de tort. Ce serait le crime parfait, on se demande pourquoi on n'y a pas pensé. Pour ce qui est des Ukrainiens, cela a très bien marché. Mais j'ai mauvais esprit sans doute.

Dans la perspective de la théorie du genre, prélude à l'élaboration d'une biomasse d'abrutis effarés dont on fait ce qu'on veut, je soumets à la curiosité des esprits comme le mien cette vidéo édifiante:

https://vk.com/loralira?z=video634258456_456246301%2F619939d4e60b837e24%2Fpl_wall_19879744

Je ne sais pas si elle s'ouvrira, car elle vient de VK, et sans doute initialement de Telegram, évidemment, puisque youtube and co censurent à mort. Il s'agit de témoignages de transgenres en proie à d'affreux effets secondaires physiques et psychiques des charcutages et des empoisonnements qu'on les a encouragés à subir pour faire d'eux-mêmes ce qu'ils ne sont pas et ne seront véritablement jamais.

Puis je suis tombée sur ce message dans facebook, envoyé par un Bulgare:

Si on imagine qu'il y a une mafia qui contrôle les médias des pays démocratiques clés ?

Elle pousse ses pions à des postes clés ? C'est facile de comprendre que dans ce cas ses candidats gagnent les élections. Ils pourraient exercer un contrôle et influencer presque chaque état démocratique par les médias et leurs propres candidats ayant gagné les élections. Cependant parfois ça ne marche pas trop : Victor Orban en Hongrie, Robert Fico en Slovaquie. Sinon on voit qu'en général on est très très unanime... Les dictatures par contre sont contrôlées par le dictateur et échappent donc au contrôle de la mafia. Cela expliquerait aussi pourquoi certains dictatures sont dans le viseur de la guerre et de la propagande des autorités et médias de certains democracies du monde. Il y a des dictateurs qui se vendent facilement (Afrique etc.) On n'en parle pas d'eux dans nos médias, ces dictateurs ne sont pas "méchants". Il y des dictateurs trop têtus, trop indépendants qui ne se rendent pas, ne se vendent pas. Les derniers doivent être éliminés. Les pions de la mafia font des guerres absurdes, des coups d'état, des révolutions de couleur. Les médias suivent la musique et l'opinion publique majoritaire est favorable. Exemple : la guerre d'Irak 2003, la guerre de Libye 2011, le coup d'état d'Ukraine 2014. C'est pas fait par stupidité ni par erreur. D'abord, que la guerre soit perdue ou gagnée, ils gagnent énormément d'argent grâce aux commandes militaires. Deuxième, ils éliminent les dictateurs qui échappent à leur contrôle. La majorité des gens puisent dans les médias non seulement les évènements et faits sélectionnés, présentés et souvent déformés, mais aussi les interprétations et opinions répétées Si on imagine cette mafia. alors tout dans notre réalité coïncide et s'explique de façon rationnelle. Non Ils n'ont pas été trop stupides, non Ils n'ont pas fait d' erreurs. Iraq, Libye, Syrie, Russia, Chine J'ai donc émis l'hypothèse que nos belles démocraties sont parasitées par une mafia militaire, qui contrôle aussi les médias Mainstream et donc le vote et l'opinion de la majorité. JFK a très probablement été assassiné notamment par cette mafia, contre laquelle Eisenhower nous a mis en garde dans son discours de passation du pouvoir. Les USA ont été la première prise de cette mafia, je pense. La Communauté Européenne est un outil parfait pour contrôle et soumission de l'Europe. l'OTAN est l'organisation militaire officielle de cette mafia. Les nombreux alliés obéissants sont sous contrôle satisfaisant. L'opposition est divisée, diabolisée et disqualifiée. Extrême droite, extrême gauche, nazis, agents de Poutine, trolls de Poutine etc etc. Après la deuxième guerre mondiale, la majorité des nazis et criminels de guerre ont été "recyclés" dans le bloc occidental pour travailler et notamment lutter contre l'URSS et le bloc de l'est. Cette mafia sans nom, utilise non seulement le "travail" des nazis, mais aussi soutient et coopère avec les terroristes islamistes. En Afghanistan contre l'URSS, en Libye contre le régime de Mouammar Kadhafi, en Syrie contre le régime de Bachar el-Assad. La stimulation des terroristes islamistes offre une vraie justification pour le contrôle sur la population et la militarisation de la police et la gendarmerie. Encore une occasion pour les marchands d'armes. Tout s'explique. Professeur Jeffrey Saks, que j'admire et je respecte énormément, avance que les fonctionnaires de Washington sont stupides, ils font des erreurs colossales. Pas du tout. Ils sont très malins et capables. Simplement leurs choix ne reflètent pas les intérêts des américains, ni de leurs alliés, ni des intérêts de l'humanité en général. Les marionnettes et la mafia anonyme, prennent des décisions et des actions très intelligentes qui correspondent aux intérêts de cette mafia qui a usurpé le pouvoir de nos sociétés démocratiques.

J'ai été sidérée par ces constatations, qui correspondent assez bien aux miennes. Il fut un temps où, sentant tout cela de façon épidermique, je m'étonnais de me retrouver du côté de Saddam Hussein ou de Khadafi que je voyais jusque là comme des dictateurs caricaturaux à la Tintin et Milou. Cependant, je ne suis pas sûre qu'ils soient aussi intelligents qu'il le dit, les grands banksters et mafieux dont il parle. Ils sont fourbes, cruels, vindicatifs, cyniques, dénués d'empathie et de principes moraux à un point fantasmagorique qui fait de Gengis Khan un type assez fréquentable, et m'inclinerait presque à canoniser non seulement Ivan le Terrible, alors là, sans problème! Mais même Staline dans la foulée. Cependant la méchanceté et la cupidité rendent souvent incapable de prévoir ce qu'on ne peut mesurer à l'aune de telles "qualités", elles inclinent à perdre le sens des réalités avec l'accroissement du pouvoir. Sans compter que ces gens-là n'ont pas de loyauté entre eux et se tiennent par la barbichette au moyen de "kompromats" affreux sur lesquels, quand on veut, on est de mieux en mieux renseigné. 

J'ai des amis russes patriotes qu'indignent certains procédés de leur gouvernement à qui ils attribuent des arrières-pensées, des atermoiements peu honnêtes, mais j'en reviens à ce que disait Laurent Brayard l'autre jour: "En face, c'est tellement pire que le choix est simple". Poutine est peut-être un dictateur, bien qu'il soit largement plébiscité par sa population, mais ce n'est pas un dictateur soumis à cette pieuvre supranationale atroce et cela suffit à déterminer mon choix. 

J'attends que tous les défenseurs des droits de l'homme va-t-en-guerre se précipitent pour montrer l'exemple aux derniers hommes ukrainiens, qui se font sauter la tête quand les recruteurs s'emparent d'eux, et à leurs femmes, que les soldats russes trouvent parfois bras en l'air dans les bois, leur criant: "Je suis enceinte", pour les retenir de tirer plus vite que leur ombre. Je voudrais voir Anne Nivat et Anastassia Colosimo, avec leur petit casque et la bénédiction paternelle, partir gaiment à la tête de ceux qu'elles contribuent à faire tuer par milliers, pour le plus grand profit de la mafia.

Pour conclure, j'ajouterai la vidéo de l'interview du professeur Perronne. Certes, Nicolas Bonnal m'a envoyé un commentaire sur la "numérisation forcée" de la Russie, mais chez mon "dictateur insoumis", je ne sens pas encore pointer ce qui se manifeste ailleurs, bien qu'à vrai dire, je suive attentivement ce qui se passe entre la Russie et l'OMS, la réaction de l'une à l'autre pouvant avoir une signification et des conséquences décisives.


Cela me fait bien plus peur que la "numérisation forcée" dont je ne sens pas ici, pour l'instant, les effets. 

lundi 8 avril 2024

Le chemin des écoliers

 

Hier soir, Jason donnait un concert au bar du café. Cela me fait un drôle d’effet de voir cet Américain « crazy », comme j’en ai connu il y a bien longtemps, nous chanter une musique que j’écoutais il y a bien longtemps, dans les bars de son pays, et qui reflète des existences chaotiques, errantes, saignantes de cow-boys, de camionneurs, de vagabonds en leur donnant une dimension tragique, parfois comique, pleine de larmes, de dérision, de passions déçues, notre univers humain déchu, violent et désespéré. C’est comme une étrange résurgence de ma jeunesse dans ma vieillesse, une sorte de téléscopage temporel. Son univers, dans le registre country, me rappelle les romances cruelles du cosaque Iouri Chtcherbakov. C'est du folklore, c’est vivant, c’est vrai, comme Jason lui-même. Il joue avec des partenaires russes qui ont de bonnes bouilles et n’attendaient que lui, et leur niveau à tous est excellent, ils pourraient tout-à-fait se produire dans des bars moscovites. Ce qui me plaît chez Jason, c'est son côté bargeot. Il est très orthodoxe, c'est son côté Silouane, son nom de baptême, et il a un côté bargeot, un côté Kerouac. Le mélange des deux est très touchant.

Le lendemain, comme je l’avais promis à la matouchka Alexandra, je suis allée fêter l’Annonciation et l’adoration de la Croix, qui cette année tombent le même jour, à la Laure de la Trinité-Saint-Serge. C'est d'ailleurs un événement rare, dû à la date très tardive de Pâque, cette année. Nous fêtons le même jour la Conception du Christ et sa mort rédemptrice sur la Croix. C'est intéressant, aussi, comme téléscopage temporel.

Cela représentait pour moi un exploit, car le matin, je suis complètement au radar, surtout quand je ne peux boire un verre d’eau et un café pour remettre mon organisme en route. Conduire plus d’une heure quand je suis rouillée et mal réveillée, puis assister à un office monastique interminable sans pouvoir m’asseoir, cela commence à ne plus être de mon âge. D’ailleurs, je râlais dans la voiture, et je ne suis pas arrivée de très bonne humeur. La cathédrale de la Dormition, construite par Ivan le Terrible, est une pure merveille, avec des fresques d’époque, une iconostase splendide. Le choeur était à la hauteur du reste, c'étaient d'ailleurs plutôt deux choeurs qui se répondaient, avec des effets de canon qui déferlaient comme des vagues sonores successives, l'écho palpitant d'envols séraphiques: « Nous vénérons ta Croix, Seigneur, et nous glorifions ta sainte Résurrection ». Voyant que personne autour de moi ne s’en privait, j’ai voulu prendre une photo, mais un gardien féroce m’a engueulée, sans doute parce qu’il connaissait tous les autres contrevenants, et que l’inconnue de service était la proie idéale. Cependant, il n’avait pas tort et d’ailleurs, prendre une photo dans une église bondée n’est jamais très facile. Mais disons que moulue et somnolente comme je l’étais, cette remontrance n’a pas amélioré mon état intérieur. A cause de cet incident, je mets seulement la photo de l’affiche de Jason pour illustrer la chronique, tant pis pour la cathédrale, ses moines et ses nombreux fidèles et pèlerins, ses starets qui distribuaient leur bénédiction à travers les allées de ses jardins, les coupoles dorées et les oiseaux tournoyants.

Pour me calmer, j’ai recouru à la prière de Jésus, cela m’évitait de fulminer intérieurement ou de trop penser à mes pieds, à mes genoux et à mes contusions. Quand on vient vénérer la Croix, il faut surmonter ses petits malaises... Mais honnêtement, si je suis contente d’avoir assisté à cet office épuisant et d’une grande beauté, cela n’est pas pour moi, en dépit du cadre vénérable et admirable. J’aime autant ma cathédrale, où je me sens en famille, ou bien la paroisse du père Valentin. Il y avait deux sermons, et outre que cela fait beaucoup, et que je n’en comprends pas toutes les subtilités, je ne pouvais m’empêcher de penser à l'homélie inspirée du père Theotokis, à Solan, qui volait tellement au dessus de l’étroite bondieuserie... Parfois, je n'ai plus aucune réaction à l'écoute de ces discours sur nos péchés, comme les gosses en classe qui débranchent quand les profs font des remontrances et dessinent ou regardent les nuages par la fenêtre. Je suis toujours restée un cancre, au fond. J'ai besoin qu'on me fasse rêver, qu'on me donne des ailes et qu'on m'inspire de l'amour. Je pense souvent à la chanson de Brassens "le testament" qui est peut-être celle de lui que je préfère:

Tant pis si les croque-morts me grondent,

Tant pis s'ils me croient fou à lier,

Je veux partir pour l'autre monde,

Par le chemin des écoliers...


Je n'exclus pas d'ailleurs que ma mauvaise humeur et ma fatigue n'aient attiré le gardien déplaisant et jeté une ombre sur ce moment, il nous arrive souvent ce que notre état intérieur détermine. Car notre office à la Laure avait certainement plus d'élan et de lumière qu'une étrange cérémonie espagnole, dont un ami catho tradi a envoyé la vidéo à Dany. Des militaires promènent un crucifix cadavérique couché, au son d'une fanfare lugubre. Je me suis souvenue, en voyant cela, des digressions de Dostoievski sur le Christ mort d'Holbein qui pouvait faire perdre la foi au spectateur du tableau. C'est là qu'émergent nos divergences, car notre ami ne voit pas cela, il voit juste que les traditions se perpétuent, oui mais lesquelles? Dany et moi sommes évidemment sorties de cet état d'Esprit....




jeudi 4 avril 2024

Archipels

 


Fiodor est parti pour la guerre, Katia est allée avec moi, pour se remonter le moral, au restaurant "les Boyards" manger un menu carémique. Il y a pas mal de pertes sur le front, d'après ce que nous entendons dire. Il part volontaire, il est fils unique, il a deux gosses. Je commande des prières de tous les côtés. En passant, nous voyons des maisons décorées de drapeaux russes ou du drapeau du Sauveur non fait de main d'homme, sur fond rouge. La ville est en ce moment particulièrement moche, parce que la neige a fondu, mais la verdure ne lui a pas encore succédé, et rien ne vient adoucir ses disgrâces. On voit toutes les verrues et toutes les tumeurs qui bourgeonnent sur les maisons anciennes, et puis les maisons nouvelles, boursouflées et contrefaites. Mais la mairie illumine la nuit les bâtiments des siècles passés qui subsistent. C'est un phénomène  nouveau. 

A Belgorod, les bombes pleuvent sur les civils qui demandent nos prières. Les Ukronatos font la guerre aux civils, cela fait dix ans que ça dure. Mais soit on n'en parle pas, soit on met ça sur le dos des Russes, qui l'ont large, comme chacun sait.

 Je suis tombée sur une vidéo d'Anatoly Livry et j'ai été particulièrement intéressée par son idée que l'Europe est l'objet d'un génocide et d'un dressage sournois depuis déjà bien longtemps (à 40 mn). Cela fait plusieurs générations qu'on assassine les Européens en masse en éliminant les meilleurs, de sorte que si nous continuons de la sorte, nous n'aurons plus que des cloportes, stupides, veules, minables et crédules, prêts à disparaître dans un melting pot de sous-hommes fabriqués pour ce rôle par une caste de demi-dieux transhumanistes. Déjà, la plupart des jeunes grandissent comme des enfants loups qui ne réalisent pas les acquisitions nécessaires au bon moment et poussent diminués intellectuellement et moralement. Bien sûr, il y a des miracles, des gamins génétiquement doués qui nous émerveillent, mais on fait tout pour les marginaliser et les exclure, car tout le domaine culturel est entre les mains d'une médiocratie contrôlée qui sélectionne systématiquement les siens. Il n'y a qu'à voir par quelle caste d'imbéciles, de fourbes et de criminels nous sommes maintenant gouvernés. De plus, on nous fait vivre dans un environnement affreux, antinaturel, profondément moche et étranger à la vie et aux valeurs humaines éternelles, ce qui bloque tout développement spirituel, esthétique, éthique, poétique. Ce qu'il dit sur les slavistes français est très judicieux, et je me demande par quel phénomène psychologique ces gens censés comprendre la Russie mieux que les autres font tout, avec une aversion méticuleuse, pour en brouiller la perception et en falsifier l'histoire à longueur d'antenne. J'en viens à penser que ce sont des agents recrutés. Ou bien simplement n'auraient-ils jamais eu leurs diplômes ni leur position si ils avaient eu un autre avis sur la question. Je me souviens de la haine trotskiste dont j'ai été parfois poursuivie quand j'étais en fac. Et pas seulement moi. L'une avait ses examens parce qu'elle était militante, l'autre était recalée parce qu'elle fréquentait des Russes blancs. Cela fait cinquante ans que nous nageons dans le "vomi trotskyste" dont il parle.


Je me dis souvent que depuis deux cents ans, Dieu fait ses moissons de justes, avant les derniers temps, et ainsi ne resteront que les pauvres êtres dressés par la Bête et marqués par elle, et un petit troupeau réparti dans les archipels lumineux que personne ne voit. Ainsi, le tri sera facile.

J'ai vu aussi la vidéo d'un adolescent qui a tout compris, et comme il est né normal, avec un bon fond génétique, il veut avoir une vie normale, celle d'un paysan qui a affaire à la nature et aux choses vraies. Mais je crains qu'on ne le laisse pas faire, car sa personne est une offense aux diminués et à leurs maîtres. Sa seule chance, c'est l'effondrement de tout ce système démoniaque. Au moment de cet effondrement, qui à mon avis ne manquera pas d'arriver, il aura un avantage par rapport à tous les autres, il saura couper du bois, faire pousser des légumes et élever des animaux. Et il en est conscient.

Ce que je trouve rassurant, c'est qu'en dépit de l'abrutissement et de l'avilissement organisés, émergent encore de telles personnalités. Cela me donne l'espoir que, dans les archipels lumineux, se préserve quelque chose qui permettra à l'humanité de reprendre pied, quand l'effondrement entraînera ceux qui en sont responsables au fond du trou noir qu'ils auront eux-mêmes créé. Il me parait parfois impossible, devant la catastrophe spirituelle et culturelle sans précédent qui est la nôtre, que nous puissions rétablir ce que nous avons mis des millénaires à acquérir et à transmettre. Mais peut-être suis-je trop pessimiste. A moins, bien sûr, que nous soyons au seuil du Second Avènement et du Jugement Dernier...

Mon beau-père me disait de tout laisser tomber et de devenir bergère dans la haute Ardèche ou les Alpes, c'était un sage. Maintenant, je suis trop vieille. Juste un petit îlot de l'archipel avec des chats, des fleurs et des mésanges, à Pereslavl-Zalesski.



Points lumineux

 


La température est montée à plus de 20 degrés pendant deux jours et maintenant, elle va redégringoler jusqu'à 5 degrés demain matin. Un peu éprouvant. Mais la neige a fondu presque complètement, laissant le paillasson marronnasse de cette période, étoilé par quelques crocus. Je suis allée nettoyer un peu ce chantier, ce qui m'a épuisée, les variations brutales de température ne me valent rien. Et puis quand je commence à jardiner, j'ai beaucoup de mal à m'arrêter à temps et à ne pas me lancer dans les douze travaux d'Hercule.

J'ai passé quelques jours à Moscou, laissant ma ménagerie à Valérie, qui est venue passer trois semaines. En sortant de ma voiture, pour laquelle j'avais trouvé une place idéale, je me suis étalée, après avoir trébuché sur une grille d'évacuation des eaux qui dépassait du bitume, je suis tombée la tête la première sur le pare-choc d'une voiture, me voici avec l'oeil au beurre noir, et des contusions diverses. Je vis dans la terreur de ce genre de gadins. J'ai passé tout l'hiver sans tomber, mais ici, on peut se casser la gueule en toute saison. 


C'était la fête d'Aliocha, le gendre du père Valentin, et après la liturgie, j'ai été invitée, avec Dany, à la table des prêtres et de leurs copains, dans la maison attenante. Il y avait, outre le père Valéri, le père Dmitri et le père Valentin,  l'arrière petit-fils du père Paul Florenski, Vassia, et aussi le Baron, Vassili Gueorguiévitch, que je n'avais pas vu depuis des temps. Il dit des choses très intelligentes et très spirituelles, mais j'ai parfois du mal à le comprendre, car il chuchote tel le python Kaa. Mais je l'aime beaucoup, j'ai passé avec lui et avec les Asmus des soirées mémorables. C'est un homme très cérémonieux, toujours en costar, un intellectuel à l'ancienne, autrefois, il aurait fini au goulag.

J'ai passé ensuite la soirée chez Iouri et Dany, dans le théâtre du poète, avec un cinéaste italien contestataire et Laurent Brayard, que connaissent bien ceux qui s'intéressent depuis longtemps à la cause du Donbass, et que je n'avais encore jamais vu en chair et en os. Nous avons beaucoup parlé de la paysannerie française, car c'est son milieu d'origine, à cinq ans il savait déjà danser la bourrée, son père et son grand-père agriculteurs fabriquaient des vieilles à roue. Il a l'âge d'être mon fils, mais il a encore connu ce monde-là, sur lequel on s'est tellement acharné qu'il a pratiquement disparu.

Puis la conversation est venue sur le Donbass, sur les horreurs qu'il a vues et se refuse à décrire en détails et encore plus à filmer. Mais il a rassemblé des témoignages. Comme il va fréquemment là bas, il n'arrive pas à s'arrêter de fumer. Il nous a raconté qu'un jour, il s'était retrouvé avec une équipière dans un endroit particulièrement dangereux, avec des bombes qui tombaient à cent cinquante mètres d'eux, et qu'ayant allumé une cigarette, il s'était fait engueuler par une grand-mère qui lui avait reproché de mettre de la sorte ses jours en danger. Ce qui avait provoqué chez lui un fou rire qu'elle avait aussitôt partagé. 

Ils ont tous évoqué des aspects peu reluisants du conflit, les trafics, les faux héros, les vrais bandits et les fonctionnaires corrompus, mais Laurent a déclaré: "C'est vrai, tout cela existe, je vois des gens immondes, des gens magnifiques, je vois aussi beaucoup de gens qui sont parfois à la hauteur et parfois pas du tout, des pires capables du meilleurs, des meilleurs qui tombent dans le pire, mais ce que je peux dire, c'est qu'en face, ils sont tellement affreux que le choix est vite fait."

Le lendemain, j'ai réussi à rencontrer Quentin le Belge et Xioucha, dans un restaurant belge, justement. Nous avons évoqué une dame libérale que Xioucha souhaitait me voir "anéantir", mais je n'ai pas trop le goût de la polémique, je n'y recours que lorsque j'explose de rage ou que je suis acculée, ce qui n'est pas le meilleur état d'esprit pour discuter. J'admire et j'envie le calme de Slobodan Despot. Cette dame a bien des qualités mais l'habituel défaut dans la cervelle, le point aveugle de ce type de personnes. "Vous auriez dû le faire, me dit le père Valentin, en tant que Française, pour le salut de son âme immortelle!

- Quel culot, me dit Xioucha, et pourquoi ne le fait-il pas lui-même?

- Parce que la parole d'une Française a plus de poids.

- Lolo, c'est inutile, elle est incorrigible, ils sont tous fous. Ainsi, elle me recommande de faire le plein, car selon elle, les raffineries russes sont toutes détruites, le pays est à genoux, nous allons manquer de tout."

Elle écoute strictement les medias russes libéraux et les médias français, et les formidables conneries qu'on y diffuse en boucle. C'est une sorte de secte, et elle a des adeptes dans tous les pays, même si elle ne détient pas le pouvoir partout. Les rhinocéros du septième jour.

https://youtube.com/shorts/tZJoyl0UXvQ?si=RVByiwrTezyn-kxo

Nicolas Bonnal nous a envoyé un extrait d'un film de Louis Malle, "my dinner with Andre", qu'il est paraît-il difficile de trouver maintenant. Cette conversation date des années quatre-vingt, et tout y est, mais ce n'est pas si étonnant que cela, tout était déjà en germe depuis longtemps. Ce qui m'a frappée, ce sont les références à des "points lumineux", des endroits de résistance où les gens conservent les valeurs humaines et des relations normales, c'est exactement ce que j'ai vu en France: une société de plus en plus étouffante et totalitaire sans que les gens s'en rendent vraiment compte, et des "points lumineux" qu'ils ignorent, qu'ils ne remarquent même pas. J'ai ressenti, depuis que je suis montée à Paris faire mes études, le milieu urbain comme une prison, et c'en est aujourd'hui réellement une, sans que les détenus s'aperçoivent de rien, et même, ils estiment que leur incarcération est un grand privilège qui leur donne une supériorité sur ceux qui restent en province. A l'époque, mon point lumineux, c'était l'église de Vanves. Je disais au père Barsanuphe que j'aurais voulu vivre au Moyen Age. Il me répondait: "Mais dans l'Eglise, vous y êtes..."


Quand je vais à Moscou, je suis contente de voir les amis que j'y ai, mais je n'ai qu'une idée, c'est de fuir cet environnement, ce labyrinthe. Et encore, Moscou, c'est une ville où l'on respire, où l'on garde une certaine liberté.

jeudi 28 mars 2024

Passage de cigognes

 


La belle Katia m’a présenté l’homme de sa vie, le beau Fiodor, un garçon baraqué et viril, avec un air honnête et bon, fils de prêtre, il n’a qu’un seul « défaut », il est patriote et part au front, Katia m’a dit qu’elle ne se serait jamais attendue à rejouer « quand passent les cigognes », avec le baiser sur le marchepied du train et le foulard agité à bout de bras sur le quai de la gare... Elle semble avoir tout à coup dix-huit ans, ils se promènent dans Pereslavl en se tenant par la main, et lorsque j’ai vu le solide jeune homme s’agenouiller pour aider « Katioucha » à mettre sa bottine, j’ai pensé que nous n’étions vraiment pas en France !

L’évêque Porphyre des Solovki, le père Tkatchev et beaucoup d’autres prêtres ou conservateurs orthodoxes considèrent que personne ne devrait aller à un concert de rock à folklore sataniste pendant le carême et en temps de guerre, ni non plus les organiser. Iouri Iourtchenko, qui n’est pas particulièrement orthodoxe, le pense aussi, et mentionne le prix hallucinant des places. Jacques Baud souligne d’autre part que ces attentats ont toujours lieu dans ce genre de manifestations. Bien que les auteurs du crime soient musulmans, les commanditaires, comme je l’ai déjà dit, ne le sont certainement pas. Mais on dirait qu’ils prennent plaisir à donner un côté sacrificiel à ces massacres.

Un orthodoxe fan de rock traite de bigots les gens qui font ce style de réflexions, ce qui me fait penser à certains orthodoxes occidentaux qui voient tout sous l’angle de leur spécificité. Il est certain que le public de ce genre de rock, et parfois même les musiciens, n’ont pas consciemment un état d’esprit sataniste, il reste qu’un orthodoxe ne devrait pas mélanger les torchons et les serviettes et connaître la puissance des symboles. Il y a des choses avec lesquelles on ne joue pas, surtout en ce moment. Et je me rends compte que notre satanisation occidentale, notre aliénation mentale néfaste, est le fruit d’une succession de petites compromissions qui nous font accepter peu à peu des choses intolérables. Les groupes de rock ont un folklore sataniste, allons donc, ce n’est que du folklore ! Les bataillons punitifs ukrainiens ont un folklore nazi, allons donc, ce n’est que du folklore ! Eh bien, l’attentat nous démontre que ce n’est pas du folklore. D’ailleurs, le vrai folklore n’est pas du folklore au sens où l’entendent les gens qui font ce genre d’objections, et du reste,  l’amateur de rock en profite pour égratigner la musique traditionnelle russe dont il a l’image caricaturale habituelle. La musique traditionnelle a un sens profond. Elle ne joue pas, ou si elle joue, son jeu est grave, comme l’étaient tous les jeux jusqu’à l’avènement du « divertissement ».

J’ai vu une vidéo sur la Serbie d’un ancien officier de la Légion, Jacques Hogard, qui témoigne avec honneteté. Il en ressort que la Serbie était le laboratoire de ce qu’est devenue l’Ukraine : une place d’armes contre les Russes, installée au mépris total des lois, des règles, des vies et des valeurs humaines, à grands coups de bombardements et de calomnies, avec des horreurs invraisemblables commises sur des civils, dans le plus grand silence, ou sous les mensonges diffamatoires empressés d’une presse ignoble. La guerre faite aux civils. La guerre mafieuse, pour des motifs mafieux, avec des complicités idéologiques de la part de divers « hainistes ». Mais l’Ukraine, à mes yeux, et ouvrez les vôtres, avec vos oreilles, est aussi le laboratoire de ce qui attend l’Europe, si elle ne se débarrasse pas de ses Zelensky.



J’ai vu aussi une analyse philosophique et chrétienne admirable de ce qui est en train de nous arriver. Tout est dit, tout est clair. A voir, et le livre de ce monsieur, qui semble écrit dans un français parfait et poétique, est à lire, dommage qu’au pays Maudit, je ne puisse le commander, à moins que passe une cigogne pour me le livrer, chez les schtroumpfs bleus.



Il parle de refoulement de l’âme, et c’est exactement de cela qu’il s’agit, particulièrement en France, où les gens semblent même en redouter le réveil, et se braquent dès qu’on parle de « religions » (les « religions » sont la cause de tous les maux, alors même que les plus grands massacres de l’humanité sont dûs à des idéologies athées ou à un christianisme dépourvu de sa part spirituelle, dans le cas des génocides protestants d’Irlandais, d’indiens et de boers). J’ai observé que mon entourage au sens large était là bas pris de panique dès que j’évoquais, ce que je fais rarement, la nécessité de s’occuper de cette étincelle refoulée qui, en eux, essaie jusqu’au dernier moment de trouver un peu d’oxygène pour flamber. C’est que l’embrasement de l’âme consumme souvent la petite existence où l’on se réfugie pour étouffer sans douleur.

Avec l’âme, c’est la prière, mais aussi la poésie et l’identité, les racines qui sont exclues de nos vies. C’est-à-dire ce qui donne à la vie son élan, sa profondeur, sa saveur et son sens, sa beauté, son prix. Mais on est prié de préserver cette existence plate, insensée et minable à tout prix. De ne la risquer que pour ceux qui l’ont privée de toute dimension quand ils ont besoin de chair à canon pour leurs petites affaires.

Il dit que la maison que nous habitons, son jardin, sont le prolongement de notre intériorité, l’endroit où nous exprimons et cultivons ce que nous sommes. De sorte que spolier les gens de leur environnement, de leur terroir, de leur pays, les condamner à une existence précaire et nomade dans des lieux de vie qui ne leur ressemblent pas, qui sont interchangeables, impersonnels, hideux les prive du refuge où leur âme peut s’épanouir, de son terreau. Et c’est exact, je le constate tous les jours ici, à l’issue des décennies soviétiques d’appartements communautaires et de déplacements de populations. Je le constatais même en France, devant les populations urbaines, déracinées et parquées dans leurs HLM.

samedi 23 mars 2024

Hainisme



Le dimanche du pardon, le photographe de l’éparchie a surpris le moment où monseigneur Théoctyste me relevait après ma prosternation rituelle, et Katia m'a envoyé le résultat. Il passe sur ce cliché  tellement de choses qui m’ont alors échappé, que je le garde soigneusement, il me paraît vraiment symbolique, une sorte de message sacré. Monseigneur incarne à cet instant toute l’Eglise orthodoxe qui me porte depuis que j’y suis entrée, à dix-huit ans, et ne me lâche pas.

J’ai appris hier soir la nouvelle de l’acte terroriste monstrueux qui a eu lieu à Moscou dans un de ces lieux maudits qui ne devraient pas exister, un gigantesque centre commercial. Il paraît que nos bartavelles politico-médiatiques dansent la gigue et pissent d’enthousiasme, et moi, en plus de l’horreur que cela m’inspire, je me ratatine de honte. C’est Daesh soit-disant, mais qu’est-ce que Daesh ? Il y a belle lurette que j’ai compris d’où tout cela vient, je laisse aux neuneus bobos leurs carmagnoles malsaines à bord de leur Titanic des fous. La guerre qu’on livre aux civils est une chose fort basse. Je me demande parfois ce que dirait un Léon Bloy devant les abîmes d’infamie où nous sombrons. Le pauvre homme avait déjà la gerbe en 1900. Que serait-ce cent-vingt cinq ans plus tard ? 

Slobodan Despot se penche sur le retour du « hainisme ». Il a le génie de la formule, hainisme convient beaucoup mieux à ce qui se passe de nos jours que fascisme ou nazisme qui, lorsqu’on en manifeste la nostalgie aux limites de la Russie, suscite les lazzis des esprits éclairés à l’égard de ceux qui s’en offusquent, alors même qu’en France, la moindre quenelle, la moindre critique des incritiquables provoque la persécution en règle du contrevenant et sa mort sociale. Il est évident aux gens honnêtes qui se sont penchés un minimum sur la question que le phénomène existe en Ukraine comme aux pays Baltes, je le remarquais déjà il y a quinze ou vingt ans, quand je travaillais encore à Moscou. Et ce n’est pas du simple folklore qu’on peut balayer d’une raillerie, puisque les bataillons punitifs ukrainiens se sont rendus coupables de vraies atrocités au Donbass, atrocités soigneusement dissimulées au public occidental, à qui on les ressert parfois maintenant, en les attribuant aux Russes. Cependant,  ce qui se passe à présent n’est pas exactement, en dépit de la symbolique des croix gammées et des marches aux flambeaux, le fascisme ou le nazisme d’antan, mais une sorte d’abominable mutation, faite de trotskisme, de nazisme, de nazisionisme et de transhumanisme qui peu à peu fusionnent. Raison pour laquelle le truc est couvert et absous par des haineux délirants comme BHL, Glucksmann, Ackermann, Alexieva, Enthoven et compagnie, ils ont partie liée. Donc « hainisme » est le mot qui convient. Il recouvre toute espèce de haine rabique dissimulée sous des prétextes idéologiques à la noix. Cette haine est transversale aux opinions politiques et aux couleurs de drapeaux. Cela me soulève le coeur de voir, derrière la vieille cohorte de manipulateurs ignobles à l’oeuvre depuis les années soixante-dix, défiler des descendants d’émigrés et de distingués slavistes, qui profèrent des stupidités hystériques et bavent sur un pays que malgré toute leur science ou leurs origines, ils n’aiment ni ne comprennent, en fin de compte, et calomnient avec une ivresse et un empressement dégoûtants.

En confession, j’ai dit à monseigneur que si j’arrivais à ne pas haïr ceux qui m’ont nui, ou à ne pas leur nuire en retour, j’avais du mal à déborder d’amour pour eux. Il m’a répondu qu’on ne m’en demandait pas tant, qu’il fallait surtout ne pas déshumaniser les autres, traiter les Français de grenouilles, par exemple.

Ou les Palestiniens d’animaux. Ou les Russes de doryphores. Et nous tous de sous-hommes. Et essayer de considérer ceux qui le font comme des êtres humains, bien que tout indique trop souvent, comme disait l’orthodoxe Photinia, que « ces gens-là n’ont pas d’âme ».  Le terrible mystère, c’est que l’humanité est Une...

J'ai achevé le grand Meaulnes pendant la nuit d'insomnies que m'a valu l'attentat. Finalement, on sent, dans ce monde englouti plein de poésie et de noblesse, les catastrophes en germe, le merveilleux château détruit, le romantique Meaulnes finalement incapable d'assumer son amour jusqu'au bout. Je lisais la description d'Yvonne de Galais, innocente, enfantine, simple et sérieuse. Et profonde. Qui, à mon époque, déjà, parmi les garçons que j'ai vus passer, se serait intéressé à Yvonne de Galais?

Curieusement, je ne peux partager les vidéos de Slobodan directement, je dois me contenter de donner le lien. On a dû bloquer la fonction... Il pense mal, poliment, au dessus de la mêlée, "un pas de côté", mais mal!

https://www.youtube.com/live/fNZ6e1FHmFM?si=-5Y43N0HC0DVM3cZ