Je devais aller à Moscou,
présentation de livres chez Iouri et Dany demain, mais j’ai remis le départ à
demain matin, j’irai même probablement directement chez eux avec mon barda, si
j’arrive à faire fonctionner l’application de l’autre monde pour payer le
parking dans cette ville « intelligente ».
Un jeune Français qui est en
Russie depuis quinze ans, et y a fait ses études, m’a pris une petite interview
par écrit et je suis sidérée par l’ampleur des réactions, sur son site, mais
aussi sur ma page. C’est une interview assez courte, et j’ai répondu vite, parce que je n’avais pas bien le temps, mais j’ai
évoqué mon enfance, dans les années 50, et les gens l’ont pris comme un vrai
conte de fées. J’ai parlé de mes jolies tantes élégantes, de l’hôtel de maman,
avec les femmes de ménage qui chantaient et riaient dans les couloirs, en
travaillant : Charles Trenet. Un type a dit que j’échangeais la libre
France contre la Russie asservie, il ferait bien de réviser ses clichés, comme
ses équivalents français, d’ailleurs, qui croient toujours la Russie gelée dans
les années 30. Une autre m’a tracé avec amertume le tableau d’une enfance dure,
avec une mère et une grand-mère pauvres et exténuées. Maman travaillait
énormément, elle se levait à cinq heures, se réveillait la nuit pour ouvrir aux
clients qui avaient oublié leurs clés, elle réparait tout elle-même, je la vois
encore repeindre les volets des vingt-deux chambres de l’hôtel, la gauloise au
coin des lèvres. Elle cousait pour elle et pour moi, et n’a pas pris de
vacances pendant vingt ans. Mais nous ne vivions pas mal et gaiment. Comme
beaucoup de gens alors. Jusqu’à la guerre sournoise contre les petits
commerçants, les paysans, les artisans, les gens indépendants, la petite
économie traditionnelle qui gênait les banquiers, les malfrats, toute l’affreuse
caste qui nous tient maintenant à la gorge.
Dans l’ensemble, toutes ces
réactions sont extrêmement gentilles et me témoignent beaucoup d’affection et
de bienveillance.
Une amie dépressive à qui j’avais
conseillé de prendre un petit spitz comme le mien pour l’aider à surmonter la mort
de sa mère est à présent très malade. Elle m’a demandé de recueillir le chien,
ou plutôt la chienne, encore plus miniature que Rita et nettement plus jeune. J’ai
besoin de vieillir gaillarde. Car je ne peux pas refuser, cette femme est
absolument seule, et c’est moi qui l’ai poussé à prendre un chien.
J’ai fait encore des changements
chez moi, c’est-à-dire un peu de bricolage et de transports de meubles. On ne
sait jamais dans quoi on s’embarque quand on commence ce genre de choses, et j’ai
eu beaucoup plus de travail que prévu. Cela m’a mise dans un épuisement que je
crois n’avoir jamais éprouvé de ma vie, sauf quand j’avais le Covid. J’ai pensé
à ma mère, ce bourreau de travail, qui, à soixante-quatre ans, s’était lancée
dans la réfection de sa salle-à-manger et m’avait dit : «Je crois bien que
c’est la dernière fois que je fais quelque chose comme cela, car je n’ai jamais
été aussi crevée ». Ma voisine Ania a soupiré aujourd’hui : « Enfin,
Laurence... mon mari a votre âge, le médecin lui a dit de faire en trois jours
ce qu’il faisait avant en un seul. »
Eh oui.
J’ai lié connaissance sur VK
avec une femme qui est paysagiste et décoratrice et montre des choses
magnifiques. J’ai vu sur sa page une maison à la fois très contemporaine et
très russe que j’aurais pu mettre en réponse à la bonne femme qui m’écrivait le
refrain habituel « nous voulons bien vivre, avec tout le confort »,
pour justifier le massacre des villes russes et leur transformation en chaos de
bâtisses mal foutues. Cette mentalité et cette absence total de goût sont le résultat, comme l'explique une autre internaute, de décennies de rééducation soviétique qui ont amené ces malheureux à mépriser tout ce qui était russe, et antérieur à 1917, et à se donner pour but de surpasser un occident mal compris dans ce qu'il a conçu de pire.
On nous a nourri pendant des décennies d'un narratif dans lequel nos contes poulaires nous présentent; vous et moi, comme un village mal lavé, une nation de branleurs et d'incapables. Nous savons en nous-mêmes que nous ne sommes pas du tout comme cela, que nos ancêtres ont survécu des siècles dans les conditions les plus pénibles, qu'ils travaillaient à la sueur de leur front, qu'au prix d'exploits infinis et de centaines de millions de vctimes, ils ont encore et encore repoussé les raids ennemeis et redressé l'économie, et créant, sans trêve entre l'épée et la charrue, une grande culture sans laquelle l'humanité en tant que telle est impensable. Mais on ne peut pas discuter avec les contes de fées, Emelia n'est pas un un calviniste hollandais obstiné, ni, mettons, un sage philosophe japonais. On nous dit qu'il est le dernier des fainéants et des idiots, mais quelque chose nous fait soupçonner que tout est là beaucoup plus intéressant. On ne nous permet simplement pas d'y penser, on le stigmatise, et on nous dit de le mépriser pour sa négligence. Lui, et avec lui tout le peuple qui a donné naissance à Emelia.
alors qui est-il, et pourquoi devrions-nous être fiers de nos héros de contes populaires? Qu'ont en commun son poêle automoteur et le char T-34? Emelya et Korolev? C'est de cela que parle cette vidéo. Cherchez par vous-mêmes, et montrez à vos plus jeunes que cela devrait être vu par le plus grand nombre - pour leur propre bien, pour un regard juste et argumenté sur les meilleurs côtés de notre peuple.
https://youtu.be/g7ADtDbXfhY?si=Z5aL1F8W_s6vJ5qY
Arina Kourassovskaïa
Les bolcheviques, qui détestaient tout ce qui était russe, ont élevé des générations de komsomols dans le déni de leurs ancêtres, et l'adoration du modèle européen, qui en fin de compte est toujours resté leur idole, mais dans ce qu'il avait de plus désespérant, son esprit bourgeois besogneux, envieux et totalement dépourvu de transcendance. Heureusement, cela n'a pas trop pris, ici, bien que cela ait fait beaucoup de ravages. C'est que pour inventer, créer, il faut avoir le temps de penser et de rêver, et que l'homme mécanique engendré par le capitalisme et son revers, le communisme, n'a en principe pas ce loisir. Le Russe était un rêveur et un mystique, un poète, dont des intellectuels au front bas ont voulu faire un prolétaire utilitariste et sinistre. Dans une certaine mesure, cependant, le système soviétique laissait encore passer beaucoup de Yemelya en donnant à tous un salaire pour faire semblant de travailler. Il n'est jamais venu à bout du bordel russe.
Je place ici pour finir une vidéo de Thierry Messian qui explique beaucoup de choses sur notre situation actuelle, et établit des liens entre ses divers aspects, notemment ce qui n'a pas pu s'accomplir au Donbass, pour cause de puissant voisin, et se commet en Palestine sans que personne n'ouvre les yeux sur le problème ni n'ose y mettre fin.
https://crowdbunker.com/v/8N5kzjJF
Всем нам десятилетиями вталкивали нарратив, в котором наши народные сказки характеризуют нас с вами как суть село неумытое, нацию лодырей и неумех. Внутри себя мы знаем, что вовсе не такие, что наши предки веками выживали в тяжелейших условиях, что они трудились в поте лица, что ценой бесконечного подвига и сотен миллионов жертв из раза в раз отражали вражеские набеги и восстанавливали хозяйство, без отрыва от меча и орала создавая великую культуру, без которой немыслимо человечество как таковое. Но со сказками не поспоришь — Емеля вам не упорный голландский работяга-кальвинист и не японский, допустим, мудрец-философ. Нам говорят, что он у нас распоследний бездельник и раздолбай, но что-то подсказывает нам, что всё там куда интереснее. Просто нам упорно не дают об этом задумываться, ставят на нем клеймо и велят презирать за нерадивость. Его — и заодно весь народ, Емелю породивший.
Так кто же он, и почему мы должны гордиться нашими героями народных сказок? Что общего у его самоходной печи и танка Т-34? А у Емели с Королёвым? Вот об этом видео. Посмотрите сами и покажите вашим младшим, это должно увидеть как можно больше людей — ради себя же самих, ради правильного и аргументированного взгляда на сильнейшие стороны нашего народа.
Арина Курасовская