Il fait soudain très chaud, mais l'automne russe, c'est dans trois semaines, le 1° septembre, des feuilles jaunissent et rougissent déjà. Je suis allée me baigner dans la rivière Troubej, mais en amont de la ville, dans un quartier resté très pittoresque. J'étais absolument seule, et je glissais dans une eau très fraîche, bordée de ravissantes plantes aquatiques, et traversée de reflets dorés et bleus, sous de gros nuages blancs chaotiques qui roulaient au dessus des saules brillants et gonflés comme des mongolfières prêtes a appareiller. Un canard solitaire prenait le soleil sur un ponton. J'ai fait un dessin, dans le fil du vent matinal. Et je remerciais Dieu, pour l'eau, les nuages et les saules, le canard et les libellules.
Puis je me suis occupée de mon jardin, des framboises qui s'abîment si vite. Les poires commencent à dégringoler, je n'ai jamais vu une telle récolte se profiler, d'ailleurs, une grosse branche de mon arbre a craqué sous le poids, ce qui me désole.
A la liturgie, une famille inconnue m'a abordée en français. Le grand-père, qui m'avait paru typiquement russe, était aussi français que moi et se prénommait Jean-Pierre, tous les autres, sa femme, sa belle-fille, qui joue de la vielle-à-roue, et ses enfants, étaient russes. Nous sommes allés prendre le petit-déjeuner au café Montpensier, où je n'allais plus depuis qu'on avait refusé Rita que jusque là, on gâtait de toutes les manières. Mais le big boss de l'établissement a dû se calmer, Rita a été admise sans problèmes. En réalité, j'avais entendu parler de ce Jean-Pierre par le prêtre d'une église de campagne que j'avais visitée. C'est un monsieur charmant. Un prêtre qui était autrefois en poste à Cannes avec le père Antoni, le père Maxime, lui avait dit: "Comment? Vous ne connaissez pas Laurence?' Et il avait décidé qu'il allait faire ma connaissance. Il a découvert l'orthodoxie en se mariant, et il s'est fait baptiser, ce qu'il n'était pas jusqu'alors. Lorsque nous nous sommes quittés, il m'a couverte de signes de croix, comme un vrai Russe.
Je devais participer avec les cosaques au tournage de l'émission "Joue, mon accordéon", qui se faisait, ce dimanche après-midi torride, dans le "parc estival". J'aurais bien préféré rester au frais sur ma terrasse, mais je m'étais mis dans la tête que les cosaques seraient contents de présenter parmi eux une Française russophile qui chantait du folklore, je me faisais un devoir de soutenir la cause, d'autant plus que je rate souvent leurs réunions, la seule chose que je fais régulièrement toutes les semaines, c'est d'aller à l'église le dimanche matin. De plus, comme les chats avaient pissé dans ma seule paire de chaussures d'été présentable, j'avais mis des baskets blanches dans lesquelles je transpirais terriblement.
A mon arrivée, pas de cosaques, et même pas beaucoup de monde. Puis j'ai vu Liocha et son tambour, quelques jeunes filles, et l'oncla Slava, avec son accordéon. Sur scène, se produisait une brochette de grand-mères, dirrigées par une vieille extatique, qui faisaient de l'imitation de l'ensemble Beriozka imitant le folklore, dans les années soviétiques. Oncle Slava me dit: "Tu es venue avec tes gousli?
- Oui, nous allons bien chanter?
- Oui, mais tu comprends, "Joue mon accordéon", c'est uniquement de l'accordéon, mais je vais demander si on veut bien te faire passer...
- Oh non, Slava, si je ne suis pas nécessaire, je préfère rentrer, j'ai très chaud et mal aux pieds, et je ne suis pas toute jeune...
- Bon, alors, oui sans doute il vaut mieux."
J'ai regagné ma terrasse avec bonheur, enlevé mes chaussures, savouré à l'ombre le peu d'air qui circulait, en pensant au midi de la France, où il peut faire 35 ou 40 à cette époque de l'année, finalement, me disais-je, tout est bien... En réalité, j'ai vu cette émission je ne sais combien de fois, quand j'étais en poste à Moscou, et je suis bien certaine qu'on n'aurait pas trouvé à y redire, peut-être même au contraire. C'est souvent kitsch au possible, mais à priori, tout ce qui est folklorique de près ou de loin y a sa place, une Française avec des gousli d'autant plus. Mais si Slava n'y tenait pas, je n'avais rien à y faire... J'aurais fait le pied de grue des heures, dans mes baskets trempées, en écoutant tout ce malheureux folklore russe dénaturé, c'est bien de moi d'aller toujours me créer des obligations qui n'ont pas lieu d'être! Une bonne leçon, que je n'oublierai pas! Les cimetières sont pleins de gens qui se croyaient indispensables.
Aujourd'hui, j'ai vu une artiste-peintre, qui avait séjourné chez moi un été, et qui m'a invitée à prendre le thé. Elle loue un appartement ici, que j'ai trouvé très bien, mais la propriétaire est odieuse, et lui parle comme à un chien, bien qu'elle paye régulièrement le loyer. Ici, le locataire n'a pratiquement aucun droit. Elle m'a raconté que les places de cimetière à Moscou étant rares et chères, on lui contestait la tombe de ses ancêtres, pour récupérer la concession et faire du fric avec. Elle devait aller s'occuper de cette affaire pénible, d'après elle, les gens qui dirigent l'endroit sont de vrais truands, et elle n'est pas trop armée pour les affronter. Elle m'a dit aussi qu'il y a deux jours, quand je me baignais en amont de tout cela, il y avait eu une catastrophe écologique au lac, une rivière empoisonnée, les poissons tués par centaines, la baignade interdite. Mais elle ne savait pas la cause de cet événement sinistre. Après avoir défiguré toute la ville, si maintenant on pollue le lac, je me demande comment on attirera les touristes dont tout le monde dit se préoccupper si fort... Cette nouvelle m'a consternée, la bêtise du triste produit qu'a enfanté la philosophie matérialiste du progrès exponentiel ne cesse de m'affliger et de m'indigner.
Sur vkontakte, quelqu'un a mis une citation de Victor Hugo, issue de son roman Quantre-vingt-treize, qui m'est allée droit au coeur: ❝ La nature est impitoyable ; elle ne consent pas à retirer ses fleurs, ses musiques, ses parfums et ses rayons devant l’abomination humaine ; elle accable l’homme du contraste de la beauté divine avec la laideur sociale ; elle ne lui fait grâce ni d’une aile de papillon ni d’un chant d’oiseau ; il faut qu’en plein meurtre, en pleine vengeance, en pleine barbarie, il subisse le regard des choses sacrées ; il ne peut se soustraire à l’immense reproche de la douceur universelle et à l’implacable sérénité de l’azur. Il faut que la difformité des lois humaines se montre toute nue au milieu de l’éblouissement éternel. L’homme brise et broie, l’homme stérilise, l’homme tue ; l’été reste l’été, le lys reste le lys, l’astre reste l’astre.❞
Aller et retour à Moscou pour rencontrer Slobodan Despot, de passage avec sa femme Ioulia. A l'aller, j'ai mis deux heures pour faire 20 km: un accident. Au retour, bouchons, et un terrible orage, je n'y voyais plus à trois mètres. 7 heures de route en tout pour aller dans un restaurant serbe avec Slobodan! La fréquence des accidents est hallucinante, mais quand on voit comment on conduit... agressivement, impudemment, imprudemment. Avec une gossièreté et une inconscience totales. Même les routiers, autrefois sympas, deviennent de vrais malotrus stupides.
Le restaurant était excellent, le Serbe de service ravi de servir un compatriote, et galant avec les vieilles dames. Nous avons évoqué les transformations de gens supposés normaux en rhinocéros barrissants et bondissants, que nous avons pu observer ces derniers temps autour de nous, et les raisons possibles de cet état de fait. Je lui ai parlé de la fac, où tout était en germe. "J'avais tellement horreur d'y aller, lui dis-je, que je traversais tout Paris pour cela, mais avant de monter dans le bus, je prenais un café à la porte de Vincennes pour me donner du courage...
- Et vous loupiez ainsi l'heure des cours, oui, j'ai beaucoup pratiqué cela moi-même!"
J'avais bu deux coups de raki, du raki aux coings et du raki aux abricots, cela me rendait prolixe... Je lui ai même raconté mon pèlerinage en Serbie, avec mon amie Béatrix, en 1972...
Ensuite, nous sommes allés chez Dany et Iouri prendre le thé et retrouver Ioulia qui nous y rejoignit plus tard. Un ami de Iouri nous a tracé un tableau consternant de la Russie, j'avais l'impression de l'entendre décrire la France, le féodalisme mafieux de l'appareil d'état, la destruction de la culture, de l'école, de l'hôpital... A vrai dire, je le comprenais assez mal, d'une part parce que je tombais de sommeil, et d'autre part parce qu'il n'articulait pas bien. "Cependant, s'exclame Iouri en riant et en conclusion, nous n'en sommes pas moins beaucoup plus libres que là bas, et notre société est beaucoup plus vivante! Peut-être l'habitude de la zone, nous avons développé des techniques pour vivre quand même!"
Le père Valentin m'a dit: "L'Occident est très hostile à la Russie, c'est un fait désormais complètement avéré. Il nous déteste, et déteste notre gouvernement. Tout gouvernement que déteste l'occident n'est forcément, pour nous, pas si mauvais qu'on le pense."
Périodiquement, quand je lis les inquiétudes dont font part certains blogueurs que je respecte, par exemple Karine Bechet Golovko, je suis moi-même perturbée. On la critique dans ces moments-là, mais je trouve sain qu'elle pose et se pose des questions. Cependant, il y a des choses que je peux dire avec certitude. Du côté occidental, j'ai l'impression d'avoir affaire à des mutants, à des extraterrestres, à une nuisance d'une forme inédite, qui prend, dans le droit fil de notre catastrophe anthropologique majeure, une apparence idéologique pour tromper ses victimes, bien que ces prétextes soient de plus en plus suspects, aberrants, hideux et difficiles à avaler, même pour les plus décérébrés. Du côté russe, nous avons quelque chose de russe, et même de médiéval, dont on a déjà vu l'équivalent au temps d'Ivan le Terrible ou de Boris Godounov, on peut tomber dans la basse politique, mais on garde quand même relativement le sens de l'Etat et tout simplement, du bon sens, du sens commun. Ce ne sont pas des anges, mais nous restons dans un registre humain historique et connu. Qui plus est, ces féodaux, issus de l'appareil communiste; se fichent éperdument de ce que nous pensons, disons et faisons, pourvu qu'on ne se mette pas sur leur chemin.
Je lui ai parlé ensuite de la campagne de calomnies que menait certain site orthodoxe français contre l'Eglise ukrainienne, afin de justifier les persécutions auxquelles son créateur et ses lecteurs s'associent de fait. Cela me soulève tellement le coeur que je ne peux même plus commenter. J'ai écrit une fois que l'on atteignait là des abîmes d'ignominie, que l'on s'assimilait ainsi aux groins de cochons qui grouillent autour du Christ au Sanhédrin, sur les tableaux de la Renaissance, et il n'y a rien d'autre à ajouter. Ces gens-là vont à l'église et récitent des prières, c'est absolument vertigineux, quand on y pense... Mais bon, sur les fresques du Jugement dernier, on voit nombre de chrétiens et de gens d'église sombrer dans la géhenne... Le grand inquisiteur de Dostoievski n'est ni bouddhiste ni musulman, il est vrai qu'au moins, il n'est pas orthodoxe, mais aujourd'hui, tout devient possible.
Quand je les entends sussurer, façon faux-cul, que "le métropolite Epiphane déplore le refus de tout dialogue de la part du métropolite Onuphre"... Quel orthodoxe normal ne ferait pas la différence entre un véritable métropolite spirituel, et persécuté, et un personnage infréquentable, ordonné par un excommunié aux moeurs bizarres, propulsé par un patriarche aux ordres de la CIA, et avide de nuire au patriarche russe par rancune personnelle? Quel dialogue pourrait mener le métropolite Onuphre avec cette marionnette suffisante? Peut-être que saint Tikhon aurait dû dialoguer avec le traître à la tête de "l'Eglise rénovée" en 1918?
Au point où l'on en est arrivé, on ne peut que se détourner en secouant sur ces créatures des ténèbres la poussière de ses sandales...
Dans la foulée, je suis allée, mes sandales à la main, écouter Boris Akimov, interviewé par Katia au bar du café français. Boris Akimov est un businessman orthodoxe devenu gentleman farmer dans le village où ses parents avaient leur datcha, près de Pereslavl. Il parle beaucoup, avec des tas de digressions, j'avais un peu de mal à suivre. Il a écrit un livre où il fait des propositions pour une heureuse transformation de la Russie à l'horizon 2062. D'après ce que j'ai compris, sa vision des choses s'apparente à celle de Soljénitsyne dans son livre "Comment reconstruire notre Russie?" et n'est pas sans rappeler non plus certains courants français à la Louis Fouché, à la différence que Boris Akimov ne croit absolument pas à la politique. Il appelle de ses voeux une "monarchie populaire" qui nous débarrasserait du souci de ce genre de choses et nous permettrait à tous d'agir sur le plan local. Il citait en exemple une ville moyenne qui, avant la révolution, s'était dotée elle-même de toutes sortes d'infrastructures, grâce au zemstvo local et à ses marchands entreprenants. Devant le désastre de l'administration de la ville de Pereslavl, il espère qu'il sera possible de créer peu à peu une gestion locale autonome et sensée. Il a fondé l'association des "gens heureux" qui rassemble tous ceux qui font et transmettent quelque chose d'utile, artisans, paysans, commerçants mais aussi écrivains, artistes, musiciens. Il est aussi à l'origine de la participation locale au festival "Tom Sawyer Feast" qui consiste à rassembler des bénévoles pour repeindre de vieilles maisons traditionnelles, afin de rendre à Pereslavl un peu de sa poésie perdue, et d'attirer l'attention des habitants sur le massacre culturel en voie d'achèvement. Et de fait, cela marche, les volontaires sont de plus en plus nombreux et j'ai lu le commentaire d'une jeune fille qui se félicitait que sa génération fût moins indifférente que les précédentes à son patrimoine culturel.
J'adhère plutôt à sa vision, car je ne crois pas que la plupart des gens soient aptes à faire de la politique et à la comprendre, moi la première. Les gentils français qui nous verraient tous dans une sorte de vraie démocratie participative dont tout le monde serait acteur concerné et conscient ne se rendent pas compte de la difficulté de mettre cela en pratique. Si je suis monarchiste, c'est bien parce que depuis longtemps, j'ai réalisé que la démocratie était un mythe qui menait à la ploutocratie, au totalitarisme et à l'avilissement général. La politique m'a toujours emmerdée et dégoûtée, je ne m'en occupe que dans la mesure où elle présente un danger pour moi et pour tout ce qui a de la valeur et du sens à mes yeux. Et je ne procède que par intuition, parce que je n'ai certainement pas le temps ni la structure d'esprit pour explorer des milliers d'informations et les analyser. Déjà, tout ce qui est économique me passe loin au dessus du bonnet. Le système des partis est d'abord un leurre, ensuite un ferment perpétuel de discorde, et dans le contexte où nous sommes, celui qui arrive au pouvoir est forcément une espèce de prostituée qui a raconté n'importe quoi pour séduire les foules et satisfaire clients et commanditaires. Je me souviens d'un jeune Gilet Jaune proclamant: "Macron, c'est finalement moi qui le paie, c'est ma pute". L'ennui, c'est que si c'est bien nous qui le payons, il est la pute de quelqu'un d'autre, qui contrôle les flux d'argent et les détourne. Mais sur le plan local, et dans les domaines où nous avons des savoir-faire, nous pouvons tous agir, avec du bon sens et de la bonne volonté. Pour l'instant, nos "féodaux" laissent faire.
Après une journée de pluie battante, sur le soir, comme un rideau se soulève, le ciel a laissé voir une lisière turquoise, et sur cette échancrure ont commencé à défiler des bouffées brunes, effilochées, pressées, comme un troupeau d'herbivores célestes, qui se sont éclairés peu à peu d'un étrange feu interne chatoyant et violacé. Puis les rides régulières des nuages ont pris des teintes roses et bleu profond, allongées comme des vagues sur une grève de cristal lisse et lumineux. Ce ciel de Pereslavl est un perpétuel miracle. Il y avait quelque chose de si mystérieux dans cette course silencieuse de vapeurs phosphorescentes sur ce fond immobile... Je n'ai pas pu fixer cette merveille sur une photo. Comme si elle échappait aux procédés techniques, une espèce d'étrange petit prodige.
Je devais aller rejoindre les cosaques dans un parc où allait se dérouler l'émission "Joue, accordéon!" C'est une émission très ancienne et souvent très kitsch, mais c'est une des seules qui soit consacrée au folklore et on y voit parfois de belles choses. A cause du temps, elle a été reportée à une date ultérieure. J'ai pensé: "Eh bien alors, va donc aux vigiles! Pour une fois que tu le peux..."
J'y suis allée et j'ai vu tout d'abord le père Andreï. "Je suis tout le temps prise par des tas de trucs...
- Eh bien comme cela, sans doute, vous n'avez pas le temps de penser!
- Mais si! Je pense beaucoup, surtout en ce moment, avec tout ce qui se passe, avec toutes ces profanations et ces calomnies...
- Ne vous en faites pas, Laurence, vous êtes montée dans l'arche, nous sommes tous avec Dieu, que peut-il nous arriver?"
Puis je me suis confessée à l'évêque, qui officiait ce soir. Je lui ai parlé de tout ce qui m'indignait et m'inspirait parfois des pensées peu chrétiennes, de certaine trahison qui m'affecte et m'emplit d'amertume et de mépris. "Vous regardez trop les nouvelles. Dans les périodes troublées, il faut écouter de la musique, lire de la poésie, et des périodes troublées, ici, nous en avons eu tellement, seule l'Eglise est stable, accrochez-vous à l'Eglise et ne la lâchez plus."
Pour la première fois depuis pas mal de temps, je n'étais pas assiégée par toutes sortes de pensées et de fantasmes. Dans l'espace intérieur libéré, se déplaçait le tintement froissé des encensoirs et des chants qui me berçaient le coeur. J'étais pleine de la joie de voir nos prêtres et monseigneur Théoctyste, si émacié et si doucement ironique, et puis la vieille Antonina, la bonne Valentina qui nous embrasse comme si nous étions de sa famille, le jeune sacristain Vania, le vieux sacristain Vitali, le petit servant d'autel dans sa robe dorée, le beau diacre athlétique et brun comme un guerrier, toute notre humble et gentille communauté.
Ce matin, je me suis hâtée, somnolente, à l'église de l'icône de la Vierge de Vladimir, où ont lieu les liturgies matinales, à sept heures. Il y a peu de monde, et on entend très bien les lectures. J'étais dans le même état de paix et de joie que la veille, sans parasites sur la ligne. De temps en temps, Dieu nous accorde de telles grâces, on peut dire qu'ici, c'est une réponse au geste que j'ai fait d'aller aux vigiles, puisque le tournage avec les cosaques était annulé, plutôt que de rester chez moi. Le père Andreï a fait un sermon qui reprenait en substance ce qu'il m'avait dit la veille.
J'ai commandé une quarantaine pour le métropolite Longin.
Voici le post d'un excellent artisan céramiste traditionnel, d'origine russo-hongroise, Sergueï Fenvechi:
En quête d'informations pédagogiques sur Youtube, j'ai vu qu'on proposait d'écouter de la musique moderne, nouveautés 2023.
Eh bien, ai-je pensé, je vais écouter les derrières merveilles de la scène. L'attraction avait de nombreux noms. Beaucoup de ces chansons vous sont familières, et vous fredonnerez ces derniers succès, meilleures chansons et autres séductions de bas étage. Mais non, voyons... laissez tomber...
J'ai écouté obstinément, avec patience, dans l'attente d'une vraie musique. J'ai enduré ce vacarme pendant deux heures. Et j'ai été horrifié.
A l'issue de tout cela, mes conclusions sont les suivantes:
1) Les paroles sont incompréhensibles, le sens des chansons est inaccessible.
2) il n'y a pas de musique. C'est-à-dire à moins d'appeler musique quelque chose de rythmé par des percussions, ponctué par les quelques sons adjacents d'autres instruments, dont beaucoup sont inaudibles. Pourquoi diable tant d'interprètes pour des sons qu'on n'entend pas?
3) Je vérifie la musicalité des chansons par leur capacité à être fredonnées, sifflées, marmonnées, pour cueillir des champignons dans la forêt et profiter de la vie. Même si je ne connais pas les paroles de la chanson. La musique est sauvegardée!
Or il n'y a pas de musique!!! En termes de mélodie. Maintenant, on appelle musique tout bruit et tumulte produit par des instruments de musique.
4) Les textes sont exposés à travers un certain type de déclamation. Toutes les "chansons" sont similaires, exposant les textes de la même manière. Aucune chanson ne se distingue des autres. Sauf si la vitesse change un peu. Eh oui, pas de chant du tout. Par rapport au chant d'opéra, comme modèle de chant. Ou, plus simplement: "Ah Natalia, Natalia, ouvre donc le portail"... C'est aussi une espèce de récitation mais il y a une mélodie.
5) Il n'y a aucun art dans la musicalité. Le monde se dégrade. Les rappeurs ont aussi déclamé des virelangues, mais au moins, dans les parties sans texte, ils avaient des mélodies talentueuses. Et maintenant, même cette allusion a disparu. A la mélodie.
6) Je ne peux pas chanter. Même quand je parle, je ne génère pas de sons. C'est vrai, parfois, je vais chanter une chanson folklorique, si je me saoûle, et si on me le demande, pour se moquer de moi. Donc, pour me gausser de moi-même, je vais chanter, en avertissant tout le monde, qu'on n'a pas besoin de me fuir dans la forêt, que je ne chanterai pas longtemps))))). Cependant, à voir comment chantent ces artistes à succès maintenant, je pourrais faire un triomphe. Je vais jouer quelque chose à une maison de disques, on mettra ça au point, on le sortira comme le truc tout ce qu'il y a de plus spécial, et je deviendrai la super star. Maintenant, tout est dépassé? Et l'ennuyeux Mummy Troll l'est aussi. On l'adorait!!! Or un imbécile essayerait de chanter la même chose sur la scène de son école pour ses camarades de classe qu'on lui cracherait dessus et le mettrait dehors par la peau du cou.
7) Où va le monde? Et l'art populaire? Et à ce propos. Il m'est maintenant plus agréable d'écouter des enregistrements d'indigènes d'Afrique, avec une danse de deux heures sur le même thème et le seul son d'un bâton cogné sur une bûche. au moins, je comprends pourquoi ils font ça. Mais la variété moderne après Beethoven et Tchaïkovski, ou même "Kalinka, Kaaaalinka"; ou "ma petite boîte est pleine"... Bien que ce soient aussi des chansons populaires factices. Mais elles se démarquent par la mélodie!
Ou même si on prend "lapti, mes lapti", c'est une petite chanson créée par le peuple. J'aime particulièrement "une mouche a aimé un moustique". Même si c'est aussi la création d'un auteur quelconque. Mais sur youtube, on la trouve dans un esprit populaire défiguré. C'est particulièrement dégoûtant de l'entendre dans une version académique.
8) Quels airs fredonneront nos enfants? Mieux vaut ne pas mentionner les petits-enfants. que comprendront-ils de... Je n'ose pas dire la musique en général, mais au moins une simple mélodie?
9) L'ère de la digitalisation nous a plongés dans un touk-touk primitif, touk-touk-touk-, touk-touk, touk-touk-touk... et crevez comme des touks-touks sans visage.Frappés sur la tronche. Et cela ne concerne pas seulement la musique mais tous les autres arts, et le mode de vie en général. Lorsqu'un goupe d'adolescentes m'a été envoyé pour modeler, ill y avait des filles avec des griffes de deux centimètres, très soignées. Le sens de leur vie était déjà tracé, c'était clair. Et puis pas mal de garçons ne sont pas capables d'orienter un objet dans l'espace et la bonne direction. Je montre et dirige avec des mots; mais ils arrivent à tourner l'objet d'une manière tout à fait surprenante, pas dans le bon sens. De toutes sortes de manières, sauf la bonne. J'ai même pensé que je devrais peut-être apprendre d'eux divers procédés pour faire ce qu'il ne faut pas faire. Leurs professeurs m'expliquent que les enfants modernes sont tous au téléphone. Et que font-ils dans leur téléphone, avec le peu qu'ils savent? De toute évidence, ce n'est pas la connaissance qu'ils recherchent. Eh non, ils ne la cherchent pas. Des balles courent sur l'écran, ils tirent dessus... Ils exacerbent leur ignorance, ils s'abêtissent dans le cadre des limites proposées par les concepteurs du jeu. De tels joueurs n'ont qu'à apprendre les limites des possibilités proposées par les programmateurs du jeu et lutter bêtement pour la victoire... pour remporter une victoire virtuellement sans valeur, en affirmant leur stupidité. Ils n'apprennent pas à créer eux-mêmes mais à consommer les propositions des autres. Ils apprennent à participer au programme de quelqu'un d'autre.
Je manquais de jouets, dans mon enfance. Nous vivions avec des fournitures limitées. Je devais fabriquer mes propres jouets. J'ai découpé des voitures en papier, fabriqué des arcs et des flêches avec des amis, sculpté des pistolets moi-même, joué au football et à d''autres jeux, et bien plus encore, jusqu'à ma décision de partir à l'aventure dans une nature inconnue, quittant la maison toute la journée pour la banlieue, et sans nourriture, cependant, car au départ, je n'avais pas l'idée de foutre le camp on ne sait où; cela m'est venu spontanément... or les enfants d'aujourd'hui restent chez eux, rencontrant parfois de plus zombifiés qu'eux par toutes sortes de drogues qui font autorité. Avec dans leurs poches toutes sortes de douceurs .
10) la musique vivait en nous. Nous vivions de façon mélodieuse. de différentes mélodies. Nous n'acceptions pas la cacophonie monotone et stupide. Nos yeux étaient ouverts à la diversité du monde. Le monde était intéressant. Nous y entrions de nous-mêmes. Ceux qui avaient des sujets d'intérêt limités, nous ne les comprenions pas, et nous les considérions comme des anormaux.
Maintenant, réfléchissez-vous même à ce qui se produit dans la variété et où cela nous conduit.
Outre que ce texte recoupe admirablement mes propres interrogations, observations et réflexions, on voit bien là pourquoi les barrières en tôle rouge en travers des beaux paysages, les maisons de plastique, sans proportions ni style, et où, effectivement, tout cela nous mène, et pas seulement ici, mais partout: à la débilité et l'avilissement général si on n'inverse la tendance. Plus de Russes ni de Français, mais des ectoplasmes conformes à l'idée que se font du populo inutile les transhumanistes de la caste qui en feront le diable sait quoi. J'espère que le processus sera ici enrayé, mais je n'en ai pas la certitude, parce qu'on continue à abrutir les gens de toutes les manières, et que même les chansons patriotiques soviétiques de la dernière guerre, qui étaient souvent fort belles, sont dénaturées par des interprétations hideuses, lors de manifestations officielles, pour faire jeune et dans le coup ou par pure contagion de la connerie galopante. Car lorsqu'on n'a rien reçu, on déteste instinctivement ce qui nous dépasse.
En complément de ceci, j'ai ouvert la vidéo d'Ariane Bilheran, "la fabrique du consentement":
Il faut à mon avis écouter plusieurs fois cette analyse profonde et juste, exposée avec simplicité et clarté, mais très dense. Elle parle justement du folklore et de sa disparition programmée, parce qu'il fait lien, il relie les gens entre eux, et les gens avec leurs ancêtres, ce qui est aussi le cas de toute expression de la culture, naturellement, mais la culture populaire, en disparaissant, ne laisse pas la place à la culture des bibliothèques et des musées qui, du reste, souvent s'en nourrissait directement ou indirectement.
Mon père spirituel a parlé à Dany de "catastrophe spirituelle". Ce qui rejoint aussi le constat d'Ariane Bilheran. Elle parle de l'effondrement de notre civilisation, que le totalitarisme vient achever, parce qu'elle ne tient plus debout depuis un moment. En fait, il n'y a pas si longtemps, quand il y avait encore une paysannerie, la situation était réversible; Mais les protecteurs de la paysannerie, c'étaient les rois et les tsars, avec leur disparition, plus rien ne venait empêcher les gnomes de faire de nous ce qu'ils voulaient. Pour ce qui est des Russes, leur civilisation était vivace, mais ils ont chopé notre vérole progressiste par contagion, en entrant dans l'orbite européenne, ils ont été pris dans le vortex, et c'est infiniment triste. Je compte sur un miracle, une volée d'anges musiciens pour colmater les trous de notre arche et couvrir le tohu-bohu sinistre du diable et de son train qui s'agitent par dessous.
Ariane Bilheran évoque la nécessité de faire notre deuil de tout ce que nous perdons et allons perdre. Elle est beaucoup plus jeune que moi, en ce qui me concerne, j'ai beaucoup de mal à le faire, bien que sur le fond, elle ait sans doute raison. C'est à ce point douloureux que dès l'enfance, pressentant tout cela, j'en étais instinctivement révoltée. Il me faudrait dépasser cela et penser au Royaume des Cieux et à la Jérusalem céleste, d'autant plus que Dieu a été miséricordieux, je ne laisserai pas d'enfants sur terre, mais je souffre pour les enfants des autres.
Je suis en train d'apprendre un chant qui remonte à Ivan le Terrible et raconte comment il a donné leur territoire aux cosaques du Terek. Il est très difficile, cela vient petit à petit, mais cela demande du travail et du temps. "Ce chant, des étudiants en musicologie n'arrivent pas toujours à le chanter, me dit Skountsev, alors ne t'étonnes pas..." Mais les cosaques ne connaissaient rien à la musicologie, seulement ils étaient tombés dedans quand ils étaient petits, et si leur vie pouvait être brève et tragique, elle était éclatante et noble, et cela se sent au caractère méditatif de la mélodie, et aux images naturelles du texte, tout cela est profondément harmonieux et habité par un souffle. Je mesure au caractère de ce chant la profondeur de notre déchéance, avec un chagrin brûlant.
В поисках познавательных сведений в Ютубе этот Ютуб предложил послушать современную музыку, новое в 2023 году. Ну-ка, подумал, послушаю новых прелестей в эстраде... Названий для завлекаловки было много. Приблизительно всякие такие, как эти песни вам знакомы и будете подпевать, самые свежие хиты, лучшие песни и тому подобное подлое завлекательство. Нннну... пусть пойдёт.... Слушал упрямо с терпением ради ожиданий действительной музыки. Часа два терпел то, что шумело. И ужаснулся. Выводы мои такие после этого: 1) тексты плохо понятны, смысл песен недостижим. 2) музыки нет. То есть музыкой названо нечто ритмичное ударниками, подбиваемые какими-то дополнительными звуками от других инструментов, среди которых многие не прозвучиваются. Нахрена столько игроков для шумов, если их не слышно? 3) музыкальность песен проверяю возможностью напевать, просвистеть, промурлыкать, собирая грибочки в лесу и радуясь жизни. Даже если слов песни не знаю. Сохраняется музыка!!!! А музыки нетути!!!!! В степени мелодии. Сейчас музыкой называют любой шум и гам, наделанный музинструментами. 4) тексты выкладываются неким типом декламации. Все "песни" похожи, однотипно выкладывающие текст. Никакую песню не отделить от другой. Разве что скорость чуток меняется. Да и пения нет совсем. Если сравнить с оперным пением, как образец именно пения. Или и попроще, например "Ах, Наталья, ты Наталья, отворяй-как ворота..." , как бы декламация, а мелодия-то есть. 5) искусства в музыкальности нет совсем. Мир деградирует. Реперы тоже декламировали скороговоркой, но хотя бы в безтекстовых проигрышах являли талантливые мелодии. А теперь и этого намёка не стало. На мелодию. 6) мне петь нельзя. Я и в речи не звукогеничен. Правда, иногда спою народную песенку, выпимши и если попросят, чтобы надо мной посмеяться. Так, для стёба над собой и спою, предупредив всех, что в лес убегать не надо от меня, долго петь не буду))))))) Однако, так, как поют сейчас эти хитовщики, я смогу поиметь серьёзный успех. Поиграю со звукозаписывающей студией, в чём-то определимся и распустим это особенной особенностью и стану звездищем. Сейчас прохавают всЁ? Прохавали же занудливого Мумий Тролля. Ликовали им!!! А попробовал бы недотёпа так же спеть на школьной сцене для одноклассников и оплевали бы, стаскивая со сцены за шиворот. 7) Куда мир катится? Насчёт искусства популярного? И насчёт популярности искусства. Мне теперь приятнее слушать записи про аборигенов Африки с двухчасовой пляской одними и теми же движениями и только со стуком палки по бревну. Этих я хотя бы понимаю почему так делают. А современную эстраду после Бетховена и Чайковского.... после хотя бы "Кааалин-ка, калинка, калинка моя..." , или "Ой, полным полна моя коробушка..." . Хотя, это тоже искусственно созданные песни. А как отличаются мелодией!!!! А вот хотя бы " Эх, лапти мои, вы лапти мои... " народом создана песенка. Особенно люблю песенку " Комара муха любила". Даже если тоже от автора некоего. Но в ютубе она искома в искажённом от народности духе. Особенно противно слушать эту песню в академическом варианте . 8) какие мелодии будут напевать наши дети? О внуках и упоминать не приходится. Что будут понимать они о ... не смею произнести про музыку вообще, а хотя бы о простой мелодичности заикнусь. 9) эпоха цифровизации ввергла нас в примитивное тук-тук, тук-тук-тук, тук-тук, тук-тук-тук... и подыхайте безликими тук-туками. Настучанными по башке. И не только насчёт музыки, других искусств, а вообще насчёт образа жизни. Когда ко мне направили группу подростков для полепить из глины, были девочки с когтями по два сантиметра, очень ухоженными. Направились насчёт смысла жизни, уже понятно. Да и парни многие не способны сориентировать в нужном направлении предмет во пространстве. Показываю и словами направляю, а они умудряются повернуть предмет совершенно удивительно не так, как надо... всяко разно, но как раз не так. Даже подумал, что мне самому следует у них поучиться разным изворотам, чтобы сделать так, как не годится. Мне поясняют их педагоги, что современные дети все в телефонах. И что же при их малознании делают они в телефонах? Явно не знания ищут. И да, не ищут. Шарики по экрану гоняют, пульками стреляют... Усугубляют свои незнания, в общем, тупеют в пределах, предложенными программистами игры. Таким игрокам надо лишь усвоить пределы возможностей, заложенных программистами и тупо стремиться к победе... добиться виртуальной никчёмной победы в утверждении своей тупости. Сами же научаются не создавать что-либо, а потреблять чужие предложения. Научаются стать участниками чужой программы. Мне в детстве не хватало игрушек. Жили же в ограниченном достатке. Приходилось игрушки делать самому. Кроил из бумаги автомобили, с друзьями делали луки и стрелы, сами строгали пистолеты, играли в футбол и другие игры, да много ещё всякого, вплоть до решения искать приключения в незнакомой природе, уходя из дома на целый день в пригород и без еды, однако, ведь первоначально не было идеи умотать неведомо куда, идея приходила спонтанно... а теперешние дети сидят по домам, изредка встречаясь с более авторитетно зазомбированными всякой дурью. И в кармане сладости и вкусняшки. 10) в нас жила музыка. Мы жили мелодично. Разными мелодиями. Тупая однообразная безмелодичность нами не принималась. Наши глаза были открыты к разнообразию мира. Мир был интересен. Мы в него лезли сами. Ограниченных в заинтересованностях не понимали и считали их ненормальными.
Дальше вы и сами думайте, что происходит в эстраде и к чему приведёт.
Trombes d'eau. Mais j'ai eu le temps de partir me baigner à l'étang d'un village, à un quart d'heure vingt minutes de chez moi. C'est la deuxième fois seulement que j'en ai la possibilité. Il faisait très doux, mais l'eau n'était pas très chaude, je me suis attardée autant que j'ai pu, savourant le silence, la paix, la solitude, contemplant un rapace qui tournait dans un ciel nacré, et puis l'église que l'on voit très bien, quand on s'éloigne de la berge, une église que je dirais du XVII°, ou peut-être début XVIII°, avec des murs blancs et des coupoles argentées. Je l'ai connue en ruines, et je rêvais de la voir restaurer, c'est sans doute grâce au monastère saint Nicétas que c'est chose faite. En revanche, les maisons moches ont surgi comme des champignons, avec les auvents en plastique et toutes ces sortes de choses. Le pire, c'est que la vue sur l'étang quand on arrive, et qui devait composer un merveilleux tableau russe, est tranchée par une horrible palissade rouge, derrière laquelle on a planté n'importe comment des arbres disparates qui n'auront pas la place de pousser. La cerise sur le gâteau de tout ce massacre est constituée par deux cigognes factices. Sur la partie en grillage qui jouxte l'étang, un écriteau prie les visiteurs de laisser l'endroit propre, ce qui est naturellement la moindre des choses. Le jardin lui-même, bien qu'immense, est tondu à mort. Un jardin qui dit à la nature, au cosmos, à la création: "Ote-toi de là que je m'y mette", comme d'ailleurs l'ensemble des civilisations nées de la modernité. Même les arbres véritables y semblent aussi factices que les cigognes.
On me fait le reproche de ne pas aborder les vrais problèmes, dont dérive le mauvais goût qui suscite mes réactions répétées et peut-être lassantes, mais il me semble que sur ces raisons je me suis largement penchée, car cela ne me paraît pas une question accessoire, c'est un symptôme. Je ne me répéterai pas ici, je me contenterai de placer le libellé "mauvais goût" a toutes les chroniques qui en parlent!
L'équipe de Gilles, des Arméniens, m'ont fait quelques derniers travaux, surtout de plomberie, car c'était la cata complète. Tout cela pour un prix si modique, en comparaison de celui de tous ceux qui ont travaillé chez moi, bien ou mal et plutôt mal que bien, que j'en suis restée sans voix. "Ils n'ont aucune vergogne", m'a dit l'artisan Gueorg.
Le soleil revenant vers le soir, j'ai fait un tour parmi mes astilbes, que je ne vois pas fleurir, avec ce temps pourri, et j'ai aperçu, sur l'écrin de leurs plumettes roses, le bijou mordoré d'un scarabée vert.
Je ne dis pas que je sois 100% d'accord, je pense que Strelkov a été très maltraité, d'une manière générale. Personnellement, j'ai pris le parti, depuis le début de l'intervention, de faire confiance au gouvernement, une confiance relative, conformément à ce que j'ai dit dans l'avant dernière chronique.
Peskov a démenti le bombardement de l'église à Odessa. Ce sont des missiles de défense anti aérienne ukrainiens qui sont tombés dessus, intentionnellement ou non. Les églises ne font pas partie des objectifs des bombardements russes...
Sur facebook, ce post qui ne manquera pas d'intéresser les orthodoxes autant que la cathédrale bombardée, n'est-ce pas?
Le métropolite Longin a été victime d'un accident vasculaire cérébral. L'un des centaines d'enfants dont il s'occupe en bon père de famille dans son orphelinat a réussi à venir secrètement à l'hôpital pour être auprès de lui. Les terribles pressions auxquelles l'UPC, ses évêques, ses prêtres et son peuple sont aujourd'hui exposés par leur gouvernement ukrainien, ont un impact important sur le saint évêque, ce qui affecte sa santé. En particulier, on essaie de toutes parts de l'empêcher de s'occuper de ses 450 enfants abandonnés. Mentionnez le métropolite Longin et ses pauvres orphelins dans vos prières.
Ici, la première partie d'un film sur l'évêque Longin, que j'avais sous-titré à l'époque:
Cette année, nous n'avons pas d'été, le printemps attardé se mue en automne précoce. On annonce de la chaleur pour la fin de la semaine, mais avec de la pluie, il pleut tellement que je ne profite pas de mes fleurs, lesquelles sont couchées par les averses. Hier, j'ai essayé de trouver un parapluie, il n'y en avait pas dans tout le centre commercial du grand Magnit, même là où l'on vend des foulards, sacs, lunettes, bonnets, chapeaux, gants, et où l'on pourrait s'attendre à trouver ce genre d'accessoires. Je suis allée au marché Slavianski, à cause de la pluie, presque toutes les échoppes étaient fermées. Un bonhomme, du seuil de la sienne, me voit errer et me demande ce que je cherche, et qu'il n'a pas, et hurle à la cantonnade: "Hé, qui vend des parapluies par ici?
- Personne!" lui répond-on de loin.
Dans cette ville où il pleut tout le temps, pas moyen de trouver un parapluie!
Dans ma quête de cet objet rare, mais néanmoins utile, je suis tombée sur trois adolescentes, casquettes américaines, percings, qui me regardaient fixement. "Bonjour, me dit l'une d'elles, j'ai adoré votre livre, vraiment, nous sommes contentes de vous avoir rencontrée, et nous vous souhaitons une bonne journée!"
J'étais si profondément touchée! Car ce livre de jeunesse, terminé dans ma vieillesse, me paraissait justement devoir plaire aux jeunes... Et puis, quelle gentillesse. Les gens ici sont très gentils, je m'en émerveille à longueur de temps.
Ce matin, je suis tombée sur un post qui m'apporte des lueurs sur l'affaire Strelkov. Il faut savoir que Strelkov et Prigogine ne sont vraiment pas copains, et Prigogine l'a grossièrement insulté comme il sait bien le faire. Strelkov a donc certainement été particulièrement ulcéré par la "trahison" de ce dernier, si vite pardonnée. Or voici le contenu de ce post:
Un pote au téléphone : " T'as vu le prigo et ses wagner !!? Ils vont encadrer l'armée biélorusse , le gars garde tous ses contrats avec l'état russe ainsi que ses business en Afrique ! Tu trouves pas ça louche ? Ça sent quand même le méga Kompromat non ?' En effet c'est ce que je pense depuis le début de cette histoire : une partition jouée a 2 pour démasquer les traités, reprendre totalement en main l'appareil d'état et redisposer Wagner ( qui avait fini ses missions sur le front ukrainien) en Biélorussie....au moment où Louka ( qui arrive aujourd'hui a Moscou) vient de signer un décret autorisant son armée a intervenir a l'extérieur.....
En effet,et si c'est le cas, Strelkov est héroïquement arrivé dans cette opération d'opritchniks comme un chien dans un jeu de quilles. Certes, c'est plutôt de la basse politique, mais qui avons-nous en face? A quel coup tordu n'avons-nous pas eu affaire?
Certains orthodoxes sautent sur la malheureuse histoire de l'église bombardée à Odessa. "Même Hitler n'aurait pas fait ça!" Mais outre que, si ce sont bien les Russes qui l'ont fait, c'est certainement fortuit, car ils n'ont absolument pas intérêt à s'aliéner les orthodoxes persécutés par le gouvernement ukrainien, ce genre de personne est resté tout à fait silencieux devant la réquisition de la Laure de Kiev, la dispersion de ses reliques et de ses icônes en Europe, l'arrestation du métropolite Paul, tout cela ne provoque aucune indignation. Qu'il est donc confortable, le fauteuil de la bien pensance, on s'y affale d'autant plus volontiers quand on l'avait quitté un moment. Nager à contre-courant, c'est dur..
A l'intention de ceux qui voudraient me troller sur un ton de procureur, avec un aplomb merveilleux et la certitude en béton de leur bon droit absolu, je vais mettre quelques détails au point.
Si j'ai choisi mon camp, je ne suis pas à l'abri des erreurs de jugement, comme tout un chacun, et du reste, il m'est arrivé d'être déconcertée par la politique russe, et je l'ai dit bien souvent. Cela m'arrive encore, et du reste, ma conviction profonde est que selon l'expression du psalmiste, il ne faut pas "mettre sa confiance dans les princes et les fils des hommes, en eux il n'est point de salut". Du moins ne pas mettre sa confiance absolue, car il faut bien aussi quelquefois faire une confiance relative, on n'a pas le choix. Dans l'occurrence actuelle, j'ai fait le choix entre ceux en lesquels j'ai une confiance relative et ceux en lesquels je n'ai absolument aucune confiance, aucune, sur la base de ce que j'ai observé depuis des années, et non sur celle de l'hypnose médiatique constante, et aussi peut-être de complexes, rancoeurs ou intérêts personnels plus ou ou moins conscients, qui leur vaut encore des partisans assez zélés pour m'interpeller sur mon blog. Non seulement je n'ai aucune confiance, mais je les sais ennemis de tout ce qui m'est cher, et qui vaut pour moi la peine de vivre et de mourir, des ennemis particulièrement fourbes, vils et sans scrupules.
Personne ne fait ici pression sur moi d'aucune façon. J'ai été menacée une fois, ce n'était pas par les Russes. Insultée, pas non plus par eux. Personne ici ne fait mon procès ricanant ni ne cherche à m'intimider. Alors que ce fut souvent le cas en France, depuis que je me suis retrouvée à la fac, et même un peu avant, puisqu'un prof de gauche qui me notait mal à cause de mes opinions, était allé contester mon excellente note de français au bac, l'année 69 qui suivait la première révolution de couleur woke du XX° siècle, celle qui nous a livrés à une meute de médiocres intellos hargneux, avides de tout mettre au niveau de la merde, le seul qui leur fût accessible.
A la fac elle-même, une prof qui m'avait prise en haine, parce que je ne voulais pas participer aux conversations sur la lutte ouvrière ou la libération de la femme, m'avait refusé l'unité de valeur au contrôle continu. Fort heureusement, le jour de l'examen, cette créature des ténèbres était malade, et j'avais eu affaire au lecteur soviétique, que je faisais rigoler et qui me traitait d'anarchiste. Comprenant immédiatement le problème, il m'avait demandé de parler d'Ivan le Terrible d'Eisenstein, sur lequel j'avais été intarissable, ce qui m'avait valu la super note, car même les plus communistes des autres profs n'y trouvaient rien à redire.
A noter que la militante de base qui n'avait pas le temps de travailler, à cause de sa lutte politique, avait ses examens d'office.
A l'époque, je défendais les dissidents russes, ce n'était pas du tout à la mode, mais ceux qui m'en faisaient grief sont devenus aujourd'hui les russophobes les plus acharnés, il faut dire qu'ils étaient souvent trotskistes. Je me souviens d'une étudiante trotskiste qui nous avait poursuivies, ma meilleure amie et moi, en nous injuriant jusqu'à l'arrêt du bus, parce que nous portions les croix que nos grands-mères nous avaient offertes pour notre communion solennelle. La fac était une enclave totalitaire hideuse dans un pays hédoniste inconscient qui ne comprenait pas où on le conduisait. Tous les méchants petits boutonneux que j'y voyais alors, et leurs descendants, sont au pouvoir à présent. Dans tous les domaines de la culture, de la politique et des médias, ils ont pendant cinquante ans, soigneusement séléctionné leurs pareils en excluant les autres, en les ostracisant et les calomniant.
Pourtant, moi, je n'ai pas varié, je ne suis pas communiste, surtout pas trotskyste; je reste russophile. Monarchiste, tout en sachant qu'une restauration est peu vraisemblable d'ici des siècles, et plutôt persuadée que nous allons vers la fin du monde, les dommages causés à l'humanité par le capitalisme matérialiste et progressiste, et ses divers dérivés et leurres idéologiques, étant, je le crains, assez irréparables, même ici. Actuellement, la forme la plus stupide, la plus révoltante, la plus ignoble, la plus néfaste de cette hydre ne me paraît pas se manifester en Russie, mais précisément dans ce qu'une certaine catégorie d'imbéciles incurables appelle "les pays civilisés". La Russie n'est honnie par ces civilisés que parce qu'en fin de compte, ils n'ont toujours pas réussi à s'emparer du butin de 17. 1917. Cela leur fait beaucoup de peine. Et puis les idéaux russes sont la négation des leurs, de leurs soi-disant "valeurs" qui sont des anti valeurs. Même communistes, les Russes n'ont pas leur mentalité de merde. Comme disait Alexandre Panarine, les Russes, au fil des décennies, avaient russifié l'horrible truc et l'avaient rendu à peu près supportable.
Personne ne fait pression sur moi, je n'écris pas entre deux tchékistes, et personne ne me soudoie. Je n'ai jamais touché un sou de Poutine, je n'ai même pas obtenu de lui mon passeport russe sur un plateau d'argent, comme certaines personnalités du spectacle, je me suis débrouillée pour avoir mon permis de séjour à travers la procédure habituelle, et n'ai pas encore entamé celle de la nationalité, parce que j'ai la flemme terrible et la phobie des démarches administratives.
Voulant me mettre dans l'embarras, on me demande "pourquoi je ne parle pas de l'arrestation de patriotes comme Strelkov"; au moment où j'ai écrit ma dernière chronique, je n'étais pas au courant, mais je ne suis pas sûre que j'en aurais parlé, parce que j'ai besoin de digérer les choses et de me faire une opinion avant de l'exprimer. Parlons-en, voici ce qu'en dit Olivier de Hangest, banni définitivement du réseau civilisé et démocratique bien connu et seul autorisé: https://vk.com/wall86797691_2068
Je suis décontenancée moi-même, mais ce n'est pas la première fois que cela m'arrive. Au moment du covid, je l'ai été souvent, et je me suis aussi demandé pendant des années, pourquoi la Russie n'intervenait pas pour défendre le Donbass, dont, depuis des années, je savais le martyre. Cela dit, pour les gens bien ou mal intentionnés, je n'ai pas la prétention d'être une politologue, une kremlinologue, un expert, loin de là, et je ne me donne pas pour propos de faire un bilan exhaustif quotidien de la situation ici. Pour cela, il est d'autres blogs beaucoup plus qualifiés que le mien. Je suis un témoin qui réagit avec sa sensibilité, au jour le jour, et cherche à comprendre. Pour certaines choses, ça y est, il y a longtemps que j'ai compris, et je ne pense pas qu'on puisse me faire changer d'avis. Et pourtant, cela m'arrive. Ainsi, j'ai longtemps cru que les Américains étaient les chevaliers blancs de la démocratie, cela m'a complètement passé dès la guerre du Golfe. La suite n'a fait que me confirmer dans la certitude que c'était surtout eux, le problème.
Donc, on a arrêté Strelkov, et c'est fâcheux, j'aime bien Strelkov. Pourtant, je ne pense pas qu'il sera sanctionné très fort, en tous cas je l'espère. J'attends de voir ce qui va suivre. Et d'en savoir plus long sur ce qui a précédé.
En dehors de Strelkov, dans la vie courante ici, nous sommes libres comme l'air, personne ne nous emmerde, ce n'est déjà pas mal. S'il y a des manifs, on ne défigure pas les gens, on ne leur arrache pas un oeil, ou la mâchoire, ou la main, comme on l'a fait en France pour tant de gilets jaunes. A part le mondialiste Sobianine à Moscou, personne n'a fait régner la terreur au moment du covid. Les malades étaient soignés. Les restaurants, les cafés, les exploitations agricoles fonctionnent et les petits patrons ne sont pas acculés au suicide ou à la fermeture. On pratique librement sa religion, sans être en butte à toutes sortes de quolibets ou de provocations, sans incendies d'églises ni destructions de calvaires ou de statues. Je connais plein de libéraux très hostiles au gouvernement, apparemment, personne ne les empêche de parler. Une amie de mon âge venue ici m'a dit: "Je me sens libre et en sécurité". C'est-à-dire qu'en France, elle ne se sent pas libre et pas en sécurité, et quand on n'est pas en sécurité, d'ailleurs, on n'est pas libre. Quand la canaille fait la loi, on rase les murs. On n'ose plus sortir son chien ou se promener le soir.
Que pensent les procureurs de service des ennuis que l'on a faits à maitre Virginie de Araujo-Recchia, arrêtée devant ses enfants, après perquisition à son domicile? Du sort de Julien Assange? Des journalistes et médecins à contre-courant calomniés, persécutés, acculés à la misère, à l'exil? Des journalistes et députés ukrainiens assassinés ou arrêtés, et cela depuis des années, bien avant l'intervention russe? Des gens grillés dans la maison des Syndicats, à Odessa? Des prêtres et des fidèles molestés, parfois assassinés? Des viols et des tortures des bataillons punitifs, des bombardements de civils, soigneusement ignorés pendant huit ans par les médias officiels? Des gens qui sont attrapés au lasso pour être envoyés au front, où leur espérance de vie est de quelques jours? Qui commet des crimes contre l'humanité, qui sera peut-être jugé un jour prochain? Pas sûr que ce soit Poutine, et s'il mérite de l'être, alors en toute justice, il ne faut surtout pas qu'il soit le seul, ou qu'il le soit par des gens qui sont cent fois pires que lui. Si je parle d'inversion accusatoire, c'est que j'ai reconnu, par exemple, des vidéos sur les exactions ukrainiennes au Donbass qu'aucun média de grand chemin n'aurait fait passer à l'époque, et qui sortaient brusquement de l'oubli pour être attribuées aux Russes, j'y ai même vu la preuve que ces infos avaient été connues et délibérément étouffées. Je dirais que jusqu'au Donbass, en 2014, je pensais que nos médias donnaient une interprétation orientée des faits, mais j'ai compris alors qu'ils les passaient sous silence, et recouraient aux reportages fabriqués et aux calomnies, qu'on ne pouvait leur accorder aucun crédit.